La Chance d'un curieux

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Yoann-8

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La Chance d'un curieux

Message par Yoann-8 »

Comme chaque matin, l’odeur de mort et de boucane me rappelle paradoxalement que je suis toujours en vie. Pendant que d’autres là dehors, se font atrocement consumer par les flammes de la D.S.E (Dispositif de Sécurité Extrême). Je remarque que le voyant bleu sur mes lunettes scintille m’annonçant l’arrivée d’un nouveau message, vocal ou écrit. Probablement quelques détracteurs dont je reçois quotidiennement des menaces depuis que j’ai décidé de me lancer en solo dans l’univers impitoyable et parfois trouble du journalisme d’investigation.

J’ai travaillé longtemps comme reporter de terrain pour ce qu’on appelle « les situations à haut risques ». Lors du déclenchement de la troisième guerre mondiale, c’est ce qui m’a valu d’être aux premières loges. Bien des fois j’ai frôlé la mort, passionné par mon boulot. N’ayant pas d’attaches, très peu d’amis et pratiquement aucune famille, je me suis consacré exclusivement à mon travail, me donnant les moyens d’en faire toujours plus, d’aller toujours plus loin. J’enfile ma paire de lunettes ultra légère, à la pointe de la technologie, obtenues au marché noir pour la modique somme de 70 000 « @ » ou « Aylles ». Sitôt mises, je sens le transplanteur neuronal se connecter à mon cerveau afin que l’intégralité de mes mails, appels, infos et j’en passe, soient retransmis sur le verre de mes lunettes. Nombre de ces messages sont postés par d’anciens confrères reporters qui lâchent sur ma boite vocale des insultes et injures en tout genre à propos de « l’acte » qui m’a valu d’être radié de la profession. Certains vont même jusqu’à me menacer de mort, agrémentant leurs envois de quelques montages photos ou vidéos, me faisant clairement entrevoir le sort qu’ils me réservaient si jamais je venais à croiser leurs chemins. Depuis déjà sept ans, je contemple chaque matin l’article qui m’a valu cette déchéance et chaque matin, je me répète que c’était en fin de compte la bonne décision. Je m’en remémore chaque instant, car d’ici quelques heures, j’aurai pondu l’article révélant au monde la vérité.

C’était il y a sept ans donc, je tenais encore sur mes deux jambes. Ma ténacité, mes réflexes et mon instinct aussi aiguisés que la lame que je portais toujours à la ceinture, me valaient d’être un des journalistes les plus célèbres des états du nouveau monde.
C’était lors d’un reportage sur la R.L.N.V (République Libre du Nouveau Monde), un pays qui s’était donné pour objectifs de redonner espoir à l’humanité et d’apporter paix et stabilité au monde. Curieux d’en savoir plus sur cette idéologie ambitieuse et totalement novatrice, après la catastrophe de la troisième guerre, je me suis donc porté volontaire pour effectuer un reportage d’investigation au sein du pays. Les premières semaines furent extraordinaires : le président m’accueillit comme un dignitaire étranger, un sacré contraste au vu du taudis à l’odeur pestilentielle où je me planque à présent. J’avais entendu dire le plus grand bien de la prévenance et du sens de l’hospitalité de mon hôte, aussi, je n’avais pas jugé bon d’amener ma fidèle lame, histoire de ne pas froisser un dirigeant aussi accueillant. Les repas étaient particulièrement copieux et délicieux, à croire que la guerre n’était déjà plus qu’un lointain souvenir… Une nuit, après avoir très copieusement diné, ce qui soit dit en passant ne m’était plus arrivé depuis bien des années, je m’endormis comme une masse dans un lit aussi grand qu’une demi-pièce. Je fus réveillé en sursaut peu après. Je pensais tous d’abord à un cauchemar, puis je fus alerté une seconde fois par des cris d’horreur qui semblaient provenir