Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

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aleclave66

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par aleclave66 »

Coucou

ça y est j'ai enfin terminé ton histoire (merci à Cazolie (si elle avait pas mis le lien sur Lucy Weasley je serais jamais allé voir) et à mon manque de livres à lire ces derniers temps (mes bibliothèques sont remplies et en même temps j'ai jamais rien à lire :cry: :( )) et mon sentiment se résume en un mot : GENIALISSIME !!!!!!!!!! :D :D :D :D

J'adore le personnage de Léonie mais je ne sais pas encore si je veux qu'elle finisse avec Danny ou avec Antoine parce qu'il y a des arguments pour et contre des deux côtés (je me suis même fait un tableau récapitulatif du pour et du contre de chacun des deux scénarios (oui je sais je suis bizarre mais je l'assume parfaitement)), donc je serais satisfaite qu'elle finisse avec l'un ou avec l'autre (par contre j'aimerais pas qu'ils se battent pour l'avoir parce que les triangles amoureux genre Twilight ça m'énerve beaucoup)

Sinon pour Luna, j'en étais sûre (enfin je me doutais pas qu'elle jouait un rôle si important mais je savais qu'elle avait quelque chose à voir dans cette histoire), c'était obligé qu'il y ait une troisième entité (vu que trois est l'un des chiffres "magiques" de l'Antiquité) et c'était logique que cette entité soit la lune (enfin pour moi et ma logique tordue).

Donc maintenant, la question est : quand est-ce que Léo découvre une tâche de naissance en forme de croissant de lune sur sa peau ? Et l'autre question est : Quand est-ce qu'elle va ouvrir cette fichue lettre pour enfin voir si son père parle de Séléné (j'ai une préférence pour les noms grecs donc je risque de n'utiliser que celui-ci).

Ah et je suis d'accord avec Cazo, il est possible que Gretel ait un rôle à jouer du mauvais côté de cette histoire (même si je pense que c'est un autre pion dans l'échiquier qui se fait manipuler comme Antoine)

Tu peux m'ajouter à la liste des prévenus s'il te plaît.
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 16 (2/3). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

-Allongez-vous contre moi, Watson.
-POURQUOI ?!
-Je me permet d'insister.
*le tire*
-Qu'est ce que nous faisons tapis ici?
*Allumant sa pipe*
-Nous attendons patiemment ... ce pendant ... que moi je fumes". *tirs de mitraillette au dessus d'eux*. J'ai dis patiemment !


Je vous jure, j'adore Sherlock Holmes (ceux qui lisent aussi Lucy le savent déjà, mais je préfère le répéter.). OK, je sais que ça n'a aucun sens de mettre une scène comme ça. Mais c'est une de mes préférées. Et Robert Downey Junior est un Dieu.

Bien, commençons !

Situation relativement paradoxale, aujourd'hui (oui, encore une fois). Alors je commencerais par le mauvais : Je demande une minute de silence en mémoire des 31 victimes (dernier bilan que j'ai vu) des Attentats de Bruxelles. Paix à leur âmes. Cousins belges, la Nordiste que je suis (Haut-de-Française? Non, ça ne passe pas!) est de tout coeur avec vous.


...



Maintenant, je demande une seconde minute de silence ... Pour quelque chose de moins avouable. Voyez-vous, est décédé ce jour un grand du football, Johan Cruyff, joueur néerlandais et triple ballon d'or. J'avoue que j'apprécie ce sport. Et que Monsieur Cruyff était un grand. Voilà pourquoi je me permet ce petit hommage.

...


Voilà qui est fait.

Mais malgré cette actualité ô combien affligeante ... ça fait deux jour que ej suis de bonne humeur parce que 1) J'ai relativement réussie ma khôlle d'SES, et 2) Pour la première fois en deux ans, on ne m'a pas retiré de point d'orthographe à ma copie de Français !! (et ça, croyez-le, c'est un vrai miracle !)


Bref Bref, vous vous en fichez éperdument, mais je suis tellement refaite que je tenais à le dire :lol:

Allez, ça suffit : Chapitre, que diable ! Bonne lecture les Enfants ! :)

AAAH, STOP : même question que pour L.W. : La mise en page, à savoir le "sautage" de ligne entre les dialogues, vous ennuie-t-elle? Parce que j'ai eu mon premier retour négatif là dessus, alors je pose la question à tout le monde :) Bref, Bonne lecture !


Chapitre 16 (2/3) : Cartes sur table.



Le week-end fut relativement pénible. D’abord parce que Danny continuait à être distant : il disparaissait la plupart du temps (et j’étais à peu près sûre de pouvoir affirmer que ce n’étais pas pour fumer), et quand nous le voyions, il était absent, comme plongé dans ses pensées. Callie et moi avions tenté de lui soutirer quelques informations, mais il restait toujours vague. Des problèmes familiaux. Je me demandais si cela concernait sa mère, pour qu’il reste aussi discret sur la question. Mais j’avais aussi peur que « affaire familiale » ne soit un nom de code pour « Geoffrey », et qu’il se serve simplement du temps pour enquêter seul. J’avais interrogé Antoine pour savoir si Danny était venu le voir, mais il m’avait répondu par la négative. Celui-ci commençait à paniquer. Tout d’abord, il pensait que le comportement de Danny avait à voir avec ce qui c’était passé jeudi soir, et je dus lui répétait plusieurs fois qu’il n’y avait aucun rapport. Et c’était quelque chose que je pensais. Danny m’aurait incendié bien plus que cela s’il avait sentis que je lui cachais quelque chose, et je ne sentais toujours pas de ressentiment de sa part à mon égard. Ensuite, il avait reçu deux photos ce week-end, dont une de sa sœur à son cours de musique, et ce malgré l’absence de lettre et d’instruction. Le corbeau maintenant la pression sur lui, de manière perpétuelle et cruelle. « Tu es sous ma coupe. Quoiqu’il arrive, et à jamais ». Les photos m’avaient angoissé, et j’avais passé des nuits pénibles vierges de tout repos, à faire des cauchemars avec la base de Lucas, Chloé Meynier, des Sirènes et des Corbeaux … Bientôt, cette histoire allait littéralement me rendre malade. J’ignorais comment Antoine avait fait pour supporter cette pression – et comment il faisait pour continuer. Le dimanche soir, Gretel réussit à réunir tout le monde dans l’infirmerie, Antoine, comme Callie et Danny. Ça avait été la première fois que nous nous retrouvions tous ainsi autour de Lucas, et Gretel avait sorti quelques-unes de ses provisions. Mais cette soirée fut le clou de ce week-end pourri, car je n’avais cessé de me battre contre la tension qui montait sans cesse entre Antoine d’un côté, et Callie et Danny de l’autre. J’avais peur, si la confrontation éclatait, de devoir me mettre ouvertement du côté d’Antoine – et ainsi assumer presque pleinement qu’il avait craqué, et que je leur cachais. Mais – Gaia soit louée ! (Ironie) – nous en n’étions pas arrivé là. Non, en réalité, le drame de la soirée fut quand Callie versa malencontreusement de la grenadine dans le verre de Danny. Danny ne s’en rendit compte qu’après avoir fini son verre, et il avait failli s’en étrangler. Il était allergique à ces colorants, et même si ce n’était pas une allergie particulièrement grave, elle n’en était pas moins contraignante. Gretel lui avait donné quelques médicaments à prendre, et ils avaient filé avec Callie. J’étais resté, quand Gretel avait prétexté vérifier une bonne fois pour toute que ma cheville allait bien, et nous avions passé le reste de la soirée à parler du maitre chanteur. Gretel était sceptique quant à la thèse de la directrice, mais non seulement elle n’avait pas d’autre idées, mais en plus qu’elle n’avait pas les cartes en mains. Antoine m’avait raccompagné jusqu’au château, soi-disant parce que c’était dangereux de se promener seule, mais j’en étais arrivé à croire qu’il m’avait raccompagné uniquement pour se moquer de mon dialecte (rappelons le, quasi-inexistant).

Dieu que je les détestais. Danny presque autant que lui.

Ce week-end fut donc tout, sauf reposant, et j’arrivai le lundi matin en SES à moitié endormie, malgré la triple ration de café que je venais de prendre au petit déjeuner. Danny arriva quelque seconde après moi, et je faillis m’étrangler de rire derrière mon cahier.

-Je ne veux pas un seul commentaire, me prévint-t-il en s’asseyant à côté de moi avec mauvaise humeur.

Une plaque rougeâtre s’étirait de son cou jusqu’à une partie de sa joue. Sans doute sa réaction allergique à la grenadine. L’hilarité acheva de me réveiller, et j’eus le plus grand mal à réprimer mon rire.

-La couleur est fortement à propos, ne pus-je m’empêcher de glisser.
-Oh, la ferme, Léo !

Je pouffai sous cape, et le laissai en paix. La matinée passa tranquillement, et Danny fut assez aimable malgré les éruptions cutanées sur sa peau. Il avait aussi des plaques à la main droite. Je me fis violence pendant des heures pour ne pas lâcher un seul commentaire là-dessus. L’heure du midi, il resta avec nous, et Callie commença à reprendre un commerce qui semblait lui tenir à cœur : les traditions de Sappho. Apparemment, après la séance de Spiritisme à Halloween, les étudiants les plus âgés avaient l’habitude de faire une petite fête privée, le dernier jour avant les vacances de Noël. Elles n’arrivaient pas de sitôt, mais elle commençait déjà à préparer le terrain avec Gretel – pour savoir le lieu, et cætera … Danny et moi avions échangé un regard profondément désespéré. Je savais que nous pensions la même chose : la situation ne prêtait pas particulièrement à ce genre de réjouissance. Je sortis prématurément de la cantine, pour aller chercher mes affaires de français et d’espagnol dans ma chambre. J’avais à peine fait deux pas dehors qu’une voix cingla derrière moi :

-Elle n’est pas sérieuse, là, Callie ?

Je fis un véritable bond en me retournant. Antoine Meynier était appuyé près de la porte de la cantine, les yeux lançant des éclairs. Avant que je ne puisse me remettre de ma surprise, et il reprit :

-Elle ne pense vraiment qu’à faire sa petite fête alors que Lucky est dans le coma et que toute l’école est en danger ?
-Je t’en prie, ne lui dis surtout pas ça, tu vas déclencher les hostilités, le prévins-je avec un soupir. Tu as tout entendu ?

Il hocha sèchement la tête, pas calmé pour deux sous. Je réprimai un nouveau soupir, et lui fis signe de la tête d’aller dans les bois. Je préférais que les gens ne nous voie pas ensemble. J’avais bien trop peur qu’il ne le dise à Callie et Danny et que ceux-ci demandent frontalement des explications. Et comme chacun savait, je ne pourrais pas mentir à Danny. Déjà qu’après la petite séance de dimanche soir, ils m’avaient attendus de pied ferme pour savoir ce qu’on s’était dit … je ne devais mon salut qu’à la bonté de Danny, qui avait remarqué mon état de fatigue, et m’avait laissé en paix. Une fois à l’abri des arbres, je me tournai vers Antoine avec lassitude.

-Est-ce que tu pourrais éviter de me sauter à la gorge de la sorte ? Le taclai-je immédiatement. Je ne suis pas responsable des agissements de Callie, j’ai à peine écouté ce qu’elle disait !
-La dernière fois qu’on a fait ce genre de truc, une bougie m’a explosé à la figure ! me rappela-t-il durement, sans prendre en compte de mes paroles.

Je comprenais bien ce qu’il y avait derrière ce rappel. Jeudi soir, nous avions conclu que les bougies avaient été « ensorcelées » on ne savait comment pour créer l’illusion quand un enfant de la Lune l’allumerait. Une fois une allumée, les autres dans un périmètre proche explosaient à leur tour, comme des dominos. Ça se tenait. Quand nous avions réessayé, avec Danny, c’était moi qui l’avais allumé – et elle avait explosé, même si cela avait été tardif. Parce que moi aussi, j’avais le sang de la Lune dans mes veines. L’intuition de Danny avait été exacte : Antoine avait été clairement visé par cette attaque. Une nouvelle intimidation du corbeau, en réponse à un arrêt temporaire du chantage. En refaisant une soirée pareille, il prenait le risque d’une nouvelle attaque psychologique – attaque qui pourrait toucher un nombre plus grand de personne.
Et pire que tout, il prenait le risque que le corbeau ne fasse entrer des Créature, et que les brèches qu’il avait créées servent à tuer tout ce beau monde.
L’idée me tordait le ventre à moi aussi.

-Peut-être que d’ici là, on aura retrouvé le coupable, tentai-je s’optimiser.

Mais le visage d’Antoine demeurait dur et fermé. Je sentis un élan de frustration bouillonnait en moi. Entre les humeurs de Danny et celle d’Antoine, j’étais bien servie, tiens. Les deux mecs les plus lunatiques que la terre n’ait jamais portés. Mais dans le cas d’Antoine, cela me paraissait plus légitime (mais non moins agaçant).

-Ecoute, d’ici là, il se sera passé des choses, plaidai-je en lançant des regards suspicieux autour de moi. On aura surement des affaires autrement plus urgentes à traiter que la fête de Noël.

Antoine se rembrunit, mais ne dit rien. Il savait de quoi je voulais parler. D’ici là, son maitre-chanteur aura envoyé une autre lettre, et nous serions tout deux face à un dilemme (avec toujours Gretel en Joker). L’idée même faisait remonter la bile à ma gorge, mais je m’efforçai de continuer :

-On devrait quand même en parler à Léna.

Antoine réagit exactement comme je l’avais prédit : il s’éloigna de moi, et commença à faire les cent pas comme un lion courroucé.

-Non, refusa-t-il avec hargne. Pas question.
-Tu l’as dit toi-même, elle ne fait plus partie de tes suspects.
-J’ai dit non, Birdy !

J’inspirai profondément pour garder mon calme. L’obstination d’Antoine était prévisible, et je savais bien qu’il était presque impossible de le faire plier. Ce gars-là avait la volonté dans le sang.

-Meynier, au prochain arbre que tu marqueras, ce sera la moitié du Sceau qui cessera fonctionner, lui rappelai-je aussi posément que possible. Autant dire qu’on sera aussi vulnérable ici que dehors.

Antoine me lança un regard où se mêlaient cruellement la colère et la résignation. Je savais que je taillais dans le vif, mais je n’avais pas le choix. Le dilemme qui se profilait m’angoissait littéralement, et j’avais bien l’impression que plus le temps avançait, moins j’étais capable de prendre une décision. Je ne supporterais pas de condamner quelqu’un à mort. Et c’était bien ce que le corbeau faisait subir à Antoine.

-Ça ne concerne pas que nous, Antoine. C’est l’école toute entière dont on parle.
-Il s’agit de Lucas, martela-t-il d’une voix saccadée, les dents serrées.
-Mais aussi du reste des élèves ! Bon sang, Antoine, tu veux une nouvelle Elodie ?

Il eut un geste brusque, et me lança un regard réellement furieux, si intense qu’une peur irrationnelle m’envahi. Je reculai d’un pas, jeta un regard rapide au sol pour vérifier qu’il ne se dérobait pas sous mes pieds. Mon cœur battait à la chamade, et je n’arrivai plus à regarder Antoine en face. Puis j’entendis un bruit sourd. Je jetai un bref coup d’œil devant moi. Antoine venait sans doute de frapper le tronc de l’arbre de son poing, et y avait laissé sa marque. A présent, il me tournait le dos, une main sur la tête, et l’autre poing serré, comme s’il s’apprêtait à donner un nouveau coup. Un goût amer me monta à la gorge. Il me faisait toujours un peu peur, quand il faisait ça.

- Calme-toi, soufflai-je, une main sur l’arbre derrière moi. Ce n’est pas comme ça qu’on va trouver une solution.

Ma voix tenait plus du gémissement que du souffle, mais à l’instant, je m’en moquais. Mon cœur battait douloureusement à mes tempes. Antoine ne parut pas m’entendre sur le coup, mais petit à petit, ses épaules se détendirent, et son poing se desserra. Il alla s’adosser au tronc qu’il venait de marquer, et passa les doigts sur sa trace, les traits crispés.

-Mouais, murmura-t-il, comme pour lui-même. Je pense même qu’on ne trouvera aucune solution …

A des moments, c’était aussi ce que je pensais. Jamais on retrouverait le coupable. Le Sceau continuerait de s’effriter, des gens mourraient peut-être, et on serait impuissants face à cela. Mais l’entendre dire me soulevait le cœur. Je m’avançai prudemment de quelque pas, tout en restant hors de sa portée.

-Nous, non, admis-je, presque à contrecœur. Antoine … Je sais que tu m’as dit tout ça à cause de mes origines, mais le fait est que … pragmatiquement parlant … Je ne peux pas t’aider. Descendante de la Lune, ou non.

Ça me faisait mal d’avouer ça. Ma fierté en était particulièrement amputée. Mais le fait était que c’était la stricte vérité. Antoine ricana un peu avec dépit.

-Je sais bien, princesse. Mais tu es la seule qui puisse entendre l’histoire en entier. J’en avais marre de faire un monologue.
-Je comprends, lui dis-je avec sincérité. Mais ce qui se passe nous dépasse complétement. J’ignore si la personne qu’on cherche est Devyldère, mais si tu n’as pas réussis à avoir de preuve de sa culpabilité, alors que tu as fouillé son bureau, je n’en aurais pas d’avantage. Avoue-le : même à deux, on est démesurément impuissant.

Antoine ne dit rien pendant quelques minutes, mais je sentis que mes mots avaient fait mouche. Il méditait. Je m’autorisai un nouveau pas en avant, et il ma lança un regard farouche. Je me figeai.

-Tu as peut-être raison. On est impuissant. Mais je ne vais pas aller ramper devant Léna pour autant.
-C’est de l’orgueil mâle mal placé, ça, grommelai-je à mi-voix.
-J’ai entendu, Birdy. Ça ne change rien. Même si je l’ai rayé de la liste, je n’ai pas plus confiance en Léna qu’en Devyldère.

La frustration et l’angoisse se chargèrent de répondre à ma place :

-Moi, si ! Comment peux-tu croire qu’elle ne cherchera pas l’assassin de Geoffrey ?
-Parce que ce n’est peut-être pas la même personne ! répliqua Antoine. Tu l’as vu : j’étais trop jeune pour corrompre le Gardien de L’arène ! Or, je suis le seul marqué par Luna depuis Einsenhover (il me lança un bref regard). Si on prend en compte la tuerie de l’Arène, l’énigme devient un véritable casse-tête. Qui a marqué cet arbre, le mystère reste entier. Il faut avoir du sang de Luna pour pouvoir manier le couteau.

Son regard s’attarda un moment sur moi. Mais je sus que ce n’était pas que moi que le regard désignait. Je frémis s’indignation.

-Tu ne pense quand même pas que c’est ma famille qui a gravé le premier sigle ?
-En fait, je pensais surtout à ton père.

Il avait dit ça d’un ton superbement détaché, impassible, et sans me regarder. Je mis un moment à assimiler ses paroles, et la colère commença à me ronger. Je n’étais pas sure de pouvoir en entendre plus.

-Espèce de salaud, haletai-je.

Je le dépassai vivement, et voulus prendre la direction de l’école, mais il m’agrippa le bras. Je voulus me dégager, mais il leva la main, menaçant. Oh, pas me frapper. Mais je sentis son aura s’épaissir autour de lui, comme un avertissement, flottant comme un nuage, menaçante. Je sentais que cette fois, le sol allait se dérober sous moi pour de bon. Je lui lançai un regard assassin, mais arrêtai de me débattre.

- Lâche-moi, lui intimai-je froidement.
-Birdy, je t’ai dit ça sans la moindre certitude. La tuerie d’il y a sept ans, je m’en fiche. Là, ce que je veux, c’est trouver celui qui met mon frère en danger. Cependant, c’est un fait : l’unique personne en rapport avec Sappho qui ait pu faire la marque de l’arbre de l’Arène, c’est ton père. J’ai fait le calcul : il est mort deux ans après Geoffrey.

Je le foudroyai du regard, piquée au vif. Ses yeux étaient eux inflexibles, son attitude détachée. Il me tenait fermement, mais sans paraître forcé. Sa nonchalance me délia la langue et je crachai d’une voix glaciale :

-Continue à répéter ça, et je te jure que tu vas le regretter.

Antoine eut un petit sourire torve, et me lâcha le bras. Je me rendis alors compte que la colère avait masqué la douleur, parce que je sentis des fourmis me parcourir l’avant-bras. J’y jetais un coup d’œil incrédule en le frictionnant. J’étais sans doute encore quitte pour un bleu. Encore une fois. Je m’écartai d’Antoine d’un bond.

-Tu traite tes alliés d’une bien étrange manière, remarquai-je sombrement en relevant ma manche pour voir les dégâts qu’avait fait Antoine sur mon bras.

Une belle marque rouge commençait à apparaître sur ma peau blanche. Je grimaçai en la tâtant, et lança à Antoine un regard soupçonneux. Celui-ci avait les yeux vrillés sur Sappho, la mâchoire contractée.

-Oh, surtout ne t’excuse pas, je vais survivre …, grommelai-je en remettant ma manche. Je ne dirais rien à Léna, si c’est ce que désire le petit prince. Mais je te jure, s’il y a un mort d’ici là …
-Birdy, s’il te plait.

Sa voix claqua comme un fouet à mes oreilles. Pas parce qu’elle était sèche. Elle était suppliante. Ses lèvres s’étaient pincées, et il avait fermé les yeux, comme si mes mots l’avaient physiquement blessé. Il ne voulait pas que je lui rappelle ce que les élèves risquaient à cause de lui.

-Elle ne comprendra pas, Léo, souffla-t-il ensuite. Quoique je dise, elle me considérera comme responsable.
-N’importe quoi.

Mais la remarque me mit tout de même le doute. Léna détestait-t-elle Antoine au point de lui faire porter le chapeau ? Antoine me lança un regard perçant, mais ne répondit rien. Je soupirai et m’ébrouai pour reprendre la route vers Sappho. Il me laissa faire, mais avant de partir, je glissai :

-Mais il n’empêche que ce n’est pas une décision que tu peux prendre seul, petit prince. Alors un jour ou l’autre, il faudra demander de l’aide.

Et sans attendre sa réponse, je redescendis en vitesse en direction de Sappho, et me dépêchai vers ma chambre. Mon cœur battait à la chamade alors que les mots d’Antoine tournaient en boucle dans ma tête, prenant, er perdant leur sens à chaque fois que je me les répétais. « L’unique personne en rapport avec Sappho qui ait pu faire la marque de l’arbre de l’Arène, c’est ton père ». Je fermai un peu trop violemment la porte de ma chambre. Mes yeux se portèrent instinctivement sur la photo qui n’avait toujours pas réapparu, et j’attendis ce qu’il me semblait quelque minutes en tournant comme un fauve dans ma chambre, lançant des regards à la dérobée à mon ordinateur, à l’emplacement vide de la photo et à mon téléphone. Je finis par ne plus y tenir, et m’assis résolument à mon bureau pour d’allumer mon ordinateur. Après quelque clic, le visage de mon père apparut à l’écran, souriant, les cheveux de jais ébouriffés.

-Papa…, gémis-je à l’écran. Ce n’est pas possible, après tout ce que tu m’as caché, pas ça en plus ?

Mon père eut le culot de rester coi. Je ne pouvais pas croire une minute les accusations d’Antoine. Mais c’était un fait indéniable : elles avaient leur sens. L’angoisse et l’incertitude me faisaient presque arracher mes cheveux. Je passai quelque instant fixé sur l’image, et fit défiler d’autres photos avec des clics nostalgiques. Je cherchai encore la photo de mon père sur laquelle j’avais vu la marque de Gaia, et je zoomai, histoire me faire encore plus mal. Je devais avoir des pulsions sadomasochistes. Les larmes me vinrent aux yeux sans que je ne puisse les en empêcher, et j’ouvris mon tiroir. Je fouillai fébrilement dedans, sortant des affaires pour dégager la lettre que j’avais planqué tout au fond. Je fixai les belles lettres qui formaient mon prénom sur l’enveloppe, et l’envie irrépressible de l’ouvrir me repris. Je la fis couler un moment entre mes doigts, bouleversée et tentée. Qu’allais-je apprendre de plus sur l’homme que je n’avais pas connu ? Mes doigts finirent par se figer sur un coin et mon index glissa presque contre mon gré dans la fine ouverture. Je l’aurais sans doute déchirée, j’aurai peut-être fini par rompre la glace, mais quelque coup à ma porte m’interrompirent. Je sursautai brusquement, et lâchai la lettre de surprise. Sans attendre mon assentissaient, Danny passa sa tête par l’entrebâillement. Je clignai des paupières pour chasser mes larmes, fulminant intérieurement, et me penchai pour ramasser ma lettre et cacher mon trouble. J’avais de la chance, habituellement, il ne s’embarrassait pas de toquer …

-Oui ?
-Tu étais juste dans ta chambre ?

Je me redressai, surprise par la phrase autant que par le ton incrédule sur laquelle Danny l’avait prononcé.

-Et où voulais-tu que je sois ? Lâchai-je avec un brin de sécheresse.

Les yeux de Danny s’agrandirent.

-Oh, je ne sais pas, moi … En cours de français, peut-être ?

Ce fut au tour de mes yeux de s’écarquiller, et je jetai un regard affolé à l’horloge de mon ordinateur. Mon cœur s’emballa, et je laissai mon front aller vers le clavier avec lassitude. J’avais passé une fichue heure sur les photos de papa. Et j’en avais séché français.
Tout ça, c’était de la faute d’Antoine !

-Je veux une corde, déclarai-je à Danny sans me redresser.

Je l’entendis se glisser derrière moi en ricanant doucement, et il me prit par les épaules pour me ramener contre mon dossier avec douceur. Je me laissai faire comme une poupée de chiffon. J’avais l’impression d’être un pantin suspendu aux aléas des conditions d’une enfant de Gaia – qui venait d’une lignée Lunaire.

