Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Postez ici tous vos écrits qui se découpent en plusieurs parties !
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ChrisRuess

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Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

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Les chroniques du Jour Nouveau est un roman que je n'espère pas d'anticipation. Il raconte les aventures de plusieurs personnages au début du vingt-deuxième siècle, situés à différents endroits du globe, dans différentes castes sociales, qui essaient de comprendre comment retrouver leur planète telle qu'elle était avant l'Age de Chute.

Attention, ce récit comporte des scènes violentes, des scènes de sexe, ainsi que de nombreux jurons qui ne conviennent pas à un public trop jeune et non averti.
Je déconseille aux moins de 13 ans.



Les chroniques du Jour Nouveau
TOME 1 / E.V.O.L.V.E

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Chapitre 1 : En dessous.
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7

Chapitre 1 : 2105


La Citadelle.

Le terrain vague semblait désert, excepté les deux enfants et l’adulte qui leur faisait face. Un léger vent faisait flotter de la poussière rouge partout autour d’eux.
« Notre objectif, c’est l’partement R4 du troisième étage. On rentre, on cherche, on trouve, et on r’mène tout au Fourbi. Les lieux devraient être vides, ça fait deux semaines qu’on veille, ya pas eu d’entrées, ni de sortie. A vous de faire le job maintenant. »
Les deux enfants échangèrent un regard, et un hochement de tête, puis s’en allèrent en silence. L’immeuble était éventré, une bonne partie des appartements, ou du moins de ce qui restait des appartements, étaient visibles de l’extérieur. Comment un vieux bonhomme pouvait habiter ici ? Leur cible était connue. Il vivait en ermite, mais ne semblait jamais manquer de rien. Quelques patrouilles du Fourbi avaient essayé de le sortir de là, pour récupérer ses ressources. Aucune n’était revenue. Pourtant, on le voyait chaque semaine faire sa réserve d’énergie Oméga. Et voilà deux semaines que personne n’avait de nouvelles de lui, et que son appartement demeurait silencieux. C’était le moment de savoir ce qu’il se passait dans l’appartement R4. Voilà pourquoi le Fourbi faisait appel à eux, deux orphelins qui n’ont rien à perdre, et assez débrouillards pour comprendre que manger est la seule chose qui compte. Et en ce moment, manger était devenu de plus en plus compliqué…

« Wo ! Késtufé ! Fé noir ici, lumzi au lieu d’penser ! » Chuchota le plus âgé.
- Deux secondes, j’pense pas, j’chercheul plante. Répondit le plus jeune au fouillant dans sa sacoche rapiécée.

La branche d’algue émit une lumière bleue, diffuse, mais suffisante pour discerner l’escalier pourri qui menait aux étages supérieurs. Des bouts de bois, de verre et de béton étaient étalés partout sur le sol de l’entrée. De nombreuses traces de sang maculaient les murs, et quelques bouts de carcasses manifestement humaines trainaient là, comme si un peintre abstrait avait été pris d’une folie créatrice mortelle.

« Tu crois kya des Déformés ? Ya keu pour faire c’genreu d’choses ! » Dit à voix basse le cadet.
- Des Déformés à coté d’la Citadelle. Pff. T’en a d’aut’ des histoires ? Allez, on monte, ‘tention aux trous.
Les planches craquaient sous le poids des deux enfants, mais aucune ne céda. Les couloirs de l’immeuble étaient déserts. Seul un cadavre les attendait devant le palier du 3ème étage. Son uniforme et son tatouage, une plume noire, montrait clairement son appartenance au Fourbi. Sa tête pendait vers l’arrière, et son crane touchait son dos. Seul un bout de peau lui avait évité la décapitation.
Les enfants ignorèrent le corps et se dirigèrent discrètement vers l’appartement. Le plus vieux sortit une arbalète de son sac, et mis en joue la porte.

« Ouvre ça, doucement. » Ordonna l’ainé.
Il s’exécuta. Une seconde après que la porte fut ouverte, une odeur de moisi, de renfermé et de souffre agressa les narines des deux enfants. Le plus jeune eu un haut le cœur avant de se reprendre, et d’enfiler le masque qui pendait autour de son cou. Ils entrèrent, inquiets, bien que déterminés à accomplir leur mission.

L’entrée était délabrée, le sol n’était qu’une dalle en béton, fissurée par endroit. Le papier peint qui recouvrait les murs était au sol, émietté. Sur la droite, une entrée donnait sur la cuisine et le salon. Des livres par dizaines étaient disposés de façon anarchique sur une table et sur une vielle étagère. Des flacons, avec des inscriptions étranges, étaient rangés, beaucoup plus strictement que les livres.
L’odeur était forte, et semblait provenir d’une porte entrouverte qui donnait probablement sur une chambre.
En ouvrant, les deux enfants tombèrent nez à nez avec un autre cadavre, celui de l’ermite, allongé dans son lit, et probablement décédé de cause naturelle, une chose rare pour l’époque.
Un nombre d’armes incalculable étaient accrochées aux murs, des épées, des couteaux, une hache, deux masses d’armes, une arme automatique, une douzaine de boites de munitions, un arc, une arbalète double coup, un grand stock de flèches, et un blaster Oméga.
Quelques livres trainaient par terre, mais un petit cahier se trouvait dans les mains de son propriétaire décédé. Les enfants restèrent bouche bée un instant, puis l’ainé s’adressa au plus jeune.

« Ya un trésor ici. Appelleul zot, on peut pas tout prendre. Dis leur ya rien à craindre, le pire, c’est l’scalier. »
Le garçon se dirigea vers une fenêtre, une pierre à la main, la lança en se couvrant le visage. La vitre, en piteux état, explosa dans un fracas cristallin. L’enfant se mit à la fenêtre, et les adultes qui attendaient en bas ne tardèrent pas à sortir de leurs postes de tir, à l’affut. Le visage du chef se détendit une brève seconde lorsqu’il aperçut l’enfant leur faisant signe de monter.
En arrivant dans la chambre, l’équipe au complet resta bouche bée, comme les deux enfants quelques instants avant eux, devant cette scène incroyable. Un mort, naturel, avec un stock d’armes à faire rougir un armurier, c’était très loin d’être une chose que l’on voyait tous les jours.
« Beau butin les tios. C’est pas ce à quoi j’pensais trouver mais ya de quoi contenter les gars de l’armurerie. Ya pas de bouffe mais c’pas grave, on va pouvoir vendre ça et racheter des stocks de conserves. Prenez ce qu’on laisse, c’pour vot’ paye. »

En dix minutes, la chambre était quasiment vidée. Il ne restait que les livres, et quelques fioles sans contenu.
« Keski vont faire ‘vec tout ça ? » Demanda nerveusement le plus jeune.
- Y zon dis : Vendre le métal et acheter à manger. Yavais des armes qui valent des dizaines de conserves !
- T’es sur ? Paskeu les armes, Giorge les aime bien, il voudra jamais les vendre. Pis si elles sont en fonctionnement il serait capable d’aller rechercher la nourriture en menaçant la Communauté. Pis ces ptis tubes pleins de liquides avec des couleurs, keskeu c’était ? Moi j’donne pas un seul haricot si on m’refile ces choses-là, on dirait que c’viens pas d’not’ monde…
- S’en fiche, c’pas not’ problème. Rétorqua sèchement l’aîné. Nous on prend les livs pis on ramènera ça a la Taupe. Elle sra contente et on aura un repas c’soir.
Le cadet acquiesça, et commença à vider l’étagère.
Le plus vieux, lui, s’intéressa au carnet que le défunt gardait précieusement avec lui. Il lui arracha des mains, puis feuilleta quelques pages.
« Héba. Il devait y tenir pour s’accrocher autant à ce machin. Ya presque rien de marqué la d’dan. J’espereuk’ La Taupe trouvera des intérêts. Bon, t’as fini ? »
Le cadet regarda une dernière fois la pièce, puis hocha la tête sans dire un mot de plus.
« Faut pas rester là, c’pas sûr d’être hors clôture par ces heures, on repart au Fourbi. » Ajouta l’aîné avec un signe de la main.
Son frère lui emboita prestement le pas.
La nuit était déjà bien avancée, et la lune, bien que voilée par des nuages orangés, brillait assez pour que les deux garçons puissent se repérer. Ils arrivèrent au Fourbi sans encombre.
Ils étaient enfin chez eux. Combien d’orphelins n’étaient jamais revenus de missions comme celle-ci ? Ils ne comptaient plus.
Les ruelles du bidonville étaient affreusement sales, et pourtant, cela ne semblait pas déranger grand monde. Des mendiants, des prostitués, des chasseurs de primes, des orphelins pillards, et quelques commerçants en boissons accomplissaient tous leurs besognes dans cette fange qu’était le Fourbi.
Soudain, deux mains se posèrent brusquement sur les épaules du plus vieux, qui fit volte-face en une demi seconde, la main sur la garde de son poignard, prêt à se battre contre son agresseur.
« Héééé ! caleum’ toi un peu non ? C’ek moi tsé ! » Chantonna une voix féminine, une pointe de malice dans la voix.
- Bara ! T’es folle, j’aurais pu t’envoyer meu’l’ lame danl’ vent’ ! Cervelle déformée va ! Répondit sévèrement le jeune homme légèrement vexé.
- Chuis contenteuk’ vous rentrez c’tout…parceuk’ c’pas toul’monde qui r’vient au cas où t’aurais oublié, cervelle déformée qu’t’es toi. Renvoya la fille sans pour autant perdre son sourire. Z’avez trouvé quoi d’bien la bas ?
- C’était horrible, yavais des gens d’ici morts, et pis nous on sait pas trop à quoi ça sert skeu yavais la bas alors…
Un geste rapide et tendu de la main de l’aîné mis fin aux paroles du cadet.

« On doit rien dire, tout va au Centre du Fourbi. Tout c’keu j’peux dire c’est qu’ils veulent racheter dla nourriture à la Communauté. Nous, on doit aller parler à La Taupe. C’t’ai ben d’te voir Bara, mais là on doit yaller, on a encore du travail. A plus tard. »

Les deux frères reprirent leur route, laissant de côté une jeune fille a l’air décontenancé.

Le Centre du Fourbi ressemblait à une décharge. Des accessoires divers et variés se décomposaient, rouillaient ou s’érodaient au fil du temps, laissés à l’abandon sur un sol recouvert par une poussière rouge. Un frigo trônait au centre de la décharge. Le plus vieux des deux enfants ouvrit la lourde porte, puis s’engagea à l’intérieur. Les souterrains étaient étroits, chauds et humides. C’était le seul endroit du Fourbi ou on pouvait à la fois être au chaud, et en sécurité. Le Centre avait sauvé des centaines d’habitants plus d’une fois en quelques années.
Après quelques dizaines de mètres, la lumière devint plus forte, et le couloir étroit s’ouvrit sur une vaste pièce pleine de métaux en tout genre. C’était là que l’on fabriquait les armes rudimentaires (épée, hache, couteaux, flèches…) pour le Fourbi et les armes de pointe pour la Communauté, lorsqu’une commande arrivait.

Une immense flaque de métal en fusion renvoyait des reflets orangés sur la chaux des murs, donnant à la pièce un aspect lugubre, et pourtant sécurisant. De dos, un homme imposant travaillait à grand coups de marteau sur une pièce de métal destinée à devenir une épée ou une hache. Son mouvement était parfaitement répété, précis et puissant.
L’Homme se retourna, et trempa le fer chaud dans un bac d’eau froide. De la vapeur s’échappa furieusement du bac, puis l’arme fut déposée avec soin sur l’étal déjà bien rempli.

« Grosse journée Archie ?! » Cria un des deux garçons pour couvrir le bruit de la forge, tout en continuant son chemin.
Le forgeron leur répondit avec un salut amical, et un léger hochement de tête.
Quelques mètres après la forge, les enfants se dirigèrent vers un couloir qui semblait être un cul de sac. Le plus jeune s’accroupit, puis tira sur la trappe qui s’ouvrit sans un grincement. Les deux enfants disparurent dans le souterrain sans plus de bruits.
L’échelle descendue, et ils étaient arrivés chez La Taupe. Une grotte creusée dans l’argile, ou de nombreuses niches regorgeaient de livres en tous genres. Le silence qui régnait dans cet endroit était si intense que pas un des deux garçons n’ouvrit la bouche. Ils étaient enfin dans ce qu’ils considéraient le plus comme chez eux. Ils appréciaient déjà l’odeur du ragout, la chaleur de la grotte et le sentiment de sécurité qui en émanait.
Puis, une voix tiraillée de vielle femme résonna contre les parois de la grotte.
« Ha ! Dan, Thom ! Je ne vous attendais plus ! J’ai bien cru que vous étiez restés hors clôture ! Venez, je suis derrière ! »

L’aîné s’avança vers le mur du fond, et appuya sur le rocher qui lui faisait face. Aussitôt, la pierre pivota et laissa un passage ouvert sur une grotte éclairée par une simple bougie, où était assise en tailleur La Taupe, un livre entre ses grandes jambes décharnées.
Elle ne portait qu’une tunique de lin et un manteau de fourrures, extrêmement rudimentaires. Sa peau était d’un gris blanchâtre inquiétant, pourtant, son sourire maternel renvoyait chez les deux enfants une joie qui faisait oublier son corps fatigué. Il ne lui restait que quelques fines mèches de cheveux blancs qui tombaient sur sa paire de lunettes, agrémentée de loupes et autres bibelots cliquetants et tombant sur les côtés. Ses yeux étaient petits, enfoncés, très sombres, mais son regard était étonnement doux.
La Taupe ferma le livre, en prenant soin de retenir la page, se leva et le posa sur un pupitre. Puis elle se tourna son visage anguleux vers les deux enfants.
« Alors, dit-elle d’une voix enjouée, qu’est ce qui a bien pu vous mettre en retard de la sorte ? Ce ne sont surement pas les livres, oh que non…vous n’êtes pas blessés au moins ? Il y a eu une attaque ?
- Non, tout va bien, c’est juste que cet endroit était vraiment très étrange. Répondit le plus âgé.
- Hmmmm. Si vous êtes ici, c’est qu’il y avait des livres ? Vous commencez à les connaitre pourtant, il n’y a rien d’étrange à cela, non, c’est autre chose. Il me faut des détails. Thom ?

Le plus jeune s’avança.

« Dis-moi, qu’as-tu vu la bas ? » Demanda doucement La Taupe.
- Yavais beaucoup d’morts. Pis yavais un gars chuis sur il était du Fourbi. Mais il avait plus de tête. Pis après on est allé dans l’partement, ça sentait la mort aussi. Mais une odeur différente, yavais moins d’sang. Alors on a vu l’ancien, il bougeait pu pis il avait un tout ptit liv ent’ ses mains. Mais c’est bizarre paskeu yavais preskeu rien d’crit d’sus.

Il marqua un temps de pause pour réfléchir, et ajouta :

« Yavais aussi plein d’tubes avec d’l’eau en couleur, ‘vec plein de couleurs, les Rapaces sont partis ‘vec, j’sais pas bien à quoi ça peut aider, moi si j’tai la Communauté, jeul boirai pas touca. »
- Et tu as bien raison ! En revanche, je te prierai de respecter le Langage. Ici, je garde le savoir parler des anciens, alors fait attention à tes paroles jeune homme, ou bien ils pourraient venir t’arracher la langue dans ton sommeil, lâcha La Taupe, un léger sourire en coin.
- Oui, c’est vrai, pardon, je suis désolé Madame Taupe. Répondit Thom en baissant les yeux.
- Haaa, voilà qui est nettement mieux, c’est bien, tu vois que tu peux y arriver si tu te concentre, dit-elle en passant une main décharnée dans les cheveux de l’enfant.

« Bien, donc, vous avez trouvé un petit livre, avec peu de choses écrites dedans, mais qu’un mort tenait entre ses mains. Montrez-moi. »
Dan sortit le journal de sa besace et le tendit à La Taupe. Elle effleura la couverture avec délicatesse.
« Il y a des lettres gravées dans le cuir, ça devait être un livre important. « E. V. O. L. V. E ». Je ne comprends pas le sens de ces lettres, ça doit être un dialecte ancien, mais pas de chez nous, je dirais que ça vient du Nord. Voyons voir, de quand dates-tu petit journ… »
La Taupe ne finit pas sa phrase. Elle resta bouche bée et lu les quelques pages du journal en silence.

« Alors keseuk c’est ? » Demanda innocemment Thom.

Pour toute réponse, La Taupe planta ses yeux noirs dans les yeux de l’enfant. Thom y vit de l’espoir, de la tristesse, de la peur, mais surtout, quelque chose de très inhabituel chez elle : l’agitation.
Elle semblait avoir perdu quarante ans en quelques minutes tant son énergie paraissait débordante.

« Une clé. » Répondit-elle dans un souffle.
- Jveux not’paye c’tout. Une clé ou un liv, pour nous c’pareil, n’a pas d’cof, n’sait pas lire. Nous faut à manger vite ! S’énerva Dan alors que La Taupe crapahutait frénétiquement d’une étagère à une autre.
Cette dernière s’arrêta net lorsque Dan eu terminé sa phrase.
« Surveille le Langage ! Tu ne comprends pas. Cette clé n’ouvre aucun coffre. Elle vient du passé, et peux rendre notre futur bien meilleur que ce présent miséreux... Ne parlez de ça à personne. Et évidemment que je vais vous payer, allez-vous installer, j’avais préparé du ragout comme convenu. » Répondit la vielle femme d’un air étrangement las.
« J’essaierai de comprendre vot’ bazar quand mon vent’ sra plein. Et mon langage c’est tout pareil qu’le vot’. Sauf que quand j’sors d’vot grotte, on m’comprend au moins. » Marmonna Dan en se dirigeant vers ce qui servait de cuisine à La Taupe.

« Mangez tant que vous le voulez les enfants, je suis désolée mais j’ai vraiment beaucoup de travail à présent. Merci pour votre aide. » Dit La Taupe en retournant dans ses étagères, à la recherche d’un livre qu’elle n’arrivait manifestement plus à trouver.

« Hé ! T’la trouve pas un peu dans l’zarb La Taupe ? » Chuchota Thom
- Plus que d’habitude t’veux dire ? Répondit Dan, la bouche remplie de ragout. Elle remue ses livs, sur’ment qu’elle range, ça doit ben lui arriver des fois.
- Normal’ment elle mange avec nous ! Insista Thom, l’air inquiet. Pis elle nous dis pas de tout manger…Le liv qu’on a ram’né, comment elle a dit dja ? Le carnet ?
Dan acquiesça, le regard planté dans son assiette.
« Héba chuis sur ya kekchose de zarb avec ce bazar. T’as vu sa tête quand elle a lu ? En plus elle nous a rien raconté de ct’histoire ! Pis c’est un liv, un carnet ou une clé ? »
Dan posa ses couverts, et repris du ragout.
- Moi l’histoire de c’liv, si ça la rendue folle, j’préfère pas la connaitre, c’est un coup à finir déformé ça, poursur. En plus on a d’quoi manger, on l’a mérité. Alors mange et pose pas d’questions, le ragout est bon, et si tu m’le laisse jeul prend ! Répondit Dan en servant une copieuse ration de ragout à son frère.

Ils passèrent leur repas sans plus de discussions. Lorsqu’ils eurent finis, ils se rendirent compte que quelque chose n’allait pas. La Taupe était sortie. Et La Taupe ne sortait jamais.
« Là, c’est vrai qu’elle est dans l’zarb. » Pensa Dan, l’estomac enfin plein.
Les deux enfants sortirent précipitamment du souterrain, avec la ferme intention de savoir ce que faisait la vielle femme hors de sa grotte.
« Hé, les tios ! Lança une voix rocailleuse, keseuk La Taupe fait en dehors ? C’pas bien la, keseuk vous lui avez fait ? »
- Rien du tout Archie, poursur, on a ramené not’ butin, des livs comme elle aime, pis on a mangé et après elle était partie. Tsé ou elle va ?
- L’es partie en courant, en direction du Hall de la Communauté. Alors faites pas de baza…

Il n’eut pas le temps de finir sa phrase. Les deux enfants se mirent à courir le plus vite possible, le Hall de la Communauté était à dix minutes de marche, si ils arrivaient à rattraper La Taupe, ils pourraient enfin savoir quel secret renfermait ces livres, et pourquoi elle, qui ne sortait même pas chercher sa nourriture, s’était empressée de partir sans même dire un mot ?
De plus, voir la Communauté, et tenter de rentrer à leur service - ce qui est bien plus reluisant que de faire des missions suicides pour le compte du Fourbi - c’était dorénavant possible.
« Après tout, pensa Dan, c’est nous qu’on les a ramené de c’t’endroit maudit ces livs, on mérite bien un peu plus qu’le ragout d’la vielle, aussi bon soitil ! »

La dalle en béton lâchait des nuages de poussière sur le passage des deux jeunes, courant entre les marchands de ressources en tout genre, semant quelque peu le trouble et l’agitation pendant quelques secondes.
Thom était à bout de souffle, mais il suivait son frère les poumons en feu. Le regard de La Taupe après qu’elle ait lu ce carnet n’arrivait pas à quitter ses pensées.
« J’dois la rattraper, et savoir l’histoire, c’tout c’qui compte ! J’veux pas qu’l’ancienne nous cache un bazar monstre ! »

Enfin, le Hall de la Communauté apparut, et au bout de l’immense tunnel, les grandes grilles vert kaki, les miradors, les pickups armés de mitrailleuses lourdes et les soldats en uniforme se dessinaient devant l’immense bunker qu’était La Citadelle. Au pied des marches de cette dernière, derrière les grilles, La Taupe se dirigeait, escortée, vers l’entrée du bunker.
Dan redoubla d’efforts, priant pour avoir encore une chance d’arriver à temps. Thom hurla en direction des grilles, attirant alors l’attention des gardes en patrouille. Un coup de feu partit. Dan chuta lourdement.

