Chapitre 11:
– Clarisse, qu'est-ce que tu fais ?
– Caleb, fais-moi confiance. Empêche les de tirer.
Il se retourne vers ses hommes et tend son arc.
– Le premier qui tire je lui lance ma flèche en plein dans son crâne, compris ?
Ils baissent tous leurs arcs.
Chloé me regarde avec des yeux interrogateurs mais je ne lui réponds pas. Je me dirige tout droit vers le loup blanc.
Je suis presque sûr que c'est lui.
Je l'espère.
– Snow, c'est toi ?
L'animal tourne la tête dans ma direction et lève les oreilles.
Il m'a reconnu.
Il s'élance vers moi et me saute dessus en me léchant le visage.
– Snow, je t'ai retrouvé !
Mes larmes coulent une fois de plus sur mes joues. Mais pour une fois se sont des larmes de joie. Ça ne m'était pas arrivé depuis longtemps, de pleurer de joie.
Il m'a tellement manqué, je n'en reviens pas qu'il soit encore en vie. Moi qui pensais qu'il avait été mangé par des infectés, je pourrais presque dire qu'il est immortel.
Je m'accroupis et Snow pose sa tête au creux de mon épaule. Je passe mes bras autour de son cou et le sers très fort contre moi. J'ai bien cru ne jamais le revoir.
Pas loin de nous une biche passe en galopant. Je comprends mieux pourquoi Snow était dans cette forêt, il a faim.
Je me redresse. Snow a les oreilles pointées dans la direction de la biche. Il jette un regard vers moi et je lui fais un signe de la tête.
En même temps nous nous élançons dans la direction de cette pauvre biche.
Tout en courant du plus vite que je le peux, je sors mon arc et une flèche.
Je sens mes cheveux voler dans le vent, je respire à plein poumon cet air. Il a longtemps que je n'avais plus couru comme ça. En à peine quelques secondes, je ne vois déjà plus Caleb et les autres qui nous regardent partir, bouche bée. Ils ne doivent pas comprendre ce qui se passe. Je lâche un petit sourire en pensant aux têtes qu'ils doivent faire.
La biche est arrêtée. Je mets derrière un arbre pour ne pas être vue. Snow continu d'avancer vers elle en rampant dans les hautes herbes de la forêt pour ne pas être vu non plus.
3…
Je prépare ma flèche.
2…
Je vise la biche.
1…
Snow saute sur la patte postérieure droite de la biche et moi je lui décoche une flèche en pleine tête pour ne pas abîmer la chaire.
Je m'approche et découpe la patte que Snow a mordu. Je la dépose dans la sacoche qu'on ma donné pour mettre les carcasses d'animaux. Je la réserve pour Snow, il l'a bien mérité. J'enlève ma flèche et tire la biche pour la ramener à Caleb.
Tout le monde est étonné de nous revoir revenir avec la biche. Chloé me lance un énorme sourire et vient m'ébouriffer les cheveux. Caleb, lui, me regarde seulement en me souriant et ne me dit rien. Tous les autres viennent me féliciter.
Personne ne pose de question sur Snow.
Je me penche vers lui et lui caresse la tête. Il est génial. Il m'a tellement manqué.
*
– Merci pour la biche. On ne l'aurait pas ramené si vous n'aviez pas été là.
– De rien, ça nous a fait plaisir.
– Oui j'ai cru comprendre ça. Je ne savais pas que tu pouvais courir aussi vite.
– Y a pleins de trucs que tu ne sais pas sur moi Caleb.
– Oui c'est sûr, à demain petite Clarisse.
Il s'approche de moi m'attire vers lui. Il pose une main dans mes cheveux et serre une mèche entre ses doigts. Il dépose un baiser très tendre sur mes lèvres et repart.
Je reste quelques secondes sans bouger.
J'ai l'impression de trahir Thomas en faisant ça. Certes il est mort, mais la première fois qu'il m'a embrassé j'étais encore avec Tommy. Et puis la dernière fois qu'il a fait ça, il a fait comme s'il ne s'était jamais rien passé.