de l’étage inférieur. Inquiet quant à un possible accident, je jugeais préférable, avant d’en avoir le cœur net, de m’équiper de ma « SEVCO » (Système d’Enregistrement Visuel par Contact Orbital), à savoir, une lentille caméra, en terme simple. Habillé à la hâte, je descendis quatre à quatre les quelques cents vingt-trois marches qui me séparaient des cris. Arrivant sur les lieux, je vis au loin deux hommes en gilet et pantalon noir, armés d’une batte qui, à chaque coup porté sur le mur, faisait trembler la paroi sur toute sa longueur. Au milieu, un homme en chemise de nuit bleue, celles que l’on reçoit dans les hôpitaux avant une opération, couverts de perfusions de différents liquides, de différentes couleurs, se débattait avec eux. Il lançait de grands coups désordonnés dans leur direction. J’étais au beau milieu d’un intense combat. Je restais là, filmant la scène, ne voulant pas rater une seconde de ce qui pourrait être mon prochain scoop. Soudain, l’homme en chemise bleue s’empara d’une des battes et frappa de toutes ses forces sur la tête d’un des gardes. Dans son élan, il arracha toutes les perfusions de son corps. La puissance de son coup fit littéralement exploser le crâne de son adversaire. Quant au second, tentant de sauver sa peau, il reçut un coup au niveau du ventre qui le fit également éclater. Je n’arrivai pas à croire ce que j’étais en train de filmer. L’impact provoqué par la batte laissait sur le corps une imposante trace, qui finissait par gonfler comme une excroissance, pour ensuite exploser, laissant échapper un flot d’organes et de cervelle. Enragé, l’homme se retourna face à moi et s’élança dans ma direction, brandissant l’instrument létal qui avait déjà fait deux victimes. Heureusement, les nombreuses situations périlleuses auxquelles j’ai été confronté par le passé, m’ont permis de maîtriser de nombreux sports de combat grâce aux machines d’un de mes plus vieux amis : le Professeur FLOVETTA. Grand ami de la Cyber-technologie, il pensait que l’homme et la machine pouvaient se rendre complémentaires à tous les niveaux. C’est ainsi qu’il créa les « MID » comme je les appelle, « Machine à Intervention Divine ». Elles permettaient à quiconque s’en servait convenablement, de pouvoir instantanément mémoriser n’importe quelle connaissance, d’un simple calcul à la maitrise du Kung-Fu. Par bien des fois, ces gadgets m’ont sauvé la vie et je m’apprêtai à en faire bon usage une nouvelle fois. Pivotant d’un trois-quarts de tour sur moi-même, je me retrouvai quasiment dos à l’agresseur. Face à moi, je constatai que quelques gardes, accompagnés du président, accoururent dans ma direction. L’homme était à présent à ma hauteur. Brandissant sa batte au-dessus de ma tête, il allait me frapper sur le crâne quand, d’un geste puissant et sûr, j’attrapai son bras. Je le fis basculer en avant en utilisant sa force et mon expérience de l’aïkido. D’un geste, je le fis se fracasser au sol dans un bruit sourd et puissant. Après l’avoir désarmé, je vis dans son regard une haine farouche ainsi que ce qui ressemblait à de la peur. L’espace de quelques secondes, je vis ses lèvres remuer, mais sans qu’aucun son n’en sorte, tandis que ma lentille analysait et enregistrait ces paroles muettes, pour les retransmettre dans mon esprit. Ces dernières paroles furent : «Tuez-moi… s’il vous plaît».
À ce moment, le président s’exclama :
« - Récupérez la cible, ce malade doit retourner en salle de soins ! » Je compris qu’il ne parlait pas de moi mais bien de l’homme que je venais de maîtriser. Mais avant qu’ils ne puissent s’en approcher, d’un geste plus rapide, je saisis la batte et la fracassa contre la mâchoire de l’homme. Sa tête commença à gonfler de part et d’autre et soudain, elle explosa, de la même manière que les gardes qu’il avait affrontés.