-Pas maintenant, petit oiseau, refusa Danny avec détachement. D’abord on a un cours d’espagnol dans cinq minutes.
-Pas envie.

J’avais laissé échapper ça sans réfléchir, et je me rendis compte que c’était lé vérité. La prof d’espagnol était gentille, mais c’était les cours les plus bordéliques, et la matière que j’aimais le moins (sans doute parce que je ne m’étais pas remise du drame familial quand j’avais préféré l’espagnol à l’allemand en quatrième. Ma grand-mère avait fini par me faire détester la langue hispanique). Danny pressa mes épaules.

-Allez Léo, c’est la dernière heure, soupira-t-il en faisant courir ses doigts sur mes épaules. C’est …

Il s’interrompit soudainement, et ses doigts se figèrent à la base de mon cou. Je venais de cliquer sur une touche de mon ordinateur, au hasard, et le visage familier de mon père réapparut à l’écran. Après coup, je regrettai, surtout quand j’entendis le silence de Danny. Je rougis jusqu’aux oreilles, et fermai résolument mon ordinateur d’un geste vif.

-Ouais, t’as raison, on y va.

Je me levai alors, et me penchai pour prendre quelques affaires sur mon bureau et les mettre dans mon sac. Quand je me retournai vers Danny, je me figeai. Il avait les yeux fixés sur l’enveloppe que j’avais omis de ranger. Mon cœur tomba dans ma poitrine. Ciel que je détestais son intuition ! Comment j’allais justifier tout cela, moi ? Sans prendre compte de son regard inquisiteur, je pris brusquement la lettre, et la fourrai dans mon tiroir, hors d’haleine. Danny continua de fixer le tiroir, une lueur étrange traversant ses iris.

-C’est ce que je crois ? demanda-t-il à voix basse.

Pour toute réponse, j’hochai brièvement la tête en m’avançant vers ma porte. Mais il ne me suivait pas. Il restait planter devant mon bureau, les yeux dans le vague.

-Tu ne l’as toujours pas lue ? Vérifia-t-il sur le même mode.
-Non. Danny, on va être en retard en espagnol.
-Pourquoi tu as passé une heure à regarder une photo de ton père ?

Sa voix avait des accents étranges, et me glaça. Il ne me regardait toujours pas, les yeux toujours rivé vaguement sur le bureau. C’était précisément la question que je redoutais, et je ne savais pas comment j’allais m’en sortir. Je sentis les rouages de mon cerveau tourner à une vitesse folle pour trouver une réponse adéquate, mais je me savais piégée. Quoique soit ma réponse, Danny sentirais que je lui cachais quelque chose. Je tentai le tout pour le tout une réponse des moins loyales, mais la seule qui me parut un minimum efficace :

-Affaire familiale.

Danny accusa le coup, sans broncher, ni même lancer le moindre petit regard agacé. La chose même qu’il répétait depuis des jours. « Affaire familiale ». Le pire dans tout cela, c’est que c’était vrai. Peut-être que la véracité de cette déclaration masquerait le reste, mais connaissant Danny, ça m’étonnerait fort. Je tripotai nerveusement la lanière de mon sac (histoire de me griller une fois pour toute), et lâchai d’une voix cordiale :

-Bon, on y va ?

Danny leva enfin les yeux vers moi, et je fis instinctivement un pas en arrière. Ce n’était pas le regard féroce d’Antoine, cet instant où on sentait qu’il était sur le point de se servir de ces pouvoirs de magiciens sur soi, mais il ne me glaçait pas moins. Ses yeux étaient rivés sur les miens, intense. Pourtant, je n’avais pas l’impression que c’était moi qu’ils voyaient. Un regard inquisiteur et perçant qui, en plus de me mettre mal à l’aise, me coupait le souffle. Je reculai encore, et cherchai la poignée par tâtonnement.

-Qu’est-ce qu’il y a ? M’enquis-je avec un froncement de sourcils.

Ma voix ne laissait pas transparaitre mon trouble, et j’en fus très heureuse. Les battements de mon cœur s’étaient accélérés. Et Danny ne me lâchai pas du regard. S’en suivit quelque instant meublé d’un silence particulièrement lourd de non-dits. L’ambiance était pesante, et ma jambe commençait à faire des bonds nerveux. Danny finit par détourner le regard et repris tranquillement son sac qu’il avait laissé à l’entrée de ma chambre. Il mit une main sur ma taille pour me pousser dehors, et me gratifia de son petit sourire de coin.

-Rien, petit oiseau. Allez, on y va.

J’eut une petite moue dubitative, mais Danny sourit encore, et posa sa main sur la mienne, qui était sur la poignée, pour ouvrir la porte. Nous nous dirigeâmes en silence vers le cours d’espagnol, et je m’assis à ma place sans adresser un regard à la classe. Nous étions une petite structure, et le moindre de nos gestes était jugé (notamment par Salomé Rosier, du reste). Alors je me doutais bien que pendant l’intercours, j’avais dû être le sujet de certaine conversation. Et je ne voulais pas croiser le regard d’Antoine Meynier. Notre dispute me restait en travers de la gorge. La prof arriva et le cours commença – ainsi que les bavardages. Je me pris la tête entre les mains.

-Je ne voulais pas venir, gémis-je à Danny. Honnêtement, à quoi ça sert ?

Danny sourit doucement, et me lança un regard de biais. Les regards qu’il me lançait en ce moment étaient étranges, comme s’ils n’étaient pas anodins. Mon crayon traça des traits aléatoires sur mon cahier.

-C’est important l’espagnol, Léo, me taquina-t-il doucement.
-Je viens d’une lignée d’origine Allemande, lui rappelai-je avant de me mordre l’intérieur de la joue.

Si je lui parlais de ma lignée, je risquai d’attirer son attention, et ce n’était pas quelque chose que je souhaitais. Mais il me lança à nouveau un regard étrange. Il m’agaçait, car je ne savais quoi en penser. Son comportement m’indiquait qu’il savait quelque chose me concernant, mais ça ne pouvait pas être les confidences d’Antoine. Si c’était le cas, son regard serait bien plus furieux. Là, il était juste … je n’arrivais pas à le définir. Comme s’il me testait silencieusement. C’était extrêmement désagréable, d’autant plus que ce n’était la première fois qu’il me faisait ces yeux. Il me regardait aussi comme ça au début. Je mis nerveusement une mèche de cheveux derrière mon oreille, et tentai tant bien que mal d’écouter attentivement la petite tornade espagnole qui babillait devant moi. Ma jambe commença à faire des bonds nerveux, et Danny me donnait régulièrement des coups de pieds sous la table pour me faire cesser. Quand mon genou prit trop d’amplitude, il y posa fermement sa main pour arrêter les bonds.

-Calme, Léo ! M’enjoignit-t-il en levant un sourcil. Qu’est ce qui te rend si nerveuse ?
-Je n’ai pas besoin d’être nerveuse, ma jambe l’est toute seule, précisai-je en un grognement.

Danny eut un petit sourire de coin.

-Elle a sa volonté propre ? Plaisanta-t-il avec légèreté. Comme l’anneau ?

Je souris malgré moi, et lui lançai un regard complice. Il me le rendit, et écrivit brièvement dans son cahier avant de lever la main pour participer. Je fus soulagée de la façon dont l’heure se passa. Danny était plus détendu, bien que distrait. Il passa la moitié du cours à regarder par la fenêtre, songeur, les sourcils froncés. La cloche retentit, sonnant ma délivrance. Je poussai un soupir en rangeant passivement mes affaires. Danny ne paraissait pas particulièrement pressé non plus. Il n’avait pas touché à ses affaires et regardait le tableau, les yeux vides. Une de ses main alla se perdre sur une des plaques sur sa joue.

-Ne te gratte pas, ça va empirer, observai-je en fermant tant bien que mal mon sac.

Il eut un sourire et laissa retomber sa main. J’avais l’impression que la couleur rouge s’était intensifiée, comme si les colorants qu’il avait ingurgités hier avaient détint sur sa peau. Je ris sous cape, et il me donna un coup de pied dans le tibia sans me regarder.je pris mon sac en me levant, et sourit à Danny.

-Tu viens, ou tu retournes te cacher ? Le raillai-je doucement.

Ses yeux se vrillèrent un instant sur moi, et me gratifia à nouveau d’un regard étrange. Il se redressa, et rangeant enfin ses affaires. Ses traits s’étaient crispés.

-Je dois parler à Raymond, m’avoua-t-il finalement en refermant son propre sac. Mais normalement je viens te voir après. Ça te va ?

J’haussai un sourcil et tentai de décrypter le ton sur lequel il venait de dire ça. Dans le doute, j’hochai la tête. J’ignorais si c’était une bonne idée puisqu’il y avait de grande chance qu’on parle de l’enquête. Et s’il demandait lui aussi si Antoine était sur le point de craquer … Je devais faire une drôle de tête, parce que Danny me prit doucement par le bras en passant devant moi.

-Tu es sûre que ça va ? S’inquiéta-t-il.
-Et toi ? Rétorquai-je avec un brin de sécheresse.

Danny me lança à nouveau un regard étrange, et me serra le bras avec un petit sourire avant de partir. Je fixai sa nuque avec appréhension, et soupirai en rajustant mon sac sur mon épaule. Quelqu’un vint se planter devant moi, et me bloqua le passage jusque la porte. Je levai les yeux sur lui, et reculai d’un pas avec un soupir de frustration. Antoine eut un sourire goguenard.

-Nerveuse ?
-Evidemment, tu me mets dans une situation impossible !

J’étais encore en rage contre lui. L’accusation contre mon père me restait en travers de la gorge, et le fait de devoir stresser chaque fois que j’adressai la parole à Danny me pesait de plus en plus. Je n’avais pas prévu que les révélations d’Antoine pourraient être si désastreuses sur ma santé mentale. Antoine eut un autre sourire, plus penaud.

-Ça va, Birdy. Tu m’as déjà prévenu qu’un jour tu diras tout à ton amoureux. Simplement, préviens-moi, que je prenne de l’avance.

Je lui lançai un regard furieux. Il cessa enfin de sourire.

-Ecoute, ce que j’ai dit tout à l’heure, tu n’es pas obligée d’en tenir compte, chuchota-t-il rapidement. Même si c’est quelque chose d’absolument plausible, mais d’invérifiable – d’autant plus que ton père est six pieds sous terre… Non, non, ne me fais pas ses yeux là, princesse, ajouta-t-il en voyant mon air offusqué.

S’il m’appelait encore une fois « princesse », il risquait fortement d’avoir mon pied dans un endroit douloureux propre à la gente masculine.

-Ce que je veux dire, c’est que je n’aurais jamais dû te dire ce que j’ai dit sur son père, acheva-t-il, hors d’haleine. C’était maladroit.
-Maladroit ? Répétai-je en contenant ma colère de mon mieux.

Il frotta sa nuque d’un air gêné, un demi-sourire à la fois embarrassé et frustré aux lèvres. Pendant une seconde, il ressembla tellement à Lucas que s’en fut douloureux. Mais assez efficace pour que je me radoucisse quelque peu.

-Ça va pour cette fois, l’excusai-je sèchement. Mais reparle une fois de mon père, et je te jure que je fais de ta vie un enfer.

Le sourire d’Antoine se fit amer.

-L’enfer, j’y suis déjà, mais c’est gentil de vouloir me faire visiter, railla-t-il.

Je lui lançai un regard agacé, mais je fus intérieurement embarrassée. Il avait raison sur un point. Sa vie était déjà un enfer. Je n’étais pas censé empirer sa condition. Mais le fait était qu’il ne me facilitait pas la tâche. Nous sortîmes de la classe en silence, réprimant tout deux notre hargne. Il m’expliqua qu’il avait reçu d’autre photo pour maintenir la pression, mais qu’aucune lettre ne lui été parvenue. Ce qui était relativement angoissant, parce qu’habituellement, les lettres qu’il recevait arrivaient sous deux jours. Il m’avoua aussi qu’il avait aussi loupé le français pour voir Gretel parce je l’avais énervé (c’était l’hôpital qui se moquait de la charité ?) et que c’était elle qui l’avait enjoignit à s’excuser auprès de moi (ce qu’il n’avait pas fait. Mais il aurait été exceptionnel de voir Antoine Meynier s’excuser. Il s’était déjà assez humilier comme ça.) Nous passâmes une heure dans un recoin de du château à discuter de ses pouvoirs, de Luna et du corbeau. Sans être agréable, la conversation fut relativement polie et se passa sans accroc. Il ne reparla plus de mon père, mais son mutisme à ce sujet ne faisait pas taire mon angoisse. J’étais toujours hantée par la possibilité que mon père ait pu tracer le premier sigle. Je ne voyais pas qui d’autre aurait pu le faire. Nous nous séparâmes relativement pacifiquement, et il retourna voir Lucas et Gretel à l’infirmerie. Je restai un moment à flâner dans le château, le regard dans le vague. Je croisai Raymond, qui retournait chez lui. Je lui fis signe, auquel il répondit par un sourire, mais j’eus l’impression que ni lui ni moi ne voulions nous attarder. Je n’avais pas très envie de parler de mon père maintenant, et il ne semblait pas être bavard. Je le regardai distraitement s’enfoncer dans la bibliothèque, et retournai rapidement à ma chambre.





AAAARGH. Frustration. Je pensais que ça passait, mais je fais vraiment des chapitre trop longs T.T (dites le si ça vous gêne, d'ailleurs ! - Oui, Cazo', je sais que tu aimes la longueur de mes chapitres :lol: )
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 16 (3/3). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Voici la fin. OUF. Bonne lecture (si j'étais VRAIMENT sadique, je vous la mettrais la semaine prochaine. Mais comme je vous l'ai dit en intro, je suis de bonne humeur, alors voilà ! : )

Chapitre 16 (3/3) : Cartes sur table.


J’ouvris laconiquement la porte, et fit un bond en arrière en étouffant un cri.

-Danny ! Je t’ai déjà dit de ne pas fumer dans ma chambre !

Danny me fit un petit sourire de coin, mais repris tout de même une bouffée. Il était assis sur l’encadrement de la fenêtre, une cigarette aux deux-tiers entamée aux doigts.

-Je t’avais dit que je passerais, me rappela-t-il à voix basse.
-Ah oui, mais je n’étais pas prête psychologiquement, rouspétai-je en posant mon sac au pied de mon bureau.

Mon regard se porta brièvement sur celui-ci et je me stoppai un instant en voyant que mon cadre avait repris sa place – bien que couché – sur un coin. Je le pris entre mes mains, et mon cœur se serra douloureusement à la vue du visage souriant de mon père. Je sentis le regard de Danny sur moi, et levai les yeux vers lui.

-Je l’avais perdu, bredouillai-je en reposant le cadre à sa place. Je ne contrôle pas si bien mon pouvoir que cela, apparemment.

Danny parut hésiter un instant, et me fis un petit sourire crispé. Il détourna le regard pour prendre une autre bouffée, et la recracha sec dans l’air. Ses jambes tapaient nerveusement contre le mur. Un peu trop nerveusement à mon goût.

-En réalité, tes pouvoirs sont innocents, avoua Danny à ma plus grande surprise. Je plaide coupable.

J’haussai les sourcils, perplexe.

-Tu quoi ?

Danny se frotta l’arête du nez, et écrasa son mégot sur le mur extérieur en se penchant un peu dehors.

-C’est moi qui ait pris ta photo, répéta-t-il, toujours sans me regarder. Je devais … vérifier quelque chose.

Je sentis mes yeux sortir de leurs orbites, et mon regard fit des bonds entre Danny et le cadre qui trônait à nouveau sur un coin de mon bureau.

-A part que je n’avais vraiment pas la classe quand j’étais petite, je ne pense pas qu’il y avait grand-chose à vérifier, avançai-je en pointant la photo du doigt.

J’arrachai un sourire à Danny, mais le fait était que je pataugeais dans la perplexité. J’avais beau retourner l’information qu’il venait de me fournir dans ma tête, je n’y trouvais aucun sens.

-Si ça peut te rassurer, je te trouve assez mignonne pour une gamine, tenta-t-il de plaisanter en descendant de la fenêtre.
Il la referma après avoir jeté définitivement son mégot. Je rosis, mais laissai couler la remarque. Il ne parut pas vouloir la relever non plus, parce qu’il était toujours tourné vers la fenêtre, le regard perdu au loin.
-Alors, insistai-je en m’asseyant sur le bureau, qu’est-ce que tu voulais vérifier ?

Danny se retourna, en jurant quelque chose dans sa barbe. Son regard se planta alors dans le mien, et j’y lus une résolution qui m’effraya autant qu’elle me surprit.

-Pour affaire familiale, lâcha-t-il, les traits crispés.

Mes yeux furent agrandis par l’incompréhension. Il parut comprendre cette réaction, car il sourit doucement, avec une certaine nervosité. Ses yeux ne quittant pas les miens, il sortit quelque chose de sa poche arrière, et la posa sur le bureau. Je voulus y jeter un coup d’œil, mais il garda sa main dessus pour la soustraire à mon regard, et me força à garder mon attention vers lui.

-Léo, j’ai compris pas mal de chose ces temps-ci, entonna-t-il doucement, d’une voix qu’il tentait de maintenir dans la cordialité, mais dont il ne cachait pas les accents émus. En fait, surtout depuis ton arrivée.
-Danny, tu me fais peur.

Je pensais l’avoir déjà préciser, mais la nervosité faisait de moi une vraie pie, et je sortais donc ce genre de pique que je ne dirais pas en temps normal. Mais le fait était que son entrée en matière n’était pas des plus rassurantes – surtout quand on prenait en compte les rumeurs qui courraient sur nous. Danny parut lire dans mes pensées – comme souvent – car il sourit doucement avec amusement, bien que toujours avec crispation, comme s’il se forçait.

- Non, petit oiseau, rien à voir, ne me rassura-t-il en reculant un peu, mais en gardant la main sur son papier. Il ne peut rien y avoir entre nous. Et il y a une raison à cela, ajouta-t-il gravement.
-Le fait que tu préfères les petites italiennes, c’est déjà une excellente raison.
-Léo, arrête de plaisanter, s’il te plait. Ce qui va suivre, ce n’est pas facile à entendre. Quand je l’ai entendu, j’ai failli péter un câble. Crois-moi, tu ne réagiras pas autrement.

La pique et son ton des plus graves eurent au moins pour mérite de me clouer le bec – et de me plonger définitivement dans l’indécision la plus profonde. Danny soupira profondément, comme si l’oxygène pouvait augmenter son courage. Quand il eut constaté que j’étais toute ouïe, il enleva sa main et retourna ce qu’elle cachait. C’était une photo. Pour être exacte, la photo de Geoffrey, sa mère et lui que j’avais déjà vu sur sa table de chevet. Je fixai Danny, incrédule.

-Là, tu m’as complétement perdue.
-Je sais, admit-t-il en faisant glisser la photo. Mais je te demande d’être attentive. Je veux voir si tu te fais la même réflexion que moi.

Il prit mon cadre et le posa à côté de sa photo. Nos deux familles côtes à côtes. Deux familles amputées dont nous étions les représentants. Je les contemplai sans comprendre.

-Je ne vois pas.
-C’est parce que tu ne sais pas où regarder. En fait, il y a deux personnes à bien voir.

Je sentais la retenue dans sa voix. Il avança son doigt sur les photos, et après quelques petites hésitations, pointa deux personnes. Avec un soupir de lassitude, je m’assis à mon bureau avec les deux photos pour me prêter au jeu, et détaillais les visages côte à côte des deux personnes indiquées par Danny. Je détaillais leur traits, sans trop savoir ce que je devais chercher, allant même jusqu’à plier la photo de Danny pour les rapprocher géographiquement. Bientôt, je leur découvrais avec appréhension des traits communs, mais je ne savais pas trop si je les voyais parce que je les détaillais tellement que je confondais leurs traits, ou si c’était effectivement un fait. Mais le problème avec cette constatation, c’était qu’elle ne pouvait pas être un fait.
Car les deux personnes que j’observais étaient mon père … et Geoffrey Hautroi.

-Tu vois ? Souffla Danny sans me regarder.

A vrai dire, sans le vouloir vraiment, je ne voyais que ça. Le nez droit de mon père était presque identique à celui de Geoffrey. De même que les fossettes dues au sourire. Et l’identique malice qui brillait dans leurs yeux. J’arrivai même à trouver leurs sourires identiques. Désappointée, je détaillai plus scrupuleusement le visage, puis pris du recul avant de me remettre à mon examen. Mais les ressemblances physiques n’avaient pas disparues.
Geoffrey Hautroi ressemblait à s’y méprendre à mon père.

-Je dois avoir un strabisme, décrétai-je en cachant une photo avec l’autre.
-Je t’assure que non.
-Quoi ?

Danny était négligemment appuyé sur mon bureau, les bras croisé, sans me regarder. Ses yeux s’étaient considérablement assombris, et je compris alors qu’il faisait tous les efforts du monde pour garder son calme.

-Tu n’as aucun strabisme, affirma-t-il avec une glaçante conviction. Ou alors, c’est qu’on est victime de la même hallucination.
-Alors une coïncidence. Un hasard.
-On peut dire ça. Un hasard particulier, en fait. Ça s’appelle la génétique.

Précisément ce que je ne voulais pas entendre. Mais la conclusion sautait aux yeux et aux oreilles. Je n’avais jamais pensé à mettre les portraits du frère de Danny et de mon père l’un à côté de l’autre, je n’avais donc pas remarqué la ressemblance physique. Mais maintenant qu’elle était mise en évidence, on ne pouvait que mettre en avant la thèse de la génétique.
J’avais mal au ventre. Mon cerveau était en train de se paralyser, et couper les ponts avec le reste de mon corps. Il était donc normal que mon cœur n’entende rien à ce que mon cerveau disait.
« Papa + Frère de Danny = Lien de parenté ».
Mes entrailles se contractèrent douloureusement.

-C’est une blague ?

Danny ne répondit pas tout de suite, et malgré mon trouble, je perçus tout de même la tension qui émanait de lui.

-Oh que non, finit-t-il par dire avec une pointe de ressentiment. J’ai même une idée très précise du rapport qu’ils peuvent entretenir.

J’attendis sans broncher, trop sonnée pour exiger quoique soit. J’avais l’impression que cette idée était une épée de Damoclès que Danny maintenait au-dessus de ma tête. Au bout d’un interminable silence, je l’entendis murmurer la sentence :

-Père et fils.

Et ma tête fut détachée du reste de mon corps. La première chose à laquelle je pensais fut de me féliciter d’être assise. La deuxième … et bien, la deuxième fut noyée dans les cris que toutes les Léonie hurlèrent en entendant la réponse incisive de Danny. Dont un ressortait plus clairement :

-C’est impossible.

J’entendis Danny ricaner avec dépit, et s’écarter du bureau pour s’affaler sur mon lit.

-Je suis désolé, petit oiseau, fit-t-il d’une voix plus douce. Mais non seulement c’est possible, mais en plus c’est avéré.
Non, ce n’était pas possible. Papa m’avait caché beaucoup de chose. Mais pas ça. Pas quelque chose de ce calibre. Je refusai de l’envisager, et secouai la tête avec obstination.
-C’est impossible, répétai-je en mettant dans ma voix toute la conviction que j’avais. Mon père ne peut pas … Il n’y aucun …

Les mots refusèrent de passer mes lèvres, et se bloquèrent dans ma gorge, formant un bouchon douloureux. Je déglutis pour le faire disparaître, mais un étau comprima ma gorge, me réduisant au silence. Danny se redressa sur mon lit, mais je me refusai à tourner les yeux vers lui.

-Léonie … Je comprends que ça ne soit pas facile à concevoir, avança-t-il doucement. Mais tu as vu la ressemblance, c’est quelque chose que tu ne peux pas nier. Après tout, ce n’est pas si difficile à imaginer … Je …

Il secoua la tête. J’eu l’impression que lui aussi perdait ses mots.

--Ça m’a sauté aux yeux, la première fois que j’ai vu la photo de ton père, avoua-t-il finalement. Quand j’ai vu son visage, il y a celui de Geoffrey qui s’est superposé. J’ai débloqué. Alors j’ai fouiné, depuis le début de l’année. Un peu partout. Dans ma chambre. Chez Raymond. Même dans les affaires de Jo, et de ma mère. Au fait, pour info, ajouta-t-il avec un sourire penaud. Elle s’appelle Isabelle.

Isabelle. Le prénom résonna en moi des milliers de fois, et les petites Léonie le répétèrent avec incompréhension. Puis ça me revint. J’avais entendu parler d’une Isabelle, dans le mail que ma grand-mère avait envoyé à Devyldère. Une main glacée se referma sur mon cœur. Je pris ma tête entre mes mains. Elle commençait à tourner dangereusement alors que je tentai de mettre en ordre les pièces du puzzle. Je me levai brusquement et croisai mes bras sur ma poitrine.

-Non, refusai-je obstinément. Mon père m’a caché beaucoup de chose. Mais pas … Pas qu’il avait un autre enfant ! Pas que …

Les mots s’étouffèrent dans ma gorge pendant que je prenais lentement, et douloureusement conscience de ce que ce lien de parenté impliquait. Je me tournai vers Danny, les yeux écarquillés.

-Danny, ton frère … Ne peut pas être le mien !

J’avais dû me faire violence pour que ces mots passent mes lèvres. Et le dire à voix haute ne m’aida pas. Si Danny avait raison …
Mon père aurait caché plus qu’une partie de lui. Il aurait caché un enfant.
Mon … frère ?
C’était absurde.

Je secouai la tête. Danny eut un faible sourire condescendant.