« Non ! Arrêtez ! Ils sont avec moi, pourquoi avez-vous tiré espèce d’inconscient !? » Hurla La Taupe, s’arrachant de l’emprise des gardes avec une énergie insoupçonnée.
Elle courut vers le blessé sans plus de ménagements.

Thom était déjà à ses côtés, hurlant et pleurant, le suppliant de se relever. La Taupe écarta l’enfant doucement pour saisir le poignet de Dan.
« Il est vivant…pour le moment, mais si on fait rien il va mourir dans quelques heures, alors toi, tu lâches ton arme, et vous le transportez à l’infirmerie ! »
- Bien Madame…lâcha le soldat honteux.
« Thom, tu vas avec ton frère, il aura besoin de toi. »
- Mais…keseuk j’vé faire ‘vec lui ? Yva mourir ? Jveux pas La Taupe ! Faukeus soit toi qu’il l’aide !
- Calme-toi. Répondit-elle en posant une main sur son épaule. Le médecin est un ami à moi. Et ton frère a besoin de lui pour les soins du corps, et de toi pour le soin moral, crois-moi. Je viendrais te chercher une fois que j’en aurais terminé. »
- Non ! La Taupe, keskispasse ?! Keseuk le liv il t’a raconté ? Jveux savoir pourquoi tu coures partout en dehors d’la grotte, et pourquoi mon frère se fait tirer d’sus ! Hurla-t-il, des larmes ruisselant sur ses joues.

Elle lâcha l’enfant.
« Tu auras tes réponses quand je reviendrais te chercher, c’est promis. En attendant va avec ton frère, que tu sois avec moi à l’intérieur n’arrangera en rien la situation. »
Elle fit volte-face, puis se retourna une dernière fois vers Thom.
« Quand tu verras le médecin, dis-lui que vous êtes des amis d’Eliza, et tout ira bien. »
Elle détourna le regard et partit, escortée par six gardes, et laissant l’enfant en pleurs suivre le cortège qui se dirigeaient vers le camp militaire dressé sur le flanc de La Citadelle.

Un homme petit et trapu, au crâne dégarni et à la barbe grisonnante, en blouse blanche, courait déjà vers le blessé, accompagné par deux infirmiers.
« Nom d’une pute éborgnée, c’tait quoi encore que c’coup d’péteux ?! Et pourquoi jme r’trouve ‘vec un gosse à soigner ? Keskilafé l’tiot la ? Un vrai danger, poursur, c’est un Déformé sur’ment, ça s’voit ben à sa sixième jambe, hein idiot ?! » S’emporta l’homme d’une voix dure tout en regardant fixement le soldat.
« Bon, c’pas grave on s’calme, allonge le, voilà, on enlève les vêtements avec délicatesse autour de l’endroit où la balle a pénétré ok ? J’prépare le sédatif et on y va. »
Les infirmiers s’exécutèrent en silence.
« D’accord. La balle est restée à l’intérieur, par chance elle n’a pas touché de point vital, mais elle a dû casser une cote, causant l’évanouissement. Faut la retirer sans faire de dégâts, nettoyer et recoudre ok ? »
Les infirmiers hochèrent la tête simultanément. Thom toussa. L’Homme sursauta.
« Nom d’une pu…oublie ça tiot. Kestufé ici, n’faut pas rester là tsé ? »
- C’mon frère, Dan, dit-il en le pointant du doigt. On est des amis d’Eliza. Ajouta-t-il d’une voix hésitante.
- Ha. Eliza hein ? Ça m’étonne pas, elle arrive toujours à se créer des ennuis.
- La Taupe, s’créer des ennuis ? On doit pas parler d’la même. Répondit Thom interloqué.

- Pour que tu arrives ici, dans ma tente, avec ton frère blessé, disant que tu es un ami d’Eliza, une amie que je n’ai pas r’vu d’puis belle lurette, peu importe comment tu l’appelles, je suis certain qu’on parle bien de la même personne, répondit-il avec un sourire nostalgique. Ne t’inquiète pas, j’vais m’occuper d’ton frangin, il va s’en sortir. Va dormir un peu derrière, yen a pour un moment.

Thom s’exécuta sans poser plus de questions, les émotions de cette journée l’avaient épuisé.
Il sombra dans un sommeil sans rêves.
Dernière modification par ChrisRuess le jeu. 23 juin, 2022 3:32 pm, modifié 30 fois.
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau [Science-fiction; Dystopie]

Message par Charmimnachirachiva »

Salut !
Bon alors, tu as bien fait de me prévenir car comme tu l'as dit, j'en ai vu d'autre ! ;)
Ce premier chapitre est très prometteur, on sent bien l'univers qui s'installe et l'on a tout de suite envie de savoir la suite !
Je trouve que justement ces éléments de langage, bien que je sois parfois obligée de relire trois fois la phrase avant de comprendre :lol: , son très utile à l'histoire et à ton univers.
Le fait que tu ajoutes des illustrations permet aussi de mieux se projeter dans ce monde.
Quand à l'intrigue bien qu'on en soit qu'au début je la trouve bien intégrée. Elle est présente et permet de donner un fil conducteur entouré de mystère sans pour autant prendre le pas sur les personnages ou les descriptions.
Et tu écris super bien ! Tu allies description, aventure et émotions d'une belle manière.
Voilà voilà ! :)
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau [Science-fiction; Dystopie]

Message par ChrisRuess »

Merci pour ton retour, ça me fait super plaisir :)
Oui, je me doute qu'au début, la façon de parler des personnages doit surprendre, mais tu as bien cerné le but de ces éléments de langage : il faut que le lecteur comprenne qu'on est toujours sur Terre, mais que beauuuucoup de choses ont évoluées. Ça sert aussi à définir les classes sociales de mes personnages :)
Et oui, cette carte et la préface m'ont été bien utiles pour construire mon récit sans m'y perdre, parce que mon univers est vraiment vaste :)
"comme tu l'as dit, j'en ai vu d'autre !"
Haha, méfie toi, c'est que le début, rien de trop méchant pour le moment, je te l'ai dis aussi ;)
Merci encore pour ton retour, ça m'encourage vraiment :)
Le chapitre deux arrive dimanche, une semaine sur deux c'est trop faible comme rythme de parution, pour les premiers chapitres en tout cas, mais chuuuuuuut, c'est un secret ! :lol:
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Chapitre 2 sorti. Les Eclaircisseurs comptent bien débarrasser la Brûlée de sa végétation dangereuse.
Dernière modification par ChrisRuess le dim. 16 févr., 2020 11:54 am, modifié 1 fois.
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par Charmimnachirachiva »

Coucou !
Ce chapitre épaissit encore plus le mystère autour de la mission E.V.O. L.V. E. Qu'on-t-ils bien pu découvrir ??????
Je me demande si on va suivre en particulier ces deux héros ou si il y en aura encore plus ?????
Que de questions mais je trouve que justement ça apporte du piquant à l'histoire ! Cette envie de tourner la page pour savoir la suite mais d'être obligée d'attendre une semaine est absolument terrible mais du coup je lirais le 3e chapitre avec encore plus de plaisir ! ;)
Je me prépare à la suite, je serais prête le moment venu ! :lol:
Je suis bien contente que tu postes toutes les semaines, j'attendrai moins longtemps ! ;)
C'est un plaisir de te lire ;
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Télécharge la préface, ça lève une partie du voile sur E.V.O.L.V.E, et ça permet aussi de comprendre pourquoi la Terre est dans cet état ^^
Les cinq premiers chapitres sont des présentations de personnages, en tout, ils sont neuf ;)
Mon personnage préféré arrive avec le chapitre 3 :)
Haha, à dimanche prochain alors ;)
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par Charmimnachirachiva »

Oui j'ai téléchargé mais je me demande quand même pourquoi tout d'un coup ils sont très important car ce carnet ne laisse penser qu'il n'y a plus de secret... Mais je vais prendre mon mal en patience ! :)
Je trouve que neuf personnages c'est bien comme nombre, en plus comme certains se connaissent déjà, ça permet de faire des ''chapitres groupés" pour ne pas perdre de vue un perso trop longtemps...
Je me demande comment il va être, surtout si c'est ton perso préféré ! :?: :geek: :!:
J'ai hâte d'être dimanche ;
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Plus de mystères ? Que tu crois ;)
L'importance du carnet, pour La Taupe, c'est juste historique, elle cherche pas a changer le monde, mais elle sais que le carnet date de très loin et qu'il parle de comment et pourquoi le monde est parti en live (parce qu'elle est maligne et qu'elle connait les dates), mais elle ne lit ni l'anglais, ni le français, donc on ne sais pas tout ;)
Pour La Gouvernance, c'est simplement parce que la végétation empêche le passage vers l'Europe de l'Est et la Russie, et qu'ils veulent explorer pour de nobles raisons bien sur :P
Mais le vrai danger viens d'ailleurs ;) Ça va mettre du temps à se décanter, pour le moment je laisse le spectateur dans le même état que mes personnages : Dans le flou le plus total :D
Pour les perso, 3 dans le 1er chapitre, 1 dans le 2ème, 2 dans le 3ème, 1 dans le 4ème, 2 dans le 5ème. Et certains personnages sont pas très bavards, mais on les repère de loin, j'essaie de donner un maximum d'identité à chaque personnage pour éviter que le lecteur ne mélange tout...ce sera à toi de me dire si c'est réussi ^^
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Chapitre 3 sorti ! :) Deux Déformés tentent de traverser le Grand Désert.
Dernière modification par ChrisRuess le dim. 16 févr., 2020 11:53 am, modifié 1 fois.
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par Charmimnachirachiva »

Coucou !
Ce chapitre est très agréable à lire. Ta plume est fluide et nous permet de bien nous projeter dans ce désert. Avoir le point de vue des ''exclus de la société" est très intéressant. D'après mes déductions (possiblement fausses) à un moment ou un autre on aura quelqu'un qui vit pas dans la misère parce que jusqu'à maintenant...
Je confirme que pour l'instant tous les personnages ont un caractère bien différent ! Il y a juste les deux frères Dan et Thom qui ont pour l'instant une identité assez proche mais après on ne les a vu qu'un seul chapitre donc...
Par contre je me demande de qui entre Henri et Dony est ton perso préféré :?: le sage tourmenté ou le grand enfant superpuissant ?? :lol:
C'est un plaisir de te lire ;
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Bah disons que dans un monde ou il reste approximativement 250millions d'êtres humains suite à une suite de catastrophes...la misère est assez relative ^^
Par exemple La Taupe et Luk ne vivent pas dans la misère comme Dan et Thom, et les enfants ne vivent pas la même misère que les Déformés :) Mais on a déjà vu le Gouverneur Principal, qui lui, a l'air d'être bien au dessus ;)
Alors, pour mon perso préféré, petit indice : C'est une personne qui est réelle, j'ai simplement augmenté certaines de ses capacités ;)
Merci encore pour ton retour, ça fait plaisir de voir ton commentaire après chaque chapitre :)
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Chapitre 4 sorti, on s'enfonce dans la Souterraine, avec le Lieutenant Colonel Lyame.
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par Charmimnachirachiva »

Coucou !
Tout d'abord désolée pour mon retard de commentaire, j'avais pas de réseau en vacances et pas mal de devoirs... :?
Du coup ce chapitre est bien palpitant !!
Et cette fin ! j'hésite entre en être éblouie ou avoir envie de te tuer pour le suspense que tu me fais vivre !! :lol: :lol:
Le rapport de Marcus fait écho au chapitre 3, je suppose que les Déformés fuient la nécrose ou quelque chose d'encore pire ? A moins qu'ils ne pensent que les normés sont responsable de la nécrose et qu'ils veuillent leur faire payer...
Ta plume est pleine de suspense cette fois, le personnage est un peu l'équivalent d'un militaire (rien que colonel-lieutenant...) ce qui donne une dimension plus... réelle, disons. Plus ''comme maintenant'' je sais pas trop si tu vois ce que je veux dire...
Par rapport à la misère, je comprends ce que tu veux dire... C'est sûr que dans un monde avec 250millions d'habitants... Mais là notre colonel ''fait semblant '' d'être en bas de l'échelle, la plèbe mais en vrai c'est juste pour se cacher...
C'est un plaisir de te lire ;
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Haha, t'inquiète pas, tout le monde à une vie, j'ai une semaine de retard sur la publication du chapitre 5 ;)
Alors oui, ce personnage montre le coté plus dystopique de mon univers, la ville aussi montre que le monde garde encore une certaine structure, avec ses forces et ses faiblesses, donc c'est cool que tu le ressentes comme plus "vrai", parce que c'est justement le but :) Les autres personnages sont plus consacrés à la partie "aventure et fantastique" du récit :)
Encore merci pour ton retour :)
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Chapitre 5 sorti. Liz et sa mystérieuse partenaire se dirigent vers le Grand Désert pour porter main forte à Marcus.
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par Charmimnachirachiva »

Bon encore du retard, désolée... :? Mais au moins avec la fermetures des collèges j'aurais plus de temps pour commenter
Du coup je trouve que ce chapitre commence à nous donner une impression qu'il y a quand même des gens compétents pour sauver le monde !
Je trouve Liz très "agréable" comme perso. Elle possède de nombreuse qualité intellectuelles et physiques même si ce qui est plutôt mit en avant ici est son sens moral : certe elle a déjà tuer des gens mais elle refuse de tuer une innocente potentiellement utile.
D'ailleurs je suis partagé au sujet de Kohée, est-ce que ses gènes ont été trafiqués et qu'elle détient des secrets vitaux ou est-elle juste une compagne loyale (un peu dans le même style que Dony...)
Le prochain chapitre, on retrouve des perso qu'ont connait déjà, les choses sérieuses vont pouvoir commencer ! :lol: (même si elles ont déjà commencée... chuuut ;) )
C'est un plaisir de te lire ;
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Chapitre 2 : Eclaircissage



La Brulée


Le lance-flamme ne faiblissait pas, pourtant, la végétation semblait faite de pierres tant elle avait de mal à bruler. L’homme avançait doucement et prudemment, pour éviter qu’une épine ne transperce sa combinaison, ou pire, son corps. Sans parler du risque de tomber sur une de ces saloperies de plantes carnivore. Déjà cinq de ses collègues avaient perdus la vie face à ces monstres végétaux, et au moins une demi-douzaine d’autres avaient étés blessés.
Dire qu’il y a quelques années de ça, toute la population de La Brulée célébrait le retour des plantes, parlant même de signe divin, la fin de l’Age de Chute qu’ils disaient…s’ils avaient su à quel point ils se trompaient.

« Tout ça pour atteindre la Vielle Flèche des Anciens, la seule partie de toute la clôture où on trouve encore cette végétation de malheur. On ne connait même pas le but véritable…en tout cas, ça m’étonnerai que La Gouvernance veuille relancer le tourisme de masse. » Songea-il, un sourire nerveux sur le visage.

Les épines rougeoyaient, puis viraient au blanc avant de fondre, et de s’éclater au sol en petites billes éparses, comme si il s’agissait de métal en fusion. Des animaux ressemblant à des rongeurs, cachés sous les arbustes et autres feuillages détalaient à l’approche de la vague de feu qui déferlait sur leur abri.
Un second Eclaircisseur, avec un brassard noir au bras, indiquant un grade plus élevé, arriva aux côtés du premier, qui bougonnait encore contre la Gouvernance, et ses saletés de branches impossible à faire brûler.

« Hé, Luk. Arrête toi, c’l’heure d’la pause, c’bon, on r’prendra taleur ! » S’exclama le chef en lui donnant une tape amicale sur l’épaule.

Luk arrêta son engin, et partit sans même adresser une seule parole à son supérieur. Il s’assit au milieu de l’endroit qu’il avait fait brulé la veille, enleva son lourd casque, et souffla longuement. Il était fatigué de cet endroit, de ce travail, de La Gouvernance, de leurs secrets pour « le bien de la Cité ». Tout ce qu’il voulait en venant à La Brulée, il y a quinze années de ça, avec ses deux parents, c’était cultiver cette végétation qui reprenait vie. Puis ils avaient finis par payer le prix fort, en comprenant que cette végétation était non seulement très complexe à cultiver, mais surtout extrêmement dangereuse. Des espèces d’animaux sauvages avaient mutés, devenant plus agressifs, plus gros et plus robustes, ainsi que beaucoup d’espèces de plantes

Ce qui ressemblait à loup immense, avec des plaques osseuses semblables à celles d’un rhinocéros et la queue d’un reptile, hérissée de pointes, avait emporté son père alors qu’il travaillait au champ.
C’était la première fois qu’on voyait autre chose que des traces d’un Prédateur.
Luk n’avait que huit ans, et ils étaient arrivés à La Brulée seulement cinq mois auparavant.

Sa mère mourut quatre années après. Des vesses de loup mutantes avaient éclatées quelque part dans la végétation. Les spores portées par le vent étaient très agressives. Elles paralysèrent ses voies respiratoires, et elle mourut d’asphyxie en moins de cinq minutes après la première crise de toux. Son corps fut brulé sur place pour éviter de répandre l’infection, comme le voulait la procédure. Il alluma le bucher, et la regarda bruler une nuit entière, seul, jusqu’à ce que la Brigade des Orphelins le prenne sous leur aile.
Et voilà que maintenant, lui, brulait la végétation de La Brulée, qu’il devait à la base cultiver avec ses parents. Certes, les premiers temps, ça l’avait aidé à oublier, à se défouler contre ces choses immondes qui l’avaient privé de sa famille. Mais dorénavant, il se sentait seul, impuissant face au mur de ronces qui se dressait devant lui. Tout cela ne faisait plus aucun sens pour lui.

« On r’prend, la pause est terminée, tous à vos postes ! » Beugla le chef en agitant frénétiquement ses bras au loin.

Il souffla une nouvelle fois, pris une grande inspiration, puis remis son casque et repartit vers la zone encore rougeâtre et fumante dont il avait la charge. Le lance-flamme rugit, et aussitôt, et les plantes reprirent leur teinte blanche.
Soudain, quelque chose explosa et projeta une boule de gaz de plus de deux mètres de diamètre dans les airs. Par réflexe et par expérience, il avait réussi à reconnaitre la plante responsable de ce phénomène, Ecballium elaterium, ou concombre d’âne, ou du moins, sa version mutante. Cette plante répand ses graines dans l’air grâce à un gaz hautement inflammable lors de la floraison. En théorie, il ne pose pas de problème, sauf si vous le respirez trop longtemps, ou lorsqu’il rentre en contact avec un lance-flamme. C’était la première cause de décès chez les Eclaircisseurs.

Luk s’était jeté le plus loin possible en arrière. Il tomba durement sur son omoplate, et entendit un craquement sourd. Il gémit de douleur, mais réussit à se remettre sur pieds, l’épaule droite complètement démise et ses bottes quelque peu roussies, puis à marcher, bien que complètement désorienté, hors de portée de son lance-flamme qui prenait feu à son tour.
Alors que les autres Eclaircisseurs arrivaient en courant et hurlant, et que sa vision revenait à la normale, il remarqua quelque chose qui lui déplut au plus haut point : le réservoir d’énergie Oméga liquide de sa machine, bientôt en contact avec les flammes, au milieu d’au moins une vingtaine de concombres d’âne.

« Oh merde. »

Ce fut tout ce qu’il trouva à dire, les yeux écarquillés, avant de partir en hurlant à ses collègues de faire demi-tour le plus vite possible.
Lorsqu’il se trouva à leur niveau, à quelques dizaines de mètres de l’endroit de la première explosion, la seconde, bien plus terrible, se déclencha.

L’équipe au complet fut projetée sur au moins trois bons mètres de distance lorsque les flammes s’élevèrent comme une cathédrale dans le ciel, qui disparut d’un coup en un souffle furieux. L’impact au sol fut terrible, Luk sentit son épaule, déjà démise, casser complètement lorsque qu’une douleur aigue traversa son bras, et l’intégralité de son dos.
Il hurla, mais tenu bon. La douleur était si intense qu’il avait des sueurs froides, le visage extrêmement pale. Il n’était pas loin du malaise, mais réussit à se remettre sur pied avec l’aide de ses camarades.
Il n’était pas le seul à être blessé, sur les huit Eclaircisseurs de l’équipe, seuls trois étaient debout sans plus de problèmes que quelques ecchymoses. Les quatre autres, dont Luk, arrivèrent à se relever malgré leurs blessures. Le dernier de leurs équipiers gisait, inconscient, au sol. Sa tête avait heurté le sol, et il saignait légèrement d’une plaie à l’arrière de son crâne.