« - Pardonnez-moi, Mr le Président, dis-je, mais deux hommes y ont déjà laissés la vie, je ne voulais pas prendre le risque qu’il vous arrive la même chose. »
Un petit rictus de sympathie apparut sur le visage du chef de l’état avant qu’il ne reprit :
- Voilà qui est à la hauteur d’un des plus grands reporters de notre époque, Mr ENSL, je vous remercie pour votre intervention et saurais me montrer reconnaissant de m’avoir certainement sauvé la vie. »
Se faisant, le président tourna les talons tout en rappelant ses gardes et repartit par où il était entré, me laissant là, avec cette marée de sang et ce corps sans tête. Me levant lentement, je regagnai ma chambre sans le moindre mot, comme s’il ne s’était rien passé, comme si j’allais soudain me réveiller et constater que ce n’était qu’un rêve. ENSL... Voilà bien un pseudo qui me rappelle pourquoi mon calme demeure inébranlable, malgré le carnage qui venait d’avoir lieu. Ce surnom que les médias me donnaient, était une métaphore renvoyant à une maladie nécrosante qui a pour effet de rendre le corps dépourvu de peau, la chair à vif, creusant un peu plus au fil de la propagation du fléau. La métaphore réside dans le fait que comme la maladie, je poursuis mon investigation jusqu’au bout et je n’hésite pas à contourner les lois et la moralité pour arriver à mes fins, qu’importe le nombre de vies en jeu. Je m’endormis avec ma lentille dans l’œil, en mode lecture, qui repassait l’ensemble de la scène en boucle, comme si j’avais l’impression d’avoir loupé un détail… Le soleil commençait déjà à se montrer lorsque je fus éveillé. Les retombées des guerres spatiaux-nucléaires avaient complètement bouleversé l’environnement dans lequel nous vivions. Nos journées donnaient l’impression de ne durer que quelques heures. La notion de temps elle-même avait été modifiée depuis le blackout mondial. Le conflit avait légèrement désaxée la Terre de son orbite et donc perturbé notre cycle jour-nuit, nous n’avions plus les mêmes repères temporels désormais. Allongé sur mon lit, j’observais à nouveau les vidéos de ma lentille, ressassant cette nuit particulièrement agitée. Après avoir réexaminé plusieurs fois l’enregistrement vidéo, je remarquai qu’à un moment, la caméra laissait apparaître un point lumineux rouge qui disparaissait après quelques secondes. Les lentilles avaient été programmées pour reconnaître les formes, symboles ou signes, en utilisant un marquage identifiant de couleur rouge, permettant de faciliter recherches et travaux éventuels à partir du fichier. Contrôlant la vidéo par ma voix, je ralentis l’image jusqu’à l’instant où le point rouge apparut. Je revis au ralenti le moment où je projetai l’homme au sol avec violence. C’est à ce moment que je stoppai l’image. Le point rouge était à présent très net et formait une cible sur le bras de l’homme. Demandant un zoom x20, j’aperçu, au centre de la cible, un symbole représentant un labyrinthe avec quatre points à l’extrémité de chaque sortie. Evidemment, je me suis immédiatement demandé ce que représentait ce symbole mais les archives Skynet ne donnèrent rien de concluant. Le tatouage avait l’air de continuer le long du bras mais caché par sa manche, je ne pouvais voir le reste. Il me fallait découvrir ce que représentait ce symbole, si ma lentille avait réagi, c’est qu’il s’agissait probablement d’un remodelage d’un symbole déjà existant ou bien classé secret défense, Skynet ne pouvant alors me donner d’informations plus précises. Je me doutais qu’essayer d’en savoir plus pourrai s’avérer risqué puisque le président lui-même était visiblement impliqué, mais j’étais avant tout un reporter chevronné que même le pouvoir et le danger n’effraie pas. Quelqu’un frappa à la porte. Lorsque j’ouvris, personne. Seul sur le sol avait été glissée une enveloppe marquée par un cachet représentant l’emblème du pays. Je savais que cette lettre ne pouvait venir que du président lui-même. La question restait à savoir si c’était pour me féliciter ou pour me prier d’avancer mon départ suite à l’incident de la veille ou pire encore, pour m’informer qu’ils savaient que j’avais enregistré