-Et pourquoi pas ?
-Mais parce que ! M’agaçai-je en commençant à faire les cents pas. Parce que c’est quelque chose qu’il aurait dit ! Enfin, si je compte bien, j’ai huit ans d’écart avec Geoffrey ! Et il serait né sept ans avant le mariage de mes parents ! Alors pourquoi il l’aurait caché à notre connaissance ? Et puis zut ! Ajoutai-je en tapant du pied avec agacement. Tu n’as aucune preuve !

Danny était adossé au mur, et me regardait avec gravité, mais aussi compassion. Je devais avoir exactement la réaction qu’il avait prévu.

-En réalité, j’ai pire que ça. J’ai un témoignage. Je te l’ai dit, Léo. Ce n’est pas que possible. C’est avéré. Raymond me l’a dit.

Je reçus l’information comme un coup de poing dans le ventre. Raymond. Je ne me rendis pas compte que je reculai, et heurtai ma porte avec un bruit sourd.

-Là, je suis définitivement perdue, soufflai-je, désappointée.
-Je me doute, comprit Danny en se redressant. Alors je veux que tu te taises, que tu arrêtes de protester – je pense que ça s’appelle le déni – et que tu m’écoutes pour que je te raconte l’histoire.
-Que tu tiens de Raymond.
-Oui. Maintenant, tais-toi, s’il te plait. Tu es prête ?

Je le fixai avec des yeux ronds, trop choquée pour articuler autre chose. J’arrivais toujours pas à croire ce que Danny venait de me dire. C’était beaucoup trop gros pour moi. J’hochai faiblement la tête, et il soupira en se relevant. Il prit quelque chose dans sa poche, et je le vis sortir une cigarette.

-Désolé petit oiseau, mais ce genre de truc, ça coûte aussi une clope. Il faut que je me détende.

Je ne dis rien, le laissant monter souplement sur la fenêtre. L’air froid qui entra me revigora quelque peu, et éclaircit mes idées. Un bons coup de fouet, parfait, qui me permis de passer de larve adossée à une porte à personne un peu plus digne assise en tailleur sur son lit, sonnée, mais relativement attentive. Danny prit une première bouffée et soupira.

-Ma mère habitait le village d’à côté depuis son enfance, commença-t-il doucement. Son père – mon grand-père – tenait un café-bar là-bas, mais il a fermé depuis. Elle voyait défiler tous les enfants de Gaia qui venait échapper à Sappho pendant leur temps libre où ils pouvaient sortir de l’école. (Ses yeux se tournèrent brièvement vers moi, avant de se perdre au loin). Dont Tristan Moineau, je suppose.

Il marqua une pose pour reprendre une bouffée, et laissait tomber quelque cendre.

-Raymond m’a dit qu’ils étaient devenus vites amis. Et qu’aux dernières années de Tristan ici, ils avaient commencés à sortit ensemble. Quand il est parti de Sappho, il s’est arrangé pour faire le début de ses études à Orléans pour rester avec ma mère, tu le savais ?

Non. Je n’avais jamais su où mon père avait fait ses études. J’avais toujours supposé que c’était en Alsace, sur les terres familiales. Il était mort avant que je ne puisse réellement m’intéresser à sa vie d’étudiant. Et apprendre ce genre de chose de Danny Hautroi n’était la chose la plus agréable qui était. Raymond m’avait dit qu’il avait eu une petite amie Orléanaise à l’adolescence.
Il avait simplement omis de dire qu’elle était la mère de Danny.
Et qu’il lui avait fait un enfant.

-Je pense que Geoffrey est arrivé un peu tôt, poursuivit-t-il, les yeux dans le vague. Il n’était pas vraiment prévu. Ni lui ni elle n’avaient fini leurs études. Ils étaient jeunes – ils avaient vingt ans. Mais ils ont gardé le bébé. Quand il est né, Fantine et Raymond ont tout de suite proposé d’aider à la garde de Geoffrey pour qu’ils puissent continuer leurs études. Ma mère a passé sa licence d’Histoire, et le directeur de Sappho a accepté qu’elle prenne le poste vacant de prof d’Histoire – sous l’impulsion de la famille de Tristan. C’est comme ça qu’ils ont réussis à gérer – avec succès – l’arrivée de Geoffrey.
-Et ils sont restés combien de temps ensemble ?

J’avais un goût amer dans la bouche. Tout cela était complétement surréaliste. Mais en même temps … D’une implacable logique. Je savais que mon père avait eu une petite amie Orléanaise. Et je ne savais pas grand-chose de mon père à cette époque, si ce n’était qu’il avait fait des études d’ingénieur. Ce n’était pas difficile d’imaginer qu’il avait été amoureux d’Isabelle Hautroi. Je pouvais même – difficilement – envisager qu’il ait eu un enfant avec elle en la personne de Geoffrey Hautroi.
Ce qui restait obscure, c’était : pourquoi il l’avait caché. Tout cela c’était passé bien avant qu’il ne rencontre ma mère. Bien avant ma naissance. Ce n’était pas comme s’il avait mené une double vie …

-Et pourquoi il ne m’a rien dit ? Ajoutai-je d’une petite voix en constatant que Danny ne répondait pas à ma question. Et puis, comment tu as pu savoir tout ça, toi ?

Danny resta quelque peu silencieux, recrachant nuage de fumée sur nuage de fumée. Il écrasa sa cigarette sur le mur extérieur, et en ralluma une nouvelle.

-Lucas me tuerait, fit-il sombrement remarquer. Je te l’ai dit, j’ai fouiné. Surtout depuis que tu as vu que le nom d’une Isabelle dans les mails de ta grand-mère et Devyldère. Je savais que ce n’était pas une coïncidence. Mais je ne savais pas non plus ce que ça foutait là. Pourquoi ta grand-mère connaissait ma mère ? Et quel rapport avec toi ? Et pourquoi Geoffrey ressemblait à ton père ? Il fallait que j’en aie le cœur net, alors après avoir cogité là-dessus depuis ton arrivée, je t’ai piqué ton cadre pour faire des comparaisons. Et j’ai confronté Raymond, la semaine dernière. Ça faisait longtemps que je voulais le faire, mais … (son visage se crispa). Bref. Ça n’a pas été facile. Mais il a fini par tout cracher.
-« Affaire familiale », répétai-je, comprenant alors le comportement étrange de Danny ces derniers jours. Il n’empêche que tu aurais pu m’en parler.
-Je sais. Mais il fallait que … je digère. J’aurais pu te parler de mes soupçons, mais … On avait tellement de problème, Léo !
-Et ça ne t’as pas posé un petit problème de conscience ?

Ses yeux étincelèrent, mais il ne me regarda pas.

-Qu’est-ce que tu crois ? Gronda-t-il avec une hargne contenue. Que c’était de gaité de cœur ? Je voulais te préserver, au cas où tu ne l’avais pas compris ! Je voulais des preuves, tu concrets ! Maintenant, j’en ai. C’est pour ça que je le fais maintenant. Mais je ne voulais pas crier au loup avant d’avoir des preuves. Et j’ai même eut des confirmations.

C’était officiel ; Danny fuyait mon regard. Il regardait distraitement par la fenêtre, silencieux, comme s’il était évident que j’allais deviner toute seule ce qu’il sous-entendait par là. J’étais assez choquée comme ça. Le calibre de l’information avait fait de mon cerveau de la compote. J’avais encore besoin de lui pour me mâcher le travail. Sa main se perdit sur les plaques rouges qu’il avait encore sur la joue, et je dis machinalement :

-Arrête de te gratter.

Il laissa retomber sa main avec un drôle d’air.

-Mouais. Bien, pour info … C’était l’une des confirmations.

Je le contemplai sans comprendre. Il finit par me lancer un regard suppliant, comme s’il ne voulait pas prononcer ces mots, qu’il fallait que je le fasse seule. Sauf que mon cerveau ne voulait pas sauter aux conclusions les plus farfelues. Mes entrailles se glacèrent, et je me raidis, sous le choc de l’idée atroce qui venait d’effleurer mon esprit.

-Danny … Tu es sûr que … Geoffrey et toi ayez le même père ?

Il eut un petit sourire crispé, et je sus que j’avais été dans la bonne direction. Pire que cela, j’avais l’impression qu’il avait bien cette réponse. Et que c’était bien l’idée affreuse qui venait de germer dans ma tête.
Non. Pas ça.
Je me redressai subitement, et mis une main dans sur ma bouche, comme pour m’empêcher de vomir. Mon estomac venait de se retourner et la bile me monta à la gorge.
Tout sauf ça.
Danny sauta sur ses pieds, non sans avoir écrasé sa nouvelle clope sans l’avoir finie. Avant qu’il n’ait pu s’avancer un tant soit peu, je pointai un doigt en sa direction pour éviter qu’il s’approche.

-Ça, c’est impossible, haletai-je en reculant pour rester hors de sa portée. Strictement impossible.
-Non, petit oiseau, souffla-t-il avec douceur. C’est loin d’être impossible. Difficilement concevable, certes. Mais pas impossible.

Je me pris le visage entre mes mains pour me calmer. Mon cœur battait la chamade, et j’eus du mal à entendre les paroles d’explication de Danny.

-Pour répondre à ta question … Ils sont restés sept ans ensemble. Et ma mère est retombée enceinte. Je … Je ne crois pas que c’était prévu non plus. Mais c’est arrivé. Et quand le bébé est né … Il est parti.

Danny n’avait pas pu retenir une pointe de rancœur. C’était une rancœur qui avait fini par m’être relativement familière. Je la voyais dans ses yeux dès que je lui posais une question sur sa famille. Je l’entendais à chaque fois qu’il évoqué son père.
Sauf que là, ce n’était pas vraiment son père qu’il évoquait.
C’était le mien.
Le bébé. C’était … lui ?
Je sentis la bille me brulait la gorge, et je chancelai sous le choc, me rattrapant à mon bureau. Danny voulut s’avancer, mais je l’en empêchai en levant la main.

-Ça, c’est impossible, répétai-je avec toute la conviction que je pouvais avoir.
-Ça, Léo, je t’assure que non, affirma Danny. Je te le dis … J’ai tout fait cracher à Raymond. Isabelle et Tristan sont restés sept ans ensemble. Danny est né. Tristan est parti.

Je m’assis sur la chaise de mon bureau, et levai les yeux vers Danny. Sans trop le vouloir, je le scrutai, comme j’avais scruté Geoffrey il y a quelques minutes. Nez droit, peau pâle rougis par endroit du fait de son allergie, boucles noires et folles qu’il avait en commun avec son frère et sa mère … J’avais beau le contempler à en avoir mal aux yeux, les traits qu’il pourrait éventuellement avoir en commun avec mon père me demeuraient invisible. Puis ses yeux croisèrent les miens. Et je ne vis bientôt que cela. Je n’avais jamais détaillé les yeux de Danny – notamment dû au fait qu’ils exprimaient bien souvent la froideur et l’agacement. M’arrêtant aux sentiments qu’ils exprimaient, je ne m’étais jamais attardé sur leur couleur. J’avais toujours vu un vague noisette, un brun clair et glacé. En réalité, ils étaient plus foncés. Plus chaleureux. D’une couleur marron familière, qui tirait sur le chocolat. Je détournai le regard, et croisai brièvement mes yeux dans le miroir qui était accroché à la porte de la salle de bain. Mon cœur tomba dans ma poitrine.
C’était exactement la même couleur.
Non. Non, non, et non.
Je plaquai une nouvelle fois une main sur ma bouche, et regardai Danny avec des yeux écarquillés. Il eut un faible sourire de dépit à mon encontre. Je n’arrivais pas à croire ce que ça signifiait. Si Danny avait raison … Si Raymond le Cachotier n’avais pas fait d’autre cachotterie … Alors Papa ne m’avait caché un, mais deux enfants nés d’Isabelle. Deux garçons.
Ses fils.
Cette fois, j’allais véritablement vomir.

-On n’aurait jamais pu deviner, murmura doucement Danny. Tu l’as remarqué dès que tu l’as vu, je ressemble à ma mère. Et il faudrait être aveugle pour ne pas constater que tu ressembles à la tienne. On était obligé de passer par Geoffrey pour découvrir la vérité.

La vérité. Toutes les pièces d’un puzzle auquel je n’avais jamais pensé se mirent douloureusement en place, de manière vertigineuse. Danny et Geoffrey avait le même père. Mon père était sorti avec une Orléanaise du nom d’Isabelle. Le père de Danny était parti avec une autre femme, d’après lui. Une rousse du nom de Florence Delire, qu’il avait épousé alors qu’elle était enceinte de quatre mois.
Devais-je préciser qu’elle était enceinte … de moi ?
De l’air. J’avais besoin d’air.

-Il ne m’a pas caché ça, soufflai-je, hors d’haleine. Pas ça …

Je vis Danny bouger et s’assoir doucement au pied de la chaise où j’étais assise. Il ne me regardait pas, et ses yeux étaient rivés sur la fenêtre toujours ouverte.

-Apparemment, si, confirma-t-il sombrement. On n’a qu’un an d’écart, Léo. Justifier un enfant né huit ans auparavant est faisable. Mais justifier qu’on a abandonné le deuxième ? Un peu plus difficile.

Abandonné. Ce que Danny m’avait dit par rapport à son père, il y a si longtemps dans sa chambre, alors qu’on recherchait innocemment « l’alphabet perdu ». « Il est parti juste après ma naissance, avec une autre femme et il nous a complétement oublié. »
Non. Ce n’était pas mon père qui avait pu faire ça.
Tout le monde c’était accordé là-dessus. Même Devyldère et Raymond. Rien n’importait plus à mon père que sa famille. Ce n’était pas cet homme qui avait pu abandonner son bébé de quelque semaine. Surtout pas pour en faire un autre un an plus tard.
Moi. Danny. Geoffrey.
Un même père ?
L’idée me donnait la nausée. Je me redressai avec une main sur le ventre, luttant contre les vertiges.

-Jamais il n’aurait fait ça, affirmai-je courageusement. Si tu as raison … si ton père … (je déglutis. Le « est le mien » ne réussis pas à passer mes lèvres). Bref. Il n’aurait jamais fait ça. Je le connaissais, il …
-Léonie, on parle du mec qui t’a caché ta condition d’enfant de Gaia alors qu’il en avait conscience, railla-t-il avec un ricanement. Tu l’as dit toi-même, ton père avait une double vie – celle du père de famille, et celle de l’enfant de Gaia. Ce n’est pas difficile à imaginer qu’il t’en ait caché une troisième.
-La ferme, le coupai-je avec froideur. La ferme.

Je refusai de penser à cela. Je ne voulais pas qu’il me renvoie à la figure toutes les frasques de mon père pour justifier ça. Il n’avait pas le droit de faire cela. Même si les preuves allaient dans le sens qu’il était le fils de mon père.
Oh ciel. Le fils de son père … Comment on appelait ça en termes usuels ?
Je pensais qu’on appelait cela un frère.
Je fixai Danny avec horreur. Envisager que Geoffrey Hautroi était mon demi-frère, c’était quelque chose que je pouvais faire … Envisager que Danny le soit ?
Non.
Je me remis à faire les cents pas dans la pièce en luttant contre ma nausée.

-Ecoute Léo, arrête de tourner, s’agaça Danny en me prenant par le bras avant que je puisse l’en empêcher. Je n’irais pas inventer un truc pareil. Jamais de la vie. Je n’ai jamais voulu savoir qui était mon père. Je … Je l’ai toujours détesté, comment voulais-tu que je m’y intéresse ? Mais ça m’a rattrapé sans que je le veuille. J’ai été le premier choqué quand Raymond m’a tout raconté. Je … t’en ai voulu sans m’en rendre compte, avoua-t-il tristement. C’est pour cela que j’ai été distant ces derniers temps. J’avais besoin digérer ça avant de t’en parler. Mais je t’assure que c’est la vérité. Raymond m’a même montré des photos – et mon livret de famille. J’avais toujours pensé que ce document était une légende, dans mon cas. Mais je l’ai vu noir sur blanc. Je … je suis le fils de Tristan Moineau.

Ces mots résonnèrent mille fois en moi. Pourtant, même au bout de la millième fois, je n’en saisis pas le sens. Mais je ne pouvais nier que les faits étaient là. Geoffrey ressemblait trop à mon père pour qu’on puisse le nier. Et Danny avait comme moi hérité de ses yeux. Ces yeux marron.
Ainsi que de son allergie aux colorants rouges. Je n’avais pas oublié la fois où mon père avait bu ma grenadine et qu’il avait passé une semaine à gratter ces plaques écarlates. Identiques à celles que Danny arborait à présent.
Comment je pouvais ne pas prendre en compte ce détail ?
J’eus l’impression de perdre pied. J’enfouis mon visage entre mes mains. Ma tête se mit à tourner violement, et des lueurs dansèrent derrière mes paupières. J’avais déjà eu cette sensation d’oppression, auparavant. Comme si mon cœur battait beaucoup trop vite pour ma cage thoracique. Comme si on appuyait beaucoup trop fort sur mes tempes. J’avais eu deux fois cette impression.

-Oh, non, gémis-je en enfonçant mes mains dans les cheveux.

Mais trop tard. Le processus était en route. Mes jambes lâchèrent soudain sous moi et mes genoux rencontrèrent brusquement le sol, et, avant que j’aie eu le temps de me ressaisir, le vide se fit dans ma tête alors que me sentais irrémédiablement attirer vers le sol.





TATATATTA DAAAAAAAAAAAAM. Sortez les clochettes, mes mouchoirs et je ne sais quoi encore. C'est LE moment où je vous perd (ou du moins, je perd la moitié de mon lectorat (va plus rester grand monde :lol: )
BRREF. Pour tout ceux qui rêvaient d'un couple Danny/Léo ... Je suis dans le regret de vous annoncer que ce ne sera pas possible, pour des raisons évidente.
Alec' (merci d'avoir tout lu, d'ailleurs, je te répondrais) : une chose à savoir : Je DETESTE les Triangles Amoureux, mais vraiment, c'est viscéral, je ne peux pas ! Alors je fais en sorte qu'il n'y en ai pas ;)

Et toute mes félicitations à Delph pour avoir deviner cette parenté dés les premier chapitres (OK, j'étais dégoutée qu'elle l'ai vu si vite. Mais ça m'a impressionnée, pour de vrai ! 8-) ;) )

Essayez de ne pas trop me détester, hein :oops: Moi en tout cas je vous aime, très fort, Keur sur vous et à la semaine prochaine !
aleclave66

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par aleclave66 »

kdrnf dgu, nhux
#maréaction.
Promis je fais un vrai commentaire demain mais là je suis trop fatiguée du coup je le ferai à tête reposée.
Juste un truc :
Je sais pas si je suis déçue ou contente parce que je sais toujours pas si j'aurais préféré Danny ou Antoine.
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

AAAAAAAAAAH

Je suis trop contente d'être enfin arrivée là parce que maintenant je vais pouvoir avoir la suite 8D

(au fait, Jeu d'Ombres c'est trop de la balle, ça fait siii longtemps que je l'ai pas vu olala j'adore Robert Machin)

Soooo
Cette scène est toujours aussi dingue :lol: (dans le sens incroyable autant qu'inattendue)
Juste un truc que j'ai pas trop compris : quand Tristan quitte Isabelle, Florence était déjà enceinte ? (nan parce que ça c'est vraiment un truc de bâtard pour le coup)
Au fait, je te déteste vraiment beaucoup parce que Danny est quand même hyper tactile comme gars du coup on se retrouve complètement paumé :lol: M'enfin. Tout est bien qui fini bien, youplaloupe (ouais il est 7h30 un samedi de Pâques alors je dis un peu n'importe quoi)
L'avantage de tout ça c'est que maintenant je visualise beaucoup mieux Danny :mrgreen: Je voyais pas trop à quoi il ressemblait avant

Maintenant il faut que :
1) Lucas se réveille
2) assimile tout ça
3) QU ELLE LISE LA LETTRE NOM DE NOM
4) Qu'Antoine arrête de faire le con
5) QUE GRETEL REVELE SA VERITABLE NATURE DIABOLIQUE :twisted: :twisted: :twisted: :twisted: (merci Alec d'ailleurs :lol: et ce fut un plaisir de t'orienter jusqu'ici)

En bref, Perri l'ornithorynque, il faut que tu postes la suite :mrgreen:

Et bravo à delph :o Je suis hyper impressionnée
On a le droit de savoir ce qui t'a mis la puce à l'oreille ?
Amethystes

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Amethystes »

Salut !

Tout d'abord merci de m'avoir prévenue.

Ton chapitre était génial, j'ai vu quelques fautes d'inattention mais rien de grave. (Je ne m'en rappelle plus désolée)

Mais un seul truc : POURQUOI tu a fait entrer Danny dans la chambre de Léo juste au moment où elle allait lire la lettre ?? :evil: POURQUOI ?? Quand elle va la lire sinon ?? :cry:

Je ne sais pas pourquoi, mais dès les premiers chapitres, je me suis dit que Danny était le frère de Léo ! Ça m'est venu comme ça parce que Danny a dit que son père est parti avant sa naissance et qu'il n'a plus eu de nouvelles de lui du coup j'ai penser que ça pouvait être le père le Léo !
Mais moi des fois avec ma logique (ou déduction) tordue, je n'y avait plus penser. (Je me suis habituée) C'est une des premières fois ou mes hypothèses sont bonnes !
Mais du coup je ne pense pas que ce soit le père de Léo qui a marqué le premier arbre, il ne voulait quand même pas mettre son fils en danger ?! A moins qu'il n'en a rien à faire de lui. :o

Ce serait bien que tu mette le chapitre suivant plus tôt mais tu ne va pas le faire ! :P

Waouh ! C'est le commentaire le plus long que j'ai jamais fait !

Je crois que je n'ai plus rien a dire alors salut !
aleclave66

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par aleclave66 »

Comme promis, je reviens pour faire un vrai commentaire point par point (avec des petits numéros pour que tu t'y retrouves) :
1) Cette révélation explique beaucoup de chose : Grispoil qui s'incline devant Geoffroy (d'ailleurs je me demande si Antoine savait que Geoffroy avait le même sang que Léo, je pense que oui mais j'imagine qu'on aura confirmation dans les autres chapitres) (par contre il sait pas pour Danny parce que Grispoil s'incline pas devant lui et si il savait il passerait pas son temps à dire à Birdy que Danny est "son amoureux")), la bougie de Danny qui explose, ...
2) Je me demande comment j'ai fait pour ne pas le deviner parce qu'il y avait quand même des indices et la chronologie qui correspondait.
3) Au moins maintenant, on est fixé, elle finira avec Antoine (ou avec Lucas si tu as vraiment le sens du suspense (c'est une idée qui m'avait effleuré l'esprit au début)).
4) Maintenant on sait plus ou moins ce qu'il y a dans cette saleté de lettre (ça serait bien qu'elle l'ouvre avant le tome 2 d'ailleurs)
5) Lucas va faire une crise cardiaque s'il doit assimiler tout ça d'un coup à son réveil
6) J'espère qu'il vont le dire à Callie pour qu'elle soit pas jalouse de leur potentielle prochaine proximité (ce serait normal qu'ils se rapprochent vu qu'ils ont le même père)
7) C'est énervant parce que maintenant il va falloir que j'attende comme tout le monde pour avoir la suite.
8) C'est quand que Lucas se réveille, il me manqueuh :cry: :cry: !!!!!!! (Bon d'accord ça fait que deux jours que je le vois plus mais quand même j'ai l'impression que ça fait une éternité)
9) Maintenant qu'ils sont de la même famille, il va falloir prévenir Danny pour les enfants de la Lune, vu que ça le concerne de près.
10) Je crois que j'ai fini
11) Ah non !! J'attends de voir pour Gretel parce qu'elle me semble vraiment trop gentille pour être honnête (même si je pense quand même qu'elle n'est pas responsable, comme Antoine).
12) Je crois que j'ai oublié de le dire donc : SUPER CHAPITRE ET JE VEUX LA SUITEUH !!!!!!!!!! (j'aimerai bien voyager dans le temps pour avoir les chapitres en avance)
13) J'espère que tu n'attendras pas un an avant de sortir le tome 2 parce que je crois que je suis devenue accro et que je supporterais pas d'attendre aussi longtemps
14) Là j'ai vraiment fini (enfin !!! :lol: )
Perripuce

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Cazolie a écrit :
(au fait, Jeu d'Ombres c'est trop de la balle, ça fait siii longtemps que je l'ai pas vu olala j'adore Robert Machin)
DOWNEY JUNIOR :D Ce mec est un dieu.

Kira, toutes mes excuses pour le choc ! :lol: (en fait, pas du tout, je suis très fière de moi, ça veut dire que pour certain c'était pas attendu :lol: )
Normalement, dans le tome 1, c'est la dernière GROSSE surprise. Enfin, je crois :D

Idem Alec', désolée pour la surprise :lol: :lol: (oui, je sais, je suis sadique :lol: Breeef. ) Et c'est GeoffrEy, pas Geoffroy ;) (ça fait très légèrement médiéval (comme Haut-de-France, d'ailleurs ... BREF) )

Amethystes, tu t'étais dis ça aussi :lol: Mince en fait, je suis un peu prévisible :lol: :lol:

BREF. Z'aurait le pourquoi du comment dans le prochain chapitre. C'est à dire Samedi (ou vendredi, si je suis de bonne humeur :lol: :lol: )

Bref, merci pour vos réactions, comme c'est un chapitre important, j'avais trop peur de le poster :oops:
aleclave66

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par aleclave66 »

Idem Alec', désolée pour la surprise :lol: :lol:
C'est pas grave, dans la vie c'est bien d'être surpris et de ne pas tomber dans la monotonie des journées habituelles qui forment des semaines habituelles qui se rassemblent en mois habituels donnant lieu à des années habituelles se regroupant en décennies habituelles... (ceci était l'instant philosophique de Clarisse !!!! :lol: :lol: )
oui, je sais, je suis sadique :lol: Breeef.