« Planteud’ merd’ ! » Pesta le chef, la cheville foulée, en s’appuyant sur son lance flamme pour tenir debout. « Faut qu’on rentre au Campement, l’a b’soin d’soins urgents. Et l’est pas l’seul j’crois ben… » Ajouta-t-il en regardant Luk, l’air inquiet.
- Et comment on fait hein !? On n’a pas de brancards, la moitié de l’équipe est blessée, et faudrait qu’on fasse les trois kilomètres de marche dans cet état ?! S’emporta Luk, appuyé sur un tronc d’arbre, en souffrance.
- On a l’radio, répondit le chef, y vont v’nir nous chercher ‘vekeul n’céssaire, reseut’ calme un m’ment, ‘longe toi s’tu veux.
- Rester calme ?! Hurla Luk en grimaçant, un œil fermé, de la sueur froide coulant sur ses tempes. Mais vous voulez quoi ? Qu’on se fasse buter par ses…saloperies, comme mes parents hein ? Cité de mort ! On va tous…y passer si on continue, vous comprenez ça les gars !? Et pourquoi !? Dites-moi…j’entends rien ! Mais c’est normal !! On ne sait pas, rien, pas une info ! On risque nos vies, sans raisons. Comptez plus sur m…

Luk ne finit pas sa phrase, il s’écroula sur le sol une nouvelle fois, inconscient. Les derniers mots qu’il entendit furent les cris de ses collègues répondant par l’affirmative à l’ordre incompréhensible donné par le chef.


Lorsqu’il se réveilla, la première sensation qui lui sauta à la gorge fut l’entrave. Son corps refusait de bouger, pourtant, aucun lien ne le rattachait au lit. Les minutes passèrent, puis les heures. Au moment où il crut pouvoir enfin être en capacité de lever le bras, une infirmière entra dans sa chambre, mais ne le remarqua pas.

« Bonjour ? » Lança Luk hasardeusement, la voix enrouée.

L’infirmière se retourna d’un coup sec, si surprise que sa bouche resta ouverte une seconde sans qu’un son n’en sorte.
« Bonjour, s’cuzez, répondit la jeune femme, vous allez ben ? »
- C’est plutôt vous qui êtes censée me le dire non ? C’est normal que j’arrive pas à bouger ?
- Oui, n’vous inquiétez pas, après être resté trois semaines dans l’coma c’normal, puis l’opération ‘range pas les choses, mais ça d’vrai r’venir d’ici une heure ou deux, le temps que…
Luk lui coupa aussitôt la parole.
« Attendez…trois semaines ? Et quelle opération ? »
- ‘Coutez, chuis pas l’médic, j’vais vous l’chercher y vous expliquera ça mieux qu’moi. Répondit-elle en agitant les bras, un brin de panique dans la voix.
Elle partit aussi vite qu’elle était apparue.

« Génial, pensa Luk, j’ai aucune idée de ce qui se passe, de ce qu’il s’est passé, et la seule personne qui rentre dans ma chambre, censée s’occuper de moi, à l’air d’avoir vu un Prédateur, alors que j’arrive à peine à bouger…qu’est-ce que c’est que ce bordel ? »

Quelques minutes passèrent, puis la porte grinça, laissant entrer une femme en blouse blanche, et un homme en costume que Luk ne connaissait que trop bien. Le Gouverneur Principal en personne.

« Bonjour m’sieur Aubert. Comment vous sentez vous ? » Demanda la médecin, souriante.
- Je ne sais pas ce qu’on m’a fait, ni ce qu’il s’est passé ces trois dernières semaines. Je ne peux pas bouger le moindre centimètre de mon corps, et la seule personne que je vois en me réveillant s’en va sans me donner d’explications, apeurée, pour vous chercher. Et vous ramenez le Gouverneur Principal avec vous, pour une raison que j’ignore. A votre avis, je me sens comment ? Répondit Luk froidement.
- Oui, vous avez besoin de réponses, je comprends, détendez-vous, je vais vous expliquer. Dit-elle d’une voix douce.
- Ya intérêt oui. Grogna Luk.
- Vous avez fait une chute qui a brisé votre omoplate, reprit le médecin, imperturbable, ainsi que votre clavicule. Ensuite, une seconde, plus grave, qui a brisé votre colonne vertébrale en deux endroits et fissurée sur plusieurs centimètres. Ca a comprimé votre moelle épinière. Vous étiez donc paralysé à votre arrivée. Nous avons retiré votre colonne vertébrale, que nous avons remplacée par une colonne de titane. Nous avons également remplacé votre omoplate, votre épaule, ainsi que votre bras. Vous n’arrivez donc pas à bouger pour le moment parce que votre corps est à la fois en train de sortir du coma, et de s’habituer au poids de sa nouvelle prothèse. D’ici douze à vingt-quatre heures, vous serez capable de vous déplacer, mais il faudra compter quelques semaines de rééducation avant de pouvoir commencer votre entrainement.
- Attendez, je tenais debout, je vous jure, je tenais debout !
- C’est l’adrénaline qui vous a fait tenir quelques secondes, et j’avoue que c’est assez impressionnant, mais c’est aussi ce qui vous a plongé dans le coma.
- Et vous avez dit mon entrainement ? Mon entrainement de quoi ? Et pourquoi vous m’avez soigné hein ? J’ai vu des gens mourir de blessures moins graves par manque de soins, alors pourquoi moi ? Demanda Luk, dégouté par ce qu’il venait d’entendre.
Le Gouverneur Principal, silencieux depuis le début de l’entretien, s’avança alors vers le patient et pris la parole.

« Monsieur Aubert. Votre supérieur nous a communiqué les doutes et les questionnements que vous vous posiez concernant votre mission d’Eclaircisseur. Vous ne saviez pas pourquoi vous risquiez votre vie, et j’en suis désolé, mais le devoir me contraint quelquefois au silence, pour le bien de la Cité. Cependant, je suis ravi du travail fourni par votre équipe. Il semblerait que la zone touchée par l’explosion ait ouvert un passage à travers la végétation. Nous sommes arrivés à l’Ancienne Flèche la semaine dernière grâce à vous, nous avons gagné des mois précieux sur notre emploi du temps.
- Et alors ? C’est pour ça qu’on me soigne ?
- En partie oui.
- En partie ?
-Vous êtes le fils de Tran Aubert, lui-même fils de la professeure Myriam Aubert, votre grand-mère, c’est exact ?
- Exact, je ne l’ai jamais connue, quel rapport avec l’Eclaircissage ? Demanda Luk, visiblement agacé par autant de mystères.
- J’y viens. Votre grand-mère faisait partie d’un groupe appelé « E.V.O.L.V.E », une cellule de crise destinée à protéger l’espèce humaine avant l’Age de Chute, et qui a œuvré à la protection de notre espèce après l’Age de Chute.
« Ouais bah ça à foiré. » pensa Luk. Le Gouverneur Principal continua sa tirade.

« Elle a disparu en 2081, avec son équipe, alors qu’elle était à bord du Flotteur, cependant, ses travaux, concernant le pathogène responsable des mutations sont censés être toujours dans les anciens locaux de la DGSE, qui employaient votre grand-mère. A côté de l’Ancienne Fleche. Et nous avons des raisons de penser que ces travaux peuvent nous apporter des réponses, peut-être même une solution au problème de la végétation. C’était le but véritable de l’Eclaircissage.
Votre père et votre mère vous ont appris les sciences, l’écrit et le parler des anciens. Nous savons que vous n’aurez pas la capacité scientifique d’exploiter les travaux de votre grand-mère, mais il nous reste quelques personnes qualifiées et capables de le faire, ce n’est pas le problème. Vous, vous avez les capacités pour réussir votre mission : repérer le local, trouver les documents et les ramener à La Brulée. Vous aurez deux jours de marche pour y arriver. Vous dirigerez une équipe de six soldats extrêmement bien armés et entrainés qui auront pour ordre de vous protéger. »
- Et si je refuse ?
- Mais ce n’est dans l’intérêt de personne enfin ! S’offusqua le Gouverneur Principal. Vous détestez cette végétation, au moins autant que tout le monde ! Cette mission peut nous permettre de changer la donne. De la détruire. D’explorer au-delà de la clôture. De cultiver, comme le souhaitaient vos parents et…



Luk coupa la parole de l’homme en costume sans une once d’hésitation ou de respect. Sa voix était si dure que tous savaient qu’il valait mieux qu’il ne soit pas en état de bouger.

- Ne parlez pas de mes parents. C’est La Gouvernance qui les a fait venir dans cet endroit maudit, avec vos belles paroles, et votre espoir stupide d’un soi-disant Jour Nouveau ! Vous dites que vous détestez la végétation ? Ha, c’est plus un signe divin maintenant ? Il vous a fallu quoi pour comprendre hein ? S’écria Luk, déjà essoufflé par l’effort, ce qui ne l’empêcha pas de continuer.
Trainer votre gros cul en dehors du Palais ? Perdre vos gardes du corps dans une attaque de Prédateurs ? Je ne pense pas. Vous n’avez aucune idée de ce que les gens vivent dehors. Votre Palais, c’est la véritable clôture. Parce qu’il y a trois semaines de ça, j’ai failli mourir, sur votre ordre, à l’intérieur de la clôture censée me protéger, comme mes parents ! Et vous, quand avez-vous risqué votre vie pour la dernière fois hein !? Demanda-t-il, un sourire méprisant sur le visage
Vous ne faites qu’envoyer des gens à la mort, après vous les réparez, pour leur proposer d’autres missions à la con, et en plus, j’ai même pas les compétences pour exploiter les travaux de ma propre grand-mère selon vous ?
Je refuse de continuer. Vous les voulez vraiment ? Vous voulez sauver le monde avec les travaux de ma grand-mère ? Allez-y, partez, et trouvez les, après tout, vous aussi vous savez écrire, lire et parler non ?
Alors, allez en enfer, vous et votre entrainement. Une fois que j’aurais fini ma rééducation, je m’en irai pour Le Rempart.

Luk serrait les dents, en sueur, les yeux injectés de sang. Tout son corps était tendu, si seulement il avait pu bouger ses bras, et décrocher la mâchoire de cet enfoiré de dirigeant sans scrupules, ça aurait été le plus beau jour de sa vie. Malheureusement, sa condition d’handicapé ne lui permettait que de passer pour un dément.

Le Gouverneur Principal ouvrit la bouche en fronçant ces sourcils hirsutes et grisonnants, le doigt levé, mais se ravisa. Il tourna les talons et sortit de la salle sans dire un mot, sous le regard médusé du médecin toujours présente.

« Vous y êtes peut être allé un peu fort non ? Vous devez montrer du respect aux Supérieurs, vous savez ? Ils nous ont toujours protégés…Monsieur Aubert ? » Chuchota la médecin, gênée par la situation.

- Allez-vous faire foutre.

Fut la seule réponse qu’elle obtenue.
Dernière modification par ChrisRuess le ven. 20 mars, 2020 1:22 am, modifié 2 fois.
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Message par ChrisRuess »

Chapitre 3 : Déformation



Grand Désert


Le sol rougeâtre teinté d’ocres bougeait sous le poids des deux hommes, et rendait leur progression difficile. Celui qui ouvrait la marche planta sa canne dans le sable et s’arrêta. Son visage était recouvert d’un turban effiloché, mis soigneusement, de façon à ce qu’il soit protégé du vent. Sa tunique noire était recouverte de poussière qui s’échappait à chaque coup de vent, le faisant ressembler à un spectre dans une tempête.
Seul ses deux iris d’un gris irréel étaient apparents, et scrutaient l’horizon d’un air inquiet.
Des buissons épineux en forme de dôme s’élevant à plusieurs dizaines de mètres de hauteur avaient poussés sur les ruines d’une ancienne civilisation, comme si des gratte-ciels végétaux avaient remplacés les constructions humaines.
C’était ces buissons qu’il craignait.
Le vent se faisait de plus en plus violent, et arrachait quelques épines de ces végétaux gigantesques. Il savait que plus d’un de ses Frères étaient morts déchiquetés lors de tempêtes qui paraissaient innocentes, mais qui se révélaient dévastatrices, car chargées en épines de la taille d’un couteau.

Derrière lui, son compagnon suivait, son pantalon de lin grisâtre remonté quasiment aux aisselles. Il était immense, au moins deux mètres et demi de haut, pour un petit mètre et demi de large. Sa tête ronde semblait posée directement sur ses énormes épaules carrées. Il avançait, sans autres protections qu’un poncho recouvert d’une cotte de maille. Son index gauche dans la bouche, et le droit levé au ciel, comme pour demander la parole. Dans son dos, un meuble d’un bon mètre carré qui devait contenir leurs affaires, était attaché, ce qui n’avait pas l’air de lui poser de problèmes.

Il arriva aux côtés de son partenaire et s’arrêta pour regarder d’un air distrait le paysage chaotique du Grand Désert.
Ses yeux bleus teintés de petites parties vertes étaient magnifiques, et son regard était celui d’un enfant, naïf, doux et innocent. Comme si un nourrisson était bloqué dans un corps de géant.
Il retira le doigt placé dans sa bouche, la laissa légèrement entrouverte d’un air étonné, puis parut se reprendre en sursaut. Il saisit alors l’homme au turban par le poignet, qui reprit sa canne en se laissant entrainer par le géant sans poser la moindre question.

Il le conduisit à l’entrée d’un vieux bâtiment en ruine, dans le creux d’une dune.
La tempête approchait, et lorsque la canne heurta la dalle en béton, l’homme au turban sembla se détendre.

Il tendit sa main tremblotante, à la recherche d’un appui, et trouva péniblement le vieux mur de pierres. De toute évidence, il ne voyait pas. Son compagnon gratta frénétiquement l’arrière de son crane en souriant, puis conduisit l’aveugle vers un coin de la pièce, ou il s’assit, manifestement épuisé.

« Merci Dony. » Murmura l’homme en train de défaire son turban, pendant que l’autre s’occupait déjà de combler l’entrée du bâtiment à l’aide de rochers et de pans de murs écroulés qui semblaient être faits de mousse tant il les trimbalait avec facilité.

Une fois l’entrée couverte, leur abri fut plongé le noir, faiblement éclairé par les interstices entre les rochers, ce qui ne les dérangea pas le moins du monde. L’abri était frais, coupé du vent chargé de chaleur, de sable et d’épines qui déferlait à l’extérieur en sifflant.

Lorsque le géant se rapprocha, légèrement courbé en avant pour ne pas heurter le plafond, son binôme avait quitté ses couches de vêtements et semblait avoir maigrit et rapetisser. Il était âgé d’une soixantaine d’années. Ses yeux étaient contournés par des cernes gonflés et de fins sourcils. Son nez bosselé avait été cassé plusieurs fois, et quelques vielles cicatrices lui marquaient la pommette et la joue gauche. Sa peau ressemblait à du cuir tanné, comme si il était resté au soleil depuis sa naissance. De ses omoplates sortaient deux excroissances, roses et nervurées, terminées par des mains difformes.

Alors qu’il posait au sol un tapis sorti de sa sacoche, les deux bras, si on pouvait les appeler ainsi, s’activèrent à chercher le réchaud, les conserves et autres bocaux dans les lourds sacs que Dony avait soigneusement disposés, de façon à ce que le vieil homme n’ai pas trop d’efforts à faire pour cuisiner.

Le géant s’affala dans une position qui n’avait rien à envier aux plus grands empereurs romains, une main soutenant sa tête, et son index toujours tendu, semblant indiquer un des murs du bâtiment, pour aucune raison visible. Il resta la, en silence, son œil gauche légèrement déviant sur le côté, puis revenant à sa place initiale, avec un air penseur, son immense front plissé de rides d’expressions.
Une allumette craqua, et le réchaud fut allumé.

En quelques minutes, de la fumée s’échappait déjà de la casserole, avec une odeur de haricots fermentés. L’aveugla ajouta quelques épices, et l’odeur devint encore pire.
« Et voilà ! C’est prêt. » Dit-il après avoir longuement gouté son plat.
Il tendit sa main vers son compagnon, qui ne réagit que quelques secondes après, mais s’empressa d’attraper deux assiettes et le reste de couverts rangés dans le meuble précédemment attaché à son dos.
Leurs gestes étaient précis, et semblaient couler de source, comme si une symbiose existait entre ces deux êtres hors du commun. Les louches de nourriture douteuse furent servies, et Dony avala son plat d’une bouchée, au sens littéral du terme, avant de boire d’un cul sec l’intégralité du pot d’eau, qu’il reposa en grinçant des dents, avec un petit « Hhmpf » de satisfaction.
Puis il reprit sa position, ses index rappelant dorénavant des vieux mouvements disco.
Son partenaire, quant à lui, prenait son temps, en faisant attention à chacun de ses gestes.
Lorsqu’il eut finit son repas, il prit la parole d’un air déprimé.

« Et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ? Je ne sais pas pourquoi t’es v’nu avec moi Dony...y’avait que moi qui était banni. Je serai mort il y a de ça plusieurs semaines si tu n’étais pas là pour me guider… »

Dony passa un doigt dans une de ses narines, avant de le mettre à la bouche, puis de nouveau dressé dans les airs. Il grinça encore des dents, le regard dans le vide.

« Si j’avais survécu sans ton aide, ce qui est peu probable, je serai surement devenu fou à cause de la solitude.
T’es un brave. J’sais pas ce qui va nous arriver, mais il est hors de question que nous mourrions dans ce désert. Il faut avertir les Normés. Ils n’ont pas conscience de ce qui se prépare…mais sais-tu seulement ou tu vas ? Tu es toujours arrivé à me protéger, mais il semblerait que l’orientation ne soit pas ton fort… » Dit-il en souriant.

Le géant se gratta l’arrière du crâne avec un rire tonitruant rappelant un dessin animé pour enfants.

« Heureux que ça te fasse rire, mais il faudrait être tout de même un peu plus sérieux. Nous manquons déjà de temps, et rester dans le Grand Désert nous rapproche plus de notre fin que de notre but…Lorsque nous marchons, je sens le sol sous ma canne devenir de plus en plus dur, nous sommes en train de le traverser, c’est certain, mais je n’ai aucune certitude concernant le chemin qu’il nous reste à parcourir. Et certaines de nos journées, j’ai la sensation de tourner en rond… »

« Nnhhhhhiiiiiié. »Répondit son compagnon en se mettant en tailleur difficilement, pour contempler ses mains sous tous les angles d’un air extrêmement concentré.
- Oui, je me doute que toi aussi tu t’inquiètes. Enchaina l’aveugle comme si il avait compris ce que voulais dire son ami, mais il nous faut persévérer. Et puis nous avons de la chance, pas un seul autre Banni n’a croisé notre route. Ceux qui survivent ici deviennent dangereux.
Tu te rappelles de cette attaque au Village ? C’était eux…plusieurs morts, et la moitié de nos récoltes pillées. Je ne pense pas qu’on leur soit très utiles. Ils cherchent des guerriers. S’ils te trouvent, ils t’utiliseront contre ta volonté, à cause de ta force. Je sais que tu ne veux de mal à personne, mais ils te forceront à le faire. Moi, ils me tueront. Je ne suis qu’un petit agriculteur après tout…
La luminosité baissait, indiquant l’arrivée imminente de la nuit, mais le vent continuait de souffler, et les cliquètements des épines contre la pierre résonnaient dans tout leur abri, donnant soudainement à la pièce une ambiance lugubre.
« Il va être l’heure de dormir Dony. Demain on reprend notre route, je sais que nous nous rapprochons, La Citadelle n’est plus très loin maintenant. »
Dit-il avec un air absent, un léger sourire acariâtre sur le visage, en repoussant son assiette vidée, les couverts soigneusement disposés à l’intérieur. Il inspira profondément.

C’était les mêmes paroles qu’il prononçait chaque soir, depuis déjà plusieurs semaines, ou quelques mois, et il était fatigué.
Est-ce que sa mission, prévenir les Normés de l’existence de la Nécrose était encore quelque chose de nécessaire ? Ou est-ce que cette chose puante qui faisait pourrir la terre avait déjà réussi à répandre ses spores assez loin pour toucher La Citadelle ? Est-ce qu’ils se rapprochaient réellement de La Citadelle, ou est-ce que c’était son esprit qui lui jouait des tours ? Est-ce que revenir au Village n’était pas la seule solution ? Une exécution rapide, propre valait elle mieux qu’une lente agonie dans le désert ?

Les Déformés l’avaient banni car prévenir les Normés étaient, selon eux, une trahison. Seuls les Normés avaient le pouvoir d’inventer une chose aussi destructrice que la Nécrose, disaient les Anciens. Il fut pris pour un traitre, et jeté dans le Grand Désert seul. S’il revenait, il serait mis à mort. Dony l’avait suivi, malgré les efforts des autres Déformés pour le retenir. Il était le protecteur du Village.
Comment faisaient-ils pour inspirer un minimum de crainte aux Bannis maintenant que Dony n’était plus là ? Le Village devait être un champ de ruines à présent. Les Déformés n’avaient pas le combat pour vocation, seule comptait la survie, et, par extension, l’agriculture, la médecine et l’apprentissage des savoirs. A contrario, étaient Bannis tous les criminels des six Villages. Des Déformés agressifs, incontrôlables, certains étaient même attirés par le sang. Celui qui était le chef de leur milice, surnommé le Vampire, avait tué tous les Anciens du conseil de son Village car, d’après ses dires, il « avait soif de connaissances ». Ses victimes avaient été retrouvées vidées de leur sang. Et pas une seule trace d’hémoglobine ne maculait le parquet, seules de larges morsures situées sur différentes artères principales étaient visibles. Le Vampire avait étanché sa soif.

