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"Je rencontre dans ma vie des millions de corps ; de ces millions je puis en désirer des centaines ; mais, de ces centaines, je n'en aime qu'un. L'autre dont je suis amoureux me désigne la spécialité de mon désir. "
Afficher en entierJe suis souvent saisi de cette évidence : l'autre est impénétrable, introuvable, intraitable ; je ne puis l'ouvrir, remonter à son origine, défaire l'énigme. D'où vient-il ? Qui est-il ? Je m'épuise, je ne le saurai jamais.
Afficher en entierLe vrai lieu de l'originalité n'est ni l'autre ni moi, mais notre relation elle-même. C'est l'originalité de la relation qu'il faut conquérir. La plupart des blessures me viennent du stéréotype : je suis contraint de me faire amoureux comme tout le monde : d'être jaloux, délaissé, frustré, comme tout le monde. Mais, lorsque la relation est originale, le stéréotype est ébranlé ; dépassé, évacué, et la jalousie, par exemple, n'a plus de place dans ce rapport sans lieu, sans topos, sans "topo" - sans discours.
Afficher en entierY a-t-il, entre tous les êtres que j'ai aimés, un trait commun, un seul, si ténu soit-il (un nez, une peau, un air), qui me permette de dire : voilà mon type ! "C'est tout à fait mon type", "Ce n'est pas du tout mon type" : mot de drageur : l'amoureux n'est-il qu'un drageur plus difficile, qui cherche toute sa vie "son type" ? En quel coin du corps adverse dois-je lire ma vérité ?
Afficher en entierIl n'y a d'absence que de l'autre : c'est l'autre qui part, c'est moi qui reste. L'autre est en état perpétuel de départ, de voyage ; il est, par vocation, migrateur, fuyant ; je suis, moi qui aime, par vocation inverse, en attente, tassé sur place, en souffrance, comme un paquet dans un coin perdu en gare. L'absence amoureuse va seulement dans un sens, et ne peut se dire qu'à partir de qui reste - et non de qui part : je, toujours présent, ne se constitue qu'en face de toi, sans cesse absent. Dire l'absence, c'est d'emblée poser que la place du sujet et la place de l'autre ne peuvent permuter ; c'est dire : "Je suis moins aimé que je n'aime."
Afficher en entier“Je sais que tu sais que je sais : telle est la formule générale de la gêne.”
Afficher en entierCe que cache mon langage, mon corps le dit. Mon corps est un enfant entêté, mon langage est un adulte très civilisé…
Afficher en entier" Aimer l'amour. Annulation. Bouffée de langage au cours de laquelle le sujet en vient à annuler l'objet aimé sous le volume de l'amour lui-même : par une perversion proprement amoureuse, c'est l'amour que le sujet aime, non l'objet. "
Afficher en entier" Il a fallu beaucoup de hasards, beaucoup de coïncidences surprenantes ( et peut-être beaucoup de recherches ), pour que je trouve l'Image qui, entre mille, convient à mon désir. "
Afficher en entierBientôt (ou en même temps) la question n'est plus : "pourquoi ne m'aimes tu pas ?", mais : "pourquoi m'aimes-tu seulement un peu ?" Comment fais-tu pour m'aimer un peu ? Qu'est-ce que cela veut dire, qu'aimer "un peu" ? Je vis sous le régime du trop ou du pas assez ; avide de coïncidence, tout ce qui n'est pas total m'apparaît parcimonieux ; ce que je cherche, c'est à occuper un lieu d'où les quantités ne se perçoivent plus, et d'où le bilan soit banni. Ou encore - car je suis nominaliste : pourquoi ne me dis-tu pas que tu m'aimes ?
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