l’altercation d’hier et que ça allait m’amener de gros ennuis. Heureusement, cette dernière idée s’effaça aussi subitement car, en y repensant, aucune chance que le fichier ait pu filtrer hors de mon appareil ; de plus, ma connexion au réseau Skynet est protégé par la loi P.2I.J (Propriété Intellectuelle Internationale Journalistique). Ne restait donc que deux possibilités. Sans attendre plus longtemps, j’ouvris l’enveloppe dans laquelle se trouvait une lettre en papier à l’ancienne, plutôt que les feuilles numériques habituellement employées. Une longue lettre me félicitant de mon acte qualifié d’honorable, lors de la nuit précédente, apaisa mes craintes petit à petit. En fin de page, se trouvait un code. Code qui, selon la lettre, allait me servir désormais à accéder à une partie non négligeable des locaux et bases de données du site, en preuve de gratitude. Je reconnu également le signe Skynet barré, symbolisant que la feuille ci-jointe contenait des documents téléchargeables par voie cutanée. Il suffisait pour le receveur, de coller son avant-bras sur la lettre et de laisser la puce de contenu téléchargeable située sous le poignet effectuer le transfert. En quelques secondes, le symbole sur la lettre disparut, laissant une légère brûlure sur mon bras. Un petit point noir, comme un grain de beauté, apparut à quelques millimètres de là où se trouvait la puce implantée dans mon poignet. Je n’avais jusqu’à aujourd’hui, jamais utilisé ce genre de technologie. Je l’avais néanmoins observé sur certains collègues qui se servaient de ce système pour stocker un grand nombre d’informations et de données en tous genres. Il était donc temps pour moi de me servir, pour la première fois, de cette technologie. Je me devais cependant de rester discret, car cette liberté d’aller et venir à ma guise me faciliterai grandement les choses mais ne tarderai pas à m’être retiré si je ne me montrais pas prudent. J’allai tenter de découvrir l’origine de l’agresseur de la nuit précédente, ainsi que l’origine de son tatouage qui commençait à sérieusement m’intriguer. Ma petite enquête me mena tout d’abord sur les lieux de l’agression où les moindres détails avaient été parfaitement nettoyés comme si de rien n’était. Même les fissures avaient été réparées et les murs remis à neuf. Ma première piste ne me menait à rien. Cependant une question me vint à l’esprit à savoir : où avait été emmené le corps ? Il me fallait surtout trouver l’infirmerie ou quelque chose s’en rapprochant, étant donné que l’agresseur portait une blouse d’hôpital et était sous perfusions. Accédant désormais à l’ascenseur principal grâce au code téléchargé depuis la lettre, je parcouru le bâtiment. Fouillant la moindre pièce, j’interrogeai le moindre garde ou membre du personnel que je croisais à la recherche d’un possible indice. Je finis par repartir vers l’ascenseur afin d’accéder à un autre étage. Soudain, j’esquissai au loin, ce qui semblait être une femme habillée comme un médecin, à côté de la cage d’ascenseur. Je couru dans sa direction, l’interpellant de retenir ce dernier. Visiblement pressée et ne me prêtant pas attention, elle s’y engouffra aussitôt. Trop tard. L’ascenseur se referma avant que je puisse la rejoindre, cependant une idée me vint subitement. Ma lentille ! Cet objet était décidément formidable. Immédiatement, je repassai la scène qui venait d’être filmée afin de savoir sur quel bouton d’étage l’infirmière avait appuyé. Le Troisième, juste deux étages en dessous. Dévalant quatre à quatre les marches le plus vite possible, ouvrant avec fracas les portes, je réussi à arriver avant l’ascenseur. Quelle ne fut pas ma surprise et ma stupeur lorsque l’ascenseur s’ouvrit et que la cabine était vide. Pourtant j’étais sûr d’avoir suivi le bon ascenseur, il n’y avait aucun doute, c’était bien cette cabine-là ! Je rebroussai chemin, retournant à l’étage où j’avais aperçu la femme et je me décidai à reprendre l’ascenseur pour en avoir le cœur net. Comme je m’en doutais, ce fut un échec. Je descendis deux étages normalement et j’arrivai au troisième, près de l’escalier emprunté plus tôt. Une légère brûlure