Un frisson parcourut la colonne vertébrale du non-voyant en repensant à ces évènements. Ou peut-être était-ce simplement dû à la baisse drastique de la température. Il s’emmitoufla dans sa couverture en laine.
Le vent commençait à se calmer, et il se laissa porter par les doux sifflements filtrants à travers les rochers, pour arriver à enfin trouver le sommeil.


Un bruit sourd lui fit reprendre conscience, un second acheva de le réveiller. Quelqu’un, ou quelque chose, tapait contre les pierres entassées de leur abri, avec la ferme intention de rentrer, au vu de la violence des coups.


Dony était debout, devant l’entrée, poussant des cris inquiets, ses mains grattant son cou et le dessous de son menton.
« Huuuuuuuuuu…huuuuuuuu… »

Son compagnon lui toucha l’épaule, et Dony parut surprit. Il plaça un doigt dans sa bouche, et se lança dans un rugissement colérique tout en se mordant l’index, son front appuyé contre celui de son partenaire.

« Shhhhhhhh, dit l’aveugle en plaçant doucement ses mains sur la nuque du géant, calme toi, calme. Ce n’est rien. Se battre n’est pas nécessaire. » Enfin, je l’espère…ajouta-t-il en pensée, alors que le bruit sourd retentissait de nouveau contre les pierres, faisant tomber de la poussière du plafond.
Dony pris les mains du non voyant pour les poser sur ses oreilles. Il était sourd, et muet, mais les vibrations émises par les chocs sur la pierre étaient en train de l’angoisser au plus haut point. Son regard, d’habitude fixe, perdu dans ses pensées, était devenu fuyant, et ses yeux enfantins ne reflétaient que la panique.

Une des lourdes pierres qui recouvrait l’entrée tomba au sol et éclata, envoyant des éclats de roche à travers la pièce. La lumière de l’aube éclairait désormais faiblement l’intérieur du bâtiment, et un visage humain couvert de poussière et de saletés jeta un coup d’œil rapide à l’intérieur.

« J’vois rien en d’dans. C’quoi c’bazar, zarb com’tout. Hier c’tait pas bouché. T’crois qu’les Déformés sont en d’dans ? Ou ptet’ que l’Fourbi est d’ja passé et les Rapaces ont tout bouché. » Demanda la voix claire d’un jeune homme.
- Si yavais des Déformés, tu s’rais d’ja mort, chibron qu’t’es. Répondit une seconde voix, plus grave, d’un ton agacé. Et les Rapaces ils marquent les endroits. Là ya pas d’marque, sont pas passés.
- J’entendais l’bruit j’te dis ! J’ai commencé à frapper, et y’avais une voix ! S’énerva le premier
- T’veux rentrer en d’dans pour vérifier ? Répondit d’un ton sarcastique le second.
- T’veux manger c’soir ou ben non ? Retourna son compère d’un ton égal. Bin faut aller ‘oir en d’dans. Passeum’moi l’arme, j’vais en premier, t’suis.
- Pas question. C’mon arme, t’vas et j’te suis.
- Et si ya des Déformés en d’dans qui m’tuent ? J’pourrais pas m’défendre, tête de vide !
- C’moi qui t’défend ! T’sais pas tirer, tu loupes un poisson mort à deux pas ! Yeux de bousier !

La figure du non voyant apparut dans le mince faisceau de lumière qui éclairait l’abri. Les deux garçons étaient jeunes, entre dix et quinze ans, et sursautèrent en voyant l’homme aux yeux gris, avec une petite inspiration paniquée. Même sans la vue, la tonalité de leurs voix indiquait leur âge, mais aussi leur peur, et il se félicita d’être resté calme.
Tuer ou blesser des enfants, affamés de surcroit, ne faisait pas parti de son credo. Le son d’une arbalète mise en joue dans sa direction le sortit de ses pensées et le ramena à la réalité.
« Bonjour, jeunes hommes, excusez-moi. Je m’appelle Henri. Merci de m’avoir secouru, sans vous je serais probablement mort d’ici quelques jours. Vous êtes mes sauveurs, je vous remercierai comme il se doit une fois que nous serons sortis de cet enfer.» Annonça-t-il avec un sourire radieux.

Dony se dirigea derrière son ami d’une démarche peu assurée. Il semblait encore terrorisé, les mains sous son menton. Lorsque son visage arriva dans la lumière, le garçon le plus jeune émit un petit miaulement apeuré, son binôme, quant à lui, tomba à la renverse en hurlant, tout en appuyant sur la détente de son arme. Le carreau parti très haut dans les airs, et vola au-dessus d’une dune de sable rouge dans un sifflement métallique.

« Huuuuuuuu…huuuuuuuuuu…huuuuuuuuuuu. »
- Tout va bien, tout va bien, répéta Henri à voix basse tandis que les enfants se relevaient, tout en posant discrètement une de ses mains sur la poitrine du géant, pour lui faire comprendre de rester dans l’ombre.

- C’est un Déformé ! Hurla le plus vieux des deux garçons, remettant l’arbalète en joue en direction de Dony, d’un air déterminé. Le doigt sur la détente.
Henri s’interposa.
« Arrêtez ! Il est avec moi, je veux le livrer à La Citadelle ! »
- Avec toi ?! T’en es un aussi !? Répondit-il, en mettant de nouveau en joue Henri.
- Non, je l’ai capturé, je veux l’amener à La Citadelle, il peut être utile dans les champs !
- Les champs ? Ya pas d’ça à La Citadelle. Comment t’es arrivé ici, avec c’monstre, et pourquoi qu’y t’as pas mangé l’aut ? Pis t’viens d’où pour palabrer d’cte façon ? J’aime pas tes jactances, un aveugle qui capture un Déformé ! T’es pas du Fourbi, poursur ! Cria le plus jeune des deux, en brandissant son collier orné d’une plume noire. Paseuk’ on l’saurait c’genre de zarberies ! Tu viens d’où ? Demanda-t-il en faisant un effort qui semblait surhumain sur sa diction.
- Il n’est pas agressif, il est même plutôt docile. S’il n’y a pas de champ, il pourra servir aux travaux de force. C’est lui qui a mis ces rochers devant l’entrée, pour m’empêcher de le livrer je suppose. Vous m’avez sauvé la vie, et maintenant vous voulez ma mort ? Arrêtez, calmons nous, il nous faut discuter. Depuis quand n’avez-vous pas mangé ?
- Kesseuk’ sa peut’faire ? On mange si on remplit la mission. C’tout. Et là, trouver des ressources dans l’bazar, dit-il en désignant leur abri, c’est la mission.
- Vous avez donc réussi, puisque vous nous avez trouvés ! J’ai toutes mes affaires dans l’abri, Ils vous acclameront, mais si vous me tuez, ou me blessez, je ne suis pas sûr de pouvoir garantir votre sécurité. Et non, je viens de La Centrale, je ne connais pas le Fourbi. Répondit Henri d’une voix forte, sûr de lui.

Les enfants restèrent muets une dizaine de secondes en se regardant d’un air à la fois victorieux et inquiet. Le plus vieux reprit la parole d’un ton dur.

« Et comment qu’on fait maint’nant, poureut’ sortireud’ la ? Pis si lui il sort eud’d’dans, il va nous tuer, moi je dis ils le veulent pas vivant ! On le ramène mort ! »
- Moi il ne m’a rien fait, je pense que si je suis avec vous, rien ne nous arrivera. Je vais passer par le trou, il sortira de lui-même, je pense qu’il ne veut pas que je m’échappe. Et on arrivera jamais à le porter jusqu’à La Citadelle si il est mort, il est trop lourd.

Les deux enfants acquiescèrent, même si l’inquiétude se lisait sur leurs visages. Henri se hissa péniblement jusqu’au trou. Dony voulut l’aider à monter, mais il le repoussa discrètement pour que les deux enfants ne remarquent rien de suspect.
Lorsqu’Henri réussit à sortir de l’abri, il chuta d’un bon mètre, mais se releva aussitôt, en secouant sa tunique poussiéreuse. Ses malformations étaient parfaitement couvertes, et personne n’aurait pu soupçonner qu’il n’était pas Normé. Il passait pour un vieillard, aveugle, pauvre et sans défenses.

Dony repris ses hululements sinistres dès qu’il ne vit plus son compagnon. Sa tête immense ne passait même pas dans le trou par lequel Henri était sorti de l’abri. Lorsqu’il se mit à grogner en se mordant l’index, les deux garçons eurent un nouveau mouvement de recul.
Une bonne chose, au vu de la puissance avec laquelle les rochers qui recouvraient l’entrée furent éjectés, pour laisser le passage ouvert au géant furieux.

Le carreau d’arbalète vola, et se ficha dans son épaule droite, ce qui n’eut pas l’air de le déranger. Il marqua un petit temps de pause, en regardant le projectile dans son épaule, la bouche ouverte, puis il se dirigea d’un pas rageur vers celui qui tenait l’arbalète, et tentait de recharger tant bien que mal, tremblant, le visage blême.
Le géant attrapa l’arme des mains de l’adolescent sans efforts. Elle avait l’air d’un jouet dans ses paumes démesurées. Il serra le poing, et elle se fissura, puis explosa en plusieurs morceaux de bois.
« Hhmpf. » Lâcha Dony, manifestement satisfait du résultat.
Il regarda à nouveau le carreau planté dans sa chair. La cotte de mailles avait réduit le choc, et la pointe ne s’était enfoncée que de quelques centimètres dans sa peau. Il la retira avec un petit grognement, puis la rendit à son agresseur médusé, en souriant nerveusement, comme si il voulait s’excuser d’avoir détruit son arme.
Puis il retourna calmement auprès d’Henri.
« Vous voyez, il ne fera de mal à personne ! Voilà comment un pauvre vieillard aveugle comme moi a pu capturer un géant ! » Annonça-il triomphalement.
Une fléchette se ficha entre les omoplates de Dony, une seconde vola jusqu’au torse d’Henri, stupéfait, qui perdit connaissance, assommé par le venin. Deux fléchettes supplémentaires dans le torse du géant eurent finalement raison de lui, il s’effondra, inconscient.

Les Rapaces étaient venus au secours des deux enfants.
Dernière modification par ChrisRuess le dim. 22 mars, 2020 2:38 pm, modifié 1 fois.
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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

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Chapitre 4 : Direction



La Souterraine


Son chapeau gris pale, brodé d’un fil doré « Stetson » était impeccable, et semblait venir d’une autre époque tant il contrastait avec le décor. Sa veste en cuir, où brillaient quelques médailles, ses bottes militaires et son treillis blanc taché de bleus verdâtres, ainsi que sa démarche rapide et assurée venait confirmer le fait qu’il n’avait rien à faire dans cet endroit.
Par terre étaient disposées des planches, pour la plupart pourries, de façon à ce que la boue n’empêche pas la circulation des rares habitants des environs. Des murs suintaient une matière visqueuse, semblable à de la bave, qui semblait provenir des pierres formant des amas cristallins qui défilaient dans le bord de son champ de vision.
Les couloirs étaient étroits, et pouvaient atteindre moins d’un mètre de large par endroits. Les galeries étaient nombreuses, creusées dans une roche granitique, et soutenues par d’immenses poutres métalliques prises dans la pierre, comme les racines d’un arbre.
L’air était chaud et humide. Evidemment, respirer sans un masque à oxygène était impossible, l’air était vicié, et très mal aéré. Une odeur rance et acide avait imprégné l’endroit.

L’écorce terrestre était devenue un refuge, puis un nid, et finalement, une fourmilière. Tout était réparti par niveaux, et chacune des quarante-six millions d’âmes qui peuplaient La Souterraine connaissaient leurs tâches quotidiennes selon leur emplacement de naissance.

Les ruines de l’Ancienne, New Delhi, étaient parsemées de campements aux airs paramilitaires qui couvraient les entrées de la cité.
Des miliciens améliorés étaient présents en masses, et la majorité portait le blason des Commandos, un ex-gang trans-humaniste aux activités plus ou moins douteuses qui cherchait à améliorer leur capacités physiques et sensorielles, avec comme unique objectif la survie.
Dorénavant, ce groupe était utilisé comme protection par les Dirigeants, ce qui avait eu pour mérite de mettre fin aux crimes divers perpétrés sur des sans-abris, devenus les cobayes des niveaux inférieurs…

Le premier niveau était consacré aux Nomades, dédiés à la recherche de ressources, ainsi qu’au repérage et à la gestion des mines d’Améthyste. Ces derniers n’étaient pas très heureux d’avoir vu arriver des miliciens criminels à l’extérieur pour assurer leur protection.
Tout ce qui était ramené du Premier devait passer par un contrôle de sécurité et une mise en quarantaine au Second, ou les Savants devaient identifier et archiver les objets ayant besoin de leur expertise. C’était aussi le pôle politique et juridique de la cité, les Dirigeants résidaient à l’Assemblée du Savoir, d’où émanaient toutes leurs décisions, tandis que les Gardiens jugeaient les criminels au temple des Justes.


Ensuite, le Troisième, le plus grand des étages, était consacré à l’exploitation des minéraux nécessaires à la fabrication d’énergie Oméga, qui étaient envoyées au laboratoire du Second pour être transformées, et stockées de nouveau au Troisième.

Le Quatrième était une prairie souterraine, un vrai bijou d’agronomie qui permettait aux habitants d’avoir des récoltes suffisantes pour non seulement nourrir la population mais également pour faire des réserves, ce qui permettait une capacité de survie non négligeable. C’était cette prairie qui avait fait grimpé la population de la Souterraine en flèche, et avait permis son développement extrêmement rapide.

Le Cinquième, prévu pour le logement et le commerce de proximité des ouvriers, fut supplanté très rapidement par le Sixième, conçu pour les mêmes raisons. Puis les niveaux inférieurs furent créés.
Le Septième et le Huitième n’étaient pas une initiative des Dirigeants.

Les habitants les plus pauvres s’étaient mis en tête de creuser de nouvelles galeries eux même, afin de construire leurs habitations. Malheureusement, l’écroulement d’une artère principale du Sixième arriva bientôt, due à l’erreur d’un sans-abri un peu trop ambitieux. Les Dirigeants décidèrent alors d’appeler la population à contribution pour construire le Septième.
Les Commandos investirent beaucoup dans le projet, et si on salua leur geste généreux, ce ne fut que de courte durée. Au bout de deux mois après la fin de travaux bâclés, la première vague de séquestrations sévissait déjà.
Les procédures judiciaires à l’encontre des responsables ne furent engagées que six années après, lorsque que les autorités trouvèrent leur laboratoire, et des corps déformés, sur lesquels des expériences inhumaines avaient été menées. Certains n’étaient même plus identifiables, tant ils ressemblaient à des monstres.

Entre temps, pour échapper au gang, certains avaient creusé des galeries extrêmement rudimentaires et bien cachées, ou ils vivaient désormais en reclus. Ce fut la naissance du huitième. On les voyait rarement monter jusqu’au Sixième, seulement pour acheter des stocks de nourriture avant de retourner se cacher. La grande majorité d’entre eux étaient reconnaissables aux mutilations, aux prothèses monstrueuses ou aux malformations qui marquaient leur corps déjà meurtri par leurs conditions de vie miséreuses.
Certains étaient devenus agressifs, à cause d’une nouvelle drogue de synthèse, probablement diffusée par les Commandos, pour toute vengeance. Plusieurs tueries et meurtres de sang-froid avaient déjà été recensés au Septième, et tous les agresseurs avaient étés abattus. Les consommateurs semblaient pris d’une rage meurtrière qui leur faisait oublier toute sensation de peur ou de douleur une fois en état de manque. Seule une blessure fatale les arrêtait.

Pourtant, il avançait, dans les galeries mal éclairées du Huitième, droit, sûr de lui, ses deux Makarov sur ses côtés, harnachés à son buste. Son regard était vif, perçant, mais reflétait le calme. Sa barbe et sa longue moustache rousse lui bouffaient le visage. Il ne s’était pas rasé depuis quelques années maintenant. En même temps, avoir l’air propre au Huitième était non seulement inutile, mais risquait également de compromettre sa couverture.

Une des galeries qu’il emprunta semblait être écroulée, et il s’arrêta devant l’amas de débris en tous genres qui trainaient sur le sol boueux, remua quelques décombres de vielles poutres en bois, quelques morceaux de toile, jeta un coup d’œil discret derrière lui, et souleva la trappe toujours couverte par un épais filet de camouflage. Cette dernière se referma automatiquement après son passage dans un cliquetis mélodieux qui indiquait la présence d’un verrou solide, et inviolable.

Le passage était encore plus étroit que les galeries. C’était une cheminée d’au moins cinq mètres qu’il devait descendre à l’aide de la petite échelle taillée dans la roche. Il finit par déboucher sur une salle en forme de cloche, remplie de matériel informatique, éclairée par un lustre d’où émanait une lumière violette caractéristique de l’énergie Oméga.
Des câbles trainaient par terre et au plafond, quant aux murs, ils étaient recouverts d’un planisphère étrange, encore vierge par endroits, recouvert de fils de différentes couleurs, de punaises, de notes et autres gommettes.
Un petit escalier menait à une estrade, ou étaient disposés une chaise, un bureau, une étagère, un frigo, un réchaud, un lit et une table basse.

Le lieutenant-colonel Lyame était enfin chez lui.
Il déposa ses courses fraichement achetées aux Producteurs du Quatrième, et posa ses deux pistolets sur le dossier de la chaise, avec précaution. Il s’assit, et fouilla dans le sac pour en sortir son contenu. Des conserves de légumes en tout genre, un jambon, des confitures, du pain, des pâtes, du lait, de la farine, des œufs, des capsules d’eau, une boite de cigarettes et de la bière. Il s’affaira à ranger sa nourriture et ses boissons dans le frigidaire, puis se dirigea, une aqua-capsule en bouche, vers les écrans, et la radio qui constituaient son centre de commandement.

Ceux qui étaient de simples Nomades n’avaient que quelques jours, tout au plus, pour effectuer leur mission avant de rentrer à La Souterraine. Leur objectif principal était de récupérer des ressources à l’extérieur de la cité, et de les ramener, avec, si possible, des informations sur les éventuelles mines exploitables de la région.
Cependant, son unité était composée de l’élite des Nomades. Des Explorateurs. Leur objectif était différent selon leur unité et leur position, et tous avaient leur domaine de compétence bien spécifique.
Recensement des espèces, disparues, en voie d’extinction, ou mutante ; analyse topographique au sol, et géographique depuis les airs, avec en option : observation du climat, et de la composition de l’atmosphère ; observation des zones d’activités hors clôtures, et renseignements sur les tribus Déformées ; prises d’échantillons spécifiques au sol, puis analyse de minéraux, végétaux et animaux mutants ; étude des différents écosystèmes, de leurs mutations et enfin ; élaboration d’un antidote stabilisant l’évolution du pathogène.
Voilà autant de missions que seuls trente Explorateurs devaient mener à bien.
Six unités de cinq Explorateurs, tous travaillants à un endroit spécifique du globe, mais en contact radio permanent avec le reste de leur unité.
Quant à lui, Edwin Johnson Lyame, il devait diriger ses troupes du mieux possible, depuis les tréfonds de la Souterraine, pour arriver à obtenir un maximum d’informations vitales à la survie de l’Humanité.

L’époque où il n’était qu’un jeune officier du Renseignement Mondial lui semblait lointaine à présent, mais il se rappelait avec une précision étonnante du jour de l’annonce de son départ pour la Souterraine. Il s’était senti fier, honoré de la confiance que le Sénat Global lui témoignait.
Il devait partir de rien, et tout construire pour une mission décisive. Le projet « E.V.O.L.V.E. » ayant dû être arrêté, du fait de la perte du Flotteur en 2081, ainsi que de la majeure partie de l’équipe, un nouveau projet devait remplacer l’ancien, malgré les efforts incroyables du professeur Falchet, ce dernier n’était plus en mesure de répondre aux attentes d’une telle mission.
Ed devait recruter des membres pour son équipe. Des personnes de confiance, capables, physiquement, mentalement et intellectuellement de remplir des missions spécifiques. La Souterraine n’était pas un endroit bénin pour établir un quartier général.
Pour commencer, sa planque était parfaite, ensuite, les meilleurs savants étaient à La Souterraine, et la capacité paramilitaire de la cité n’était pas négligeable. Il avait l’abri, et la main d’œuvre à proximité. De nombreux candidats se présentèrent, et le recrutement se termina rapidement, sans attirer l’attention, dans le plus grand secret.