Chloé rentre dans ma chambre me sortant de mes pensées.
– Qu'est-ce que tu fais planter là ?
– Heu rien, Caleb vient de partir.
– C'est pour ça que je viens de le croiser, je me demandais ce qu'il pouvait bien faire ici cet idiot.
– Tu le détestes toujours autant ?
– Oui ! Mais toi tu n'as pas l'air de partager mon avis, je me trompe ?
– Tu dis n'importe quoi…
Elle saute sur mon lit s'allonge et tapote la place à côté d'elle.
– Allez, raconte-moi tout.
Je lui souris et la rejoins sur le lit.
Je lui raconte tous les détails que je peux sur Caleb et moi en passant le premier baiser.
Une fois mon histoire terminée, elle me lance un grand sourire et se jette à mon cou.
– Vous êtes trop mignons !
– Chloé !
– Non vraiment. Même avec moi il n'a jamais été aussi souriant et puis ce moment après l’entraînement, je ne l'avais jamais vu comme ça. Quand je suis arrivée, avant que vous vous sépariez, j'aurais presque pu être jalouse si je le détestais pas déjà. Il n'a jamais été comme ça tu sais.
– Peut-être, mais le souvenir de Thomas est encore là. Je ne peux pas faire ça. À chaque fois que je suis avec Caleb, je pense à Thomas. C'est vraiment glauque. C'est trahir Thomas et je ne veux pas faire ça et puis pour toi aussi. Même si tu dis le détester je suis sûre qu'au fond de toi tu l'aimes encore.
– Tu te souviens quand je parlais avec Thomas dans l'avion ? Et bien les trois quarts du temps on parlait de toi. Enfin non, Thomas parlait de toi. Il savait qu'un jour il mourrait et te laisserait seule. Il espérait vraiment que tu sois heureuse et que tu fasses ta vie. Clarisse, tu es jeune. Le monde dans lequel on vit en ce moment est le plus horrible de tous. Franchement tu n'as pas à te priver. Thomas voulait que tu sois heureuse. Et puis, pour moi, je peux t'assurer que tu te trompes. Caleb ne te l'a certainement pas dit mais il ne m'a pas quitté parce qu'on se supportait plus, quoi que c'est un peu vrai quand même, mais c'est surtout parce qu'il nous avait pris sur le fait Stiles et moi.
– Stiles et toi ?
– Stiles m'aimait depuis très longtemps et ne l'avait jamais dit à Caleb. J'étais la seule au courant. Au début, je lui ai fait comprendre que j'aimais Caleb de tout mon cœur et puis avec le temps Caleb est devenu de plus en plus méchant, surtout après la mort de sa mère. Là, il avait pété un plomb. C'est là que je me suis rendue compte que j'aimais Stiles.
– Qu'est-ce qu'il a fait Caleb ?
– Avant on était dix adolescents.
– Et alors ?
– Quand vous êtes arrivé nous n'étions que trois.
Non. Il a pas fait ça quand même ? C'est donc ça les choses impardonnable que m'avait décrit David.
Je trouve ça plus qu'impardonnable.
– Je sais que tu penses, que c'est un monstre mais pas du tout. Il a juste pété un plomb. Il était rendu à un stade où il n'en pouvait plus de tout ça.
– Mais pourquoi personne n'a rien dit ?
– Parce que personne ne sait que c'est lui qui a fait ça. Il n'y avait que sa famille et la mienne qui était au courant. Caleb ne les tuait pas dans le campement, ça se passait toujours dehors. Avant, ils faisaient des groupes de deux et ils devaient rapporter le plus de nourriture. Sept fois Caleb est revenu seul en disant que son compagnon c'était fait mordre. Sept fois on a dû faire un tour de la zone pour s'assurer qu'il n'y avait pas une horde de zombie aux alentours, sept fois on n'a rien trouvé si ce n'est quelques zombies solitaires.
– Mais il ne s'en veut pas ?
– Ho que si, mais quand il les tuait, il ne savait plus ce qu'il faisait. Il pleurait pendant longtemps après avoir commis les meurtres. Il a même voulu mettre fin à ses jours pour ne plus tuer personne mais on lui a empêché de faire ça. Stiles est revenu vers lui à ce moment-là.