AH !! Tu vois que c'est facile de le reconnaître !!!! :mrgreen:
Et c'est GeoffrEy, pas Geoffroy ;)

Oups :oops: :oops: !!!! Désolée Geoffrey, paix à ton âme (oui, je sais je parle à un mort qui n'a jamais existé autrement que dans cette histoire et donc je passe pour une folle mais au moins comme ça vous êtes prévenus !!!!!!!)
(ça fait très légèrement médiéval (comme Haut-de-France, d'ailleurs ... BREF)
Allez Perri, je suis sûre que tu vas finir par t'y habituer, ce n'est qu'une question de temps !!!!! Bientôt tu auras oublié qu'on vient de défigurer le nom de ta région (non, non je ne suis pas du tout en train de retourner le couteau dans la plaie, je n'oserais pas *air d'ange innocent essayant vainement de retenir son auréole qui se casse la figure* :lol: :lol: )
chatchat14

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par chatchat14 »

Hey !!

Wait ! Dani ?????? SON FRÈRE ?????????? Co…Pou… Mais pas possible !! :o :shock:
Bref, je pense que son père devient vraiment pas net… Il abandonne comme ça ses deux fils ??
C'est pas sain tout ça…

Bon, à bientôt pour PLEIN d'autres surprises ( j'imagine ) !
delph212000

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par delph212000 »

Je le savais mais j'avais pas compris qu'il était parti après la naissançe de Dany , abandonner ses gosses comme ça c'est vraiment horrible et quand Geoffrey est mort il ne s'en est même pas préoccupé?
J'espère qu'il a vraiment une bonne excuse faut vraiment qu'ils lisent cette lettre. Et au final il ne voulais pas qu'elle aille a Sappho pas pour la protéger mais pour ne pas qu'elle rencontre ses fils et son ex.
Quand Antoine va savoir ça il ca être fou. Bon du coup j'espère que Léonie et Antoine vont finir ensemble. Par contre je ne voit toujours pas qui est le traitre et le maître chanteur.
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

J'ai pas envie d'aller me coucher même si je suis crevée alors on va faire le récap tout de suite :lol: (suite vendredi ? Steup? Nan en fait baleck - oui cette orthographe est tout à fait correcte - je pourrai pas le lire vendredi)

Bref !

Nous avons donc :

1) Antoine et son corbeau (maintenant que je sais ce que c'est, non je ne suis pas en prépa)

2) Le lien familial chelou

3) Delvydère, Grand-Mère Moineau, Isabelle, Tristan... Tout ce beau monde relié

4) Tristan qui voit l'avenir

5) Luna (Sélène pour Alec) et Antoine

6) Lucky toujours dans le coma :cry: :( :cry: :(

7) moi qui me goinfre de chocolats. (hein?)

DONC

1) qui peut bien être le corbeau, hein ? Quelqu'un qui peut prendre Lucas en photo régulièrement, mais aussi Chloé, qui est à Paris. A moins qu'un des enfants de Gaia ait le don d'être à deux endroits à la fois je dirais que... il a un complice ! :mrgreen: "L'art de révéler des évidences, Lestrade". Ce qui nous donne comme suspecte : GRETEL :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: :mrgreen: Gretel est obligée de prendre les photos et de déposer les messages pour une raison quelconque, et c'est pour ça qu'elle demande à Léo de protéger Antoine : elle s'en veut trop de lui faire du mal. (t'as vu j'ai des arguments cette fois !)

2) Clairement, Luna, les marques, les agressions et la famille Moineau-Hautroi sont liés. Parce qu'à part Tristan, je vois pas qui d'autre aurait pu faire les marques. En même temps ce serait terriblement sadique de ta part, parce que ça voudrait dire qu'il est responsable de la mort de son fils, avec qui il a quand même vécu 7 ans, et ça c'est affreux. Donc la 2è hypothèse est qu'il ait un enfant de Luna caché.

3) Delvydère, je suis sûre qu'elle était amoureuse de Tristan :lol: Et peut-être qu'elle savait pour Luna parce que Tristan portait la marque et qu'elle l'a vue sur lui. (oui bon ok c'est juste un secret de directeur mais laisse-moi faire mes théories ! J'en aurai au moins une de bonne comme ça ! Un bout d'une !) Bref, je pense qu'elle en sait beaucoup sur Tristan, notamment pourquoi il est parti. ET QU IL LISE CETTE LETTRE BON SANG DE BONSOIR
Léna... A mon avis elle sait pas grand chose. (belle analyse je sais)
Quant à grand-mère Moineau, elle sait que son fils était avec Isabelle donc elle doit connaître un bout de l'histoire. Attends attends, on a pas dit à un moment que Tristan ne s'entendait plus avec sa mère ? Est-ce qu'elle lui en a voulu d'avoir abandonné Isabelle ? Du coup elle serait pas au jus.

4) Voir l'avenir est la seule raison logique qui l'aurait poussé à partir. M'est avis qu'il a essayé de jouer avec le destin - pour ça qu'il a pas dit à Léo pour les enfants de Gaïa. Sauf que ça a juste mené à la mort de Geoffrey, ce qui était sans doute déjà prévu au départ et qu'il a essayé d'éviter. Ou alors il a vu que Léo était nécessaire à l'accomplissement de quelque chose et du coup il est parti. Mais en même temps je le vois pas épouser Florence juste pour ça. Mais je le vois pas non plus se remettre avec une autre femme 4 mois après avoir quitté Isabelle. Diable, t'es vraiment affreuse avec Tristan en fait :lol:

5) Bon euh là j'ai déjà dit pas mal de trucs là-dessus plus tôt :lol:

6) Lucky A INTERET A SE REVEILLER

7) Miam :D
Amethystes

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Amethystes »

Perripuce a écrit : Amethystes, tu t'étais dis ça aussi :lol: Mince en fait, je suis un peu prévisible :lol: :lol:
Non en fait je ne m'y attendait pas trop :). Comme je te l'avais dit, j'avais complètement oublié ce que je me suis dit. Du coup c'était quand même une surprise ;) .
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Les enfants de Gaia - Chapitre 17 (1/2). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

BOOOOONJOUR !

Alors j'espère que depuis une semaine vous vous êtes remis de ces révélations :lol: :lol: Désolée de vous avoir tant chamboulé ! :lol:

Mais maintenant, place aux explications :D Bonne lecture, chers amis !

(PS : PETIT TOPO : dans deux semaines je passe mes concours, ce qui fait que je suis en révision. D'un point de vue purement technique, tout est déjà écrit, mais poster prend quand même un certain temps, alors je le ferais quand je pourrais me libérer, ce qui fait que les prochains poste seront sans doute TRES irrégulier ... Je suis vraiment désolée, mais c'est un mauvais mois à passer ! (le 28 Avril, c'est fini ... FORZA !) Bref, voilà, c'était juste pour vous prévenir x) )

Encore merci à b-pauline pour les corrections !


Chapitre 17 (1/2) : Déchirements.

Je trébuchai sur le sol, et tenais de me rattraper, mais sans succès. Je m’écroulais sur le sol et me atterrit face contre terre sur le parquet de la pièce. Quand je me redressais le plus dignement possible, je reconnus la pièce dans laquelle je m’étais téléporté.

-C’est une blague ? Grommelai-je en me relevant.

Je m’étais une nouvelle fois téléportée dans le bureau de la directrice. Je reconnaissais le portrait qui cachait le Sceau de Drouet, et les jouets Kinder sur les étagères. Heureusement, il était vide. Je voulus me relever, mais mes jambes cédèrent à nouveau sous mon poids, et je m’écroulais à nouveau. Ma tête tournait violement, et je contins tant bien que mal mes nausées. Les mots de Danny tournoyaient à une vitesse folle dans mon esprit. Ce midi, j’avais demandé à l’image de mon père s’il m’avait encore caché quelque chose.
Mais jamais je n’avais pensé à un secret de cette envergure.
Putain, Danny Hautroi était mon frère.

Le penser enfin accentua ma nausée, et j’eus le temps de ramper jusque la poubelle de Devyldère pour éviter de tâcher son parquet, et recrachai le maigre contenu de mon estomac dedans. La folle révélation de Danny, et la téléportation brutale n’avaient pas fait bon ménage, d’autant plus que je manquais de sommeil. Quand mon estomac fut calmé, je me hissai à la chaise que j’avais occupée pendant notre entretien, il y a quelques jours. Ta tête tournait encore violement, et j’avais du mal à garder les yeux ouverts, mais au moins, la nausée avait disparue. Ne me restait que le goût de bile dans la bouche. J’avais un peu honte d’avoir vomi dans le bureau de la directrice, mais je n’avais pas pu la contenir. C’était à la fois le contrecoup de mon don, et le dégoût que j’éprouvais face à cette situation.

-Papa, dis-moi que tu n’as pas fait ça, supplia-je au vide, les larmes aux yeux. Dis-moi que tu ne m’as pas caché ça …

Evidemment, ce fut le silence qui me répondit. Mais un instant plus tard, le silence fut déchiré par des voix floues à l’extérieur, et par une clef qu’on introduisait dans une serrure.

-… Les Gardiens, Léna. La seule question, c’est comment vous avez pu y avoir accès.
-Je n’ai eu accès à aucune information, madame. C’est simplement une constatation.
-Voulez-vous me faire avaler ça ? Je vous connais, Léna. C’est moi qui vous tout enseigné. Il y a des années que vous êtes au courant. Pourquoi vous ne m’avez rien dit ?

La porte venait de s’ouvrir avec un clac sec. Je vis Devyldère passait la porte, son visage exprimant une colère polie et contenue. Je bondis subitement sur mes pieds, paniquée, mais dès que je fus relevée, ma tête se remit à tourner violement. Les yeux de la directrice furent les premiers à se poser sur moi.

-Mademoiselle Moineau ? S’exclama-t-elle, surprise.

Je n’eus pas le temps de réfléchir à une explication, ni d’articuler quoique soit. Je chancelai, et me rattrapait tant bien que mal au bureau devant moi. J’entendis des bruits de pas pressé, et des mains se refermèrent sur mes bras pour me ramener dans le fauteuil.

-Je vais chercher Gretel, annonça Léna avec précipitation.
-Non, ça va, bredouillai-je vaguement.

Maintenant que j’étais assise, mes idées étaient plus claires, et les vertiges plus supportables. La directrice me scruta avec une inquiétude qui me surprit beaucoup. Mais elle raviva aussi mon ressentiment à mon égard. Tant de réponse qu’elle connaissait et qu’elle s’était acharnée à me cacher !
Luna.
Mon père.
Danny.
Oh mon dieu. Danny.

-Vous êtes sûre, Mademoiselle Moineau ? demanda-t-elle doucement en tâtant mon front.

Au contact léger de ces doigts, je sentis une onde revigorante me traversait la tête, chassant les vertiges, et la guimauve qui c’était installé dans mon cerveau. Mes épaules se détendirent, et je ne pus retenir un soupir de soulagement.

-Oui, affirmai-je avec plus de conviction. Oui, ça va, ne vous en faites pas.
-Alors qu’est-ce que tu fais ici ? S’enquit Léna avec étonnement. Comment tu es rentrée ?

Je ne répondis rien, et l’agrandissement progressif de ses yeux m’indiqua qu’elle avait compris seule. Un éclair de satisfaction y brilla.

-Waho… Tu t’es téléportée ?
-Mademoiselle Duriez, coupa fermement Devyldère. Je ne pense pas que ce soit le moment. Mademoiselle Moineau me semble en état de choc.

Ces paroles me piquèrent au vif. En était de choc, oui, c’était exactement le mot. Je lançai un regard féroce à la directrice. Certes, inconsciemment, j’en avais peur. Et si je me laissai guider par ma colère, je risquais fortement de trahir Antoine. Mais pour l’heure, je m’en fichais.
Si Raymond avait pu raconter l’histoire à Danny, elle allait me la raconter à moi. Et je ne sortirais pas d’ici sans avoir eu une explication satisfaisante.
Devyldère dut lire beaucoup de chose dans mes yeux, car elle hocha la tête doucement, et congédia Léna. Celle-ci parut vouloir protester, mais elle finit par abdiquer, et me lança en sortant un regard lourd de sous-entendu. Rappel toi qui tu as devant toi. La conseillèrent sortit de la pièce, et Devyldère prit sa place derrière son bureau.

-La téléportation a l’air de vous couter beaucoup d’énergie, constata-t-elle en glissant rapidement ses yeux sur la poubelle.

Je rougis un peu, mais ne laissai pas me démonter. Je rassemblai tout mon courage pour mettre mes coudes sur mon bureau pour demander d’une traite :

-Est ce que mon père est sorti avec la mère des Hautroi ?

La directrice parut sincèrement désappointée par la question. Ses yeux sombres fixèrent les miens avec méfiance et surprise, les sondant, l’air d’évaluer ce que je savais réellement. Après quelque seconde de réflexion, elle parut en conclure que j’en savais assez, alors elle répondit du bout des lèvres :

-Oui.

J’eus l’impression d’entendre cette phrase comme venant d’un long tunnel, lointaine et mystique. Je ne reconnut pas ma propre voix quand elle lâcha :

-Et … Est-ce que mon père … est celui de Geoffrey et Danny ?

Les yeux de Devyldère brillèrent étrangement, mais elle hocha la tête.

-Oui.

L’entendre de la bouche de cette femme fut presque cent fois pire qu’avoir entendu Danny dire « je suis le fils de Tristan Moineau ». Tout le ressentiment que j’éprouvai à son égard, et à l’égard de cette affaire complément surréaliste ressortit d’un coup, et j’en oubliai toute prudence.

-Ça vous aurait tuée de m’en informer ? M’exclamai-je durement.

Devyldère se laissa aller contre son dossier avec un soupir, mais cela attisa ma rage plus qu’autre chose.

-Vous le saviez ! Dès que vous avez vu mon nom sur la liste des nouveaux élèves, vous avez su que vous alliez réunir tous les enfants de Tristan, et vous n’avez rien dit !
-Léonie, tenta-t-elle de m’apaiser en levant une main en signe de paix. Calmez-vous, s’il vous plait.
-Me calmer ?

Ça me paraissait momentanément impossible. Je bouillonnais de colère. Contre Danny. Contre elle.
Mais surtout contre mon père. L’envie d’aller cracher sur sa tombe alsacienne me repris soudainement.

-Comment voulez-vous que je me calme quand j’apprends que mon père a eu deux fils ?!

Et pas n’importe qui. La colère me donnait de l’adrénaline et les dernières sensations de fatigues ou de faiblesse s’évaporèrent. Au contraire, je sentis ma vieille énergie nerveuse refaire surface. Devyldère croisa ses mains devant elle, et y appuya son menton. Son visage était imperturbable, mais je sentais son débat intérieur.

-Je n’ai jamais compris le souhait de votre père, avoua-t-elle d’une voix à peine plus élevée qu’un chuchotement. Mais quand j’ai reçu le faire-part de votre naissance, je l’ai montré à Isabelle pour qu’elle présente leur sœur aux garçons. Mais elle s’est mise en colère et m’a dit de ne plus jamais évoquer Tristan devant ses fils (une lueur triste passa dans son regard). Et encore moins leur sœur. Je pense que le départ de Tristan l’avait beaucoup affectée, bien plus que je ne l’avais soupçonné. Peut-être même étais-ce les première graines de folies qui s’était logées dans son esprit. La mort de Geoffrey l’a achevée.
-Mais pourquoi il a fait ça ? Gémis-je presque contre mon gré.

J’ignorais si je parlais de son secret, ou de son départ. Mais Devyldère parut songer que c’était le départ. Elle planta son regard dans le mien, et dis :

-Le lignage, Léonie. Le lignage.

Elle hésita un moment, regardant la fenêtre un instant, pendant un long moment. Je me demandais si elle allait continuer au moment où elle reprit la parole. Ses épaules s’affaissèrent, et j’eu la désagréable impression que je venais de vaincre la grande Esther Devyldère avec le souvenir de mon père. Elle me raconta alors ce qu’Antoine m’avait révélé il y a quelques jours : Luna, sa marque, Antoinette. Le secret de ma lignée. Et à aucun moment elle n’évoqua Antoine. Il devait me rester un minimum de bon sens, car je fis ce que je pus pour paraître surprise. Mais de fait, surprise, je l’étais.

-Pourquoi me racontez-vous cela ?

Elle se leva alors, et se mit à lentement faire les cents-pas devant son bureau, laconiquement.

-Je n’étais pas censé vous révéler tout cela. Daniel ne sait absolument rien de Luna. Geoffrey n’a, je pense, jamais rien su. Mais il me semble important que vous sachiez pour que vous compreniez les actes de votre père. Il avait ses raisons.
-Ses raisons ? Me récria-je, incrédule. Des raisons d’abandonner ses enfants, sa compagne, et de les cacher à sa famille ?
-Pas toute sa famille, Léonie, rectifia Devyldère avec douceur, passant outre mon ton pour le moins impoli. Emilie, votre grand-père, peut-être même votre tante étaient au courant.

Je reçu l’information comme un coup de poing dans l’estomac. Un coup de poing qui me coupa le souffle.
Toute ma famille était au courant.
La famille Moineau avait toujours était vallonnée de disputes familiales. Notamment entre mon père, et sa sœur, Nathalie, la mère d’Hadrien, ce qui faisait que je ne les avais que très peu vus pendant mon enfance. La seule chose qui les avait réconciliés avait été la mort de mon grand-père Moineau quand j’avais six ans. Mais je ne me souvenais que trop bien des regards haineux que Nathalie lançait à mon père, des conversations à voix basses qu’elle avait avec mes grands-parents à son sujet… Maintenant, je me demandais si leur sort des Hautroi n’avait pas été le foyer de ces disputes. Mes grands-parents avaient accepté. Nathalie avait refusé.
Mais ce n’était pas pour autant qu’elle m’en avait fait part.
Devyldère dût lire l’horreur sur mon visage, et décida de la faire passer en reprenant le cours de ses explications :

-Luna a presque détruit votre père, Léonie. Louis Bronchard, le directeur de l’époque, était quelqu’un de très cynique. Il a su d’où venait Tristan, qui était son arrière-grand-mère, quel sang qui coulait dans ses veines. Contrairement à moi pour vous, il ne lui a rien caché. Et il le lui a presque fait payer. Tristan faisait l’objet d’attentes plus poussées que les autres. Bronchard avait un tel niveau d’exigence que les nerfs de Tristan lâchaient parfois. Je pense qu’on a dû vous le dire, ces années ici n’ont pas été particulièrement heureuses … Mais en famille ce n’était pas beaucoup mieux. Marceau Perrault, son grand-père, a presque était aussi exigeant que Bronchard. En famille ou à Sappho, Tristan n’était en sécurité nul part. Alors il se retrouvait souvent chez moi, ou chez les Pinceaunot. Et puis, il y a eu Isabelle.

Un bref sourire passa sur ses lèvres, et un nuage de nostalgie assombrit son regard.

-Elle était gentille avec Tristan. Elle était son bol d’air, sa façon de respirer. Avec elle, il était heureux. J’ai toujours trouvé que Geoffrey était arrivé trop vite, mais … (elle ricana en secouant la tête. L’entendre rire renforça mon état de choc. Alors comme ça elle était humaine ?), il m’a amadoué en faisant de moi la marraine de Geoffrey !
-Vous êtes la marraine de Geoffrey ? Répétai-je, incrédule.

Elle hocha brièvement la tête, et sourit. Ses yeux brillaient de nostalgies. Ce fait donnait une autre dimension à cette femme. J’avais beau savoir qu’elle et papa avaient été proches, je l’avais toujours considéré comme un être mystique et lointain. Savoir qu’elle avait été la marraine de Geoffrey, qu’elle avait dû souffrir comme Léna et Danny à sa mort, et qu’elle devait sans doute encore avoir un vide dans le cœur depuis… C’était surréaliste. Et la nostalgie et la tristesse qui brillait dans ses yeux sombres la rendaient plus humaine. Plus proche. Je sentis doucement mes doutes envers elle vaciller. Comment la marraine de Geoffrey pouvait-elle être responsable de sa perte ?

-Je vous l’ai dit, Léonie. J’aimais beaucoup Tristan. (Elle marqua un arrêt, puis décida de la jouer pathétique) Comme un petit frère. Et j’ai trouvé en Geoffrey un fils de substitution. Je les ai beaucoup aidés à s’en occuper, et j’ai réussis à pousser, avec l’aide de Marceau, qui était encore vivant à cette époque, pour qu’il intègre Sappho malgré l’absence de marque. Chose qui a enchanté Tristan. Son fils ne subirait pas les mêmes pressions que lui. Il était humain. Il aurait une enfance normale. Leur vie était paisible.

Elle se laissa aller contre son dossier en soupirant. Elle avait perdu toute la posture de reine qu’elle s’imposait d’habitude. Elle descendait de son piédestal. J’arrivais presque à imaginer la jeune femme que mon père avait connue.

-Puis Isabelle a commencé à vouloir un autre enfant, raconta-t-elle. Tristan était très heureux avec Geoffrey, et je voulais pas tenter le diable – enfin, plutôt Gaia, en réalité. Il était le troisième depuis Antoinette. Au bout de la cinquième génération, le Conseil des Ecoles commencent à trouver la lignée plus gênante qu’autre chose. Les enfants ayant le sang de Luna dans les veines échappent à leur contrôle. A leur compréhension. Ils sont plus puissant, mieux avertis, mieux armés… Et Bronchard était encore à la tête de Sappho. S’il laissait Geoffrey tranquille parce qu’il était humain, il n’en serait rien si l’autre enfant était enfant de Gaia.

Elle s’interrompit un moment. J’étais malgré moi suspendue à ses lèvres. Je me souvenais presque parfaitement qu’Antoine avait dit quelque chose de relativement similaire « au bout d’un certain nombre … les individus doivent devenir plus gênant qu’autre chose. »

-Mais il a cédé, devinai-je d’une voix étouffé.
-Oui. Il s’est dit que si Geoffrey était humain, il n’y avait de raison qu’il en soit autrement pour l’autre enfant. Alors oui, il a cédé à Isabelle. Et Daniel est né.
-Avec la marque.

Elle hocha la tête.

-Tristan a paniqué, m’avoua-t-elle. Il m’a téléphoné, et je ne savais même pas si c’était un garçon ou une fille qu’il m’apprenait qu’il avait la marque. J’avoue que je n’étais pas sereine non plus, mais j’étais optimiste. Les jours de Bronchard étaient comptés. Dans un an maximum, il était parti. Et j’étais en tête de liste pour le remplacer. Daniel aurait pu avoir une enfance normale. Mais j’étais moins sure pour l’adolescence. Geoffrey avait sept ans, et le Conseil avait délégué un représentant pour vérifier qu’il n’avait pas la marque lunaire, étant donné qu’il était le plus jeune enfant issu d’Antoinette Perrault. Non. La seule chance pour Daniel d’avoir une enfance normale était qu’on le détache complétement de son père.

Les pièces du puzzle se mirent lentement en place dans mon esprit, masquant alors ma colère.

-C’est Isabelle qui a eu l’idée, continua Devyldère. C’était un couple discret qui habitait dans un petit appartement, à Orléans. Bronchard s’intéressait peu à la vie de la petite famille. Il n’avait même pas remarqué la grossesse d’Isabelle, malgré son congé prolongé. Elle réussit à faire deux livrets de famille, dont un où Daniel était de père inconnu. Elle a confié l’autre à Raymond. Dans les deux, elle a donné son nom à Daniel, pour effacer la trace avec son père – précaution qu’ils avaient déjà pris pour Geoffrey. Puis Tristan a décidé d’arrêter là leur relation, et de repartir chez lui, en Alsace.

Un silence s’insinua entre nous. La directrice ne m’avait pas regardé de l’entretien, ayant le regard perdu dans le vague. La pluie s’était mise à tomber, et tapait avec férocité sur les carreaux.

-Ça lui a brisé le cœur, souffla-t-elle. Il passait des journées entières avec Raymond et moi pour savoir si c’était la bonne solution. Raymond était contre. Il était le parrain de Daniel, et refusait qu’il grandisse sans son père. Mais j’avouais que si le but était de préserver Daniel … Il valait mieux qu’il s’en aille. Que Daniel grandisse sans que quiconque sache qui était son père. Très peu de gens à Sappho connaissaient la petite famille. Tristan vivant avec Isabelle à Orléans, et faisait tout pour éviter de retourner à Sappho. On voyait souvent Isabelle et Geoffrey … Mais pas Tristan. Il pouvait bien disparaître. Alors il est parti. Quand il est monté dans le train pour Strasbourg, j’ai su que c’était sans doute la dernière fois que je le voyais. Isabelle n’avait pas eu le courage de lui dire au revoir. Et Geoffrey a dû sentir aussi qu’il perdait son père, parce qu’il ne voulait pas le laisser partir. Même Daniel pleurait dans mes bras alors qu’il n’avait que deux semaines. C’était un instant tragique. Je vous avoue que … C’était l’avant-dernière fois que j’ai vu Tristan.

J’eus l’impression que mes entrailles, douloureusement contractées depuis que j’avais parlé avec Danny, se détendaient lentement. Le nœud de mon estomac s’envola lui aussi. Je passai une main sur mon visage pour chasser mon trouble. C’était bien mon père qui avait abandonné Danny bébé.
Mais Devyldère avait eu raison. Rien de comptais plus pour mon père que sa famille.

-Qu’est-ce qu’il s’est passé, ensuite ? Crossai-je.
-J’avais des nouvelles de temps en temps. J’en faisais part à Isabelle, mais elle paraissait distraite. Geoffrey demandait souvent après son père, et dans les premiers mois, il lui arrivait d’aller de temps en temps le voir en Alsace. Puis, six mois après la naissance de Danny, Tristan m’a dit qu’il avait rencontré une autre femme. C’était rapide, mais j’étais heureuse qu’il puisse oublier Isabelle, et je l’ai encouragé dans cette voie. Mais Isabelle l’a su, et s’est mise en colère. Elle a refusé que Geoffrey retourne voir son père, et a décidé de le bannir définitivement de sa vie.