Il avait toujours vu ça comme une chance, même après vingt années de service au Huitième, avec des reclus drogués, modifiés et agressifs pour seuls voisins, il le savait : si l’Humanité avait un espoir, c’était lui, et ses unités.
Tout n’avais pas été simple, loin de la même. La perte tragique de certains Explorateurs l’avait contraint à affiner son recrutement, pour essuyer le moins de sang possible sur sa conscience déjà bien entachée.
C’est lors du troisième recrutement qu’il avait rencontré Liz. Une des meilleures Exploratrice que cette planète abritait, sans aucun doute. Elle n’avait pas dix-huit ans quand elle s’était présentée à l’entretien. Pourtant, elle avait battu les records de deux des huit épreuves physiques, cinq records sur huit épreuves mentales, et le troisième meilleur quotient intellectuel de toutes ses recrues. Aussitôt, il l’engagea, et commença sa formation de deux ans sur le terrain. Elle avait été formée aux Sciences par une personne de sa famille, une personne importante, qui faisait partie de la cellule « E.V.O.L.V.E », le professeur Workensen, physicien, chimiste, éthologue, inventeur, géologue, philosophe et agronome. Un des plus grands scientifiques que le monde ait porté, souvent comparé à Einstein dans les années 2060, pour son travail sur l’extraction et la transformation de la citrine issue de l’améthyste, ayant permis la découverte de l’énergie Oméga.
Son arrière-petite-fille avait, de toute évidence, héritée des attributs intellectuels de son aïeul. A la fin de sa formation, après deux années de terrain avec un Explorateur aguerri, elle avait conçu un ballon sonde dirigeable, totalement autonome en énergie, et équipé d’appareils photos assez puissants pour cartographier la Terre depuis les airs, ce qui avait permis une avancée considérable des recherches, ainsi que la découverte des villages Déformés et d’espèces animales et végétales encore inconnues.
Le lieutenant-colonel alluma une cigarette, pris une énorme bouffée, et laissa la fumée s’échapper lentement de son nez et de sa bouche. Il était penseur.
Liz était devenue comme une fille pour lui, et lui comme un père pour elle. Les Explorateurs étaient une famille. La survie avait la faculté de rendre les liens entre humains extrêmement puissants, dans l’amour comme dans la haine. Lorsque les Explorateurs se retrouvaient seuls, en mission, avec pour seul contact avec le reste de leur équipe une radio, ces liens devenaient primordiaux, et indestructibles.
Une sonnerie sortit le militaire de ses songes. La radio de Marcus, Explorateur dont la mission était l’observation et le renseignement concernant les tribus Déformées du Grand Désert, était en train d’émettre. La réunion quotidienne n’était prévue que deux heures plus tard. Et Marcus était un soldat, ponctuel, avisé, et un stratège militaire hors pair. Son appel n’avait rien de normal.
Ed se dirigea vers une console remplie de boutons, et appuya sur celui, clignotant, qui correspondait à la radio de l’Explorateur. La voix sèche, grave et tendue de Marcus résonna dans la salle.

-…state un déplacement anormal des populations Déformés. Des colonnes de plusieurs centaines d’individus semblent se diriger vers la Citadelle. Impossible de connaitre leurs intentions, mais cette formation rappelle celle d’une armée en marche rapide, ou un déplacement de réfugiés. D’après leur vitesse, j’estime leur arrivée d’ici quarante-huit heures. De plus, les Déformés résidants dans le Grand Désert semblent se regrouper, tout en se dirigeant vers la Centrale. Là encore, impossible de connaitre leurs intentions, aucune formation de déplacement n’est mise en place, c’est totalement anarchique, mais leur vitesse est conséquente. Je pense qu’ils seront à la Centrale d’ici soixante-douze heures au maximum. A vous.
- Une idée de la cause de leurs déplacements ? A vous. Demanda son supérieur.
- Pour ceux du Grand Désert, je n’ai aucune explication à vous fournir, mais certains villages portent des traces de combats violents. Aucune idée sur ce qui a pu attaquer ces villages, mais ceux du Grand Désert auraient été incapables de faire des dégâts pareils. Je pense qu’il y a des réfugiés, mais je n’ai aucune certitude sur ce point. Il est également possible que les réfugiés soient tous morts, ou enrôlés de force dans une armée. A vous. Répondit Marcus à travers les enceintes qui grésillaient.
- Si des réfugiés Déformés se rendent à la Citadelle, ils ne trouveront que la mort. Et je pense qu’ils s’en doutent, c’est pour cela qu’ils ne sont jamais rentrés en contact…alors pourquoi se déplaceraient-ils maintenant, si ce n’est pour attaquer ? A vous.
- Pour fuir mon Lieutenant, annonça du tac au tac la voix du stratège. Mais je ne suis pas certain de leurs intentions, et je n’ai pas d’informations suffisantes pour identifier la menace. A vous.
- Bien, très bon boulot Marcus. Restez en dehors du conflit, ces informations sont suffisantes pour le moment. Et faites attention à vous. On se retrouve pour la réunion afin de trouver une solution avec le reste de votre équipe. Je vais contacter les autres, la réunion est avancée, dans H moins un. Terminé.
- Bien reçu, terminé.

La radio grésilla, et la transmission fut coupée. Sa cigarette, préalablement allumée, était déjà consumée d’un tiers. Il retira dessus, puis l’écrasa encore fumante dans le cendrier.
Il appuya sur un nouveau bouton, et pris la parole.

« Ceci est un message pour l’unité de Renseignements et d’Observation, réunion avancée à H moins un, ne soyez pas en retard les enfants ! Terminé. »

Puis il se laissa tomber, perplexe, sur l’assise de son fauteuil.
C’était la première fois que les Déformés quittaient leurs villages, il y avait forcément une raison. Et surtout, pourquoi marchaient-ils vers la Citadelle et la Centrale, après plusieurs dizaines d’années sans même une tentative de contact ?
Il espérait que Marcus trouve une réponse en moins d’une heure pour avoir de nouvelles informations lors de la réunion, mais il savait qu’il était impossible que l’Explorateur puisse y arriver. Et il lui avait demandé de rester prudent, hors du conflit.
Il se leva de nouveau, et s’approcha de l’énorme carte d’explorations.

Il analysa le planisphère une bonne dizaine de minutes, dans l’espoir de trouver une réponse dans l’amas de notes punaisées en annexes, sur le mur. Mais rien. Tout ce que son équipe avait rapporté n’expliquait en rien ce comportement nouveau. De plus, si les Déformés du Grand Désert n’étaient pas responsables des attaques sur les villages, alors qui ? Ou quoi ?

Aucun Gouvernant, de toutes les Cités-Etats du monde, n’étaient au courant de l’emplacement de ces villages, et seule quelques dirigeants de la Centrale étaient au courant de leur existence. Ce n’était donc pas une attaque décidée par la Citadelle, ou la Centrale, ce qui aurait expliqué un mouvement en direction de ces villes.
Est-ce qu’un prédateur encore inconnu aurait pu déloger les Déformés de leurs villages ? Il en doutait fort. Les Déformés étaient les seuls habitants du Grand Désert, et ils étaient établis là depuis des dizaines d’années. Qu’une créature, ou même une meute de créatures mutantes puisse les faire fuir n’avait aucun sens.
Et quelle mission donner à ses troupes ? Est-ce qu’il n’était pas temps de regrouper les unités ? Non, ça ralentirait le rythme des explorations, et leur travail était fructueux, tous les jours des nouvelles arrivaient, avec des progrès dans chaque unité. La Centrale était satisfaite de leur travail, ils ne pouvaient pas se permettre de ralentir maintenant. Et puis, la Citadelle était lourdement armée, et la Centrale bien protégée. Ils n’avaient pas besoin d’équipe d’Explorateurs dans ce conflit. Mais qui d’autre qu’un Explorateur pouvait arriver à comprendre ce qui se passait. Et le regroupement des unités augmentait leurs capacités d’action et de réflexions.

L’heure passa très vite, au rythme des interrogations inextricables qui chahutaient les neurones du lieutenant-colonel Lyame. Il alluma une nouvelle cigarette, et s’assit de nouveau devant la console. Il appuya sur le bouton qui relayait ses communications à l’ensemble de l’unité Renseignement et Observation, afin qu’il puisse faire leurs réunions, une fois par semaine, dans des conditions optimales.
« Unité R/O, au rapport. » Annonça-il avec une voix protocolaire.

Une voix grave et féminine fut la première à répondre, suivie de près par ses camarades.

- Jess, au rapport mon Lieutenant.
- Sulvin, au rapport mon Lieutenant.
- Wilzon, au rapport mon Lieutenant.
- Mina, au rapport mon Lieutenant.

Un silence pesant s’installa, et se transforma, au fil des secondes, en malaise clairement visible sur le visage d’Edwin. La voix tremblante de Jess résonna dans la salle.

- Où est Marcus mon Lieutenant ? A vous.
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

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Chapitre 5 : Exploration



Forêt Aquatique.


La radio s’alluma automatiquement et émit un son strident par trois fois, ce qui réveilla Liz instantanément. Elle s’assit sur le plancher du ballon-sonde, les yeux plissés, lorsque la radio crépita.
« Unité C, Exploratrice Liz, au rapport. »
Elle attrapa la radio d’un mouvement de bras rapide et précis, comme une réaction automatique.

- Au rapport mon Lieutenant. Que me vaut l’honneur de cet appel à une heure si matinale ? A vous, répondit la jeune femme d’un ton enjoué, malgré ce réveil brutal.
- On a un problème dans le Grand Désert, Marcus est injoignable, mais sa balise est toujours active, et ne bouge pas. Sa dernière transmission rapportait des faits de combats chez les villages Déformés, ainsi qu’une vague de déplacements, divisées en deux groupes, l’un dans la direction de la Citadelle, l’autre du côté de la Centrale. J’ai averti mes contacts dans les institutions politiques des deux cités, elles sont en train de se préparer à une menace éventuelle. Votre mission sera de retrouver Marcus, et de le ramener au Rempart avec le plus d’informations possibles. Votre vision aérienne et votre connaissance du terrain vous confèrent un avantage non négligeable. Vous partez immédiatement. Des questions ? A vous.
- Les Déformés quittent leurs villages à cause des combats ? Demanda la jeune femme, étonnée, et pourquoi se dirigent-ils précisément vers les cités ? Ils nous ont toujours évités. A vous.
- Aucune explication claire, Marcus n’avait aucune idée de la menace, il m’a transmis le fait que ceux du Grand Désert n’étaient pas en mesure de faire autant de dégâts aux villages. Des idées à soumettre ? A vous.

Liz ne répondit pas. Un Prédateur ne serait jamais assez puissant pour faire plus de dégâts que ceux du Grand Désert. Un conflit interne ? Non. Il n’aurait concerné qu’un seul village, et les Déformés du Grand Désert ne seraient pas concernés, alors pourquoi ce déplacement ? La voix du Lieutenant-Colonel la tira de sa réflexion.

- Marcus pensait également à une fuite, mais n’avait pas de visuel sur une quelconque menace. A vous.
- C’est l’explication que je trouve la plus rationnelle, mais elle ne nous apprend pas grand-chose. Et fuir vers un nouvel ennemi, c’est un suicide, pas une fuite, pourquoi ne sont-ils pas partis au sud ? A vous.
- Ils ne savent peut être pas que nous sommes ici, nous n’avons eu aucun contact avec eux depuis les Pluies Pourpres il y a plus de vingt-cinq ans. Cette information sur une fuite potentielle nous apprend que les villages sont probablement vides, et qu’ils contiennent très probablement des réponses. Cependant ! Interdiction formelle de poser le pied à terre. Si vous avez un visuel sur un élément suspect, ou étrange, vous transmettez l’information et vous dégagez, reçu ? A vous.
- Bien reçu mon Lieutenant, il me faut sa dernière position. A vous.
- Peupa…popeuaa !
- C’était quoi ce bruit ?! A vous ?
- Un oiseau mon Lieutenant, rien de grave, pas d’inquiétude. A vous.
- Ok, soupira Ed, je vous envoie le point de dernière émission, vous y serez dans moins de quarante-huit heures. Terminé
- Reçu mon Lieutenant, terminé, confirma Liz à la hâte.

La radio s’éteignit avec un nouveau crépitement.
Liz enleva sa main de la bouche de son amie qui semblait être très agitée, laissant apparaitre un large sourire. Sa silhouette bougeait d’une façon si désordonnée qu’on aurait pu la confondre avec celle d’une joyeuse marionnette dirigée par un ivrogne avec le hoquet.

« Popaaap ?!! »
Elle s’avança, sur la pointe des pieds, avec une démarche maladroite, les pieds rentrés vers l’intérieur, les bras repliés à la manière d’un t-Rex.
« Khoée…tu vas finir par me faire virer avec tes conneries ! » Explosa Liz, le doigt levé en guise d’avertissement, plus risible que crédible.
L’intéressée rigola, en se cachant le visage derrière une de ses mains, tandis que la seconde saisit l’avant-bras de Liz d’un geste approximatif, mais déterminé, pour le placer à l’arrière de sa tête. Elle agita son bras de manière à faire bouger la main de l’Exploratrice dans sa tignasse de cheveux bruns, puis leva finalement la tête d’un mouvement brusque, et planta ses yeux d’un noir profond dans ceux de Liz, un immense sourire sur le visage.
Liz caressa doucement ses cheveux bruns, et Khoée sembla se calmer, malgré ses mouvements toujours raides et saccadés. Un doux sourire apparut sur le visage de Liz et se refléta dans les yeux brillants de la jeune femme.

« Tu finiras toujours par m’avoir hein ? » Murmura Liz d’un air exaspéré en essayant de se défaire de son étreinte. Khoée gloussa de nouveau, et colla sa tête contre la poitrine de son amie, les yeux rieurs.

« Bon, on doit partir, on retourne dans le Grand Désert…il y a quelqu’un qu’on doit aider la bas, tu comprends ? Comme toi, il est tout seul et il a besoin d’aide. »
Khoée ne bougeait plus, et la regardait à présent avec un air ébahi, les sourcils froncés, ses grands yeux remplis de questionnements qu’elle n’arriverait jamais à formuler.

********

Liz l’avait recueillie alors qu’elle analysait des zones mortes du Grand Désert. Un soir, en analysant une suite de photographies prises depuis les airs, elle avait distingué une forme humaine, en chien de fusil, seule, au milieu du sable, à quelques kilomètres de sa position.
Lorsqu’elle était retournée sur le site, pensant récupérer des échantillons ADN de Déformé, elle la trouva, inconsciente, à moitié recouverte par le sable, dans un état de déshydratation morbide, avec un pouls très faible. A première vue, elle avait l’air normale. Elle devait avoir son âge, et aucune malformation n’était présente sur son corps ou son visage brulé par le soleil. Son collier semblait indiquer son nom : « Khoée ».
Liz l’amena à bord du ballon sonde et préleva un échantillon d’ADN. Elle constata avec surprise que rien qui n’indiquait une mutation due au pathogène dans son génome. Elle contacta aussitôt le Lieutenant-Colonel.

Les ordres étaient simples. Interroger cette fille sur sa présence dans une zone aussi isolée, inhabitée et dangereuse du monde. Sa survie était importante, pourquoi rien n’apparaissait aux analyses si elle vivait chez les Déformés ? Liz attendit que sa patiente se réveille.

Deux jours plus tard, elle lui posa la question : « Qui est tu ? »
Ce à quoi Khoée répondit avec son traditionnel « Peupaaa », quelque peu ramolli par son réveil. Elle ne mit que quelques secondes pour agiter frénétiquement ses bras et ses jambes, la bouche déformée par la peur et commencer à hurler.

Liz eu beau se protéger les oreilles, la voix stridente de la jeune femme lui écorchait les tympans, si bien qu’elle vacillait, comme si son oreille interne était touchée. Elle était complètement désorientée.
Dans un mouvement désespéré, elle libéra difficilement de ses liens la fille qui la fixait, ses yeux sombres remplis de colère et de larmes, toujours en train de crier.
Lorsqu’elle eut finit de détacher le dernier lien, voyant que son otage ne se calmait pas, elle se mit en position pour riposter.
Une bonne chose vu la vitesse à laquelle un coup de poing imprévisible vint heurter son avant-bras, manquant de quelques centimètres sa tempe.
Elle déclencha un coup de pied pour qu’il aille taper les cotes de la fille, mais cette dernière bougeait d’une façon si aléatoire, à la manière d’un maitre de boxe de l’homme ivre, qu’elle la manqua alors qu’elle se rua sur Liz.
Deux mains à l’allure de serres, les doigts raidis, lui griffèrent le visage, manquant de l’éborgner.

Elle tomba à la renverse, poussée par son adversaire qui s’effondra sur elle. Sa tête tapa lourdement le sol, et le front de Khoée rencontra brutalement son arcade sourcilière. Elle s’évanouit.

Lorsque Liz se réveilla, du sang séché sur le visage et du sang frais sur ses lèvres, Khoée était en train de la secouer. La haine et la colère qui transparaissaient auparavant sur son visage s’étaient transformées en inquiétude. Le nez de Liz saignait, mais, par chance, n’était pas cassé. L’Exploratrice sonnée se remit debout, et Khoée se recroquevilla, honteuse, sous ses mains, accroupie dans un coin du ballon-sonde, lâchant de petits cris aigus par intermittence. Liz se dirigea vers elle d’un pas déterminé, la mâchoire serrée, mais réfréna son envie de la jeter par-dessus bord.
Elle devait rester vivante, c’était les ordres. Mais, manifestement, elle était Déformée, quoi d’autre pouvait expliquer ce comportement ? Le fait que rien ne soit visible sur les analyses était anormal. Peut-être qu’elle devait refaire des analyses, mais comment, maintenant qu’elle était détachée ? Et si c’était quelque chose de nouveau, une déformation due à un pathogène inconnu ? Et, par-dessus tout, pourquoi ne l’avait-elle pas tuée pendant qu’elle était inconsciente ?
Elle secoua la tête, abasourdie par autant de questions qui la paralysait. Elle se dirigea vers sa radio en surveillant Khoée du coin de l’œil, et transmit les derniers évènements à son supérieur.

Le haut-parleur grésilla furieusement : « Vous êtes blessée !? A vous ! »

- Rien de grave mon Lieutenant, elle avait l’air plus terrorisée que réellement agressive, je pense que cette attaque était une réaction due à son instinct. Mes blessures sont superficielles, elle m’aurait tuée si elle avait voulu. A vous.
- Son instinct ? Elle n’est pas comme nous ? Vous m’aviez transmis des analyses qui ne montraient rien d’anormal. Et comment ça elle aurait pu vous tuer ? Il me faut des informations plus claires, concentrez-vous. Qu’a-t-elle dit ? A vous, répondit Ed d’une voix dure.
- J’ai peut être fait une erreur dans mes analyses, j’ai dû manquer quelque chose. Elle n’a prononcé que des cris, elle ne semble pas connaitre de mots, ou alors je ne connais pas ce langage. Sa position ainsi que ses mouvements sont étranges, elle semble secouée de spasmes. Je pense à un choc post traumatique. J’ai également envisagé la possibilité qu’un second agent pathogène se développe. A vous.
- C’est une possibilité en effet, souffla le Lieutenant-Colonel, qu’avez-vous envisagé par rapport au sujet ? A vous.
- J’ai envisagé de vous transmettre les informations et d’attendre vos ordres, actuellement elle n’est pas agressive, elle est dans un coin de la pièce comme un chien battu. A vous.

Ed soupira, et marqua un long temps de silence.
« Vous refaites des analyses, vous me les renvoyez, si elle est Déformée, vous la tuez. Si vous détectez un autre pathogène, vous la tuez, et vous poursuivez vos études sur votre sujet. Si c’est quelque chose d’inconnu, qu’il n’y a pas d’explications…soit vous la tuez, et vous la ramenez à la Centrale pour qu’on fasse des tests approfondis sans risquer une agression, soit vous l’abandonnez si vous pensez qu’elle ne présente pas d’intérêt pour les Savants. Des questions ? A vous. »
- Lieutenant, si cette personne est en état de choc post traumatique, la supprimer nous priverait d’informations, s’indigna Liz. A vous.
- Actuellement, c’est le post choc traumatique supposé qui nous prive d’informations, dont on ignore l’importance. Si elle n’est pas agressive, vous pouvez essayer de la faire reparler, mais j’ai peu d’espoir concernant cette solution. Je ne peux qu’aiguiller votre choix, au vu des circonstances. Une initiative personnelle à me soumettre ? A vous.
Liz marqua en temps de pause, puis reprit.
- Je demande une semaine pour faire la réunion, en parler à l’équipe, refaire mes analyses et attendre un possible rétablissement du sujet. A vous…Lieutenant ? A vous.
- Semaine accordée. Terminé, répondit Ed d’un ton sec.
- Reçu, terminé, conclut timidement Liz.

La semaine passa bien trop vite pour que Liz arrive à comprendre quoi que ce soit aux analyses de sa patiente. En effet, elle avait comparé à nouveau le génome de Khoée avec un génome Déformé, et elle ne présentait aucune mutation due au pathogène. Même après des tests avec une cinquantaine d’échantillons Déformés, ses analyses étaient bonnes. Liz savait qu’elle avait affaire à quelque chose d’inconnu.

Elle compara alors son génome avec celui de sa patiente. A première vue, rien ne semblait poser de problème. Elle passa des nuits entières à essayer de comprendre quelle était la différence entre son génome et celui de son sujet, qui ne présentait pas de signes de rétablissement au niveau cognitif. Elle était toujours apeurée, mais tentait de communiquer avec Liz, en émettant des petits cris dont l’Exploratrice ne comprenait pas le sens, s’il y en avait un. Liz ne l’avait pas enfermée, ou entravée à nouveau. L’expérience de ses cris horribles l’avait convaincue de laisser Khoée déambuler sur le ballon-sonde, de toute manière, elle ne pouvait pas s’échapper, leur véhicule étant situé à plusieurs centaines de mètres du sol. Elle avait récupéré quelque uns de ses cheveux coupés très courts, ce qui lui avait permis de refaire des analyses ADN sans avoir à reprendre du sang à son sujet. Elle avait été rasée, ce qui indiquait un lien certain avec quelqu’un d’humain, qui l’avait probablement abandonnée.