– Oui David m'a parlé de ça. Après la mort de leur mère, Stiles s'est isolé.
– Oui. Il en voulait beaucoup à David et Caleb mais ils n'ont jamais voulu comprendre pourquoi.
– Parce que c'était sa manière à lui de faire son deuil. Il écrivait des textes pour sa mère.
– Exactement. Je t'en surplis ne refuse pas Caleb pour ses erreurs du passé. Il s'en veut beaucoup et il ne supporterait pas de perdre encore des gens qu'il aime à cause de ça.
Je reste là sans bouger pendant dix minutes. Mon regard est perdu dans le vide. Je ne sais plus ce que je dois penser de Caleb. Dois-je l'aimer, le détester, en avoir peur ? Je ne sais pas.
– Tu sais Clari, je suis sûre qu'il t'aime.
– Je pense surtout qu'il joue.
– Non. Je suis prête à parier qu'il prend ça au sérieux.
– On verra bien demain. Tu restes dormir ?
– Bien sûr !
Elle s'allonge sous les couvertures et s’endort presque aussitôt.
Snow est au pied du lit. Je m'assoie à côté de lui et pose sa tête sur mes jambes. Il a quelques coupures sur son beau pelage blanc. Heureusement que j'ai pu le nettoyer, parce qu'il en avait vraiment besoin quand je l'ai retrouvé. Son poil était presque gris tellement il était sale.
Je remonte sur le lit et je m’endors à côté de Chloé.
*
– Clarisse !
Au même moment Chloé et moi sursautons. Je dormais tranquillement quand des coups se sont fait entendre derrière ma porte. J'avais au départ cru qu'ils appartenaient à mon rêve mais la voix de Caleb hurlant me prénom me fit comprendre qu'ils n'y provenaient pas.
Le soleil n'est pas encore levé. Que pouvait-il bien venir faire à cette heure ?
Je me lève, enfile un gilet et vais lui ouvrir la porte que je ferme toujours à clef pendant mon sommeil. Je ne voudrai pas me faire réveiller par un zombie en train de me vider le ventre avec ses dents. L'image qui apparaît grâce à cette pensée me donne la chaire de poule. Je sers fort le gilet contre moi.
– Prends tes affaires, on part. Tiens.
Il me tend un arc et des flèches.
– Quoi, tu veux partir à la chasse maintenant ?
– Non on peut plus retenir les zombies les murs vont bientôt tomber sous le poids des contaminés. Dépêche-toi, je n'ai pas envie de finir manger !
– Quoi ?
– Je t'expliquerai en chemin, il regarde derrière moi et aperçois Chloé, il fait une grimace. Toi aussi, dépêche-toi.
Je prends mon sac à dos et mets mon peu d'affaires dedans. Je prends mon jean noir, mes bottines noires et ma veste kaki. Chloé est déjà en train de se changer. Je commence à enlever mon bas de pyjamas quand je me rappelle que Caleb est toujours là.
– Ce serait plus facile si tu te retournais, Caleb.
Il pousse un grognement puis se retourne.
J'enfile mes habiles en gardant mon haut. Un tee-shirt noir. Je n'ai pas le temps d'en trouver un autre et de toute façon je crois biens que je n'en ai pas d'autre.
Je passe le collier de Snow autours de son cou et le tiens en laisse. Je sais que c'est débile mais je suis rassurée à l'idée de le savoir au bout de cette corde.
Je fixe bien mon sac à dos et mes flèches sur mon dos, je mets la laisse à mon poignet droit et tiens l'arc de ma main gauche.
Chloé est prête elle aussi.
Nous sortons tous les trois dans le couloir, en nous dirigeant vers la sortie.
Je profite qu'on soit en chemin pour demander à Caleb où nous allons.
– On a un berg. Nous trois et Marc on va le prendre.
– Et les autres ? Vos familles ? Toutes les autres familles ?
– Mon père partira en dernier avec Thibault et Elsa, les parents de Chloé. Ils doivent d'abord régler quelques détails et avant que tu ne me poses la question, non je ne sais pas ce que sont ces détails.