D’où l’idée qu’avait toujours eut Danny que son père était parti avec une autre femme. Jamais il n’aurait pu deviner qu’en réalité, c’était lui, la cause de son départ.

-Cette femme, demandai-je doucement, c’était ma mère ?
-Oui, sourit-elle. Florence. Il l’a rencontré alors qu’elle faisait un stage en Alsace. Elle était un peu plus jeune que lui, mais c’est allé assez vite entre eux deux. Oh, n’allez pas imaginer qu’il s’est servi de Florence pour oublier Isabelle. Non, non. Je pense qu’il est réellement tombé amoureux de Florence au fil des mois. Elle a apaisé la douleur qu’il éprouvait. Au bout de trois mois de relation, il m’a invité à venir les voir dans leur petit appartement strasbourgeois. Une femme charmante, cultivée avec cette pointe de franchise qui manquait peut-être à Isabelle.

Je fis un rapide calcul. Il me confirma ce que je savais déjà, mais dans ce contexte là, ça avait quelque chose de particulièrement dérangeant.

-Je suis arrivée tôt.

Danny était né en janvier. Mes parents s’étaient mis ensemble en juin. Ma mère était tombée enceinte en décembre. Compte tenu qu’avant, il avait été dix ans avec la même femme, et que ces deux fils avaient sept ans d’écart, la relation avec Florence Delire paraissait précipitée. La directrice me lança un regard, et fit un geste qui m’étonna, même dans ses circonstances : elle s’avança vers moi, et mit doucement sa main sur la mienne.

-Oui, je ne vais pas vous le cacher, admit-elle avec sincérité. Votre père a eu apparemment une … seconde d’inattention, sans doute enivré par son nouveau bonheur. Florence a voulu garder le bébé, malgré la jeunesse relative de leur relation, et étant donné que les parents de votre mère sont …
-Catho, extrémistes religieux, intolérants …

Etait-ce utile de préciser que je ne m’étais jamais entendu avec mes grands-parents maternels ? Même si j’étais sûre qu’ils s’entendraient très bien avec Grand-mère Moineau (mais elle au moins, elle avait laissé Isabelle et Papa faire ce qu’ils voulaient).

-Voilà. Ils ont forcé vos parents à se marier pour que vous ne naissiez pas … dans le pêché.

J’étais déjà au parfum de cette histoire. Quand j’avais compris que mes parents s’étaient mariés à cause de moi, j’en avais éprouvé un fort sentiment de culpabilité. Etant donné que le mariage avait été fait dans la précipitation, ça n’avait pas été le mariage de rêve dont rêvais toutes les petites filles. Je m’étais donc promis, du haut de ma dizaine d’année, d’un jour leur refaire un mariage digne de ce nom pour réparer mon erreur. Mais comme mon père était mort trop tôt, je m’étais rattrapée avec le remariage de maman avec Christophe. Je vous l’assure : Sissi l’Impératrice aurait été jalouse de ce mariage. Je lançai un regard timide à la directrice, et tentai :

-Vous allez me dire que vous avez été témoin ?

Devyldère parut réprimer son sourire, car une voyait la commissure de ces lèvres se levait légèrement. Après tout, elle devait être humaine.

-Exact, mademoiselle Moineau, confirma-t-elle d’un ton très professorale. Vous êtes née en juin. Et cette fois, Tristan m’a épargné la crise de nerf. Bien au contraire. Ses peurs qu’il avait enfuis avec son départ définit d’Orléans ont refait surface. Mais cette fois, il les a gérés d’une tout autre manière. Après avoir coupé les ponts avec sa compagne et ses fils, il les a coupés avec Orléans tout entier en s’exilant avec vous et Florence dans le Nord. Dès le moment où il a cessé de m’appeler ou de m’envoyer des lettres, j’ai soupçonné que vous aviez la marque, mais qu’il avait souhaité vous préserver, comme il avait voulu préserver Daniel. Vous n’iriez jamais à Sappho. Il vous éduquerait lui-même. C’était une solution qui avait aussi été envisagée pour Daniel, mais Isabelle ne voulait pas abandonner ni son poste à Sappho, ni la condition d’enfant de Gaia de son fils. Elle voulait que Daniel aille à Sappho. Elle était fière de sa marque.

Elle lâcha ma main, et se rassit sur son bureau. Lâcher toutes ces informations semblait la soulager de minutes en minutes.

-Tristan a tout abandonné pour protéger ses enfants, conclut-t-elle avec gravité. Tout sacrifié. Isabelle. Geoffrey et Danny. Raymond et moi. L’Alsace. Alors faites-moi plaisir, mademoiselle Moineau. Minimisez votre rage envers votre père.

Ma mâchoire se contracta, et je méditai intérieurement sur cette requête. Elle ne me paraissait pas complétement absurde dans la mesure où mon père avait des raisons valables de faire ce qu’il faisait, et qu’il avait beaucoup perdu pour nous protéger. Lui en vouloir pour ça relevait de l’ingratitude, et cette idée me soulevait le cœur. D’un autre coté … Je pensais que c’était le secret de trop. J’avais appris que mon père avait une vie secrète, celle de l’enfant de Gaia, et dont je n’avais jamais eu connaissance. En revanche, j’avais toujours été très loin de soupçonner qu’il avait eu une véritable vie avant de faire la connaissance de ma mère. Et encore moins que Danny Hautroi avait pu faire partie de cette vie. C’était comme si à chaque fois que je creusais sur le passé de mon père, je découvrais un nouveau personnage, une nouvelle facette de son identité que je n’avais jamais rencontrée, un nouveau dédoublement. C’était ça. Mon père était un véritable schizophrène.
Je haïssais sa schizophrénie.
Mais malgré ça, malgré le sentiment de trahison que j’éprouvais, la colère contre ce stupide secret et l’envie d’aller cracher sur sa tombe, beaucoup de petite Léonie me murmurait à l’oreille : « il a fait ça pour toi … » « Il voulait vous protéger »… Et peut-être le pire dans tout ça, c’était la petite Léonie qui disait « C’est aussi de la faute d’Isabelle ».
Je n’étais pas tout à fait sure que Danny serait d’accord avec cette Léonie-là.
Je lançai un regard torturé à Devyldère, et finit par lâcher du bout des lèvres :

-Je vais essayer. Mais ce n’est pas vraiment de moi que vous devriez vous inquiéter, ajoutai-je sombrement.

Je vis la lueur d’incompréhension passait fugitivement dans les yeux de la directrice, et je lui expliquai bon gré, mal gré, comment Danny m’avait révélé tout cela il y a quelque minutes. Devyldère pesta, et je n’eus aucun mal à deviner pourquoi : j’avais pu comprendre les intentions de mon père en ayant toutes les cartes en mains. Il en manquait une à Danny. Quelque chose que Devyldère et papa n’avaient jamais voulu lui dévoiler.
Luna.
Comment pouvait-il comprendre réellement mon père – euh… notre père ? Non, désolée, ça ne passait toujours pas ! – sans cette carte ?

-Rassurez-moi, et dites-moi que vous comptez lui dire tout ce que vous m’avez dit, bredouillai-je précipitamment.
-Je ne sais pas, fit lentement Devyldère, les yeux rivés sur les miens. Daniel n’a jamais été Geoffrey. Isabelle m’en a voulu d’avoir cautionné le rapprochement entre Tristan et Florence. Elle a tenté d’éloigner Geoffrey de moi, mais il était déjà assez grand pour prendre certaine décision, d’autant plus qu’elle avait emménagé dans la résidence des professeurs quand, un an après le départ de Tristan, j’ai été promue directrice. Geoffrey était assez grand pour venir toquer à ma porte quand il ne supportait plus sa mère, ou quand il voulait avoir des nouvelles de son père. J’ai été tenté plusieurs fois de lui dire qu’il avait une petite sœur. (Elle sourit doucement). Il aurait adoré. Il demandait souvent à sa mère une petite sœur, quand il était petit. C’est d’ailleurs en partie pour ça qu’Isabelle a voulu un deuxième enfant. Mais la petite sœur était un petit frère. C’est moi qui lui ai appris après le coup de fil paniqué de Tristan. Vous auriez vu sa tête !

Je n’arrivais pas à croire que j’entendais ce genre d’anecdote de la bouche de la légendaire Esther Devyldère. Et c’était encore plus surréaliste de songer que j’étais la petite sœur rêvée du célèbre Geoffrey Hautroi. Je me surpris à me demander si j’aurais aimé être réellement sa petite sœur, comme Danny était son petit frère. Je revoyais son sourire enjôleur, la lueur malicieuse sur les photos qu’on m’avait données, les descriptions qu’on m’en avait faites … Et je m’étonnais une nouvelle fois en songeant que oui, j’aurais adoré connaître Geoffrey Hautroi en tant que grand frère. Et cette constatation fut la plus cruelle que j’eu depuis mon arrivée à Sappho.
Jamais je ne pourrais connaître ça. Parce que Geoffrey était mort.
Un sentiment de perte s’épris de moi, la même sensation de vide glacé qui m’avait envahis quand j’avais compris que papa avait succombé à l’accident. Pour ajouter au tragique de la situation, les larmes me montèrent aux yeux. Devyldère ne remarqua pas mon soudain émoi, et continua sur sa lancée :

-Tout ça pour vous dire qu’Isabelle a tout fait pour que Daniel ne soit pas aussi proche de moi que ne l’était Geoffrey. J’ai toujours eu des relations cordiales avec lui. Il m’a toujours vouvoyé – ça faisait bien rire Geoffrey, d’ailleurs – et n’est jamais venu toquer chez moi. Je pense qu’il n’a même jamais su le lien que j’avais eu avec son père. Pour lui, j’étais la patronne de sa mère. Maintenant, je suis sa directrice, cette femme un peu hautaine qui jadis était la marraine de son frère. Je me vois mal lui raconter …
-Non, refusai-je fermement en ravalant mes sanglots. Vous devez le dire à Danny. Il faut qu’il comprenne.

« Sinon il va continuer de détester son père » pensai-je, tout en étant incapable de le dire tout haut. Or, comme son père était le mien, et qu’il avait fait tout ça pour le protéger…
Je devais avouer que j’allais avoir du mal à entendre Danny dire du mal de papa.
Devyldère me lança un regard étrange, et remarqua enfin les larmes qui perlaient à mes yeux. Je vis ses mains qui tressaillirent, comme si elle retenait un mouvement.

-J’aviserais, promit-t-elle en se levant. Il est vrai qu’il n’est que justice qu’au niveau des informations, le frère et la sœur soient à égalité. Je l’aurais fait sans hésiter… S’il ne s’agissait pas de Luna.
-Faite-le, lui intimai-je sans relever le « le frère et la sœur ».

J’étais surprise de ma propre audace, et je me rappelais alors qu’en plus d’être la directrice de cet établissement, elle était notre suspect numéro un dans notre enquête. Même si mes doutes vacillaient de plus en plus, je devais tâcher de garder ça dans un coin de ma tête, et éviter de la contrarier.

-S’il vous plait, ajoutai-je pour adoucir mes paroles. Danny a le droit d’enfin savoir.

Elle médita mes paroles un petit moment, puis hocha doucement la tête en promettant d’y réfléchir. Elle se leva alors, et, dans la façon de se tenir et de me regarder de haut, je suis qu’elle était remontée sur son piédestal, et que la séance était terminée. Elle avait dit ce qu’elle avait à dire. Je me levai alors de mon siège.

-Vous vous sentez mieux ? S’enquit-t-elle d’un ton plus doctoral. Plus de nausée ?
-Non, affirmai-je en réussissant avec satisfaction à tenir sur mes jambes.

Je jetai un regard d’excuse à la poubelle dans laquelle j’avais vomi, et saluai la directrice avec un « merci beaucoup » cordial. Machinalement je m’avançais vers la porte de la bibliothèque, avant de faire subitement demi-tour en m’injuriant intérieurement. Je n’étais pas censée connaître cette porte. Je me dirigeai vers l’entrée extérieure, et avant que je n’aie pu ouvrir la porte, Devyldère m’interpella :

-Mademoiselle Moineau ?

Je me retournai vers elle, surprise. Elle s’était rassis sur sa chaise et avait allumé son ordinateur (avec le mot de passe « Kinder », évidemment). Elle sourit doucement en me lançant un regard entendu, et ses yeux brillaient d’une malice surprenante.

-Vous seriez gentille de me rendre la clef de la bibliothèque.

***



Voilààà ! N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez, s'il y a quelque chose que vous ne comprenez pas, et à une prochaine fois ! (je ne sais pas quand, mais je reviendrais, promis !
Amethystes

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Amethystes »

Salut !

Je vais faire ce commentaire avec des chiffres se seras plus simple. (Mais, je te préviens, il y auras beaucoup de questions ;) )

1) Moi aussi j'aurais aimé qu'il y ait un dialoque entre Danny et Léo mais bon... :roll:

2) Comment Devyldère (elle s'appelle bien comme ça ? Parce que je n'arrive pas à retenir son nom :cry: ) sait pour la clé que Léo lui a volé ? Elle ne l'a dit à personne !

3) De quoi parlaient Devyldère et Lena en entrant dans le bureau ?

4) C'est normal que Léo se téléporte toujours quand elle est en état de choc ?

5) Je ne l'ai pas dit dans mon commentaire précédent mais c'est vraiment dommage pour le couple Danny/Léo. :cry: . Mais je ne veux toujours pas que Léo finisse avec Antoine.

6) Ça fait toujours bizarre de savoir que Danny et Léo sont frère et sœur.

7) Je crois que c'est tout ! :)

A bientôt !

PS : Bonne chance pour tes concours et révise bien :) ;)
PS 2 : J'adore les smileys :D
chatchat14

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par chatchat14 »

Hey !!

Le mot de passe " kinder " :lol:
Elle n'a pas l'air si hautaine que ça quand elle parle là !
Dire qu'elle a été la marraine de Geoffrey !
Elle doit se douter que Léonie sait déjà se téléporter depuis un moment ( enfin " sait "… ) :
Perripuce a écrit :Devyldère m’interpella :

-Mademoiselle Moineau ?

Je me retournai vers elle, surprise. Elle s’était rassis sur sa chaise et avait allumé son ordinateur (avec le mot de passe « Kinder », évidemment). Elle sourit doucement en me lançant un regard entendu, et ses yeux brillaient d’une malice surprenante.

-Vous seriez gentille de me rendre la clef de la bibliothèque. Parce que là, pour qu'elle est compris que c'était elle !

***



Voilààà ! N'hésitez pas à me dire ce que vous en pensez, s'il y a quelque chose que vous ne comprenez pas, et à une prochaine fois ! (je ne sais pas quand, mais je reviendrais, promis !
Bon, bah, à bientôt !
roxyfox

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par roxyfox »

SALUT ;)
Une nouvelle lectrice ça te fais plaisir?!?
J'ai littéralement dévoré ton histoire dans la dernière semaine allant même jusqu'à délaisser mon étude de bio (Est-ce que je me sens coupable? non du tout!!! :P ) pour lire tes super long chapitre (En passant j'adore la longueur c'est tellement rare!!!)
Pour la petite histoire... je me rappelle avoir lu le début de ton histoire quand tu as posté ton premier chapitre mais pour je ne sais quelle raison j'ai pas continué :shock: POURQUOI???? I don't know!! (Je me rends compte que je mets beaucoup de trop de point d'exclamation...désolé ;) ) Et là il y a une semaine, j'ai cliqué par hasard :? sur ton lien et tu m'as complètement happé. Tes personnages sont incroyables et chacun a ça propre personnalité et j'avoue que je suis vraiment très impressionnée :) Ton intrigue est très bien ficelé et chaque chapitre a son lot de rebondissement. Au début, tu t'excusais que ce soit long avant que l'intrigue démarre, mais moi j'aime mieux ça. Quand ça commence à la première ligne, je trouve qu'on perd la fameuse partie initiale qui permet de bien mettre sur pied l'histoire. Mais une fois que tu pars l'histoire tu pars l'histoire! C'est vraiment bon continue comme ça! Et à partir de maintenant tu me comptes comme lectrice assidue!!! Tu peux me prévenir?

Ça me tente de commenter ce que je penses des personnages... Alors Léo est juste incroyable, elle est forte et terriblement intelligente. Danny est drôle et son personnage a beaucoup de présence. Antoine, ah Antoine... pauvre Antoine j'ai juste le goût de le prendre dans mais bras pauvre ptit chou!!! (ET LÉO DOIVENT TERMINER ENSEMBLE!!!!) Lucas est juste adorable ;) et Callie est très attachante... Gretel je la sens pas... à vrai dire je pense même que c'est elle la méchante, mais bon d'habitude je ne suis pas très bonne pour découvrir le meurtrier d'habitude...

Bon okii je pense que mon message est assez long :)
J'ai hâte de lire le prochaine chapitre!
rox
Ps. SHERLOCK C'EST JUSTE GÉNIAL!!!!!
Marie-A

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Marie-A »

Excellentissime !!!

Que de révélations en une seule partie de chapitre. C'est vraiment intéressant tout ça ! Mais à quand la lettre ??
Bon maintenant, je pense qu'on sait à peu près tout ce qu'il y a dedans mais on ne sait jamais.
Et Danny ? Est-il fils de Lune lui aussi ?
Vivement la suite !!
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 17 (2/2). (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Coucou c'est moi !

Allez, pause dominicale pour vous poster la fin du chapitre 17 ...
Argh, je me sens pas bien ... :
1) Parce qu'il ne me reste de fait plus que DEUX chapitres à poster. DEUX. J'en reviens pas.
2) Parce que lundi pro c'est mes concours et je STRESSE un truc de bien.
3) Parce que lundi c'est mon anniv' et que je passe une dizaine et ça m'ANGOISSE.

Bref, vous vous en fichez, mais bon :lol: Fin du chapitre 17, Bonne lecture à tous !


Chapitre 17 (2/2) : Déchirements.

Les jours qui suivirent furent sans doute les plus pénibles que je n’eut jamais à endurer à Sappho. Vraiment. L’unique chose qui s’en rapprochait un tant soit peu dans ma vie était la mort de mon père.
Mouais. Bien, en même temps… c’était bien encore sa faute.

Danny avait dû comprendre que j’avais besoin de m’isoler pour comprendre la chose, parce quand je rentrais dans ma chambre après un jogging qui avait suivi mon entretien avec Devyldère, je la trouvai déserte, mais les deux photos de familles étaient toujours là. Je n’avais pas su dormir de la nuit, assimilant petit à petit l’ampleur des informations que j’avais reçues en l’espace d’une heure. A savoir ?
Mon père avait eu d’autres enfants.
Danny Hautroi, pour ne citer que lui.

Ça me restait encore en travers de la gorge, et je n’avais pu empêcher les larmes de couler pendant quelque heure. Mais vers deux ou trois heures du matin, je n’avais plus eut aucune larme à versé, et avait constaté que cette purge avait été bénéfique : j’avais les idées beaucoup plus claires. L’idée d’avoir deux frères (enfin … demi-frères) ne me paraissait plus aussi saugrenu, bien que difficile à accepter. Les signes se tenaient de façon presque tragique. L’allergie de Danny, et ses yeux. La ressemblance physique entre Geoffrey et Tristan. Et … l’instinct de protection de Danny à mon égard … est ce que ça comptait ? Bref. Une nuit à cogiter avait suffi à la fois à m’apaiser, et à m’épuiser définitivement. Je n’avais pas encore dormi quand mon réveil avait sonné, mais je ne sentais pas prête psychologiquement à aller en cours. J’avais réussis à m’endormir avant que Callie ne prenne sa douche, et j’avais roupillé une bonne partie de la journée.

Si le mardi se passa relativement bien parce que personne ne vint m’embêter. Mais Callie m’obligea à sortir le samedi matin, ne serait-ce que pour manger – il était vrai que je n’avais rien avalé du vendredi. Je m’étais raidi en voyant Danny arrivé à la table, mais il ne m’adressa pas un regard. Il avait l’air assez maussade, et fatigué. Puis je l’avais trouvé dans ma chambre en rentrant du repas du midi. Nos relations avaient parfois été tendues avec Danny. Je pouvais affirmer maintenant qu’elles avaient éclatées. Il s’était inquiété après ma disparition subite, et ça ne l’avait pas rassuré le moins du monde quand je lui avais dit où j’avais – de nouveau – atterri. Après quelque minutes de silence gêné où nous nous étions timidement dévisagés, se demandant comment débuter cette nouvelle relation qui s’ouvrait à nous. J’avais encore du mal à voir en Danny un … frère. J’avais été fille unique presque toute ma vie, et quand j’avais dû partager avec Greg, je l’avais très mal pris. Je ne pouvais pas considérer Greg comme mon frère, d’autant plus que nous n’avions pas de sang de commun. Avec Danny, si.
Mais non. Je n’y arrivais définitivement pas.
Punaise, papa ! Honnêtement, à moi, tu aurais pu le dire, quand même ?

Timidement, nous avions tenté de reconstituer ce qu’il s’était passé lors de la naissance de Danny, moyennant les informations incomplètes que nous avions tous les deux. Mais ça partit vite en vrille. Ce fut le moment fatidique où, prenant mon courage à deux mains, je tentais tant bien que mal de lui expliquer ce qu’il s’était passé il y avait presque dix-huit ans. Mais je n’en eus pas le temps – même pas le temps de trouver un mensonge alternatif à Luna. Danny s’était depuis toujours mis dans la tête que son père l’avait abandonné. J’avais enfin compris ce qu’il avait voulu dire quand il avait dit qu’il m’en avait momentanément voulu pour ce qu’il s’était passé, au moment où il m’avait presque craché « il est parti avec ta mère ». Je sus aussitôt que nous allions avoir un problème, d’autant plus que je considérais que sa mère était plus responsable que la mienne. J’avais sous-entendu ce fait, et je pense que je pouvais affirmer avoir déclenché la troisième guerre mondiale. Il était sorti de ma chambre, furibond, les poings serrés, et j’avais balancé mon oreiller sur la porte qu’il venait de claquer. Je trouvais que notre relation … fraternelle commençait plutôt bien. Ça me rongeait, mais il ne pouvait pas comprendre ce qu’il se passait tant qu’il n’avait pas vu Devyldère. Pour ajouter au tragique de la situation, je m’étais surprise à pleurer sur le visage de Geoffrey Hautroi.

J’étais censé avoir découvert une nouvelle famille, dans cette histoire. Mais en réalité, j’avais l’impression de perdre tellement plus … Un frère ainé que je ne connaitrais jamais. Deux personnes m’en avaient privé. J’ignorais qui était de mon père ou d’Isabelle Hautroi était la première. Et j’étais encore plus dans le flou en ce qui concernait la seconde – celle qui l’avait tué. Je leur en voulais terriblement, mais je ne pouvais blâmer personne. Et puis j’avais la sensation de perdre chaque jour un peu plus Danny. Les jours qui ont suivi, il avait refusé de m’adresser la parole. La façon dont j’avais presque accusé sa mère l’avait blessé – d’autant plus qu’elle était la seule famille qui lui restait, à l’asile ou non. J’en voulais à Danny de m’avoir lâché cette bombe pour m’abandonner immédiatement après, mais il était vrai que je ne l’avais pas joué fine. Et accuser sa mère n’avait fait qu’augmenter le ressentiment qu’il éprouvait depuis toujours envers moi et ma mère. La famille que, dans sa tête, mon père avait choisie.
Mais ce que Danny ne comprenait pas encore, c’était qu’il n’y avait pas eu de choix.

Bref. Toujours était-il que j’avais la sensation que tout cet émoi n’avait servi à rien. J’avais gagné deux frères. Pour les perdre aussi sec.

J’avais décidé de contenter la directrice, et d’aller lui rendre la clef de son bureau. Antoine m’avait vu faire, et m’avait lancé que je devais être la fille la plus désintéressée de tous les temps. Le samedi, quand il m’avait vu arriver à l’infirmerie après ma dispute avec Danny (j’avais été prise d’une incommensurable envie de voir Lucas pour m’apaiser), il avait deviné d’un coup d’œil que quelque chose n’allais pas (en même temps, c’était vraiment le jour où je l’avais laissé le plus paraître), et avait craint que ça n’est un rapport avec son corbeau. J’avais complétement oublié cette histoire, et j’avais été un instant désappointée. Mais je le rassurais en lui disant que ça n’avait aucun rapport, et lui avouais même que ça concernais Danny d’une petite voix. Antoine m’avait lancé un regard étrange, mais je l’avais prévenu de ne pas faire le moindre commentaire, et il s’était tu. Je ne voulais – surtout pas – entendre Antoine me demander si nous avions « des disputes d’amoureux » (en terme usuel … je pense que ça s’appelle de l’inceste. Oh, ciel, il fallait que je me fasse à l’idée …). J’avais été voir Raymond le dimanche m’assurer de sa version, et le concierge parut soulagé de constater que je ne lui en voulais pas outre mesure pour les cachotteries. Il fournit même des preuves supplémentaire sous la forme de photo de mon père adolescent avec la belle Isabelle, et des photos de famille avec eux et Geoffrey, certaines avec Devyldère, et une, qui devait être unique, faite à la maternité, avec le petit Geoffrey dans les bras de sa mère fatiguée, et le bébé Danny … dans les bras de mon père. Quand je vis cette photo, je fondis en larme. Elle était l’argument ultime, la photo de trop, et Raymond et Fantine me consolèrent du mieux qu’ils purent.
Je n’avais jamais autant regretté la mort de mon père.