soudaine se fit sentir au niveau de la trace laissée par le code. La douleur s’intensifia lorsque ma main s’approcha du panneau de boutons, comme si le code réagissait avec l’interface de l’ascenseur. Je cherchai la marque de communication entre l’ascenseur et ma puce, symbolisée par le symbole de téléchargement par voie cutanée, un symbole Skynet barré. Rien n’apparaissait, pourtant j’étais persuadé que la connexion était présente. Je passai un long moment à parcourir tous les étages mais rien n’y faisait. Arrivé au rez-de-chaussée, je vis un homme avancer vers moi pour prendre également l’ascenseur. Mon réflexe fut donc de rester appuyé sur le bouton du rez-de-chaussée afin que les portes restent ouvertes. Elles se fermèrent quand même et, étrangement, l’ascenseur se mit en marche. J’étais complètement désorienté, comment l’ascenseur pouvait bouger alors que j’étais au même niveau, appuyant sur le même bouton et surtout, pourquoi j’avais l’impression que l’ascenseur se déplaçait horizontalement ? Mon impression se confirma lorsque je me sentis aspiré sur le côté gauche, désagréable sensation. La douleur sur mon poignet se dissipa comme si la connexion avait été établie. Quelques minutes s’écoulèrent avant que l’ascenseur ne s’arrête enfin. Les lumières s’éteignirent, les portes s’ouvrirent. Un long couloir plongé dans la pénombre s’étalait devant moi. Au plafond, de vieilles ampoules à douilles suspendues par de simples câbles éclairaient péniblement l’endroit. L’on distinguait en observant le sol et les murs que l’endroit était assez vieux, comme si l’on avait rebâti par-dessus. Marchant à pas feutrés, l’ensemble de mes sens étaient aux aguets. Le moindre son me plaquait contre un mur, là où la lumière était la plus faible, quasiment plongé dans le noir. J’entendis parler deux personnes, auxquelles venait s’ajouter le bruit de leurs pas résonnant dans cet immense couloir dépourvu de vie. Tâchant de ne pas me faire remarquer, j’ouvrais la première porte se présentant à moi grâce une nouvelle fois au code que le président m’avait offert. En refermant cette dernière, je remarquai la longue chevelure blonde du médecin croisée plutôt dans la journée. Je redoutais le pire. Je fus néanmoins rassuré car sa présence indiquait que j’étais sur la bonne voie. A tâtons, je devinais dans le noir que j’étais dans une pièce remplie de dossier sous format papier et non numérique, signifiant que les documents devaient être très anciens, car je n’en avais plus vu autant depuis une quinzaine d’années au moins. Dans cette obscurité, difficile de pouvoir distinguer quelque chose mais je ne pouvais allumer la lumière de peur de me faire repérer. Soudain, une petite diode s’illumina par intermittence derrière l’une des armoires à proximité. Avançant ma main pour la toucher, je sentis mon poignet brûler à nouveau signifiant la présence d’un contenu téléchargeable. Aussi j’approchai la puce de la diode et je fus instantanément connecté au serveur Skynet privé du gouvernement. L’appareil m’informa que j’étais dans une zone hautement sécurisée et qu’il me fallait un code d’accès. Sans plus attendre, je composai mon code mais bizarrement il fut refusé. Je recommençai l’opération encore deux fois avant qu’une alarme s’enclenche m’informant de l’arrivée des agents de sécurité. Il me fallait disparaître d’ici au plus vite, sinon je risquai d’être découvert et j’aurai bien du mal à expliquer ce que je fabriquais ici. Le président me cachait donc quelque chose d’important, sinon pourquoi le code que j’avais reçu ne fonctionnait-il pas à ce niveau ? L’alarme continuait à retentir dans tout le bâtiment. Je voyais par l’entrebâillement de la porte le personnel médical s’agiter et évacuer vers l’ascenseur. J’étais pris au piège, ils n’avaient visiblement pas regardé à la dépense pour ce qui était des dispositifs de sécurité. Ma lentille remarqua subitement un changement dans la pièce. La diode ne clignotait plus en bleu comme précédemment mais en rouge et vert. Me rapprochant de cette dernière comme pour tenter ma chance une dernière fois, je me reconnectai, tentant le tout pour le tout.