– Et les autres familles ?
– Elles dorment toutes.
Elles n'ont pas été prévenues ?
Je m'arrête net dans ma course. Je ne pensais pas qu'ils étaient capables de faire une chose pareille ! Quel bande de monstres, j'espère qu'il a une bonne excuse pour laisser autant de familles se faire massacrer.
– Dis-moi que c'est une blague Caleb !
Chloé et Caleb s'arrêtent à leurs tours.
Caleb me regarde dans les yeux. Je peux lire dans les siens de la colère, de l’agacement mais je reconnais aussi quelques traits de la culpabilité. Je sens au fond de lui qu'il veut autant que moi sauver toutes ces personnes, mais il ne fera rien. Parce que c'est son père qui dirige, parce que c'est tout simplement impossible.
– Clarisse, on n'a pas le temps. Papa reste ici avec les autres, il trouvera peut-être une solution pour eux, mais nous on doit y aller. Marc nous attend dans le berg alors dépêche.
– Parce que tu crois que je vais partir en sachant tout ce qu'on laisse ici ? Il reste plein de mondes, je ne les laisserai pas mourir. Chloé, ne me dis pas que tu approuves ce qu'il est en train de nous raconter ?
– Clari, on a pas le choix. Si on reste avec eux on mourra tous et alors on ne se sera battu pour rien. On sera resté en vie pour rien.
– Non !
– Si tu restes ici, tu vas perdre Snow. Quand tous les zombies seront là, tu ne pourras pas le sauver.
Caleb a retrouvé son regard fermé et sombre. S'il pense me faire changer d'avis en me regardant comme ça, il se met le doigt dans l’œil. Je ne laisserai pas autant de gens mourir. Je suis sûre qu'on peut les sauver. Il doit forcément y avoir une solution. Cela fait un an qu'ils réussissent par je ne sais quel miracle à survivre, alors que tout espoir semblait perdu pour tout le monde. Eux ont réussi. Ils ne vont pas mourir maintenant. Non ils doivent y arriver encore une fois. Si tout le monde prend les armes, je suis sûre qu'on peut tous les tuer et reprendre notre vie normal. Je sais qu'il y a encore de l'espoir !
– Clarisse, je suis désolé mais on avait prédis que tu ne nous suivrais pas, mais on a besoin de toi. Tu es peut-être notre seule chance de trouver un remède. Tu viens avec nous !
Caleb s'avance à toute allure vers moi et avant que je n'ai pu l'en empêcher il m'enfonce une aiguille dans le cou. Aussitôt, je sens tout le stresse de cette vie horrible me quitter. Je sens mes jambes m'abandonner et me laisser tomber dans les bras de Caleb.
Je rassemble le reste de mes forces pour essayer de donner un coup de poing à Caleb mais je n'ai déjà plus aucune force. Je n'ai même plus la force de retenir mais larmes.
– On ne peut pas les laisser mourir… droit de vivre… Toi… monstre…
Je perds le contrôle de ma langue et mes yeux sont lourds. Trop lourd. Je suis à deux doigts de perdre connaissance. Mes yeux se ferment lentement mais j'ai encore le temps de crier une dernière chose à Caleb.
– JE TE DÉTESTE !
Puis le monde s'écroule. Je suis plongé dans le noir complet. Ma tête me fait très mal, j'ai l'impression qu'elle va exploser. Mes poumons se contractent et ma respiration se fait plus lente. Trop lente pour pouvoir essayer de me réveiller.
Je suis bercée dans les bras de Caleb. Prise d'une hallucination, je rêve pendant deux secondes que c'est Thomas qui me porte. Qu'il m'emmène en lieu sûr. Dans un monde où le virus n'a jamais franchis les portes du laboratoire. Un monde où je sers toute ma famille dans mes bras. Ma famille…
Je commence à perdre de conscience et à rejoindre le monde des rêves.
Au dernier moment je m'entends dire tout bas : « Tu es un monstre Caleb ». Puis je m'endors.
Chapitre 12