Lors de la réunion, le reste des membres de son équipe désapprouvèrent la décision de Liz. Une personne porteuse d’un pathogène, quel qu’il soit, présentait un risque de contamination, et risquer de perdre une Exploratrice, de plus, une des meilleures, ne faisait pas parti des plans. Le vote fut sans appel. Khoée devait mourir, une semaine de sursis, c’était déjà de trop.
Ce fut six jours plus tard que Liz trouva la réponse à ses questions. Le chromosome 15 était porteur d’une anomalie. Deux gènes de la région 15q11-q13 étaient absents, ce qui avait eu pour conséquence de faire muter d’autres gènes de cette partie du chromosome. La seule explication de cette délétion des gènes était une maladie génétique.
Elle n’était pas Déformée, seulement atteinte d’une pathologie rare, surement inconnue. Ce qui n’avait aucune utilité pour le Lieutenant-Colonel, ou le reste de son équipe. Il n’y avait pas de risques de contamination, une pathologie génétique n’est pas contagieuse. Mais les ordres étaient clairs, l’Equipe en avait décidé ainsi. Liz devait l’abandonner à une mort certaine. Les Explorateurs se devaient d’être des soldats raisonnables, quels que soit les sacrifices à faire pour accomplir leur mission, mais Liz rechignait. Quelque chose n’allait pas.
Elle avait déjà tué, enlever la vie faisait partie de leur entrainement, cependant, elle sentait que le regard profond de cette fille allait hanter ses nuits, à contrario de ses précédentes victimes. Etudier son comportement et cette pathologie n’allait pas constituer un fardeau, mais plutôt une nouvelle mission. Après tout, elle était complètement capable de travailler sur l’élaboration d’un traitement à cette pathologie. Sa mission d’Exploratrice constituait une énorme part d’observation et de prises de photos, pour ensuite en faire des cartes sur lesquelles étaient visibles des zones de vie, de mort, de danger et de ressources exploitables. Rien ne l’empêchait de travailler sur le génome de Khoée en plus.
Et s’il était possible qu’elle parle ? Et si elle détenait des informations capitales, et que cette maladie était une manière de crypter un être humain, pour qu’il ne puisse pas parler ? Des faits similaires lui avaient été rapportés à la Suspendue, quelques mois plus tôt, et il était certain que quelqu’un avait été en contact récemment avec Khoée.
Il y avait son collier, et le fait qu’elle avait été rasée, qui constituaient des éléments flagrants de contacts. Restait à trouver qui l’avait abandonnée, et pour cela, il fallait qu’elle parle.

Elle saisit de nouveau la radio, presque tremblante.

« Exploratrice Liz, unité C, au rapport mon Lieutenant. Je vous envoie les analyses complémentaires de mon sujet. Elles mettent en évidence une pathologie génétique rare, ou inconnue. J’ai éliminé le sujet par conviction qu’il n’était pas utile. Terminé. »

Elle reposa le micro rapidement, le visage blême. Elle se retourna lentement vers Khoée, les yeux dans le vide. Elle venait de désobéir pour la première fois à un ordre du Lieutenant.

*******

L’aube se levait à présent, projetant ses couleurs verdâtres striées de rouges orangés acides entre les roseaux immenses de la Forêt Aquatique.
Les panneaux solaires du ballon-sonde brillèrent de mille feux lorsque qu’il changea de cap pour faire route vers le Grand Désert.

Il était magnifique. Dire que les premiers ballons sondes n’étaient que des petites alvéoles blanches capables de monter à seulement quelques centaines de mètres de hauteur, c’était à peine croyable à la vue de l’hexagone volant de plus de cinquante mètres de diamètre, soutenu par un ballon immense, lui-même relié à un petit ballon, qui servait de sonde.

Deux compartiments distincts à l’allure de bungalows étaient les seuls endroits habitables du ballon-sonde. Un pour vivre, avec une cuisine, un lit, un bureau, des toilettes, une salle de bain, le tout regroupé dans une douzaine de mètres carrés. Le second compartiment était bien plus imposant. C’était le labo, là où elle recevait les photos émises par l’appareil surpuissant de sa propre création, placé sous la plateforme. Des piles de notes étaient entassées sur le bureau, et le tableau blanc était recouvert d’algorithmes.
Fioles, microscopes, scalpel, kits de survie, journal de bord, table d’opération : tout dans ce qui composait sa vie d’Exploratrice était dans ce compartiment du ballon-sonde. Une sorte de jardin secret pour scientifique, éclairé par un néon bleuté.
La plateforme était bardée de plusieurs rangées de panneaux solaires et lunaires, servant à l’alimentation de la flamme. La chaleur reçue par les panneaux solaires était transmise au système d’allumage, qui chauffait un enduit inflammable, et dont l’intensité était contrôlée par un système de soufflets, ce qui permettait au ballon de flotter à une hauteur de plusieurs centaines de kilomètres. Une immense turbine, dirigée par un gouvernail, située sous la plateforme lui permettait également de se déplacer assez précisément pour éviter les incroyables végétaux de la Forêt Aquatique.

Tout ici était immensément grand. Les plus hauts bâtiments de l’Ancienne faisaient pale figure devant ces végétaux si imposants que certains couvraient le ciel sur des dizaines de kilomètres carrés. Les arbres aux branches dures comme la roche, ornés de leurs feuillages aux allures préhistorique, regorgeants d’espèces animales encore inconnues et de fruits mutants exotiques, laissèrent bientôt place à l’immense étendue émeraude qui faisait face à Liz et Khoée, les cheveux dans le vent.

L’océan Atlantique avait maintenant un autre nom, qu’il portait à merveille : L’Antique. Une ruine d’océan. Une étendue d’eau poussiéreuse et si opaque que la lumière du soleil ne passait pas au travers. Sa couleur verte était le résultat de la réaction chimique due aux dépollutions et autres manipulations expérimentales épandues dans l’air par les humains des dizaines d’années plus tôt.
La fine couche ocre qui recouvrait autrefois les océans s’était gélifiée, puis de nombreuses algues avaient proliféré dans ce nouvel écosystème. Liz avait eu la chance d’apercevoir de très rares formes de vie sur L’Antique, grâce à son appareil. Bien que la surface de l’eau soit trouble, et que les informations sur les créatures marines étaient extrêmement limitées, des créatures semblables à des lions de mer, très élancés, à la manière des lévriers, avec un pelage noir, semblaient avoir établi une colonie près de la Vielle Ile, et se reposaient sur les rochers.

La nuit était belle, sans nuages. Elle semblait être une des seules choses immuables de cet univers. Un drap noir enveloppait tout, et, au fur et à mesure que les derniers rayons du soleil disparaissaient derrière l’horizon, et que les Prédateurs commençaient siffler gaiment, le ballon-sonde atteignait peu à peu le rivage. L’eau verte s’était transformée en un marais teinté d’orange. A certains endroits, des épaves de porte-avions rouillés recouverts de vase perçaient la surface de l’eau pour finir par être recouverts de mousse brune et de champignons. Liz avait également repéré des espèces de crustacés exceptionnellement grandes sur certaines de ces rives, malheureusement, sa mission n’était pas de ramasser des crevettes géantes pour les étudier.

Elle avala la capsule de nourriture hebdomadaire avec son café, et se posa à son poste d’observation matinal, songeuse. Khoée ouvrit un œil, et manqua de tomber du hamac que lui avait fabriqué Liz.
« Héhai…popeupeupa. » Lacha Khoée à voix basse, visiblement mal réveillée.
- Tiens, prend ton café, répondit Liz en la servant.

Khoée se frotta les yeux, puis saisit le café des deux mains, pour que ses mouvements incontrôlés ne le renverse pas, et vida sa tasse d’une traite, en essayant de refreiner ses tremblements. Elle reposa la tasse d’un mouvement sec, et tourna son attention vers l’Exploratrice plongée dans ses pensées.
La radio crépita.

« Message à tous les Explorateurs ! Les Déformés n’attaquent pas la Citadelle, mais des campements ont été érigés dans la zone explorée, et ont été repérés ce matin par des habitants du Fourbi. La Centrale à subit une attaque, et essuyé de lourdes pertes malgré avoir réussi à faire battre en retraite les Déformés, il apparait que nous n’étions pas préparés convenablement face à la menace réelle. Ils n’ont pas véritablement de formation militaire, mais sont plus nombreux, et très agressifs. N’allez pas vers la Citadelle, ou la Centrale. Je répète. Interdiction formelle de s’approcher de ces deux Cités Etats. »
Ed marqua un temps de pause.

« Exploratrice Liz. Vous devez retrouver Marcus coute que coute, les informations qu’il détient sont capitales. Personne ne comprend ce qu’il se passe, les dirigeants de la Centrale sont aux abois, et la cité n’est pas prête pour un siège, ça pourrait mal tourner. La Citadelle refuse d’envoyer ses troupes et préfère protéger le Fourbi face à la menace éventuelle. Dans combien de temps serez-vous sur zone ? A vous. »
- Sur zone dans quatre heures mon Lieutenant. A vous.
- Des que vous localisez Marcus ou quelque chose de suffisamment suspect pour mériter une intervention, vous transmettez l’information. Vous aurez de nouveaux ordres suivant l’évolution de la situation. Terminé.
- Bien reçu mon Lieutenant. Terminé.

La voix tendue de son supérieur n’annonçait rien de bon. Lorsque le Grand Désert apparut, le paysage chaotique confirma les inquiétudes de Liz.
ChrisRuess

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Chapitre 6 : Découverte




Grand Désert

Le sol semblait bouillir. Des flaques noirâtres maculaient la terre, et des bulles éclataient lentement, perçant la surface, projetant une matière semblable à de la boue. Les projections fumaient au contact de l’air, et consumaient le sol en retombant, comme si il s’agissait d’une sorte d’acide gélatineuse.

La mâchoire de Liz se décrocha et resta ouverte quelques secondes, ses yeux reflétant la terreur qui émanait de ce phénomène inconnu.
Quelques mois plus tôt, elle survolait le village Déformé qui surplombait fièrement les dunes, comme pour montrer à la nature qu’ils étaient toujours là, vivants.
Il ne restait que des ruines, des poutres massives, gravées de motifs étranges semblables à des dessins d’enfants qui constituaient autrefois les palissades du village, et dorénavant disparaissant peu à peu dans cette mélasse couleur nuit qui consumait tout autour d’elle. Les dunes elles-mêmes s’écroulaient, venant nourrir le flot fumant de matière progressant inexorablement à l’intérieur des terres.

Le phénomène semblait se propager sur toute la côte du continent, formant une immense tache noire sur le littoral absorbant tout ce qui se dressait sur son passage.
Une fumée jaune caressa les narines de l’Exploratrice et de son amie avec une odeur âcre, rappelant celle du souffre, de la cendre froide et du métal rouillé.

Liz se précipita dans le laboratoire en entrainant Khoée qui lâcha un « Héééi ? » de surprise tout en laissant tomber sa tasse dans sa course forcée et malhabile. Liz ferma la porte avec force et rapidité.
« Met ça ! » ordonna Liz en pointant du doigt un des masques de protection.

Elle enfila le sien en moins de dix secondes après avoir reconnu l’aspect lourd et jaunâtre, senti l’odeur de cette fumée, chargée en gaz hautement toxiques. L’odeur du pathogène.

« Haiiii ! Peupopa. » Lança Khoée dans un souffle désespéré, ses bras tendus vers Liz, les sourcils froncés, semblant comprendre la gravité de la situation, mais incapable d’agir pour se protéger. Elle avait bien le masque en main, mais ses tremblements suivis par des spasmes colériques l’empêchaient de l’enfiler de façon correcte.
« Putain Khoée, déconne pas ! » Hurla Liz en l’entrainant de force vers la combinaison de protection intégrale. Khoée lui répondit par une moue déterminée et colérique en se servant de tout son poids pour que Liz ne la traine pas plus loin.

« Si tu ne mets pas ce truc… »

Khoée repoussa le doigt de Liz tendu vers la combinaison ; le ton changea et devint beaucoup plus froid, bien que dépourvu d’agressivité.
« Je sais que ça te fait chier, mais si tu ne mets pas ce truc t’es morte tu comprends ça !? C’est soit ça, soit je t’enferme dans le sas ! »

Liz désigna les vitres en plexiglas que composaient la seconde partie du laboratoire, avec en son centre la table d’opération.
Le regard de Khoée changea. La peur, la colère, l’incompréhension, et finalement la résignation apparurent à tour de rôle. Elle se détendit, et Liz lui enfila la combinaison complète, pour être certaine qu’elle ne puisse pas l’enlever.

Lorsque la porte du laboratoire fut ouverte à nouveau, le ciel n’était plus visible, et la lumière du soleil était voilée d’un épais brouillard jaunâtre englobant le ballon sonde et les deux femmes. Liz se félicita d’avoir opté pour la combinaison pour protéger sa partenaire, et vérifia l’étanchéité de son masque avant de sortir du sas de confinement.
Elle s’avança rapidement vers la radio.

« Liz au rapport. Toute la côte est rongée par ce que je suppose être le pathogène. Il se répand comme un incendie. Fumées toxiques abondantes, visibilité nulle. Sur zone de mission dans H-1. »
Elle se retourna vers Khoée, qui peinait à marcher dans son nouvel accoutrement.
« Je vais à la sonde, toi tu vas voir les photos d’accord !? »

Khoée ne répondit pas, fixa Liz quelques instants un air de défi dans les yeux, laissant planer un silence gênant dans l’air vicié. Elle se recroquevilla légèrement et laissa échapper quelques éclats de rire saccadés, une main cachant maladroitement son visage amusé. Elle finit par se renfrogner en constatant le regard dur de l’Exploratrice, puis se décida à se diriger lentement vers le laboratoire sans poser plus de problèmes, ce qui soulagea Liz. Les autres avaient raison, elle n’aurait pas dû la garder.

« Elle n’est pas une Exploratrice, elle va mourir si elle reste avec moi », pensa durement Liz tout en montant les barreaux de l’antenne métallique qui menait à la sonde.
Lorsqu’elle arriva aux derniers barreaux, la voix stridente de Khoée qui hurlait telle une alarme parvint à ses oreilles.

« Chié. » Lâcha la jeune femme, perchée au sommet du ballon sonde, son masque la gênant au fur et à mesure de son ascension. Elle ignora sa compère, malgré la boule d’angoisse qui lui tenaillait l’estomac. Il lui fallait les données du ballon.

Elle se hissa rapidement sur la passerelle, pivota pour attraper la rambarde de sécurité, et s’assurer avec la corde et le mousqueton de son baudrier. Au centre de la petite plateforme, un immense écran affichait quantités d’informations sur la composition de l’air, les sources de chaleur terrestres, le relief, les courants aériens, la pression atmosphérique et bien d’autres . Toutes les données du ballon sonde étaient là.

« Ok. Toutes les infos H-4, et tout en H+24, c’est là, j’envoie en développement. » Murmura Liz, les sourcils froncés, concentrée sur sa mission. Une légère secousse agita le ballon sonde, quelque chose venait de frotter contre la plateforme principale, elle devait faire vite.

Elle redescendit l’échelle deux fois plus vite qu’elle l’avait montée.
L’appareil photo massif, un mastodonte de la taille d’un moteur de locomotive, était déjà en train de sortir des stocks de photos en pagaille lorsque l’Exploratrice surgit dans le labo, et constata quelque chose qui lui déplut au plus haut point.

Khoée n’était pas là. Liz se saisit du panneau de commandement du ballon sonde. Les capteurs révélaient la présence d’éléments rocheux en forme pointues, un relief extrêmement inégal, et surtout extrêmement haut. Incompréhensible, cette zone était un désert. Un désert de sable rouge. Sans aucune montagne, juste des dunes orangées striées de rouge sang, à perte de vue.

L’Exploratrice sortit du labo, la panique commençait à gagner son regard cherchant désespérément Khoée. Sa tignasse brune hirsute apparut à l’avant de la plateforme, à une bonne trentaine de mètres de sa partenaire.
Lorsque Liz, soulagée de la voir sans égratignures, regarda l’horizon, elle constata le problème. Des colonnes de sables s’élevaient à plusieurs centaines de mètres de hauteur, et semblaient s’être solidifiées pour finir par former un mur qui couvrait l’horizon saturé de panaches de fumée jaune.

Plus le ballon sonde se rapprochait de la zone de mission, plus les piliers de pierre friable étaient hauts, et menaçaient l’aéronef qui faisait déjà s’effondrer le haut de quelques colonnes à mesure que les secousses devenaient de plus en plus violentes.
Liz rentra dans le laboratoire en furie, et ordonna au ballon sonde un énorme effort pour les faire monter plus haut que ces piliers, à huit cent mètres d’altitude au-dessus de leur position. La flamme devint gigantesque, et les soufflets de la machinerie s’activèrent furieusement, gonflant lentement l’énorme ballon du dirigeable.

« Allez, donne tout c’que t’as mon bébé ! » Lança Liz entre ses dents, la mâchoire serrée en constatant les dégâts. Les chocs ne posaient pas le plus gros du problème, car les masses de sable se détachaient facilement de leurs sommets. Cependant, le sable tombait à l’intérieur de la plateforme, et l’alourdissait, l’entrainant inexorablement vers un crash, à la manière d’un navire qui se remplit d’eau, le ballon sonde allait faire naufrage si il ne remontait pas en altitude très vite. Khoée était toujours là-bas, et ne semblait pas déterminée à bouger.
Liz s’élança hors du laboratoire une nouvelle fois et attrapa Khoée, tétanisée, regardant l’horizon fixement.
« On bouge ! Allez, c’est pas compliqué à comprendre ça, bouge ou on va crever toutes les deux ! Khoée ! » Hurla Liz à plein poumons.

L’intéressée se tourna lentement vers l’Explorarice, comme si elle était en train de flotter, les yeux révulsés, et s’effondra dans ses bras.
« Oh merde ! » Lâcha Liz, décontenancée, un air horrifié sur le visage. Khoée était agitée de spasmes extrêmement violents, si bien qu’elle faillit la laisser tomber au sol à plusieurs reprises. Elle parvint à la trainer péniblement jusqu’au laboratoire, duquel elle verrouilla l’entrée après une grosse secousse qui, cette fois, arracha une partie du bardage de la plateforme.

Le choc projeta les deux femmes sur le mur situé à l’autre extrémité de la pièce, mais dans un réflexe, Liz parvint à protéger Khoée en lui servant de bouclier lors de l’impact, en se plaçant entre elle et le mur. Un craquement retentit derrière elle, et une douleur brulante lui déchira le dos, puis elle retomba sur Khoée, toujours inconsciente, continuant sa crise de spasmes.
Elle hurla. Son bras était paralysé par la douleur qui transperçait le bas de sa nuque. Des gouttes de sueur froide perlant sur son front et la vision brouillée, elle s’attacha à Khoée, puis s’attacha à une des rambardes de sécurité du labo avant de s’écrouler au sol et d’être trimbalée par les secousses et le vacillement désordonné de la plateforme.
Une ultime secousse envoya sa tempe taper contre le coté de son casque, et elle perdit connaissance à son tour.

Lorsqu’elle se réveilla, la nuit était tombée, et du sang séché recouvrait une partie de son visage. Il commençait à coaguler autour d’une plaie assez importante pour nécessiter quelques points de suture sur son arcade. Elle voulut se relever, mais la douleur dans son dos était si atroce qu’elle ne parvint qu’à tourner légèrement la tête vers le tas de débris qu’était devenu le ballon sonde. Le conteneur qui renfermait le laboratoire était éventré, et par le trou béant, Liz pouvait observer les débris et la carcasse de sa machine.
Le laboratoire était en miettes, mais par miracle, l’appareil photo était encore en route, et sortait des clichés à allure régulière. La table d’observation et d’opération était brisée en trois endroits. Par un malheureux hasard, la pointe paratonnerre du ballon sonde était tombé sur elle, réduisant à néant l’accès aux données du ballon sonde. La plateforme disloquée gisait un peu plus loin, toujours rattaché à l’énorme dirigeable. Ce dernier ressemblait à la voile d’un bateau maudit, déchirée de toutes parts, de façon anarchique.
Des parties essentielles étaient hors de son champ de vision, l’ordinateur de bord contenait toutes les données confidentielles du ballon sonde, ainsi que la balise GPS et le signal de détresse à envoyer au Lieutenant-Colonel.

Liz grimaca, il lui fallait de l’aide. Elle tira sur le bout de corde rattachée à Khoée, et si elle put constater sa présence grâce au poids inerte qu’elle peinait à trainer, elle ne pouvait pas la voir, et n’obtint aucune réponse de la part de son amie.
Elle tenta de l’appeler une douzaine de fois, sans plus de succès que de s’abimer la voix. La chaleur était écrasante, sa gorge desséchée par la déshydratation la faisait suffoquer à chaque nouvelle tentative de respiration, et la douleur était si violente provoquait vertiges et nausées.
Liz perdit conscience une nouvelle fois, puis elle revint à elle, secouée par un léger mouvement de balancier. Ses mains et ses jambes étaient liés entre eux. Des taches floues aux formes relativement humaines se déplaçaient avec elle.
Elle sombra de nouveau dans l’inconscience.