Aussitôt connecté, une décharge électrique parcourue mon corps en un instant, la lentille m’informa que j’avais reçu un nouveau mail. Le regardant en toute hâte, je reçu simplement un petit mot et une série de chiffre :
« Le temps presse, 1190719884536CGDF. »
Il s’agissait visiblement d’un code d’accès similaire au mien et sans attendre plus, je le téléchargeai et le rentrai en espérant un résultat plus concluant. J’entendis les portes du couloir être ouvertes l’une après l’autre, quand le voyant passa au vert fixe. L’alarme se tut, aucun bruit dans le couloir. Le silence reprit sa place. Sans réfléchir, j’apposai mon poignet contre la diode et le téléchargement commença. Nombre de dossiers défilaient devant mes yeux à une vitesse telle que je n’en saisissais que quelques bribes comme « expériences », « dociles », « armes » ou « DTS ». Le téléchargement terminé, il me fallait sortir d’ici. Je passai quelques minutes à attendre, pour laisser le personnel médical ainsi que les gardes regagner leur poste jusqu’à ce que les bruits de pas cessent. Subrepticement, je regagnai l’ascenseur, restant appuyé sur le cinquième étage, puis rejoignis ma chambre. Arrivé sur mon lit, ma tête s’embrouilla. Mes émotions en firent de même et je ne savais plus quoi penser, le flot d’informations téléchargées défilait devant mes yeux sans cesse. Je crus que mon crâne allait exploser. Il me fallait enlever la lentille. Je m’exécutai aussitôt et la douleur s’estompa peu à peu. Cependant, la quantité d’informations contenue dans la puce était bien trop importante et mon corps commença à se recouvrir de centaines de grains de beauté. Attrapant un trombone, je me mis à le déplier puis en plantai une des extrémités dans mon poignet afin d’en retirer la puce, juste sous ma peau. Cela était indispensable, mon corps ne pouvait traiter ou contenir toutes ces informations en si peu de temps. Je plaçai la puce ainsi que la lentille dans le compartiment réfrigéré dissimulé dans la semelle de mes chaussures, initialement utilisé pour avoir toujours une arme sur soi, un petit cadeau de mon ami le professeur. L’ouvrir était tout sauf pratique, il fallait réaliser une petite série de tests neuronaux dont seul le professeur et moi avions les réponses. Pour couronner le tout, je lui avais même demandé d’y ajouter une devinette de son choix, ce à quoi il m’avait répondu, lorsque je lui en demandai la réponse, que cela me rappellerai une vielle et belle époque. M’empressant de répondre aux questions, quelqu’un frappa à la porte avec force. Il me fallait débloquer la dernière sécurité, craignant que quelqu’un d’autre ne mette la main sur mes précieux outils de travail. Je ne répondis pas à mon visiteur. Sur l’interface du compartiment s’affichait désormais un plateau d’échecs avec en ma possession les pions noirs. Voilà donc la surprise du professeur, me rappelant ainsi les longues parties que nous effectuons durant notre jeunesse bien avant que la guerre ne le rende complètement fou. De nouveau, les coups retentirent à la porte ; j’entendis cette fois la voix du président me sommant d’ouvrir la porte avant que ses gardes ne s’en chargent. Décidant de réagir, je lançais la partie d’échec tout en tentant de bloquer la porte avec une armoire et tout ce qui passait à portée de main. Mon esprit bouillonnait et je ne tardai pas à infliger à mon adversaire un échec en trois coups en employant la vieille technique du berger. La porte et ma barricade improvisée craquèrent. J’eus à peine le temps de refermer le compartiment, que les gardes étaient sur moi, leurs matraques sous mon cou, suivi du président qui entra magistralement dans la pièce :
« - Je crois que quelques réponses s’imposent, mon cher ENSL, lança-t-il sans hésitation.
- De quoi parlez-vous ?
- Ne jouez pas à l’idiot avec moi, je vous ai confié un code d’accès pour votre reportage et voilà comment vous me remerciez, avec du sang sur les mains ?
- Je ne comprends rien à ce que vous me dites, Monsieur le Président.