Ils me laissèrent charitablement dormir chez eux la nuit même, parce que j’étais trop bouleversée pour cacher mes émotions à mes camarades. Et s’il y avait une chose que je ne voulais pas, c’était que tout le monde soit au courant de ce qui se passe – ou pire, l’interprète mal. Le lundi qui suivit, je repris ma place au premier rang, n’ayant pas le courage d’affronter Danny. Nous nous ignorâmes les premiers jours de la semaine, et la situation parut peser à Callie, qui faisait sans cesse des allers-retours entre nous pour voir ce qui se passais. Evidemment, nous demeurions muets, ce qui n’était pas pour contenter Callie. Elle finit par nous menacer - séparément - de nous enfermer tous les deux dans une pièce jusqu’à qu’on se réconcilie, mais ni lui ni moi n’y tînmes compte, et elle se réfugia dans les bras d’Hugo.

Je passai mon mercredi après-midi dans la bibliothèque, à faire un DM de math, les écouteurs enfoncés dans mes oreilles (écoutant The Offspring à un volume sonore qui devait être nocif pour les oreilles) dans le rayon philosophie, qui avait fini par devenir mon sanctuaire. Timothée était passé une ou deux fois pour réclamer une partie de carte, mais j’avais décliné, le nez dans mes calculs. Les maths avaient cette vertu bienfaitrice de vous vider complétement l’esprit. The Offspring aussi. Et puis, j’aimais assez faire des maths avec ce genre de musique. Quand j’arrivai au deuxième exercice, quelqu’un retira un écouteur de mes oreilles, et la musique de You’re gonna go far, kid retenti dans le rayon philo. Je sursautai, et des feuilles de calculs s’éparpillèrent.

-Meynier ! Grondai-je en ramassant mes feuillets. Tu n’aurais pas pu t’annoncer ?

Antoine haussa les épaules et s’assis en tailleur devant moi.

-Je t’ai appelé deux fois, mais tu ne m’entendais pas. Je ne savais pas que tu écoutais The Offsping. Pas un peu trop hard pour toi, Birdy ?
-J’écoute depuis que je suis gamine, grommelai-je en reprenant mes calculs. Que me vaut l’honneur ?
-Juste avoir des nouvelles, déclara-t-il avec flegme. Tu es tellement préoccupée par ton froid avec ton amoureux …
-La ferme, le coupai-je en piquant un fard. Je t’ai déjà dit que ça n’avait rien à voir, et que je ne voulais pas en parler. Toi, dis plutôt. Des nouvelles ?

Le visage d’Antoine se crispa, mais mes épaules se détendirent. Il était vrai qu’après notre brève discute de samedi, je l’avais évité pour avoir de nouvelle complication. C’était lâche de ma part, mais je commençai à peine à me remettre de cette folle histoire – et le froid avec Danny n’aidait pas.

-J’aurais pu en avoir plus si tu n’avais pas rendu la clef …, persiffla-t-il avec mauvaise humeur. Mais non, je n’ai juste que d’autre photo. Peut-être qu’il va enfin me laisser en paix …

Nous échangeâmes un bref regard dubitatif, prouvant que nous n’y croyions pas. Il y aurait un cinquième message. Ce n’était qu’une question de temps. Antoine lança un regard mauvais à la porte discrète menant au bureau.

-Allez sors de là, et donne-moi ta foutue carte …

Je sentis mon cœur se serrer, et lui lançai un regard hésitant par-dessus mon DM.

-Je ne pense pas vraiment que ce soit elle, hasardai-je prudemment.

Antoine me lança un regard à mi-chemin entre le choc, et l’incrédulité. J’avouai que ce revirement était relativement soudain, mais l’idée que Devyldère ait pu sciemment nuire à son filleul et aux enfants de Tristan m’apparaissaient maintenant comme impossible. Je n’avais pas oublié l’émotion contenue avec laquelle elle avait évoqué cette histoire. Ça la touchait bien plus – immensément plus – qu’elle ne voulait bien le laisser paraître. Je m’étais même parfois demandé si nous ne devrions pas lui révéler ce que nous savions, mais ça me semblait encore beaucoup trop tôt.

-Et qu’est ce qui te fait penser ça ? Cingla Antoine d’un air cynique.

Je gardais le silence, cherchant une réponse convenable. Mais la vérité, c’était que je ne pouvais rien lui dire. Admettre qu’elle avait été la marraine de Geoffrey aurait été quelque chose de bizarre en soi, et avancer le fait qu’elle connaissait bien mon père n’aurait pas été un argument valable pour Antoine, parce qu’il soupçonnait mon père d’avoir fait le premier sigle sur l’arbre – soupçon qui me donnait encore la nausée, mais nous évitions de l’évoquer. Au contraire, l’argument acculerait plus la directrice, pour lui.
Bon sang, même en ce qui concernait les informations, nous n’étions pas en phase ! Pourquoi c’était toujours compliqué avec lui ?

-Parce que je le sens, répliquai-je durement avec toute la conviction que je pus. Et parce que je ne vois pas pourquoi elle ferait ça.

Antoine me lança un regard acerbe, mais ne répondit rien. Il était vrai que la question de la motivation nous faisait toujours défaut, mais je n’avais rien de concert pour déculpabiliser la directrice, mis à part la mémoire de mon père, et celle de Geoffrey. Cependant, j’ouvris la bouche pour enfoncer le clou, mais Antoine mis subitement un doigt sur ses lèvres pour m’induire le silence. Je me tus alors, et des pas énergiques retentirent dans l’allée centrale. Bientôt, Devyldère passa devant le rayon philosophie, en compagnie de … Danny. Je ramenai mes brouillons de math à mon visage, feignant de vérifier scrupuleusement mes calculs. Tout mon corps s’était tendu. J’espérai que ça signifiait ce que je pensais que ça signifiait, et que Devyldère allait tout expliquer à Danny. Antoine me donna un petit coup de pied dans le tibia.

-C’est bon, Birdy, tu peux arrêter de te cacher, me taquina-t-il en prenant une de mes feuilles de DM. Pas mal la question de l’exercice deux, je l’aurais pas fait comme ça … mais ça se tiens. Tu étais en S ?
-Oui. Tu peux me rendre ma feuille s’il te plait ?

Antoine me tendit mon brouillon avec un petit sourire sarcastique. Je remis un écouteur dans mon oreille – pas deux, sinon ça ferait trop asociale – et me remis à gratter frénétiquement ma feuille avec des calculs. Je m’entendais à ce qu’Antoine s’en aille, mais il sortit sa PSP, et me demanda si je pouvais lui prêter l’autre écouteur. Avec appréhension, j’acceptai, et nous écoutâmes The Offspring, occupés à nos tâches respectives, pendant une heure. Je finis par lâcher mon stylo avec satisfaction, et je rassemblai toutes mes feuilles de brouillons éparpillées sur le sol.

-Fini ? me demanda Antoine sans lever les yeux de son jeu.
-Ouais, confirmai-je en rangeant tout dans mon sac. Je les recopierai demain.

J’arrachai mon écouteur de son oreille et éteignit la musique. Antoine plissa les yeux en me regardant, l’air vexé que je le prive de The Offspring.

-Où tu vas ? S’enquit-t-il alors que je me relevai.

J’avais atteint le bord du rayon, et hésitai avant de lui répondre :

-Voir Lucas.

Ce qui, du reste, était la stricte vérité. Simplement, je n’étais pas sure de vouloir qu’Antoine m’accompagne. Mais naturellement, quand je prononçai le nom de son jumeau, il se leva d’un bond, et éteignit sa PSP en décrétant qu’il me suivait. Mouais. C’était une réaction à prévoir. Il mit sa veste et nous sortîmes rapidement de la bibliothèque.

-Au fait Birdy, pourquoi Devyldère voudrait voir Danny ?

J’haussai les épaules en retenant de mon mieux le regard acerbe qui me venait. Antoine était du genre « l’hôpital qui se foutait de la charité », à savoir qu’il voulait tout savoir, mais rien révéler. Néanmoins, je perçus la tension dans ses épaules, et décidai d’être charitable en répondant :

-Je ne pense pas que ça ait un rapport avec le corbeau. Il veut trouver le coupable autant que nous, pourquoi il irait voir Devyldère à ce sujet ?
-Peut-être parce qu’il pense comme toi qu’elle n’ait pas coupable, grommela Antoine.
-Ça, je peux t’assurer que non, rétorquai-je avec sècheresse.

Et de fait, s’il était bien dans ce bureau – aussi longtemps – pour les affaires que je pensais, il n’allait pas être enchanté parce que la directrice allait lui révéler. Nous étions arrivés au Hall, et, curieusement, Antoine n’arrêta en plein milieu. Je compris pourquoi quand il sortit son portable de sa poche. Il l’alluma, et je vis nettement son visage blêmir. Il me lança un regard affolé, et je sentis mes entrailles se glacer douloureusement.

-C’est lui ? Soufflai-je.

Antoine ne répondit même pas et ses doigts pianotèrent sur l’écran pour lire ce que ce salaud venait de lui envoyer. Son visage se décomposa et je me permis de lire brièvement au-dessus de son épaule. C’était un mail qui ne contenait aucun objet, et aucun texte, si ce n’était deux images : celle de Lucas, toujours comateux à l’infirmerie, et l’autre … L’autre était un plan de Sappho. Cinq croix rouges. Une nouvelle croix verte.

-Oh non…, gémis-je contre mon gré.

Antoine ne paraissait pas en penser moins, mais il eut la décence de ne rien dire. Son visage s’était figé, et il éteignit son portable avant de le fourrer d’un geste rageur dans sa poche.

-Et merde, jura-t-il dans sa barbe.

Oui. Ça devait être le juron approprié. Ce que nous redoutions depuis des jours venait à nouveau de se produire.
Le Corbeau venait de demander à Antoine d’infecter un nouvel arbre.
Avant que nous n’ayons pu formuler quoique soit, j’entendis la porte qui venait de la bibliothèque s’ouvrir bruyamment, et je vis un Danny fulminant passer cette porte. L’urgence s’épris de moi. J’avais bien sondé les intentions de Devyldère. Et la réaction de Danny.

-Antoine, chuchotai-je, affolée. Tu as un quart d’heure d’avance.

Je lus l’incompréhension dans son regard, puis il remarqua Danny, qui venait d’un pas décidé vers nous. Sans avoir toutes les cartes, il parut comprendre qu’il fallait mieux qu’il s’en aille. Et que le temps où je gardais docilement son secret venait de toucher à sa fin.

-File ! Lui enjoignis-je alors que Danny se rapprochait.
-D’accord, céda-t-il en détournant. Je t’attends à l’infirmerie.

Ses mots étaient dit très bas. Un mortel ordinaire ne les aurait pas entendus. Un enfant de Gaia ordinaire ne les aurait pas compris. Mais moi, j’étais une descendante de la Lune. Ce qu’Antoine ignorait, c’était que Danny aussi.
Antoine passa la porte du Hall au moment où Danny arriva à ma hauteur. J’aurais bien essayé de soutenir son regard, mais ses yeux lançaient des éclairs.

-Que me vaut l’honneur ? Cinglai-je, jouant la carte du sarcasme.
-Tu étais au courant. Depuis longtemps.

Il masquait mal la hargne qu’il y avait dans sa voix. Toujours sans le regarder, j’haussai un sourcil, pour lui faire comprendre que je ne voyais pas de quoi il parlait.

-Luna.

J’hochai la tête pour confirmer. Avec lui, il était inutile de nier. J’avais donc bien deviné les intentions de Devyldère et la réaction de Danny.
Franchement, à des moments, je devrais prendre des paris.
Danny fulminait.

-Et tu le tiens d’Antoine, pas vrai ?

L’accusation me surpris un peu plus. Je n’avais pas pensé que son intuition avait été aussi loin. Mais de même, face à Danny, j’étais dos au mur. La seule chose qui me restait, c’était ma dignité. Le reste, il me l’arrachait.

-Oui, avouai-je en osant le regarder dans les yeux.

Je n’aurais pas dû. L’accusation et la colère qui y régnait me blessèrent profondément. Et mon « oui » accentua la froideur des iris de Danny. Je comprenais pourquoi. Je venais d’avouer que je lui avais caché des informations. Et pas des moindre.

-Alors Antoine a craqué, constata-t-il avec dépit. Et tu n’as rien dit.

Je me mordis l’intérieur de la joue. C’était une froide constatation, qu’il me jetait allégrement à la figure, et qui fut pour moi comme un pieu glacé dans le ventre.

-Je t’en aurais parlé, tentai-je de me défendre. Je te le jure. Mais le contexte ne me semblait pas idéal …

Danny se passa une main dans les cheveux. Je remarquai en passant qu’elles tremblaient (sans doute de rage).

-Argument non valable, me tacla-t-il durement. Tu savais avant.
-Si tu connais toutes les réponses, alors pourquoi tu es là ? M’agaçai-je en levant les yeux au ciel.
-Mais parce que je n’ai pas toutes les réponses ! Éclata Danny, si brusquement que je reculai d’un pas. On s’était mis d’accord : on te laisse gérer Meynier, mais tu étais censé tout nous dire immédiatement après ! Au lieu de ça, tu as tout gardé pour toi !

Ce n’était pas exactement comme ça que ça c’était passé. Mais je sentais que Danny n’était pas réellement d’humeur à entendre le moindre de mes arguments. Et encore moins les explications.

-On a tous accusé Antoine de cautionner l’enfoiré qui fait ça, poursuivit Danny avec éclat. Maintenant, toi aussi tu cautionnes ? Tu protèges le mec qui a tué Geoffrey ?

Il avait presque hurlé la dernière phrase, et elle me heurta de plein fouet. J’eus l’impression de me prendre une vague de dix mètres, et de me noyer dedans avant de me redresser en toussant, les poumons en feu.
Là, c’était mon cœur qui était en feu.
J’avais prononcé exactement – ou presque – les mêmes paroles à Antoine il y a quelques semaines. Ce n’était maintenant que je prenais l’ampleur de ce que j’avais dit. C’était cruel. Ça faisait mal. Très mal, même. Peut-être même que ça me faisait plus mal que ça n’avait été le cas pour Antoine. Danny avait précisément appuyé sur ce qui me blessait le plus en ce moment. Sciemment, ou non.

-Ne me parles pas de Geoffrey, murmurai-je si bas que je doutais qu’il l’ait entendu.

Simplement, ce n’était pas un simple enfant de Gaia que j’avais devant moi. C’était aussi un descendant de Luna, et à ce titre, il avait pu parfaitement entendre ce que j’avais dit. Ses mains tressaillirent, comme s’il retenait un mouvement.

-Que je ne parle pas de Geoffrey ? répéta-t-il avec une colère froide. Non mais tu veux rire, j’espère ?
-Fiche lui la paix, Hautroi.

Je sursautai, et, étrangement, Danny aussi, et nous nous retournâmes d’un même mouvement. Antoine venait de passer à la porte qu’il venait à peine de refermer. Il avait le visage impassible, mais résigné. Je sentis mon cœur se serrer, et ne pus m’empêcher de me frapper le front avec ma paume de main.
Pas besoin d’être chimistes pour savoir qu’ « Antoine + Danny » était un cocktail explosif.

-Je pensais que tu devais aller voir Lucas, soupirai-je avec agacement.
-Désolé, mais c’était avant que j’entende Hautroi hurler – et, peut-être plus étonnent, en ne t’entendant pas hurler en retour.

Je le gratifiai d’un regard acerbe, mais lui était plus concentré sur Danny, lequel lui rendait son regard. Je me fis toute petite, mais me placer tout de même préventivement entre les deux garçons.

-Donc, tu es vraiment un enfant de la Lune, déclara Danny d’une voix contenue.

Antoine hocha sèchement la tête. Une lueur s’alluma dans les yeux de Danny, une lueur plus chaleureuse et moins inquiétante que j’avais souvent vu : l’intrigue, la curiosité. Je préférais amplement qu’il soit guidé par cela que par son désir de vengeance – et sa colère contre moi.

-Pourquoi Devyldère a voulu que tu le saches ? répliqua Antoine.
-Ça ne te regarde pas, Meynier, répondit Danny avec plus d’ardeur. En revanche, toi, tu sais des choses qui me concernent de plein droit.

Antoine eut un petit sourire ironique – le genre de sourire qui n’annonçait rien de bon. Je le suppliai du regard, priant pour qu’il ne fasse pas de bêtise, qu’il ne mette pas Danny plus en colère qu’il ne l’était déjà. Mais avant qu’il n’ait pu faire des bêtises, Danny enfonça le clou en me lançant un bref regard.

-Vous nous les avez cachés.
-Je lui ai demandé de rien te dire, me défendis Antoine avant que je n’aie pu le faire moi-même. Ça va, Hautroi, fiche lui la paix. Elle n’a rien fait de mal.
-Rien fait de mal ?

Je reculai d’un pas, ma tête allant d’Antoine à Danny. J’ignorais ce qui me choquait le plus : la hargne croissante de Danny à mon égard, ou Antoine Meynier qui persistait à prendre ma défense.

-Ça tu n’en sais rien, cracha presque Danny.

La pique me donna presque envie de vomir, presque autant que la rancœur que je lisais dans les yeux de Danny. Je serrais les poings et mes ongles s’enfoncèrent dans ma peau. Il ne parlait absolument pas de l’affaire. Il parlait de papa. J’eus envie de lui hurler « mais putain qu’est-ce que je t’ai fait ?! », mais la présence d’Antoine m’en empêchait. Du reste, je savais très bien ce qu’il me reprochait. J’étais la fille que papa avait choisie à ses détriments. Celle qui lui avait enlevé son père et tout espoir d’enfance normal. Mais ce que Danny avait oublié – chose que maintenant, il devait savoir -, c’était que contrairement à moi, il avait été voulu. Je l’avais compris quand j’étais petite, quand mes parents me racontaient comment j’étais née, et j’en avais eu la confirmation : j’étais un accident. Pas lui. La décision d’Isabelle et Tristan avait été murement réfléchie, quand ils avaient choisis d’avoir Danny. Il était réellement un enfant de l’amour, conçu au sein d’une famille unie. L’enfant que papa avait voulu protéger par-dessus tout. Moi, j’avais été conçue par la négligence, et le désir de l’oubli. L’amour était venu plus tard. C’était lui, l’enfant choisi. Pas moi.
Il savait cela, maintenant. Comment pouvait-il encore m’en tenir rigueur ?
Mes poings se serrèrent encore un peu, et je sentis mon rythme cardiaque s’emballait. Je n’aimais pas cette sensation : elle me rappelait la sensation que j’avais avant de me téléporter. Je m’efforçai donc de me calmer, et de ralentir ma respiration pour prévenir tout incident. Mes poings se desserrèrent, ne lançant qu’une marque brulante au centre de mes paumes. Par bonheur, Antoine n’avait pas remarqué mon trouble, et un autre sourire sarcastique s’étirait sur ses lèvres.

-Tu n’en sais rien non plus, lui fit remarquer Antoine.

Ce n’était pas la meilleure des répliques à faire, et je lui lançai un regard d’avertissement. Il narguait presque Danny, et celui-ci d’en rendait bien compte, parce qu’il paraissait presque prêt à sortir son arc pour planter une flèche dans le cou d’Antoine.

-Je lui ai demandé de ne rien te dire, répéta ce dernier d’une voix moins cynique. Notamment parce que j’étais certain qu’après avoir tout entendu, tu m’aurais tué.
-Non, vraiment, je ne vois pas où tu as pu aller chercher une idée pareille, persiffla Danny en levant les yeux au ciel.
-Danny…, soupirai-je laconiquement.

Il me gratifia d’un regard furieux, et je renonçai en levant les mains en signe de paix.

-Il n’empêche que si tu veux des scoops, il va falloir te calmer, le prévins-je néanmoins.
-Me calmer ? répéta-t-il en haussant le ton. Ça me semble momentanément difficile. Je ne sais pas encore ce que vous cachiez. Mais putain pourquoi vous le faite ?! Vous nous empêchez complètement de trouver une issue à ce bordel !

Antoine éclata d’un rire amer.

-Bravo, Hautroi, tu as mis le doigt sur notre problème ! Premier scoop : on ne sait pas comment mettre fin à ce bordel !

Il avait plongé la main dans sa poche, et je le soupçonnai de tripoter son téléphone, et de penser secrètement au mail que le corbeau venait d’envoyer.
Oh ciel de dieu, le mail… Qu’est-ce qu’on allait faire ?
Stop. Une chose à la fois. La priorité, c’était de calmer Danny. Mais je sentais bien que ni moi, ni Antoine n’y arriveront. Je les avais plusieurs fois sentis au bord de l’affrontement. Mais cette fois, l’affrontement semblait pour moi inévitable. Danny fixa Antoine, incrédule. Ce dernier exécuta une petite révérence moqueuse.

-Quelle déception, pas vrai ? Tout ce mystère, et on a même pas la solution…
-Antoine, le coupai-je fermement. Ce n’est pas le moment pour le sarcasme, alors, soit gentil et ravale ça.

Antoine leva les yeux au ciel, et continua de jauger Danny avec un sourire effronté. Je lui fis les gros yeux. Bon sang, mais il ne voyait pas qu’il aggravait les choses en se comportant de la sorte ? Danny semblait être sur le point d’exploser.

-Il n’empêche que cette affaire ne concerne pas que vous ! s’écria-t-il. Vous avez pensé à quoi en gardant ses infos secrètes ?
-A ma vie, pour commencer, railla son adversaire avec un ricanement.
-Meynier !
-Nan, laisse, Léo, gronda Danny en fusillant Antoine du regard. Je me doutais bien que sa motivation principale était quelque chose dans ce goût-là.

J’ouvris la bouche pour lui dire qu’il se trompait lourdement, mais la tête s’Antoine parlait d’elle-même : il avait perdu toute superbe. S’il y avait bien une affaire où on ne pouvait pas l’accuser d’égoïsme, c’était celle-ci. Il porta la main machinalement à sa ceinture – à une dague, surement. Je me raidis, et secouai discrètement la tête. Pas ça, petit prince. Pas maintenant. Malheureusement, Danny avait lui aussi perçut ce mouvement, et fit apparaître son arc dans sa main si vite que je ne le vit pas venir. Je m’interposai entre les deux, affolées. Danny ne tint pas compte et encocha rapidement une flèche pour mettre Antoine en joue. Mon cœur tomba dans ma poitrine. Je l’avais vu s’entrainer des dizaines de fois, au stand de tir. Il était parfaitement capable d’atteindre Antoine sans me toucher.

-Putain mais vous ne pouvez pas vous calmez, maintenant ? Plaidai-je désespérément.
-Je veux juste savoir ce qu’il cache ! Ce qui est arrivé à Geoffrey !
-Super ! Râlai-je en levant les yeux au ciel. Précisément la question sur laquelle il ne pourra pas t’avancer non plus !

Les yeux de Danny flamboyèrent. Ce n’était pas possible : la colère et la vengeance lui avait définitivement fait perdre le sens commun.
Mon inquiétude secrète ? Qu’il pète les plombs autant que sa mère.
Je me tournai avec désespoir vers Antoine.

-Ça te tuerait de m’aider ? Lui soufflai-je avec urgence.
-Elle a raison, fit alors Antoine d’une voix résolument plus calme et moins sarcastique (il m’avait écouté ! Louons Gaia !). C’est deux personnes différentes qui ont gravé les sigles d’il y a sept ans, et ceux de ces dernières semaines. Alors je n’ai aucune idée de qui a bien pu tuer Geoffrey.

La flèche partit sans que je puisse faire quoique soit. Je la sentis passer à raz de mon oreille, et je fis un bond en arrière. Mon cœur battait la chamade, et je lançai un regard horrifié à Danny, et à la flèche. Elle s’était figée juste au-dessus de l’épaule d’un Antoine Meynier imperturbable.

-Je te jure, Hautroi, insista-t-il, impassible. On n’a aucune idée de qui a fait tout cela il y a sept ans. Le cerveau est peut-être le même … mais la main est différente.

Danny avait encoché une nouvelle flèche, et je n’y tins nerveusement plus. Je levai la main, paume vers le haut, et la flèche s’y téléporta docilement. Les doigts de Danny se renfermèrent sur le vide, et il me lança un regard furieux.

-C’était tout le carquois qu’il fallait téléporter, Birdy, grommela Antoine derrière moi.
-Une chose à la fois, rétorquai-je en rangeant la flèche dans ma ceinture.

Un autre jet se ficha entre mes pieds. Même, un brin trop près du droit. A un centimètre près, il me transperçait. Je bondis en arrière en étouffant un cri de surprise. Je n’avais pas vu Danny réarmer son arc. Antoine me pris nerveusement le bras pour me faire reculer, et lança un regard dégouté et incrédule à Danny. Il avait sortis sa dague entre temps, et je sentais qu’il n’était pas loin de faire la démonstration de ses talents de sorcier à Danny.

-Bon sang Hautroi, qu’est-ce qu’il t’arrive, t’a pété les plombs ou quoi ? Je te pensais capable de me tuer moi, mais pas Léo ! Léo, putain, moi qui pensait que c’était ta petite protégée !
-Je le pensais aussi, fit une voix glaciale à l’entrée.

Cette voix eut le mérite de nous faire sursauter tous les trois. Esther Devyldère se tenait dans l’encadrement de la porte, droite et fière, le regard inflexible. Danny rangea son arc d’un geste souple, et Antoine remis sa dague dans sa ceinture en jurant tout bas. Pour ma part, je sentis une boule de reconnaissance envers la directrice se former dans ma gorge. S’il y avait une personne dans cette école qui pouvait calmer les esprits, c’était bien Esther Devyldère.

-Monsieur Hautroi, on peut savoir à quoi vous pensiez ?

La voix de la directrice était froide et sèche. Une constatation glaciale qui me donna le frisson. Danny ne répondit rien, se contentant d’un regard farouche en direction du sol.