Lorsqu’elle rouvrit les yeux, elle ne savait pas où elle se trouvait, mais ce n’était certainement pas le paradis. Une odeur de terre poussiéreuse, de renfermé et de moisi lui saisirent les narines. Elle vomit de la bile en quantité, et fut surprise de constater la bassine posée à côté de son lit. Si elle était prisonnière, alors elle était plutôt bien traitée, ce qui était bon signe, même si la prudence était de mise. Elle ne connaissait toujours pas l’identité de ces gens qui l’avait sortie du ballon sonde. Et où était passée Khoée ?
Un mouvement trop brusque lui rappela instantanément ses blessures, et la douleur dans son dos l’empêchait de bouger normalement. Des cataplasmes d’argile parsemaient son corps, et au fur et à mesure que ses yeux s’habituaient à la pénombre de la pièce, elle constata avec stupeur que son pied droit n’était plus qu’un moignon recouvert par de nombreux bandages tachés de sang.
Elle vomit à nouveau, avec la sensation de sentir le monde s’écrouler autour d’elle. Soudain, la corde rattachée à son baudrier s’agita doucement.
« Khoée ? T’es là ? » Hasarda Liz, la voix cassée par le manque d’eau et l’acidité de la bile.

- Wiiii. C’eeest biiiiien ma douce. Voilaaaa, on va aller au dodo, lui chuchota lentement une voix d’homme presque enfantine.
- Qui est là !? Où est Khoée ? Paniqua Liz.
- Nooooooon, arrêête bougeeeer ! Maaaal. Sois sage ‘vec Laxence hmmmm ?
Une porte s’ouvrit brusquement.
« Haaaaa ! Kékananééé ! » Lança une voix de femme enjouée.
Liz entendit des pas se rapprocher, puis une main, petite et potelée lui tâta les bras, la nuque et le front. Puis elle apparut.

De longs cheveux noirs encadraient son visage rond, creusé par de nombreuses fossettes d’expressions, au petit nez aplati et au sourire éclatant qui laissait échapper ses quelques dents pointues au placement irrégulier. Derrière sa paire de vielles lunettes, son regard était si expressif que lorsque Liz le croisa, elle fut immédiatement rassurée. La femme semblait contente. Elle attrapa une chaîne, probablement reliée à un engrenage, et tira dessus.
Liz constata qu’elle était attachée lorsque ce qu’elle pensait être un lit se plaça doucement à la verticale, en face de ses interlocuteurs. Si elle avait été rassurée, ça n’avait pas duré longtemps, cette fois, elle se sentait bel et bien prisonnière.

Celui qui était rattaché à la place de Khoée était massif, au moins deux mètres de haut pour plus d’une centaine de kilos. Son visage semblait gonflé tant il était imposant et rond. Ses yeux étaient presque fermés, et il ne semblait pas porter grand intérêt à ses compagnons, regardant un coup le plafond, un coup le sol, puis un mur. La femme aux cheveux noirs était petite et rondouillette, ses cheveux descendaient jusqu’à ses genoux, et l’Exploratrice constata qu’elle avait été brûlée. Une large cicatrice lui recouvrait une grande partie du cou.
Derrière ses deux interlocuteurs, un vieil homme se tenait debout, et observait Liz d’un air tantôt sévère, tantôt curieux, sans dire un mot, se frottant nerveusement les mains, et agitant ses sourcils broussailleux dans une pagaille d’émotions indéchiffrables.
La femme aux cheveux noirs s’approcha d’elle d’un air sérieux, malgré sa démarche maladroite. Elle planta ses yeux dans ceux de l’Exploratrice et, tout en se frottant frénétiquement le bras, elle demanda, sure d’elle :

« Hadine ? »
- Hein ? Répondit Liz, désorientée, et abasourdie par la situation.
- Ha-Hhh-Hadine !? Répéta la femme en se concentrant d’avantage sur son élocution.

De toute évidence, la communication entre les Normés et les Déformés n’allait pas être facile à établir.
Charmimnachirachiva

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par Charmimnachirachiva »

Coucou !
Désolée j'avais pas vu ton message ... Mais je suis là maintenant ! ;)
Ca faisait longtemps que tu n'avais posté (c'est pas un reproche hein, je sais pas si t'avais pas le temps de poster ou si t'avais plus d'inspi pour l'écriture ou j'en sais rien un autre truc (et ça me regarde pas) mais c'est cool que tu soit revenu ! :) )du coup j'ai relu les derniers chapitres (après avoir lu le premier paragraphe de ce chapitre je me suis dit ''mais qu'est-ce qu'elle fait là bas en fait ?" donc ça s'imposait...).
Le mystère s'épaissit !! C'est bien, on est de plus en plus curieux de savoir ce qui va arrivé et le début de l'intrigue se dessine. Par contre fait quand même attention à pas trop trop épaissir le truc et que ce soit trop complexe à la fin (c'est pas le cas pour l'instant, c'est au cas-ou (d'ailleurs tu fais la liaison à au cas-ou ou pas ? oui je sais ça n'a rien avoir :lol: ).)
Il lui manque un pied à la madame maintenant ! Ca va être galère pour ce déplacer. Et ça va être galère pour communiquer. Bref, ça fait plein de galère en perspective... 8-) !
Pour les pdv, tu fais les chapitres en fonction de l'histoire (chronologiquement) ou tout se passe en même temps et tu as un "ordre des pdv" (je sais pas si c'est trèc clair cette histoire...
C'est un plaisir de te lire ;
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Salut ! :)
J'avais quelques autres petits projets en cours et beaucoup de boulot, du coup j'ai pas pris le temps d'écrire...mais j'ai le chapitre 7 qui s'avance bien, par contre mon rythme de publication va être plus réduit pendant un bon moment je pense...
Je vais essayer de faire monter le mystère pendant encore un moment, histoire que le lecteur se pose plein de questions et puisse imaginer un scénario, puis délier les choses petit à petit ;)
Sans la liaison, sinon ça fait "au kazoo" (https://www.youtube.com/watch?v=5cGmZ0IyQFU), et ya aucun rapport avec l'instrument de musique dans "au cas ou" ;)
Oui, elle a perdu un bout en route, mais elle gère t'inquiète, c'est une guerrière, même pas mal :P
Alors, c'est plus ou moins chronologie, chaque chapitre se déroule dans un futur ou un passé très proche lorsque je change de chapitre, par exemple :
Chap 4 : Le lieutenant reçoit le message de Marcus
Chap 5 : Liz est chargée de la mission
Chap 6 : Elle arrive sur sa zone de mission
Mais ça, c'est juste le pdv de Liz , dans le chapitre 5, on sait que les Déformés se déplacent, et dans le chapitre 7, on aura le pdv d'un autre personnage qui est directement confronté à ça...je sais pas si c'est très clair non plus x)
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

Message par ChrisRuess »

Chapitre 7 : Incident

La Citadelle.


Tout le monde criait sur la place principale du Fourbi. Les Rapaces étaient revenus, et cette fois ci, à entendre la foule, la chasse avait été bonne. Dan clopina, appuyé contre sa béquille, curieux de savoir ce qui causait autant d’agitation.
Voilà déjà une semaine que la Taupe était partie avec Thom, et il s’ennuyait. Il n’avait même pas pu dire au revoir à son frère, alors qu’il devait entamer un long voyage jusqu'à La Brulée
Le médecin lui avait expliqué que la Taupe était venue le prévenir de leur départ immédiat pour une mission importante pour la Citadelle alors qu’il était toujours inconscient. Thom ne lui avait rien dit, il semblait perdu, les yeux dans le vide lorsque la Taupe avait annoncé leur départ, et la mission qu’elle confiait à Roche, son vieil ami.

« Tu t’en occupes comme si il était ton apprenti. Prend en soin. Je ne veux plus qu’il aille faire des missions pour le compte du Fourbi, c’est terminé. Je veux qu’un de tes infirmiers soit avec lui à chaque fois qu’il quitte ton domicile pour le protéger. Des choses importantes sont en train de se produire Roche. Prend soin de toi, de lui et des autres aussi. » Le ton d'Eliza autrefois maternel et jovial était à présent plus dur et déterminé, bien que toujours positif.
- Bien. Je te souhaite bonne chance, et reviens en entier.
Roche soupira, puis gloussa nerveusement.
« Espèce de vielle folle. C’est bien plus dur que d’éduquer ton marmot. D'ailleurs, il va commencer par se reposer quelques temps. J’ai fait des analyses et elles ne sont pas bonnes, ce gamin était pas en forme déjà avant de se prendre la balle. Les missions pour le Fourbi devait pas payer assez pour qu’il ait à manger convenablement je suppose. Ne t’inquiète pas pour lui, il sera nourri, logé, protégé et éduqué. Que les vents te soient favorables, fait attention à son frère, ajouta-il, il est jeune. »
- Il est intelligent, curieux, et il apprend vite. Et puis ses sens sont en meilleure forme que les miens. Il m’aidera beaucoup, j’en suis convaincue. Ta mémoire se dégrade mon ami, lâcha La Taupe avec un sourire en coin.
« Quel âge avions nous, lors de la Chute ? Tu as oublié qu’il faut se faire confiance, même si nous ne sommes que des enfants ? » Demanda la Taupe, une bonne dose de malice dans la voix.

Roche resta muet un instant, puis un sourire se dessina sous sa barbe, et la nostalgie du temps passé fit pétiller ses yeux.
La Taupe tourna les talons en tenant la main de Thom, et salua une dernière fois le médecin qui la regardait s’éloigner d’un grand geste de la main.

Lorsque Dan se réveilla et que Roche l’informa de la situation, il chercha immédiatement à se lever pour partir à la poursuite de son frère et de la Taupe, ce qui eut pour conséquence de faire sauter un de ses points de suture et de provoquer une douleur si intense qu’il se recoucha instantanément.

« Bombe à cul ! T’détruis not’ ‘vail ! T’crois malin ?! Fémal hein !? T’vas nulle part dans c’t’état mon tiot ! Sois moins stupide, j’ai donné m’promesse à Eliza qu’tu s’rais pas ‘bimé ! J’t’répare pis tu ruine tout ! Aneukté ! » S’époumona Roche à grand renforts de mouvements de bras dignes d’un chef d’orchestre. S’il avait parlé en choisissant avec soin ses mots devant Eliza, il avait dorénavant opté pour un vocabulaire qu’il appréciait beaucoup plus, et que Dan était en mesure de comprendre sans problèmes.
Les insultes étaient la meilleure façon d’exprimer la colère sans faire couler le sang, c’était la Taupe qui lui avait appris, alors qu’il n’était encore qu’un très jeune enfant, colérique et violent.
Les infirmiers refermèrent la plaie rapidement, sans dire un mot.

Ils faisaient peur à Dan. Ils étaient identiques, grands et fins, leurs silhouettes élancées semblaient reliées entre elles par quelque chose d’invisible tant leurs mouvements étaient similaires. Ils portaient toujours un masque chirurgical ainsi qu’une grande capuche noire qui cachait leur visage et ne disaient jamais rien. Des individus pour le moins étrange, malgré leur bienveillance médicale.
Cinq jours après son opération, Roche lui ordonna d’aller marcher tous les jours, Dan fut aux anges. Lorsque le vieux médecin ordonna à un de ses infirmiers de le suivre et de lui servir de garde du corps, il devint blême.

Lorsqu'il réussit enfin à voir ce qui provoquait toute cette agitation sur la place, après quelques mètres mal assurés dans la foule hurlante, ses yeux s’écarquillèrent.
Une cage protégée par quatre Rapaces contenait deux Déformés. Un géant, recroquevillé sur le corps de son ami inerte, poussait de longs cris plaintifs en se grattant le cou. A force de répétitions, il s’était mutilé, laissant de grandes plaies jusque sous son menton, le bout de ses doigts recouverts de sang. L’autre était étalé sur le sol, enroulé dans de nombreux haillons, ressemblant à des draps, qui recouvraient son corps. Cependant, une excroissance violacée, ressemblant à un bras de nourrisson dépassait des haillons. Dan frissonna.

« Késeuk vous ram'nez la ! Doiv’crever ! » Hurla une vielle femme à la droite du jeune homme encore trop choqué pour réagir, titubant au rythme effréné du mouvement de la foule.
Soudain, une voix grave et puissante résonna contre les parois de métal rouillé qui composaient les murs de la place.

« Le silence, les Mouettes ! »

Un homme se tenait dans l’entrée principale, encadré par des piliers de voitures écrasées, il observait l’horizon, tournant le dos à la foule ainsi qu’aux deux prisonniers, ses longues dreadlocks se balançant au rythme du vent. Sa jaquette en cuir rapiécée arborait fièrement la Plume Noire du Fourbi, et sa coiffe fabriquée à partir du crane d’un volatile immense ne laissait pas de doute quant à son identité.
Haspar Khan. Le chef des Rapaces, l’unique depuis la création du groupuscule trente ans auparavant. Il organisait tout le trafic du Fourbi, légal ou pas, et accomplissait de nombreuses missions pour le compte de la Communauté. Toute la place devint silencieuse instantanément, dans l’attente de ce qu’il allait ajouter, mais rien ne vint. Il resta là, à regarder l’horizon, fixement, la main sur le manche de la hachette attachée à sa ceinture.

Les hommes et les femmes du Fourbi se regardèrent un moment, la bouche ouverte, sans oser en laisser sortir un son. Puis la porte du frigo qui menait aux entrailles de la Citadelle s’ouvrit dans un grincement langoureux.

« Y sortent jamais voir nouzot’, par contre quand c’est des monstres, ça, y sont intéressés, sur euk’ même La Taupe est v’nue en courant, ou kelle s’cache ‘core c’te rabougrie ? » Souffla l’homme le plus proche de Dan à ses amis, qui eurent un petit sourire gêné pour toute réponse.

Un petit groupe de cinq personnes, trois hommes et deux femmes, tous âgés d’au moins une soixantaine d’années, encadrés par une douzaine de soldats armés d’armes automatiques venaient de faire irruption dans le Fourbi. La Communauté, presque au complet.

En premier, un homme petit, pâle, les traits tirés et les yeux cernés, habillé sobrement d’un pantalon noir effiloché, d’un t-shirt et d’une casquette rouge délavée se présenta en haut des escaliers, la main en avant de manière à couvrir la lumière brûlante du soleil.
Malgré son apparence simple et chétive, il s’agissait du gérant de la Sécurité Intérieure, celui qu’on appelait le Loup. Sa démarche calme, précise et déterminée ne laissait aucun doute sur son passé militaire.
Derrière lui, une femme aux cheveux longs d’un blanc immaculé, à la peau encore peu ridée et aux yeux verts électriques suivait de près, d’un pas décidé. La Mante était la scientifique de la Citadelle, et était gérante de l’Education, tant scolaire que militaire.µ

Ensuite vint un homme immense, si bien que c’était à se demander comment il avait fait pour passer la porte du frigo, pourtant imposante. Son visage portait de nombreuses crevasses et cicatrices que l’on parvenait à voir malgré sa longue barbe qui recouvrait une bonne partie de son visage, et des tatouages déformés par le temps qui recouvraient son crâne chauve. Le Lynx était le gérant des ressources alimentaires, et il était talonné par son acolyte gérante des ressources financières, L’Hermine, une petite femme rousse, aux lunettes rondes cerclées d’or. Elle était la plus jeune de la Communauté, et aussi la plus discrète.

Derrière eux venaient le Gaur. On l’appelait aussi l’Ingérant. Il était celui qui s’occupait de la pauvreté et des cas sociaux de la Citadelle. C’était l’un de seuls que Dan avait déjà vu, puisqu'il était le seul à traîner la nuit dans les quartiers les plus sombres du Fourbi. C’était grâce à lui qu’il avait eu sa première mission pour le compte des Rapaces.
A l’époque, Dan était trop jeune pour comprendre à qui il s’adressait. Comme ses amis, ils l’appelaient « Le bossu », à cause de ses multiples difformités. Ses mains avaient été cassées, et il boitait, son dos déformé le faisant horriblement souffrir.
Personne ne savait rien sur son parcours, mais son visage tanné par le soleil, ses longs cheveux blancs, sales, en bataille, et ses yeux bleus glacés, inexpressifs, témoignaient de la dureté du passé de cet homme.
Il manquait bien évidemment la Taupe, l’érudite, bibliothécaire, gérante de la Culture de la Citadelle.

Le Loup se plaça dos aux Déformés, face à la foule, et commença son discours d’une voix forte.

« Aujourd'hui, nous avons vu ce que sont vraiment les créatures aux airs faussement humains qui massacrent nos orphelins, les enfants de notre Cité, nos maris et nos femmes, nos sœurs et nos frères, innocents, ingénus ! Ces êtres sont des difformités, des choses abjectes, indignes de la nature, et inutiles, sinon dangereuses à autrui ! D'après nos dernières informations, chers concitoyens, leur présence ici n’est pas due au hasard, bien au contraire ! De nombreuses traces de campements, établis depuis plusieurs jours déjà, ont été retrouvées par notre ami le Khan. Il a également pu observer des camps énormes à quelques jours de marche, sans pouvoir les approcher. »

Ce dernier n’avait toujours pas bougé. Il était visiblement aux aguets, prêt à défendre le Fourbi. La foule s’agita, la peur commençant peu à peu à faire son œuvre, et quelques groupes de badauds essayèrent de quitter l’étroitesse de la foule pour retrouver leurs proches et la sécurité de leur habitat. Le Loup continua son discours en vociférant, crachant des postillons à chacun de ses mots, et agrémentant ses syllabes de gestes rigides et vigoureux.

« A présent, nous les tenons ! Ceux-là serviront d’exemple. Pour votre sécurité, nous décrétons le couvre-feu à partir de la tombée de la nuit ! Si… »
- Une minute, l’interrompit alors la Mante, qui observait la cage attentivement, d’un ton calme, mais ferme. Vous êtes comme toujours beaucoup trop hâtif dans vos interprétations, et dans vos décisions, mon cher.
Elle posa son regard sur Dony, toujours en train de pousser des cris plaintifs, ou des râles de colère et d’impuissance.
« Celui-ci possède des caractéristiques physiques intéressantes. Il semble que son corps ce soit adapté au Grand Désert, mais c’est en plus un géant, je dois l’étudier avant qu’il ne mette fin à ses jours. Il est en train de s’ouvrir la gorge. Quant à l’autre, il nous faut l’examiner, nous ne savons pas ce qu’il est, mais il est hors d’état de nuire. Le couvre-feu, nous en débattrons et il sera soumis au vote, comme toujours. »
- Pourquoi n’est-il pas agressif ? demanda le Lynx d’une voix étonnamment aiguë et chantante pour quelqu'un de sa carrure, tout en désignant Dony d’un petit geste de la tête.
Personne ne répondit à cette question, laissant le bruit d’une foule apeurée en train de s’échapper de la place couvrir la discussion aux oreilles de Dan.
Un passant le bouscula, et sa béquille dérapa dans la boue, mais l’infirmier la rattrapa, lui permettant de se tenir debout.
Il se pencha sur Dan, ses deux yeux brillants dans l’ombre de sa capuche, l’air inquiet. Remis sur pied, il lui fit signe que tout allait bien, et l’infirmier se redressa, et observa les alentours avant de se replacer derrière Dan tel un agent de protection rapprochée.
Puis la voix grave et éraillée du Gaur se fit entendre.
« Probab’ment parce qu’y n’est pas ‘gressif. »
Le visage du Loup se tendit, ses sourcils effilés froncés, plissant son front en de multiples rides d’expression.
« Vous êtes complètement à côté du sujet mon pauvre ! Vous connaissez aussi bien que moi les rapports sur les attaques de ces abominations ! Et vous pensez qu’ils ne sont pas agressifs !? » Hurla-t-il, sans prêter attention au jeune garçon qui, patiemment, écoutait, péniblement appuyé sur ses béquilles, alors que la place finissait de se vider de la foule nerveuse qui s’échappait au pas de course.

« Les rapports indiquent des difformités monstrueuses et visiblement dangereuses. Mis à part sa grande taille, je ne vois pas de difformités semblables, ni d’une quelconque menace émanant de cet individu. Son compagnon n’a pas l’air bien en forme, et semble chétif malgré les vêtements qui le recouvrent. Il ne doit pas être une grande menace non plus. » Rétorqua calmement le Gaur.
- Et comment vous l’expliquez ? Et leurs campements à l’extérieur ? C’est une déclaration de guerre ! Il a juste peur parce qu’il sait qu’il est vaincu ! Tuons-les ! Vengeons nos camarades ! Plantons leurs têtes immondes sur des p… »

La main de la Mante se figea devant le visage du Loup d’un mouvement sec, l’interrompant à nouveau.

« Nous allons les étudier, avec mon équipe, pendant vingt-quatre heures, et nous allons tirer nos conclusions à partir des informations que nos analyses révéleront. Vos équipes de l’Ordre sont également conviées afin de les faire parler sur leur présence ici et de comprendre pourquoi ils installent des campements à l’extérieur de la Clôture, ajouta-elle en se tournant vers le Loup. Ensuite, suivant nos informations, nous déciderons de leurs sorts respectifs. Qui est contre ? »
Sa voix était à présent sèche et autoritaire, et personne ne trouva quelque chose à redire.

Le Gaur haussa les épaules et s’en retourna vers le frigo, duquel il passa la porte sans se retourner vers les Dirigeants et les prisonniers.

« Très bien, reprit la Mante, et qui est pour ? » Demanda-elle en levant la main, suivie de près par le Loup, puis rejoint par l’Hermine et le Lynx.