- Dans ce cas expliquez-moi pourquoi, votre code d’accès a été utilisé au sein de notre laboratoire et ce à plusieurs reprises alors que vous n’étiez nullement autorisé à y pénétrer ? Et pourquoi subitement, un autre code d’accès piraté vous a été envoyé depuis le poste de sécurité où mes hommes ont retrouvé un garde mort lacéré par ce qui semblait être une épée au vu des blessures, curieux hasard n’est-ce pas quand on sait que vous pratiquez et maîtrisez divers arts martiaux? Vous m’en avez offert un brillant aperçu hier.
- Je vous jure, Monsieur le Président, que je ne sais pas qui est cette personne, je n’ai rien demandé, je ne comprenais juste pas pourquoi mon code d’accès était refusé alors que vous m’aviez assuré un libre accès et une transparence totale.
- Il y a des choses que même la transparence se doit de garder dissimulé aux yeux du monde et particulièrement à l’œil vil et fouineur d’un reporter d’investigation. »
Le ton de ses paroles m’inquiétait de plus en plus. Je savais ce qui allait se passer et j’espérai un miracle assez rapidement.
« - Inspectez son œil, reprit le président, ces gens-là s’équipent souvent de ce genre de gadget pour ne pas perdre une miette de ce qu’ils jugeraient bon de diffuser. Et vérifiez son implant aussi, on va enfin savoir ce qu’il cherchait. »
Le garde se pencha sur mon œil et ne vit que le noir de ma pupille, mon poignet saignait là où l’implant devait se situer. Lorsque le président vit cela, il lança :
« - Ce petit con doit avoir caché ses appareils dans la pièce, fouillez-là et lorsque vous aurez mis la main dessus, tuez-le ; officiellement il aura trouvé la mort des mains de l’évadé de la nuit passée, que nous avons été contraint d’abattre ensuite. » Sans ajouter un mot, il quitta la pièce et les gardes commencèrent à retourner la chambre à la recherche de mes appareils. L’un deux, probablement le capitaine, reçut un ordre que je n’entendis pas. Cependant, deux des gardes arrêtèrent leurs recherches, me saisirent chacun un bras, et commencèrent à m’emmener hors de la chambre. Je traversai le couloir, essayant de rester à l’affût de la moindre opportunité pour m’enfuir. Arrivé dans l’ascenseur, l’un des gardes appuya sur le bouton du troisième sous-sol, le parking. La descente alors commença avec, pour la première fois, une mélodie un peu plus rock que la musique d’attente habituelle. Un léger grésillement se fit entendre et la chanson reprit aussitôt. Ce grésillement était un grand classique, du déjà-vu dans le monde de l’infiltration, à savoir que quelque chose allait se passer. Les gardes ne réagissant pas, je pensai donc que ce signal devait m’être destiné. Je commençai à m’accroupir quand les gardes me relevèrent avec vigueur, mais voyant le sang s’écouler de ma blessure, ils pensèrent sans doute que mes forces m’abandonnaient. Aussi, ils commencèrent à desserrer leur étreinte et me laissèrent au sol. Mettant leur matraque bout à bout, un champ de force faisant office de barrière se dressa devant moi m’empêchant le moindre mouvement. Nous voilà au second sous-sol. Aurai-je mal compris ce grésillement soudain ? Je ne pus qu’imaginer le pire, que tout cela ne fût qu’une coïncidence et que ma fin était désormais proche, quand la musique grésilla à nouveau. Cette fois-ci, ce fut plus intense, à tel point que les gardes en eurent visiblement mal aux oreilles. Brutalement, une lumière vive pénétra dans la cage d’ascenseur frappant les deux gardes en même temps, comme si la foudre s’était matérialisée à l’intérieur du compartiment. La lumière s’éteignit et l’ascenseur, tout comme la musique, s’arrêta. Une odeur de viande cuite envahit l’endroit et je me retrouvai bloqué sous les deux corps des gardes, encore fumants et dont les restes commençaient à empester sévèrement. La musique reprit d’un coup, me faisant tressaillir légèrement et une intense impulsion électrique me parcourut de la semelle de mes chaussures jusqu’à la racine de mes cheveux. Lentement, je me dégageai, repoussant les deux macchabés de l’autre côté de l’ascenseur. Me voici désormais au troisième sous-sol. Sans un bruit, les portes de l’ascenseur s’ouvrirent et je me faufilai à travers les allées de voitures de luxe et les piliers en béton qui jonchaient le sol vert émeraude de ce parking immense. Je continuai mon avancée à la recherche d’un véhicule qui pourrait me permettre de fuir, quand les lumières du parking s’éteignirent brusquement. Seule, stationnée à quelques mètres de là, une voiture dont les phares étaient restés éclairés. Pensant à un piège, je fis d’abord un premier tour du véhicule, inspectant le moindre objet suspect qui trahirait une mauvaise intention à mon égard. Je fus soudain surpris par un bruit résonnant dans tout le parking qui me fit bondir en arrière. En tendant l’oreille, je crus distinguer le grésillement d’une voix, comme émanant d’un vieux haut-parleur. M’en approchant à pas feutrés, je me retrouvai de nouveau devant l’ascenseur. La voix émanait de la radio d’un des deux gardes et j’entendis clairement :
« - Où est le prisonnier ? Qui a donné l’ordre de l’amener au parking ? Quatre gardes avec moi, on descend !