-Au cas où ça vous importerez, ni Geoffrey, ni votre mère n’aurait accepté ce genre de comportement, poursuivit-t-elle, toujours avec la même attitude hautaine et glaciale.

Il y avait quelque chose de plus dans ses yeux, un sous-entendu que je compris aisément. « Votre père non plus ».

-Monsieur Meynier, Mademoiselle Moineau, je vais vous demander de regagner vos chambres, nous ordonna-t-elle sans nous regarder, les yeux toujours fixés sur Danny. J’ai encore deux mots à dire à Monsieur Hautroi.
-Attendez, protesta Antoine en fronçant les sourcils.
-Dans vos chambres !

Devyldère n’avait pas particulièrement élevé la voix, mais quelque chose dans son ton, en plus de n’admettre aucune réplique, avait des accents de dangerosité. Timidement, je pris le bras d’Antoine pour le pousser vers les escaliers. Il se laissa faire de mauvaise grâce. En passant devant elle, j’essayais de faire passer des remercîment par mon regard, et elle les accepta, parce qu’elle hocha sèchement la tête. Alors, sans un regard pour Danny, ni vérifier qu’Antoine me suivait encore, je montai les escaliers, d’abord lentement, puis quatre à quatre. Ma vie se troublait, et mon rythme cardiaque s’emballait.
Danny n’avait quand même pas vraiment essayé de me blesser ?
Les larmes me montèrent presque malgré moi aux yeux, et mes poings se serrèrent. Je n’en revenais pas. J’ignorais si c’était la pathologie de sa mère qui l’avait rattrapé, ou si la colère contre papa et son désir de vengeance obscurcissaient tellement son jugement que sa frontière du bien et du mal en était troublée.
Dans les deux cas, il pouvait s’assoir sur ses études de droit.

-Téléporte des trucs, princesse.

Je sursautai en constatant qu’Antoine me suivait toujours. Nous étions à peine au deuxième étage, mais j’enfonçai tellement mes ongles dans ma peau que mes paumes commençaient à m’élancer.

-Utiliser ton pouvoir, ça va t’épuiser, mais ça va te détendre, aussi, expliqua Antoine en me forçant à m’arrêter. Alors soit gentille, arrête de te mutiler, je sens le sang d’ici.

Je clignai des yeux, surprise, et ouvrit ma main. En effet, des petites plaies commençaient à apparaître là où mes ongles avaient percés la chair.

-J’en reviens pas, soufflai-je, sans trop savoir si je parlais de Danny ou de mes petites blessure.
-Ouais, bien canalise toi, Birdy. Allez, téléporte des choses.
-En marchant, ça fonctionne ?
-Comme tu veux, princesse.

Alors je me remis à grimper les escaliers, et il me suivit. Je fermais parfois les yeux pour visualiser ma chambre et des objets à téléporter en son sein, sans que je sois présente. J’arrivais à déplacer quelques objets, mais rien qui ne me calma mes nerfs. J’en parlais à Antoine, et il haussa les épaules.

-Soit plus ambitieuse. Essaie plus grand.
-D’habitude, quand je m’énerve, c’est moi que je téléporte, avouai-je avec frustration.

Antoine eut un petit sourire goguenard.

-Moi je marque les murs de mon poing où de mon pied, et après je rectifie mes bêtises. Ça relève presque de la télékinésie, et c’est la partie la plus délicate et la plus usante de mon don. Après ça, généralement, je trop crevé pour faire quoique soit d’autre que roupiller. Alors, ça marche ?

Je hochai la tête avec un soupir. J’avais déplacé les pierres qui étaient sur le stand de tir, et quelques tables de la cuisine pendant qu’il parlait.

-Et je pense aussi que j’ai vraiment renversé le bureau de Danny, grommelai-je.

Néanmoins, je devais admettre qu’Antoine avait eu raison : user de mon don m’avait fatiguée, mais je n’avais que plus envie de foutre mon poing dans la figure de Danny. Antoine me lança un drôle de regard, et éclata de rire.

-Oh, Birdy, tu ne vas pas faire la même avec le bureau de Callie ?

Je refusai avec un sourire. Sans m’en rendre compte, nous étions arrivés devant ma porte de chambre. Et Antoine m’avait suivi. Je le gratifiai d’un regard gêné.

-Tu n’étais pas obligé de me raccompagner, grommelai-je, une main sur ma poignée.

Antoine eut un petit sourire sarcastique.

-Birdy, la seule chose que tu as à dire, c’est « merci », et « je t’adore », me taquina-t-il en haussant les épaules.
-Je vais faire l’impasse sur la deuxième partie, décrétai-je en laissait échapper un sourire. En revanche, je pense bien te devoir un merci.

Antoine exécuta une petite révérence taquine.

-A votre service, princesse. Même si j’avoue que ma présence ici est loin d’être désintéressée.

J’haussai un sourcil, à moitié surprise. Oui, évidemment. Une gentillesse gratuite d’Antoine Meynier, ça m’aurait relativement étonné. Puis il sortit son téléphone de sa poche, et je compris pourquoi il m’avait raccompagné.
Le mail.
Oh, ciel.

-On a combien de temps ? M’enquis-je d’une petite voix.
-La dernière fois, entre la lettre et l’attaque des Sirènes, il m’a laissé trois jours. Mais je ne sais pas si c’est une longueur de référence, alors généralement je fais les sigles sous deux jours.
-Deux jours, répétai-je.

C’était horriblement court. L’angoisse s’épris de moi, et je me sentis pâlir. Le dilemme qui se profilait devant nous me donnait la nausée.
Lucas ou Sappho ?
Antoine s’adossa à ma porte en poussant un soupir.

-On ne prendra pas cette décision ce soir, de toute façon, avança Antoine à voix basse. Mais il faut commencer à réfléchir à ce qu’on va faire.

Ce qu’on va faire … C’était une excellente question, tiens. En temps normal, j’y aurais réfléchi depuis longtemps. Mais là, mon « affaire familiale » m’empêchait de prendre les mesures nécessaires. La seule chose que j’avais envie de faire était de me rouler en boule dans mon lit, et de dormir.

-Peut-être que si on se relaie pour surveiller Lucas…
-Et Chloé ? rétorqua Antoine, sans brusquerie.

Je gardai le silence. J’oubliais que la petite sœur était elle aussi menacée par le Corbeau. Protéger Lucas, c’était envisageable. Mais la petite Chloé Meynier qui était à Paris ? Plus difficilement réalisable.

-N’empêche qu’on pourrait prendre celui qui prend les photos en flagrant délit, enchéris-je sans grande conviction.

Antoine eut un ricanement de dépit, et me dis qu’il avait de toute façon prévu de dormir à l’infirmerie. Je me demandai soudain si c’était aussi pour cette raison qu’il dormait à l’écurie, de temps en temps : à la fois pour protéger la brèche et voir s’il ne pouvait pas coincer son corbeau. Je posai mon front sur ma porte.
Lucas ou Sappho.
Comment Antoine avait-il pu supporter une telle pression ?

-On en reparle demain ? Proposai-je, voyant bien que toute délibération serait inutile ce soir.

Il hocha sinistrement la tête, et se décolla de ma porte. Je lui souhaitai bonne nuit en ouvrant ma porte, et il ne répondit rien. J’allais refermer quand je l’entendis m’appeler :

-Birdy ?

Je passai ma tête par l’embrassure. Dans la pénombre du couloir, je distinguai à peine Antoine.

-Je suis désolé.

J’haussai les sourcils, surprise, pour ne pas dire choquée. Un petit sourire s’étira sur mes lèvres, timide et incertain.

-Meynier, tu ne viens quand même pas de t’excuser ?

Malgré l’obscurité ambiante, je vis le petit sourire de dépit d’Antoine.

-Profite de ton triomphe, princesse, rétorqua-t-il.
-Non, sérieux ? Mais pourquoi ?
-Parce que je m’étais pas rendu compte dans quelle merde je te mettais en te confessant mes pêchés. Je ne sais pas ce qui se passe entre Hautroi et toi, et je ne veux pas le savoir. Simplement, je n’aurais pas imaginé qu’il puisse essayer de te blesser à cause de ça.

Contre son gré, du moins l’imaginais-je, une pointe de regret et de culpabilité avait percée sa voix. Mes doigts se crispèrent sur ma porte. J’hésitai entre être touchée, ou vexée.

-Ça va, Meynier, ce n’est pas ta faute, le déculpabilisai-je avec un soupir. Il y a … d’autres facteurs que simplement l’histoire des brèches. Et il ne m’a pas blessé, s’il avait voulu le faire, je le serais. Roh, et puis je ne suis plus une gamine ! Arrêtez de me border !

Antoine ricana doucement, mais je doutai avoir réussi à le convaincre. Notamment sur la partie « je ne suis plus une gamine ». Finalement, il préféra arrêter là le débat, et me fit un salut militaire avant de repartir. Je refermai la porte de ma chambre avec un gros soupir. Je me repassai la scène du Hall dans la tête, plusieurs fois. Chaque fois, elle me parut plus surréaliste. Danny qui nous menaçait, toute raison étant emportée par la rage. Antoine Meynier qui me défendait. J’avais l’impression d’être de l’autre côté du miroir, dans Alice au Pays des Merveilles. Tout était sans dessus de sous. Inversé. Rien n’avait de sens.
C’était ça. Ce qui s’était passé n’avait pas de sens.
Quand elle m’entendit rentrer, Callie se précipita dans ma chambre et me demanda si c’était bien la voix d’Antoine Meynier qu’elle avait entendu dans le couloir. Quand j’hochai la tête, elle m’harcela pour savoir s’il avait craqué, et si non, quand est ce qu’il le ferait. Je finis par renvoyer Callie dans sa chambre en haussant la voix, ce qu’elle fit en fulminant. Je n’étais pas d’humeur à cela, même si le comportement de Callie commençait lui aussi à m’inquiéter. Depuis que nos disputes avaient commençé avec Danny, elle s’était éloignée de nous, et je la voyais souvent en compagnie de Léna. J’avais peur qu’elle ne raconte l’intégralité de nos connaissances à Léna, et que ça en pâtisse sur Antoine. Que Danny commence à se poser des questions et à sauter à sa gorge, s’était déjà bien assez contraignant. Il était hors de question que la conseillère en rajoute une couche. Je me rendis compte que j’étais doucement en train de glisser du côté d’Antoine : nous ne pouvions pas en parler à Léna. J’avais pensé que Danny aurait été un minimum réceptif, et il avait failli me transpercer le pied. Si quelqu’un d’aussi pondéré que Danny Hautroi réagissait ainsi, alors qu’en serait-t-il de Léna ? Je m’assis sur le lit en me prenant la tête entre les mains. Cette histoire commençait à être un véritable casse-tête. Luna avait créé presque autant de problème qu’elle en avait résolu.
Lucas ou Sappho ?
Comment étions-nous censé agir ?
Des larmes me vinrent aux yeux sans que je ne m’en rende compte, et je les essuyai rageusement quand elles coulèrent. Ce n’était pas le moment de craquer. Antoine avait raison, je n’étais pas en état de réfléchir ce soir. Je venais de prendre mon ordinateur pour me mettre un film capable de me vider la tête avant de m’endormir quand quelques coups discrets furent portés à ma porte. Je lâchai mon ordinateur sur mon lit en fulminant. Je n’avais pas envie de parler à qui que soit. Je m’approchai doucement de ma porte, et mis ma main sur ma poignée sans l’ouvrir.

-Oui ?
-C’est moi.

Mes entrailles se glacèrent. Danny.
Je m’attendais à être furieuse. A lui cracher du venin au visage. Sortir les crocs, et ne lui laisser aucune miette de dignité. Mais la triste vérité, c’était que mes yeux s’emplirent immédiatement de larme. J’ignorais simplement ce qui les provoquait. La rage ? La déception ?

-Va-t’en, réussis-je à articuler, la main toujours sur la poignée.
-Léo, écoute, chuchota précipitamment Danny de l’autre côté de la porte. Je suis vraiment désolé pour ce qu’il s’est passé dans le Hall.

Mon estomac se retourna, mais ce fut de nouvelles larmes qui me vinrent aux yeux.

-Ça m’est égale. Vire.

J’entendis Danny soupirer derrière ma porte, et ses doigts pianotèrent nerveusement dessus. Je serrai tellement la poignée que mes jointures s’étaient blanchies.

-J’ai déconné, Léo. Je n’ai jamais voulu lâcher cette flèche.
-Pourtant tu l’as fait, répliquai-je en ravalant mes larmes. Et c’était un brin trop bien visé pour être un accident.

Danny ne répondit pas. Mais moi, les mots me brulaient la langue, et je sentis le venin que je stockais des semaines remonter en une trainée acide dans ma gorge :

-C’est ignoble, ce que tu as fait, haletai-je d’une voix qui était pour ma plus grande horreur cassée. Tu … Tu n’avais le droit de me balancer ce genre de bombe pour m’abandonner comme ça après.
-Léo, soupira Danny. Ce … Ce n’était pas comme ça que c’était censé se passer. Je … je ne pensais pas t’en vouloir autant.

Je reçus ses mots comme un coup de poing. La bile et la rage remontèrent dans ma gorge.

-M’en vouloir ? Répétai-je d’une voix blanche.
-Léo, c’est irrationnel. Complètement. Je … tu l’as compris, j’ai toujours détester mon père. J’ai toujours vécu avec l’idée qu’il nous avait abandonnés. Qu’il n’en avait jamais rien eut à faire de nous.

Je m’adossai à ma porte et réprimer les sanglots qui me nouaient la gorge. Rien à faire ?! Je déglutis pour faire passer les pleurs, et rétorquai d’une voix sourde :

-Devyldère t’a dit pourquoi il était parti ?
-Oui, souffla Danny après quelque seconde. Oui, elle m’a tout dis. Ça … n’a pas été facile.
-Alors tu sais qu’il ne t’a pas abandonné. Il t’a sauvé.

Ma voix s’était étouffée dans ma gorge quand je prononçai le dernier mot. Bon sang, mais qu’est-ce qu’il me prenait de perdre le contrôle comme ça ?

-Alors tu n’as absolument pas à m’en vouloir, poursuivis-je avec lenteur. Parce que contrairement à ce que tu as l’air de tout le temps sous-entendre, c’était toi, l’enfant choisi.
-Léo …
-Non ! Maintenant, tu m’écoutes ! Exigeai-je en réprimant mes larmes. Ce qui se passe, c’est que tu as eu une enfance pourrie, et le seul responsable que tu as trouvé à tes malheurs, c’était ton père ! Il n’aurait peut-être pas pu éviter ce qui est arrivé à Geoffrey, mais au moins, il vous aurait aidé, ta mère et toi. Et peut-être même que ta mère n’aurais pas été placée. Alors tu as appris à le haïr, et à haïr la femme qui t’avais ravi ton père.

Danny ne dis rien, mais même si je ne voyais pas, je devinai sa tension. J’avais beaucoup réfléchis à ce qu’il pouvait se passer dans sa tête. J’en avais même parlé avec Raymond – il avait été assez déçu de la réaction de Danny, même s’il l’avait comprise. Alors je ne pensais pas me tromper de beaucoup dans ce que je disais.

-Sauf que la réalité, c’est que la seule femme qui t’a ravi ton père, c’est ta mère.

La phrase qui faisait mal. La phrase qui faisait que je venais de le perdre définitivement. Mais cette situation impossible m’avait appris une chose : j’avais trop de respect pour papa pour que quiconque ne dénigre son sacrifice comme le faisait Danny. C’était pourquoi je décidai de continuer :

-Je comprends que la relation entre papa et ma mère ait été un choc pour elle. Et je suis la première à admettre que je suis arrivée trop tôt. Je les ai même forcés à se marier. Oui, c’est sans doute à cause de moi qu’elle a refusé que vous voyiez votre père. Mais c’est elle qui a pris la décision. La seule chose que mon père voulait, c’était s’éloigner de toi géographiquement. Geoffrey le voyait encore dans les premiers mois en Alsace. Si ça se trouve, tu aurais pu le connaître. Un week-end par-ci par-là, mais tu aurais pu le connaître. Même si j’étais là. Alors arrête d’en vouloir à ma mère. Et putain, arrête de m’en vouloir. (Les larmes commençaient à couler sur mes joues, mais je parvins à garder une voix relativement blanche). Je n’ai rien fait. Je n’étais même pas voulue. Toi, tu l’étais, au moins. Tu es le seul enfant que papa ait accepté d’avoir. La seule chose à laquelle il a pensé quand il est parti, c’est à toi. Alors arrête de m’en vouloir.

A présent, les larmes coulaient librement sur mes joues, et je posai mon front sur ma porte. Même ma tête était trop lourde à porter. Un choc discret m’indiqua que Danny venait de faire la même chose. J’entendais d’ici sa respiration haletante. Peut-être était-t-il dans le même état que moi, à retenir ses pleurs pour ne pas perdre la face.

-Léo, s’étouffa Danny. Laisse-moi rentrer, s’il te plait.
-Non. Vas-t-en, s’il te plait.
-Léo…
-File !

Mes doigts se crispèrent un peu plus sur la poignée, mais je refusai de céder à la tentation de lui ouvrir. Ce qu’il avait fait ces derniers jours avaient été bien plus douloureux que toutes les flèches qu’il avait bien pu vouloir me lancer. Il était hors de question que je lui pardonne comme ça. Il se tut quelques secondes, puis je l’entendis se décoller de la porte, et faire les cents pas devant. Puis les pas s’éloignèrent résolument. J’attendis de ne plus les entendre pour me détendre. Mes doigts se décrispèrent de la poignée, et je m’adossai à la porte avec lassitude. La conversation m’avait ôté mes dernières forces. Je me laissai glisser à terre, et, repliée en position fœtale, je laissai enfin échapper les sanglots que j’avais réprimés.


VOILAAAAA !
Et Cazo', tu te souviens du bébé-extrait que je t'avais envoyé? Bah il était issu d'ici :) (BONNE CHANCE POUR LUNDI !!!)
BREF, ceci étant fait, à la prochaine les amis !
chatchat14

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par chatchat14 »

Heeeyyy !

Plus que deux chapitres ?!?!?! Mais comment qu'on va faire ?? :lol:
Bref :
_ Je demande toujours à voir Antoine avec Birdy !! ( ce qui avance, lentement, mais surement… :twisted: )
_ Danny n'a pas l'air d'être le meilleur frère ( vu qu'il a quand même essayé de lui transpercé le pied… )
_ Antoine a décidé de la défendre ???? Et il s'est EXCUSÉ ?!?!?!

Bref n°2 : Hâte de lire la suite !! ( l'inceste sera-t-il présent :lol: ? )

À bientôt !
Amethystes

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Amethystes »

Salut !

Je ne sais pas quoi dire... Danny a voulu blesser Léo ! :o Je ne l'aurais jamais cru... Comment ça se fait que Danny se soit calmé aussi vite ? Il était quand même très en colère ! Et bouleversé aussi je pense. Enfin bref... C'est compliquer pour leur relation. Et leur discution à la fin m'a achevée.

Antoine s'est excusé ???? :shock: C'est nouveau ça...

Il ne reste que deux chapitres ??? C'est horrible !!! :cry: :cry: :cry:

A bientôt !
roxyfox

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par roxyfox »

Wow Danny a vraiment perdu les pédales... J'arrive pas à croire que de un il les a menacé avec son arc et de deux qu'il ait tiré... La seule chose positive dans toute cette histoire c'est qu'on a vécu un énorme rapprochement entre Léo et Antoine ;) :D :)
J'ai hâte de voir ce que les tourtereaux vont faire avec l'autre photo!
Comment ça deux chapitres ?!? Deux chapitres avant quoi?
Rox
Marinetiti

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Marinetiti »

Ecris la suite très bientôt stp. J'ai envie de voir comment la relation entre birdy et Antoine va évoluer (il faut qu'ils finissent ensemble). Danny est super nul comme grand-frère.
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Woh woh woh ! Je suis en train de lire le chap 12 (je lai pris au pif, j'attends mes parents à l'entrée du périph parisien alors c'est pas marrant) et bref : Lucas était déjà hyper mal avant de tomber ! Donc : GRETEL A FRAPPÉ elle lui donne un truc pour qu'il guérisse pas :O ou alors (meme si ça me fend le Coeur) elle s'arrange pour le garder à l'infirmerie où elle peut le surveiller pour éviter que qqn le tue. MAIS je pense que tout ca n'est pas normal DU TOUT!
Cazolie

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par Cazolie »

Me revoilà pour une réaction moins hystérique ahem
Et pour commenter ces chapitres fort en émotions (OUI ILS L ETAIENT)

Bon, Perri, je vais commencer par ma critique (mon unique critique sur cette histoire), avec laquelle Flammèche est d'accord d'ailleurs (ouais je suis lâche alors je l'embarque avec moi dedans) : on trouve que la réaction de Tristan paraît un peu démesurée à la naissance de Danny. En fait même si tu dis que ça a été très dur pour lui à Sappho c'est difficile d'imaginer que ça ait été suffisamment horrible pour qu'il abandonne sa femme, son fils et son nouveau né. Peut-être qu'il faudrait que tu le montres plus avant, j'sais pas. Parce que c'est huge quand même ! Ou alors c'est qu'il y avait autre chose (geeeeeeeeeeeeenre une vision ? 8D)
Après, pour la naissance de Léo, c'est quand même GRAVE un connard (oui la vulgarité était nécessaire là) Enfin d'ailleurs Léo le souligne bien en disant que c'était Danny l'enfant voulu et tout et tout
BREF, ça y est, j'ai fini d'être désagréable Perri de mon coeur :mrgreen:

Je maintiens que Delvydère était complètement amoureuse de Tristan la pauvre :lol: M'enfin
Comme pour Lucy, je vais me contenter des trucs qui m'ont marquée : LA CONFRONTATION DANNY-ANTOINE-LEO OLALALALALAL
CETTE SCENE MES AIEUX
C'était iiiiiiiiiiincroyable vraiment
Et puis Antoine qui défend Léo :mrgreen:
ET DANNY QUI SORT SON ARC (ah oui juste une question : il a toujours son arc dans le dos lui ?)
ET QUI TIRE SUR LEO
OLALA MES AMIS QUE D EMOTIONS ET IL N EST QUE HUIT HEURES DU MATIN (Em'?)
Je me sentais trop mal après. Le pire c'est quand Danny vient à la porte de sa chambre, j'ai cru que j'allais me mettre à pleurer (ah oui y a un moment qui m'a trop ému aussi c'est quand Léo se dit qu'elle aurait pu être la petite soeur adorée de Geoffrey, ce qui doit clairement être la meilleure chose au monde, et qu'après elle dit qu'elle a perdu deux frères au lieu de gagner une famille). J'ai bon espoir que Danny et elle se rabiboche mais là ça me fend le coeur. Ca m'a fait trop bizarre de voir Léo pleurer parce qu'elle pleure jamais d'habitude euuuuh
Rolala
Bon puis le retour du corbeau là... On sent la fin qui arrive (wait a sec : il va y avoir la fin de ATDM et des EdG ?! Mais je vais crever!)
Et même si ça va me tuer d'avoir la fin j'ai très très envie d'avoir la suite aaaargh

VOILA :mrgreen:
Perripuce

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Les enfants de Gaia - Chapitre 18 (1/2) . (Fantastique/Fantaisie).

Message par Perripuce »

Salut les enfants ! :D

Je suis de retour (provisoirement) pour vous jouer un mauvais tour ! :D (OK, mon coté Pokémon se met en veilleuse).

Tout d'abord, je vous laisse méditer sur : l'idée de Justice, et Les Crises des Années 30 dans le Monde (j'ai vu le sujet, j'ai cru que j'allais pleurer x) )

BREEEEF.

Cazo', tes messages d'hystériques m'avaient manqués ! <3 Et pour ce qui est de ta critique je suis d'accord, et il faut que j'accentue le jour où je prendrais le temps de réécrire tout ça ! :)

BREEEEF 2.0.

Je vous offre la première partie du chapitre 18 !! :) Désolée du retard, je voulais passé ma plus grosse épreuve niveau stresse (à savoir l'Histoire) pour vous le livrer :)

Donc voilà, bonne lecture ! :D


Chapitre 18 : Le Break, 2.0. (1/2)

-Meynier !

Je tambourinai encore à sa porte, mais Antoine eut le culot de ne pas répondre. Je fulminai. Nous étions le vendredi. Ça faisait aujourd’hui bientôt deux jours que son corbeau lui avait envoyé son mail, et nous avions convenu hier de prendre aujourd’hui la fatidique décision.
Sappho … ou Lucas ?
J’avais passé mon jeudi presque entier dans l’infirmerie, à graver les traits du petit génie dans ma mémoire au cas-où je prenais la mauvaise décision. Gretel avait su pour le mail, mais m’avait tenu compagnie, tout aussi douloureusement déchirée que moi. Danny était passé, tout comme Callie, mais aucun des deux ne s’était attardé. Callie s’éloignait chaque jour un peu plus, et Danny et moi nous évitions pour prévenir de nouveaux incidents, même si son comportement s’était agréablement calmé depuis.
Pour répondre à votre question, non. Je ne lui avais toujours pas pardonné.
Et c’était donc pour ça que je tambourinai à la porte d'Antoine en ce gai vendredi après-midi. Les cours venaient de se terminer et il avait allégrement – comme souvent, d’ailleurs – séché l’histoire-géo. Je tapai encore trois coups énergiques à la porte en rongeant mon frein de mon mieux.

-Hey, Léonie !

Je me tournais et croisai Alex, le gamin aux oiseaux, qui passait sa tête par l’embrasure de sa chambre quelques portes plus loin. Il me sourit.

-Pas la peine de t’acharner, j’ai vu Antoine sortir il y a une ou deux heures. Et je ne l’ai pas vu rentrer, alors il y a peu de chance qu’il soit dans sa chambre !
-Ô joie, grommelai-je en levant les yeux au ciel. Merci, Alex. Et désolée du dérangement.