« Parfait, nous savons donc quoi faire. »
Elle se tourna vers un homme habillé intégralement de blanc, de larges lunettes de soleil opaques masquant ses yeux, puis l’interpella.
« Intendant, ramenez moi le nécessaire pour transporter les sujets au laboratoire du sous-sol sud, ainsi que l’équipe de l’unité. Il nous faudra aussi un sédatif pour le géant, qu’il se calme. On va passer par le monte-charge destiné aux transports de ressources, la cage ne passera pas la porte.»

L’intendant hocha la tête et tourna les talons, puis une voix enfantine se fit entendre, et surpris tout le monde, y compris le Khan toujours immobile, qui tourna la tête en direction de Dan.
« Pour prot’gé eul’ Fourbi comankonfé ? »

Un silence flotta de nouveau sur la place, cette fois quasiment vide, à l’exception de quelques badauds, dont Dan et l’infirmier, toujours attentifs aux envolés lyriques des Dirigeants.

« Nous allons procéder à des interrogatoires, et ne t’inquiète pas mon garçon nous auront les éléments nécessaires à l’extermination de cette vermine. » Répondit le Loup d’une voix dure.
- Je sais, J’ai ‘tendu, mais s’y n’disent rien, et si eul’zot’, dehors, attaquent, qui va protéger l’Fourbi ?
- Le jeune a raison. Mes hommes sont braves. Ils peuvent que se battre jusqu'à la mort avec le sourire aux lèvres. Mais protéger les autres n’est pas dans notre Code, nous sommes les Rapaces, pas une armée. Seul la Survie est la Voie. Si la mort arrive, alors, soit tu étais fort, et elle est à ta mesure, soit tu étais faible, et elle est à ta mesure.

Le ton froid du Khan glaça le sang de Dan, ainsi que celui des membres de la Communauté. Il était connu que les Rapaces ne faisaient pas dans le sentimental, et qu'Haspar était le plus dur d’entre eux, malgré l’approche de sa cinquantième année de vie, il restait un combattant dont la vie était dévouée à l’art de mourir. Pourtant, rien ne le poussait à protéger les habitants, d’autant que les Rapaces ne comptaient qu’une petite trentaine de membres. Seul le Niz était important pour lui.

« Vous n’avez k’faire eud’nous ! Moi j’dirais aux gens d’partir si vous z’avez pas d’protection ! Ya toute une armée en d‘dans ! » Hurla un homme à quelques pas de Dan. Le Loup se rapprocha du public restant.
- Vous voulez partir ? Où donc ? Les Déformés sont à La Centrale, et ils repoussent d’ores et déjà leurs assauts. Vous pouvez tenter votre chance jusqu'au Rempart, si les Déformés ne décident pas de croiser votre chemin alors vous y arriverez peut être, déclara-il cyniquement.

La foule gronda de plus belle, et Dan frissonna de nouveau, pensant à la Taupe et à son frère, justement en route pour le Rempart.
« Calmez-vous ! Notre armée sera là pour vous protéger comme elle l’a toujours fait, en temps voulu, et le Khan continue ses missions d’éclaireur pour nous permettre de mieux connaitre les risques. Nous sommes la Citadelle. Nous pouvons vous fournir des armes, afin de vous défendre, car il est vrai que nous ne connaissons pas l’étendue de la menace. Notre armée est puissante par notre matériel, mais pas par le nombre, et votre aide sera précieuse si une bataille est à mener. Avez-vous le courage de lutter avec nous pour protéger notre Cité ? Ou voulez-vous fuir, comme le lâche ici présent !? » Hurla le Loup, ce qui fit taire les plus bruyants des badauds.

« La Mante et moi-même allons procéder aux interrogatoires et analyses qui s’imposent, comme nous vous l’avons expliqué. Je ne vais pas perdre plus de temps avec vous, un gros travail m’attend. »
Il tourna les talons, et disparut dans les entrailles de la Citadelle sans dire un mot, suivit par les autres Dirigeants.
Dan quitta la populace mécontente qui discutait de vive voix devant la porte qui le ramenait chez Roche, à la Citadelle.
Lorsqu'il referma la porte du frigo, il se figea, et chuchota son prénom.
« Bara ».
Il ouvrit de nouveau la porte du frigo, et traversa la place en clopinant pour se diriger vers le Fourbi le plus vite possible, suivi de près par l’infirmier silencieux. Il fallait avertir son amie, essayer de la mettre à l’abri, à l’intérieur.
ChrisRuess

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Re: Les chroniques du Jour Nouveau (Tome 1 : E.V.O.L.V.E) [Science-fiction; Dystopie; Post-Apo]

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Chapitre 8 : Expérience


La Citadelle


Dan avait les poumons en feu, et sa cicatrice lui faisait mal. Il se dirigeait à l’autre bout du Fourbi, vers le quartier de la Clôture, en s’appuyant avec rage sur sa béquille pour avancer le plus vite possible. L’infirmier le suivait toujours de près, et l’aidait quelquefois à avancer dans les ruelles étroites qui menaient au logement de son amie. Bara résidait dans un tractopelle aménagé, au vingt-deuxième étage de la Clôture, une palissade d’engins de chantier, de bateaux, de tanks, de bus, de tracteurs, d’avions et autres grues, soudées entres eux, servaient de logements aux plus pauvres du Fourbi et de protections face aux Prédateurs, aux Déformés et aux tempêtes. Le Niz, le repaire des Rapaces, composaient les trois derniers étages de la Clôture, juste au-dessus de chez Bara.
Il tambourina contre la porte de la cabine dans laquelle elle habitait, essoufflé. La vitre s’abaissa dans un son électrique discontinu du au moteur vieillissant de la porte, et laissa apparaitre le visage rayonnant de la jeune fille. Elle avait le même âge que Dan, ils s’étaient connus dans les rangs des missionnaires des Rapaces, alors qu’ils n’avaient que dix ans, quatre années auparavant. Bara avait intégré l’unité à l’âge de six ans, et avait pris Thom et Dan, arrivés après elle, sous son aile. Son sourire semblait ne jamais quitter son visage tant il était naturel. Ses cheveux roux, coupés courts, à la garçonne, comme la mode du moment l’imposait, faisaient ressortir ses yeux bleu nuit d’une profondeur océanique.

« Dan ! Keseuk’ t’a fé ? J’eul’ savé qu’y t’été ‘rivé une zarberie, cinq retours eud’ mission, et toi t’été pas la ! Et Thom ? Lé ou ? Va bien ? »
- J’te ‘xplikré en route, faut partir eud’la.
Le visage masqué de l’infirmier apparut dans le coin de la fenêtre, et acquiesça doucement. Bara eut un mouvement de recul, et son sourire disparut pour laisser place à la surprise. Elle fronça les sourcils.

« Cékiça ? Késki vient dans mon chémoi ? Tu m’xplik maint’nant tout l’bazar, t’façon chuis pa’billée. » Elle ouvrit la porte, laissant apparaitre un long t-shirt rose délavé tombant sur le haut de ses cuisses élancées et une culotte noire.
Dan rougit instantanément.
« Allé rent’. Jeum’ bille, tu m’xplik et pis on y va si c’vaut l’coup. J’laisse pas mon chémoi pour rien. En plus cé l’heureud’eul’ sieste. » Annonça la jeune fille, qui avait retrouvé son sourire, manifestement amusée par le regard gêné de son interlocuteur qui cherchait désespérément un point à fixer dans le décor pour ne pas regarder ses jambes.
Dan se tourna vers l’infirmier, qui acquiesça de nouveau. Dan entra et l’infirmier resta devant la porte afin de garder l’entrée.


**********

Henry sentait qu’on le transportait, et avait entendu l’intégralité du discours des Dirigeants, mais le venin continuait à faire son effet paralysant, et il ne pouvait toujours pas bouger. Tous ses repères avaient disparus.
Sans la vue, il ne savait pas où il se trouvait, ni où se trouvait Dony. Il avait entendu son ami crier, mais, privé de ses sens, il ne put pas l’aider.
Puis ils l’avaient emmené. Il entendait Dony hurler et gronder. En quelques minutes, le son de ses vocalises s’atténua, et disparut complètement, remplacé par le claquement des bottes des hommes qui l’escortèrent jusqu’à une petite cellule. Il était l’un des rares Déformés à avoir appris le Langage avec Walt le Normé, et par conséquent, il avait entendu ce que ses agresseurs disaient lors de son voyage vers les geôles, sans arriver pour autant à saisir l’intégralité de leurs paroles.
Ils disaient que des « piqures », et des « transfusions » étaient nécessaires pour « procéder » à l’ « opération ». Henry sentait la tension dans la voix de ses gardiens, et le cliquetis incessant des armes contre le métal de leurs armures lui faisait tourner la tête. Lorsqu’ils le jetèrent brusquement à l’intérieur de l’espace exigu et que leurs voix disparurent, Henry fut rassuré.

Il sentait le sang circuler à nouveau dans ses veines, et put, quelques temps après, bouger de nouveau ses membres. Il peina de longues minutes pour se relever, empêtré dans ses longs vêtements destinés à la traversée du Grand Désert. Il avait compris que la cellule était étroite en entendant le choc de son corps se répercuter sur les murs. Une fois debout, il estima la distance entre chaque mur et visualisa automatiquement un carré de deux mètres sur deux. Une cage un peu plus grande que la précédente, avec une planche en bois pour dormir ou manger.
Il s’assit avec précaution, et lorsque ce fut fait, poussa une longue expiration pour retrouver ses esprits. Il fallait avertir les Normés de la menace qui pesait sur le monde entier, la Nécrose, c’était là sa seule mission, l’objectif principal de la traversée du Grand Désert. Il n’espérait qu’une chose : que les Normés ne le laissent pas pourrir dans cette cellule.
Il sentait l’odeur de la mort partout autour de lui, elle l’oppressait tant elle était présente. Puis le bruit d’une porte qu’on ouvre résonna contre les murs des couloirs, suivis des bruits de pas de deux paires de bottes venant dans sa direction. Il s’attendait à être emmené ailleurs pour être interrogé, mais au lieu de cela, la voix de l’homme qui hurlait et les qualifiait d’ « abominations » s’adressa à lui d’un ton ferme.
« Bien. Les Rapaces qui vous ont amenés ici m’ont communiqué le fait que vous savez parler notre Langue. J’aurais donc des questions à vous poser et j’attends des réponses. Avez-vous compris ? »
- Oui, je comprends, acquiesça Henry.
- Qui êtes-vous ? Comment connaissez-vous notre Langue ? Et qui est votre ami ? Manifestement, il ne parle pas.
Henry prit une grande inspiration, et expira lentement avant de répondre.
- Il s’appelle Dony. Il est le Protecteur de notre Village Principal, c’est lui qui protège le village contre les attaques des Bannis. Je suis Henry, je suis l’Agronaute du Village, ancien dirigeant du Conseil des Anciens. Nous venons en paix. C’est un Normé qui m’a appris votre Langage il y a longtemps déjà.

Un silence gêné s’installa quelques instants dans l’air vicié des geôles.
« Si vous venez en paix, alors, que faites-vous ici, vous et les autres ? » Demanda sèchement le Loup.
- Pas d’autres. Nous avons traversé le Grand Désert avec Dony, après mon bannissement. Il y a un danger qui nous menace tous.
- Les autres, ceux qui installent leurs campements en bordure de la Clôture. Et de quel danger parlez-vous ? Vous voulez nous attaquer ?!
- La Nécrose, souffla Henry. Une chose qui fait pourrir le sol, tue animaux et végétaux, et menaçait nos villages. Les Anciens ont dit que c’était vous qui aviez provoqué cette chose ! J’étais sûr qu’ils disaient faux. Je ne sais pas qui sont les personnes qui s’installent chez vous, mais la Nécrose à du détruire nos villages, ils ont dû partir. Si c’est eux, ils viennent chercher de l’aide. Les Bannis sont dangereux, ils ne montent pas de campements, ils se contentent de tuer et manger. Laissez-moi aller voir ces campements pour voir et parler.
- Hors de question ! Répondit du tac au tac le gérant de l’Ordre, vous connaissez notre structure, qui nous dit que vous ne révèlerez pas ces informations à vos petits camarades pour ensuite nous attaquer ? Demanda-il en se tournant vers sa comparse. Je ne vous fais pas confiance ! Ajouta-il d’une voix forte.
Henry ne répondit rien.

Sentant que l’interrogatoire allait couper court, la Mante intervint.
« Qui sont les Bannis ? Et pouvez-vous nous expliquer un peu plus ce que vous appelez la Nécrose ? »
- Les Bannis sont ceux qui tuent ceux que vous aimez. Pas nous. Nous les envoyons dans le Grand Désert pour la sécurité du Village. Ils ont survécu sans que l’on sache comment, et se sont adaptés, puis ils ont eu faim, de chair et de vengeance. Ils nous attaquaient. Sans nos Protecteurs, nous serions morts. Mais le pire danger est la Nécrose. Elle est inconnue, ces effets sont affreux…des lacs de liquide qui fait fondre la peau, des dunes qui tombent, ou qui vont vers le ciel comme des bâtons. Les tempêtes sont encore plus violentes, le Nomade, un Village qui bouge, ne peux plus se déplacer. J’ai décidé de partir vous avertir même une fois banni. Faites-moi confiance. Laissez-moi soigner Dony, et aller voir qui est dans ces campements.

La Mante eut un sourire froid que l’infirmité d’Henry lui dissimula.
« Malheureusement, je suis déjà en train de soigner votre ami, dans le but d’étudier ces caractéristiques génétiques. Ces opérations ne sont pas sans risques, mais votre ami à l’air d’être quelqu’un de vaillant n’est-ce pas ? »
- Faites attention avec lui, c’est un conseil. Dony est un Protecteur. Dangereux mais pas Banni. Il protège les autres et lui.

Le ton d’Henry était si dur et si froid que la Mante perdit instantanément son sourire.
« Ah oui, un Protecteur ! Déclara-elle d’un ton moqueur. Je n’ai vu qu’un tas de chair informe qui se mutilait ! Remerciez-moi plutôt de l’avoir endormi, ce qui lui a empêché de mourir. »
- Un Protecteur doit protéger, si il n’est pas à la hauteur, il se donne la mort ou il tue et devient un Banni, répondit presque mécaniquement Henry, la voix tendue.
« Dony ne tuera personne s’il échoue dans sa mission, il se donnera la mort. Il a cru que j’étais mort et il voulait mourir… »

Le vieux Déformé marqua un temps de pause, penseur, puis déclara d’un ton toujours plus froid : « Vous ne tentez pas de le blesser, et tout ira bien, mais je conseille de ne pas trop vous approcher. Si vous m’emmenez le voir, s’il voit que je vais bien, ce sera bien pour votre sécur… »
- C’est moi qui fait l’Ordre ici ! Je sais ce qui pourrait être bénéfique pour notre sécurité, mettre vos têtes sur des piques pour faire déguerpir ceux qui nous menacent ! Hurla le Loup sans aucune retenue, visiblement excédé par la tournure de leur entretien.

Le silence d’Henry fut leur seule réponse. Il s’était renfermé dans un mutisme si puissant qu’il ne réagissait plus à aucune parole ni gestes de ses interlocuteurs, ses yeux gris regardant fixement le mur en face de lui, en tailleur, une moue rageuse figée sur son visage marqué par le temps.
Une bonne vingtaine de minutes plus tard, Henri perçut le bruit d’une paire de bottes qui quittaient les geôles. La Mante venait de mettre fin à l’interrogatoire.
Le bruit du grincement de la porte, quant à lui, mis fin au mutisme du Déformé. Il sentait le danger approcher avec le bruit calme et sinistre des bottes du Loup.

« Si tu ne parles pas, tu es inutile. Je vais pouvoir jouer un petit peu avec toi. Et qui sais, peut être que tu reparleras, fils d’immondice.» Lança le Loup d’une voix neutre.

Henri ne bougea pas, mais des gouttes de sueur commençaient à perler sur son front, au fur et à mesure que les bruits métalliques des outils que le Loup faisait tourner dans ses mains se répercutaient contre les murs de la cellule.
Un coup de pied le percuta à la tempe, le faisant rouler jusqu’au fond de la pièce. Le Loup l’attrapa par les poignets, et des anneaux métalliques fixés au mur se refermèrent sur les bras d’Henry, désorienté, mais toujours conscient et silencieux.
Le Loup déboutonna tranquillement la chemise d’Henry.
La lame froide du scalpel se posa délicatement contre son torse, et le Loup siffla en découpant rapidement une fine couche sa peau, laissant une estafilade brulante en travers de sa poitrine. Un nouveau coup de pied vint comprimer sa cage thoracique, lui coupant la respiration quelques secondes, le temps que son tortionnaire change d’outil et continue sa besogne.
Une pince se plaça doucement sur les côtés de son genou droit, et vint brutalement comprimer sa rotule. Son genou gauche subit le même sort quelques secondes plus tard, et le Loup laissa les deux pinces faire leur office morbide. Les carotides d’Henry commencèrent à gonfler, et sa mâchoire sa crispa durement. Dans ses tempes tambourinaient les battements de son cœur. Il était tétanisé de peur. Le Loup sourit, fier de son œuvre, il alluma une cigarette et tira fortement dessus, de façon à ce qu’elle devienne brulante, puis l’écrasa doucement sur le menton de son prisonnier qui ne laissa pas s’échapper un seul son, mais grimaça, les mâchoires toujours plus serrées. Il avait senti une de ses dents se fendre sous l’effet de la pression.

« T’es un dur à cuire, tu dis toujours rien. Ou alors, tu es une fillette qui a trop peur pour ouvrir la bouche. Je vais te tuer. Tu ne veux pas avouer pourquoi tu es là n’est-ce pas ? Tu veux encore me raconter tes histoires de Nécrose ? Vous avez de belles histoires chez les mutants.»
Une nouvelle incision cisailla de nouveau sa poitrine, cette fois plus profondément dessinant un x sur ses maigres pectoraux.
« Et si je te coupait la langue ? Elle n’a plus l’air de te servir à grand-chose. » Reprit le Loup, d’un ton toujours sinistrement calme et méthodique, tout en effleurant la lame de son scalpel sur le visage d’Henry. De toute évidence, la torture était une routine pour lui.

Henry frissonna, ses genoux lui faisaient horriblement mal, il sentait ses rotules craquer doucement, les pinces forçant sur ses os abimés par le temps, mais il ne disait toujours rien.
« Oh, attend, tu as l’air de souffrir. Laisse-moi t’aider »
Le Loup retira les pinces, Henry se détendit instantanément tout en poussant une longue expiration. Les anneaux métalliques s’ouvrirent brutalement, et il tomba les rotules à terre. Un craquement inquiétant se fit entendre, et cette fois, Henry hurla.

« Ha, finalement, tu peux encore émettre des sons, gardons ta langue un petit moment. »

Une droite violente lui percuta l’arcade, qui cassa, et lui fit faire volte-face. Il cracha du sang, et une dent suivit. Le Loup lui arracha sa chemise, et le vieux Déformé tomba brutalement face contre terre, laissant apparaitre les deux excroissances dans son dos, pendantes, informes et inertes.

« Ce que tu es laid. Pourquoi vis-tu, fange d’humanité ? Ta mort est la solution à nos problèmes, mais aussi à la souffrance que la vie t’a infligée. Je te plains tu sais, ne pense surtout pas que ma haine me pousse à mettre fin à tes jours, c’est au contraire mon amour pour la vie qui m’ordonne de le faire. » Souffla doucement le Loup à l’oreille du Déformé, d’un ton si doux qu’il en devenait vicieux.
Il attrapa de nouveau les poignets du prisonnier en piteux état, et lui écrasa la face contre le mur afin de le suspendre à nouveau. Les anneaux métalliques claquèrent, et Henry sentait qu’il perdait peu à peu tous ses sens. La douleur masquait tout, et allait lui faire perdre connaissance.

« Ces choses qui pendent dans ton dos vont surement beaucoup intéresser la Mante, je vais commencer par les retirer pour faciliter leur dissection. Ne t’inquiète pas, elle fera de grandes choses avec ça » continua le Dirigeant tout en contournant les omoplates de son prisonnier au scalpel.
« Ou pas, ajouta il après avoir attrapé une scie rudimentaire. Tout dépend de ton utilité au fond. J’ai peu d’espoir, mais tentons le coup, qui sait, ces choses peuvent peut être nous soulager si l’on choppe la chiasse. »
Il sourit de nouveau, prenant plaisir à humilier sa victime, son regard vicieux laissant clairement apparaitre la démence alors qu’il posait délicatement son instrument sur la base du bras difforme. La tête d’Henry retomba et son corps se détendit, il avait sombré dans l’inconscience.

Lorsque le Loup entailla la chair de l’excroissance, elle bougea si rapidement qu’il ne réalisa pas ce qu’il lui arriva. La masse de chair pendante et difforme s’était gonflée en un bras, compact, tendu et démesuré. D’un mouvement aussi rapide qu’un coup de feu, la main de l’excroissance avait attrapé le visage du Loup, et l’avait entrainé vers le mur à quelques dizaines de centimètres derrière lui. La violence du choc fut telle que le visage du tortionnaire éclata quasiment instantanément au contact de la pierre, lui arrachant le cou du reste du corps, qui tomba au sol, décapité, ses instruments de torture toujours en main.
Le mur avait été enfoncé, et l’impact rappelait celui d’un petit caillou sur du verre.
L’excroissance se rétracta, et repris sa forme initiale. Plus rien ne bougeait.
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