Extraits

« Si le Premier le veut, et à la demande de la famille, l’Unique peut vivre avec ses parents jusqu’à son dix-septième anniversaire. Mais l’Unique devra être tenu à la disposition du Premier dès la première heure de ses dix-sept ans. Aucune dérogation n’est possible. Investis de l’autorité du Premier, les Gardiens ont tout pouvoir pour s’assurer de la pleine et entière coopération de l’Unique, de sa famille et du personnel de l’abri. »

Kris ne peut détacher son regard de ce paragraphe extrait du Code du Premier, recopié à la craie blanche sur le mur face à lui. Le jeune homme l’éclaire de sa lampe torche, bulle de lumière au milieu du tunnel obscur. Sa main droite joue machinalement avec ses deux dés fétiches qu’il garde toujours sur lui. Ces petits cubes taillés dans un bois très léger sont ses biens les plus précieux, donnés par ses pères l’année dernière, deux semaines avant que l’incendie du dortoir VII-A n’emporte ses parents et ne fasse de lui un orphelin. Comme si être né Unique ne suffisait pas !

La première heure de ses dix-sept ans… Et s’il existait une autre solution ?

Il se raidit, car, derrière lui, il entend des bruits qui se rapprochent. N’étant pas sûr de reconnaître les bottes de l’arrivant, il éteint la lumière et se glisse dans un recoin. Les pas s’éloignent et le calme revient. Un silence toutefois relatif, car avec huit étages sous terre, le ronron des assainisseurs d’air et le son des gouttes d’eau de condensation qui tombent sont constants. Un véritable silence serait très mauvais signe...