Il haussa les épaules, et rentra dans sa chambre sans fermer la porte. Je lançai un regard mauvais à celle d’Antoine, décidai d’aller le chercher à l’infirmerie. ça ne me réjouissait pas outre mesure, parce que dehors, c’était un véritable déluge – c’était d’ailleurs la raison pour laquelle Léna avait annulé notre séance de 3A, étant donné que nous nous entrainions surtout à l’extérieur. Tout ce que j’espérais, c’était qu’il ne m’oblige pas à pousser jusqu'à l’écurie – auquel cas, je risquais d’être violente en le revoyant. Il pleuvait des cordes (et glaciales, les cordes, tranchantes comme des couteaux), et le vent soufflait à en faire trembler la vieille carcasse de Sappho. Je descendis les marches quatre à quatre, et courus jusque l’infirmerie. Evidemment, quand Gretel m’ouvrit, j’étais trempée jusqu’aux os, et j’avais failli m’envoler deux ou trois fois.

-Tu n’as pas mis le chauffage ? lui reprochai-je en claquant des dents.
-On le met en décembre, ça ne serait tardé, élagua-t-elle en me tendant une couverture pour me réchauffer. Tu as vu Antoine ?
-J’allais te poser la même question, grommelai-je en m’emmitouflant dans la couverture.

Je m’assis au chevet de Lucas. Il était toujours aussi pâle, toujours moribond, mais Gretel lui avait enfin enlevé sa minerve et l’attelle de sa jambe. Il n’avait plus que son bras dans le plâtre, et un pansement à la tempe.

-Il se remet, commenta Gretel en remontant ses couvertures sur lui. Doucement, mais sûrement. Il n’a pas des capacités de guérison aussi merveilleuse que les tiennes.

Je souris, mais laissai couler la pique. J’avais fini par comprendre que ces merveilleuses capacités de rémission qui m’avaient été fortes utiles à mon arrivée ici étaient des cadeaux de Luna. De papa. Je m’étais demandé si Danny avait les mêmes, et avait failli lui poser la question ce matin avant de me rappeler que je lui en voulais encore pour la flèche qui avait été à deux doigts de transpercer mon pied. Gretel claqua de la langue d’un air désapprobateur, et je sentis ses doigts glisser dans mes cheveux.

-Hey ! protestai-je.
-Combien de fois dois-je te répéter que tes cheveux doivent être libérés délivrés ?
-Gret’, comment tu peux penser à mes cheveux dans un tel moment ? grimaçai-je avec âpreté.

La mine déconfite de l’infirmière m’indiquait qu’elle pensait à des milliers de trucs autrement plus importants que mes cheveux, mais qu’elle tenait vainement de les chasser de son esprit. Elle tendit une main vers Lucas, et lui caressa les cheveux.

-Tu n’as vu personne prendre des photos ? lui demandai-je pour la centième fois depuis hier.

Gretel secoua encore la tête. Ses mains tremblèrent. Comme elle l’avait déjà dit hier, il y avait des moments où elle laissait Lucas sans surveillance. Quand elle allait manger, quand elle dormait, quand elle travaillait à ses cours sur le net … tant d’opportunités que le corbeau avait de se faufiler dans l’infirmerie pour prendre des photos de Lucas endormi. La porte de l’infirmerie s’ouvrit la volée, et Gretel quitta le paravent.

-Oh, salut Charlotte. Insuline ?

J’avais appris hier que Charlotte était diabétique, et que Gretel lui faisait régulièrement ses piqûres d’insuline parce qu’elle n’aimait pas les aiguilles. Je regardais Gretel préparer la seringue et Charlotte pâlit d’une teinte. La tête blonde de la petite Charlotte glissait une nouvelle interrogation en moi : comment le corbeau arrivait-t-il à avoir des photos de Lucas et de Chloé Meynier ? Je voulais bien admettre que Paris et Orléans étaient relativement proches, mais faire sans cesse le voyage entre les deux devait être contraignant… A moins d’avoir un complice sur place.
Des Corbeaux ?
Ce n’était pas la première fois que j’y pensais. Mais c’était la première fois que je songeais sérieusement à cette option. Je n’en avais pas encore parlé à Antoine, mais je pensais réellement maintenant que ça pouvait être une piste à creuser. Danny aurait pu m’aider là-dessus… S’il avait un jour été disposé à nous écouter. Gretel mit un pansement sur la petite plaie de Charlotte, et la renvoya allégrement au château. La gamine ne parut pas enchantée outre mesure, mais elle affronta le déluge avec courage.

-Elle s’est bien remise des Corbeaux, constatai-je avec un petit sourire.

Gretel eut elle aussi un sourire crispé, puis passa dans la réserve pour faire un inventaire. Je restai derrière le paravent, au chevet de Lucas. Mon regard parcourut machinalement les photos, puis tomba sur le visage souriant de Geoffrey. Mon cœur manqua un battement, et je détournai les yeux en serrant les dents. Mais fixer Lucas n’était pas plus agréable que de fixer mon demi-frère (Waho … C’était toujours aussi difficile à sortir). Ça me rappelait de manière douloureuse la décision que je devais prendre d’ici quelques heures.
Sappho ou Lucas ?
Mon portable vibra dans la poche de ma veste, interrompant ma rêverie (enfin … « cauchemardrie » serait un mot plus approprié, mais je n’étais pas sûre qu’il soit dans le dictionnaire). Je le sortis et grommelai. Danny.

-Non, toujours pas, décrétai-je en appuyant sur la touche « raccroché ».

Mais il remit ça immédiatement après. Je lui raccrochai à nouveau au nez, et éteignit mon téléphone pour prévenir la tentation de lui répondre. De toute façon, les ondes, c’était mauvais pour Lucas. Gretel revint vers nous un instant pour lui administrer un médicament par intraveineuse.

-Toujours pas réconciliée avec Danny ? constata-t-elle en remarquant ma mine bougonne.
-Nan.
-C’est dommage.

Je parvins à saisir toutes les nuances de ce « c’est dommage ». Gretel était outrageusement déçue. A peine sa famille se reconstruisait-t-elle qu’elle se cassait déjà la figure.
Mouais. Ce qu’elle ne savait pas, c’était que j’avais la même de mon côté.

-C’est quand la dernière fois que tu as vu Meynier ? m’enquis-je, désireuse de changer de sujet.
Gretel me lança un drôle de regard, et parut réfléchir à la question.
-Ce matin, il me semble. Quand il est venu voir Lucas. Je vais travailler un peu. Si tu as besoin de moi, je suis dans la pièce d’à côté.

Je hochai distraitement la tête et elle disparut dans ses appartements. J’aurais dû poursuivre mes recherches, mais j’étais encore frigorifiée, et j’avouai qu’il me manquait du courage pour aller chercher Meynier jusqu'à l’écurie. Et si par malheur il était au stand de tir, soit l’endroit le plus exposé et le plus lointain, je l’étripai en bonne et due forme. Je restai un moment à contempler Lucas, toujours la même question en tête. J’attendais le moment où mon cœur allait se déchirer pour de bon, quand j’entendis des pas précipités sur le seuil de l’infirmerie. La porte s’ouvrit à la volée et quelqu’un me rejoignit derrière le paravent, trempé jusqu’aux os, et l’air visiblement agacé. Mon cœur manqua un nouveau battement, et mes entrailles se glacèrent quand je rencontrai les yeux de Danny.

-Tu serais gentille la prochaine fois de répondre quand on t’appelle, me tacla-t-il avec une certaine sévérité.

Il secoua ses cheveux mouillés comme un chien. Je réprimai de justesse un commentaire taquin et décidai plutôt d’hausser un sourcil, l’air le plus innocent que possible. Danny parut faire d’énormes efforts pour ne pas craquer.

-Léo, entonna-t-il d’une voix résolument calme, mais pressante. S’il y a un moment où il faut enterrer la hache de guerre c’est maintenant.
-Ah oui ? répliquai-je âprement. Non mais c’est …

Danny me coupa en mettant un doigt sur ses lèvres, les yeux écarquillés. Je fronçai les sourcils, et il désigna la pièce du regard. Intriguée malgré moi, je me levai de ma chaise et sortit du paravent, tout en prenant soin d’éviter Danny. Callie était assise au bout d’un des lits de l’infirmerie, très droite et très digne malgré son état lamentable. Ses cheveux étaient détrempés et prenaient des nuances verdâtres familière (tellement familière que je commençais à me demander si ce n’était pas sa couleur naturelle), et son beau chemisier était presque bon à jeter.

-Cal a décidé de faire comme toi, et d’ignorer certaines règles, fulmina Danny en me suivant dans la pièce principale.

J’hésitai entre incendier Danny du regard, ou lancer un regard éperdu à Callie. Celle-ci ne broncha pas devant l’annonce de son ex, mais ses yeux étincelèrent.

-Je ferais remarquer à monsieur Hautroi que depuis quelques jours, nos investigations sont à plat, et que vous ne paraissez pas vous bouger des masses pour les faire repartir, répliqua-t-elle avec aigreur. Je t’ai déjà dit que j’ai fait ce qu’il fallait.
-Et je t’ai dit que c’était surtout ce qu’il ne fallait pas faire !
-Oh ! intervins-je en levant la main comme à l’école. Vous m’expliquez ?
-Elle a été fouiller la chambre d’Antoine, persiffla Danny en s’appuyant contre un mur.

Je lui lançai un regard surpris, mais aussi perplexe. Il avait failli nous tuer tous les deux pour avoir des informations pas plus tard qu’avant-hier. A côté de ça, fouiller la chambre d’Antoine était une méthode on ne peut plus soft. D’autant plus que Callie avait déjà prouvé que fouiller les chambres était sa spécialité (elle avait fait la même chose avec la mienne). Et puis, je ne pensais pas qu’Antoine soit assez idiot pour y laisser des trucs compromettant. Mais ça, c’était avant que Callie ne sorte son portable pour me le tendre d’un air à la fois triomphal et de défi.

-Il mettait trop de temps à craquer, alors j’ai pris les devants.
-Et quand ça ?
-Hier soir.

Je pris le portable qu’elle me tendait avec appréhension. Qu’Antoine ait laissé des indices dans un endroit aussi trivial que sa chambre me semblait bien étrange… Je jetai un coup d’œil à l’écran, et je sentis mon sang se figer dans mes veines.

-J’ai simplement profité qu’il aille à la douche, et il avait laissé son ordinateur ouvert, fanfaronna Callie, sans doute réjouie par mon air hébété.

La suite, je la devinai. Elle avait eu accès à ses mails. Et ce que j’avais devant mes yeux était la carte que le corbeau avait envoyée à Antoine. Cette fameuse carte dont nous devions débattre.
Lucas ou Sappho.

-C’était ouvert là dessus, précisa-t-elle. Et j’ai entendu l’eau se couper, alors je n’ai pas cherché à aller plus loin. Mais c’était amplement suffisant. Léo, tu te rends compte de ce que ça signifie ? On se trompait depuis le début ! Quelqu’un de l’administration, tu parles ! C’était simplement Antoine !

Stop. Tout allait beaucoup trop vite. Le regard de Callie flamboyait de satisfaction et de défi, mais aussi de rancœur. Mes entrailles s’étaient douloureusement contractées, et je ne pus m’empêcher de me tourner vers Danny. Je m’attendais à ce qu’il m’en veuille – il savait que je lui cachais les secrets d’Antoine, et il venait de découvrir lequel – mais il se contentait de me scruter, attendant simplement mon explication. Il ne croyait pas à la culpabilité simple d’Antoine. Il y avait quelque chose en dessous, et il attendait que je le dise. Pour une fois, je remerciai intérieurement son instinct. Il avait raison.
L’heure était à l’enterrement de la hache de guerre.

-Non, Cal. Ce n’est pas « simplement », Antoine.
-Oh que si ! protesta-t-elle en se levant d’un bond. Et Léna était d’accord avec moi.
-Léna ? me récriai-je avec horreur.

Danny leva une main désespérée vers Callie, l’air de me dire « tu comprends pourquoi c’était si urgent ? ». Et je comprenais aussi pourquoi il disait qu’elle avait ignoré les règles. Mon cœur tomba en chute libre dans ma poitrine, et mes angoisses concernant Léna revinrent me hanter. J’avais toujours eu peur qu’en sachant qu’Antoine était impliqué, elle péterait plus les plombs que Danny.

-Cal, tu lui as dit quoi, au juste ?
-Tout, répondis Danny à sa place. Tout ce qu’on savait – ou pas, d’ailleurs.

Je me frappai mon front avec ma main avec accablement. C’était bien ce que je craignais. Callie n’avait pas supporté la stagnation de notre affaire, alors elle avait été tout balancer à Léna, l’unique personne capable d’encore agir, selon elle.
Léna savait donc qu’Antoine était responsable des fuites.
Réflexion faite, c’était pire que ce que je craignais.

-Comment elle a réagi ? m’enquis-je avec angoisse.
-Mal, qu'est-ce que tu crois ? cingla Callie, les yeux plissés.

Elle n’avait pas l’air ravi de ma réaction. Elle pensait peut-être trouver en moi un soutien contre Danny. Je me pris le visage entre les mains, tentant vainement de faire le vide dans ma tête.

-Bon. Tu lui as dit quand ?
-Ce matin. Oh, Léo, ne réagit pas comme ça, bon sang ! Que voulais-tu que je fasse d’autre ?
-Que tu m’en parles ! rétorquai-je avec un brin très de sècheresse. Tu ne sais pas tout, Cal, ce n’est absolument pas ce que tu crois !
-C’est ce que Danny disait, fit Callie. Mais il a été incapable de m’expliquer.

Je gratifiai à nouveau Danny d’un regard étonné. Après tout ce qu’il s’était passé, j’avais perdu l’habitude qu’il soit de mon côté. Surtout en ce qui concernait Antoine Meynier. Lui s’était désintéressé de ma dispute avec Callie, et ses yeux parcourait nerveusement l’infirmerie, comme s’il cherchait quelque chose.

-Antoine n’est pas là ? murmura-t-il.

Je secouai la tête machinalement. Danny fronça les sourcils, et regarda son portable.

-Ça fait une heure que je le cherche, jugeai-je utile de préciser. Justement à cause de ça, ajouta-je en désignant la carte sur le portable de Callie.

Celle-ci fronça les sourcils avant d’ouvrir la bouche, muette de stupeur. Mais évidemment, une Callie qui se tait, ce n’était pas fait pour durer :

-Tu étais au courant ?! s’indigna-t-elle en prenant son portable d’un geste vif.
-Cal, soupira Danny en allant voir Lucas. Ça fait un moment qu’Antoine a craqué.
-Il quoi ?

Le cri de Callie se répercuta dans l’infirmerie, et je m’étonnai que Gretel ne sorte pas de son appart pour voir ce qu’il se passait. Je tentai de la calmer silencieusement en lui prenant la main, mais elle se dégagea sèchement.

-Et tu comptais nous en informer quand ? cracha Callie, mauvaise.
-Léo, la coupa Danny en revenant vers nous. Tu sais où est Meynier ?

J’étais stupéfaite de ce changement soudain de conversation. Puis, je reconnus la tension dans les traits de Danny. Mon cœur se serra.

-Non, sinon je le chercherais pas.
-Et tu sais où il peut être ? insista-t-il en prenant mon bras.
-Mais qu'est-ce qu’on en a à faire ? s’agaça Callie.

Pour ma part, je regardais la main de Danny qui serrait mon bras, et il me lâcha. Je reculai d’un pas, et sans tenir compte de ma colocataire, je répondis avec prudence que je comptais aller voir à l’écurie. Danny poussa un profond soupir, et mit résolument sa capuche (déjà gorgée d’eau) sur sa tête en décrétant qu’on y allait. Callie et moi échangeâmes un regard indécis. Le sien était aussi mêlé de frustration, et le mien d’inquiétude.

-Qu'est-ce qui ne va pas, Danny ? m’enquis-je nerveusement en mettant à mon tour ma capuche.
-Je ne sais pas encore, avoua-t-il en ouvrant la porte. Mais il y a bien quelque chose qui ne va pas.

Il me lança un regard lourd de sous-entendus, me demandant silencieusement de lui faire confiance. Je me mordis la lèvre inférieure, puis soupirai en prenant la tête du groupe. Nous traversâmes le parc sous les trombes d’eau et de vent, et nous dûmes nous y mettre à trois pour pousser la porte de l’écurie contre les rafales. Bucéphale et Rivière mangeait paisiblement à l’intérieur, et Grispoil leur faisait même l’honneur de sa présence. Je sautais dans son boxe sans une once d’hésitation, et j’entendis Callie s’étrangler derrière moi.

-Non mais Léo, tu es folle ?

Je réprimai de mon mieux le sourire de satisfaction qui me venait aux lèvres. Notamment parce que c’était une réaction beaucoup trop Menyerienne à mon goût. Alors je me contentai de flatter l’encolure de Grispoil, et il inclina sa tête vers moi. Callie en fut bouche bée.

-Mais … Tu le touches ?!

Je ne répondis pas, et poussai jusqu’au fond du boxe. Je trouvai rapidement ce que je cherchai. A son emplacement habituel était étalé le sac de couchage et la couverture d’Antoine. Mais aucune trace de lui.

-RAS, annonça Danny de son côté.
-Il a dormi ici ! leur appris-je en m’avançant vers la porte.

Grispoil me suivit, et frotta sa tête sur mon épaule. Callie étouffa un couinement de souris.

-Léo, sors de là s'il te plaît, tu me stresses, gémit-t-elle, ses mains couvrant sa bouche.

Je levai les yeux au ciel, er remarquai que Danny se tenait bien loin de l’enclot de Grispoil. J’avais d’abord cru que c’était pour fouiller l’écurie, mais une autre idée m’effleura l’esprit. Grispoil s’était incliné devant Geoffrey. Pas parce qu’il était une drôlerie d’humain, comme tout le monde le pensait, mais parce qu’il descendait comme moi de la Lune. Comme Danny. Connaissant Grispoil depuis sa plus tendre enfance, Danny devait savoir qu’il jouissait d’une grande côte auprès du Roi de Sappho. Simplement, il voulait que ça reste secret.
Tant pis pour moi. Je venais de me griller.
Je ne pus retenir un sourire à l’adresse de Danny. Il parut surpris par la gentillesse, mais eut l’amabilité de me la rendre, bien que son sourire fut forcé. Grispoil frotta à nouveau sa tête contre mon épaule, et poussa un petit hennissement qui arracha un cri à Callie. Elle courut se réfugier derrière Danny.

-Arrête de faire peur aux autres, le réprimandai-je en passant ma main sur son encolure. Qu'est-ce qu’il se passe ?

Grispoil souffla par les naseaux et me poussa jusqu’aux affaires d’Antoine. Il les poussa du bout des naseaux et tapa du sabot devant. Je clignai des yeux, pour le moins perplexe.

-Qu'est-ce que tu veux me dire ? soufflai-je en le suivant.

Il avait les ailes replié sur le flanc, et je ne me risquai pas à les toucher, descendante de la Lune ou non. Je le contournai, et fouillai les affaires d’Antoine sans rien y trouver. La présence des affaires en elle-même était étrange, parce que j’avais vu Antoine les remballait à chaque fois qu’il quittait l’écurie. Un terrible soupçon vint m’étreindre la poitrine, et je levai des yeux presque implorants sur le pégase.

-Tu as vu ton copain, récemment ? lui demandai-je prudemment.

Grispoil renâcla avec un certain agacement.

-Léo, intervint durement Callie. C’est un cheval.

Le pégase piaffa d’indignation, et il se tourna vers Callie en déployant brusquement ses ailes, de manière à l’effrayer. Ça fonctionna, parce qu’elle se réfugia à nouveau derrière Danny en réprimant à grand-peine un cri. Je devais admettre que j’en réprimai un aussi. Mais pas qu’à cause du spectacle époustoufflant des ailes magnifiques de Grispoil. Si ses ailes étaient restés repliées sur son flanc, c’était pour une bonne raison. Son flanc était déchiré par une entaille assez profonde, d’une longueur égale à mon avant-bras, d’où coulait beaucoup de sang. Son odeur me donna la nausée.

-Oh, ciel, Grispoil…
-Je pense que finalement, tu as raison, Cal, réfléchit Danny, toujours à l’écart. Tu peux appeler Salomé ?

Callie fixait toujours la plaie béante du pégase, mais sortit de sa torpeur pour s’exécuter. Alors qu’elle parlait à Salomé à une vitesse folle, Grispoil replia dignement ses ailes sur son flanc, et je vis un éclair de souffrance traverser ses incroyables yeux d’argent.

-Qui t’a fait ça ? m’enquis-je en lui caressant les naseau.

Il souffla encore et me poussa vers sa porte qui menait à l’extérieur. Il y tapa son sabot, et j’ouvris le verrou. Je la poussai, mais elle ne s’ouvrit pas. Grispoil n’honorait pas Bucéphale et Rivière de sa présence. Il était enfermé, et blessé. Quelques minutes plus tard, Salomé arriva, trempée et affolée. Elle tenta de s’approcher de Grispoil, mais il piaffa en s’éloignant.

-Et pourquoi tu acceptes que le zoziaux vienne ? s’agaça la commère en mettant ses mains sur ses hanches.
-Elle a raison, grommelai-je contre mon gré à Grispoil. Laisse-la te soigner.

Le pégase hésita un instant, puis s’affaissa sur ses pattes avant pour pouvoir s’allonger. Salomé grimpa souplement sur la porte et entreprit prudemment de le soigner. Je vis Danny s’approcher du coin de l’œil, et s’accouder à la porte du boxe.

-Lo, Grispoil essayait de dire quelque chose à Léo…
-Tu m’en diras tant…, bougonna-t-elle en nettoyant la plaie du pégase. Quelqu’un peut-t-il aller chercher Gretel ? Chevaux oui, Infirmière, nan.
-Salomé ! la reprit Danny en montant sur la barrière. C’est important, s'il te plaît ! Tu comprends ce que dises les chevaux, et nous, on a besoin de savoir ce que Grispoil a à nous dire !

Je suppliai moi aussi la palefrenière du regard, les mains caressant l’encolure de pégase. Il avait d’ailleurs recommencer à renâcler, et il leva péniblement la tête pour regarder Salomé. Celle-ci soupira devant notre obstination.

-Je comprends moins Grispoil que les chevaux normaux, précisa-t-elle. Et je ne parles pas le cheval, j’interprète leur regard, leur comportement, alors posez des questions qui peuvent se répondre par « oui » ou « non ».
-Merci, Lo, soupira Danny, qui était à présent assis sur la porte. Léo ?

J’hochai la tête et demandai à Grispoil s’il avait vu Antoine ce matin. « Oui », dit Salomé, qui était entrée dans une sorte de transe. Mon cœur tomba dans ma poitrine quand je demandai :

-Tu as vu quelqu’un d’autre que lui, cet après-midi ?
-Oui, traduisit Salomé.
-Est ce que c’était Léna ? intervint Danny, le souffle court.

Je le fixai avec hébétude et crainte. J’avais bien l’impression que son instinct confirmait mes conclusions catastrophiques. Ainsi que la réponse de Salomé :

-Oui.
-C’est Léna qui t’a blessé ? enchéris-je, le cœur battant à tout rompre.

La transe de Salomé fut troublée par ce qu’elle découvrait. Ses yeux s’écarquillèrent, mais elle tenta de se reconcentrer pour dire d’une petite voix :

-Oui.

Je mis une main désespérée sur mon front. Les pièces éparses du puzzle se mirent lentement en place dans la tête. Antoine avait laissé ses affaires de couchage alors qu’il ne le faisait jamais. Léna avait blessé Grispoil. Il avait été enfermé. Antoine était introuvable. Tout cela semblait converger de manière indéniable vers un même scénario, un scénario que je n’avais jamais envisagé encore. Je cherchai les yeux de Danny, et vit dans les siens des doutes identiques aux miens. Il hocha la tête et sauta au bas de la porte.

-C’est assez, décréta-t-il.
-Vous ne pensez quand même pas …, entonna Callie d’une petite voix craintive.
-Que Léna a enlevé Antoine ? achevai-je avec un ricanement de dépit. Et comment qu’on y croit.

***


VOILA ! La deuxième partie je ne sais pas trop quand :D Désolée pour le suspens, mais vous commencez à avoir l'habitude ;)
(Comment ça vous me détestez? Ne me dites pas ça, vous allez me déprimer pour le reste de mes concours :lol: )
chatchat14

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Re: Les enfants de Gaia. (Fantastique/Fantaisie).

Message par chatchat14 »

Heeeyy !!

Mais ce n'est pas possible !! Pourquoi nous laisser avec ce suspens ?!
Je pense que Léna est dans le coup, qu'elle est le Corbeau, ou l'un de ses acolytes et que, quand elle a su qu'Antoine avait laissé fuiter que c'était lui qui avait fait les marques, elle s'est dit que, de toute façon, il ne lui servait plus à rien, et que tout ce qu'il pouvait faire, c'était en dire plus sur l'affaire, et la mettre en danger. Si elle est la sale survivante du massacre d'il y a 7 ans, c'est parce qu'elle était l'une des alliées du Corbeau, ou le Corbeau lui-même, et si elle a été blessée, la dernière fois, peut-être qu'elle savait que Léo allait venir, ou en tout cas quelqu'un, et du coup elle a fait ça pour être loin de tout soupçon !!
Moi, je pense que Léo commence à bien aimé Antoine ! :D J'adore me faire des idées en me disant ' tiens, ce serait drôle celui-là avec celle-ci ! " :lol:
Mais je pensé pas que Léna allait enlever Antoine, quand même !

Bref, à bientôt ( j'espère vraiment vraiment vraiment beaucoup que se sera bientôt ! )
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