- Monsieur, je reçois un signal d’alarme de la salle de maintenance électrique, que faisons-nous ?
- Envoyez une autre équipe sur place, dispersez-vous et abattez-le sans hésitation ! »
Sur ces mots, la porte de l’ascenseur se referma, la lumière se ralluma, la musique continua de plus belle et l’ascenseur reprit sa course en direction des étages supérieurs. Je compris aussitôt que je n’avais d’autre choix que de tenter ma chance avec la voiture que le destin semblait avoir mis sur ma route. A toute allure, je grimpai dedans et présenta mon poignet pour démarrer le véhicule. Ce dernier me salua, m’identifiant en tant que Mr C.G.D.F. Cela me rappelait le code pirate que j’avais eu en téléchargement dans la salle des archives. Cette voiture n’était donc pas là par hasard, mais alors, qui avait orchestré tout cela et surtout comment avait-il pu anticiper en détail ce que j’allais faire ? Sans prendre le temps d’y réfléchir davantage, je démarrai la voiture en trombe quand, face à moi, déboula la garde présidentielle ainsi que le président en personne. Faisant signe à ses hommes d’ouvrir le feu, chacun d’entre eux sortit de sa combinaison un petit bâton de métal qu’ils pointèrent dans ma direction. D’énormes ondes de choc se propagèrent, dévastant les autres véhicules sur leur passage. Je fonçai droit devant, traversant les ondes de choc comme si elles n’affectaient pas la voiture. Je remarquai soudain que la voiture semblait changer de forme chaque fois qu’une onde la touchait, se déformant juste assez pour l’encaisser sans dégâts apparents. Je manquai de peu d’écraser le président, ce qui ne m’aurait pas dérangé plus que ça. Quittant le parking en trombe, je traversai la ville à une vitesse incroyable pour un tel véhicule, même à notre époque et atteignit rapidement la frontière, l’esprit confus, les sens en alertes, le souffle saccadé. Je roulai ainsi pendant presque quarante-sept heures, étrangement, l’horloge du tableau de bord fonctionnait apparemment sur le cycle journalier de l’avant-guerre. Parmi les nombreuses options présentes, un brouilleur radar ainsi qu’un pilotage automatique m’offrirent toute latitude pour traverser incognito la région. La voiture semblait ne jamais avoir besoin de s’arrêter, j’ignore par quelle énergie elle était alimentée, mais sur le moment cela m’importait peu. Sur le GPS, un itinéraire déjà rentré dans la base de données avait pour direction mon propre appartement. Je ne savais pas qui se donnait tout ce mal pour en savoir autant sur moi, mais je lui devais une fière chandelle. Qui sait, peut-être un jour rencontrerai-je cette personne… A moins qu’il ne préfère demeurer dans l’ombre de la technologie.
Charmimnachirachiva

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Re: La Chance d'un curieux

Message par Charmimnachirachiva »

Trop bien, fait plus de paragraphe et c'est parfait ( mes parents me saoul avec ça alors maintenant je fait attention ;) )
Je préfère le fantastique mais j'aime bien la science fiction aussi. Je répète, c'est TROP bien !!!! :D :D :D
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