Extraits

-On est en plein milieu des cours. Soit tu es perdues, soit tu sèches, ce qui n'est clairement pas le cas.

-Et pourquoi donc ? répliqua-t-elle du tac au tac, mais sans véritable raison.

-C'est le cas ?

-Non, admit-elle.

Il eut un petit sourire en coin.

-Tu es la nouvelle, n'est-ce pas ?

Laissée, elle confirma d'un hochement de tête.

-Moi c'est Keefe.

-Sophie, mais je parie que tu le sais déjà.

Il s'esclaffa.

-Tu es probablement le plus gros scoop de l'académie depuis l'incident du Grand Goulon il y a trois ans. Avec lequel je n'ai rien à voir, au passage. (Il prit un air malicieux.) Mais ce n'ait pas un mal. Personnellement, j'ai toujours adoré être au centre de l'attention.

Elle n'en doutait pas. Depuis sa tignasse en bataille jusqu'à sa façon de rouler ses manches en laissant traîner les pans de sa chemise, elle le voyait bien - il était cool. Populaire aussi, sans doute. Alors pourquoi lui adressait-il la parole ? Elle manqua de le lui demander, mais se ravisa à la dernière seconde.

-Où es-tu censé être ? demanda-t-elle à la place.

-L'univers. Je sèche dès que je peux. Lady Belva a un gros faible pour moi. Enfin, difficile de lui en vouloir ... (Keefe désigna son corps.) Mais quand même, c'est gênant, tu comprends ?

Elle avait beau être sûre à quatre-vingts-dix pour cent qu'il plaisantait, force était de constater qu'il était beau garçon. La moitié des filles de l'école, au moins, devait en pincer pour lui.

-Et voila que je rencontre la mystérieuse petite nouvelle, ajouta-t-il. Autant dire que j'ai bien fait de tirer au flanc.

Elle se sentit au rougir et pria pour qu'il ne le remarques pas.

-Je n'ai rien de très mystérieux.

-Je ne suis pas d'accord. Tu ne m'as toujours pas expliqué pourquoi tu n'était pas en classe. Ne vas pas croire que j'ai oublié.

Elle fixa ses pieds.

-C'est parce que c'est trop gênant.

-J'adore les histoires gênantes !

Il s'esclaffa devant son mutisme.

-Tu veux bien au moins me dire quel cours tu sautes ?

-Alchimie, avec Lady Galvin, soupira-t-elle.

-Ah, quelle horreur ! Je l'ai eu en Niveau 3. Elle me détestait, sans doute parce que j'ai transformé la table en argent. Mais elle disait vouloir être impressionnée. (Clin d'oeil) Enfin, à ta place, j'éviterais de lui dire qu'on est amis.

Amis ? Depuis quand les beaux gosses voulait-ils d'elle comme amie ? Même si elle n'allait pas sans plaindre ...

-Alors, quoi, elle t'a mise à la porte ? demanda-t-il.

-Si ont veut.

-Mais encore ?

-Tu vas te moquer de moi.

-Sans doute, confirma-t-il.

De toute évidence il ne lâcherait pas le morceau, aussi garda-t-elle les yeux rivés au sol.

-J'ai accidentellement fait sauter le sérum que j'était en train de préparer.

Il éclata de rire, comme elle s'y attendait.

-Tu as causé des dégâts ?

-Seule sa cape a été touchée ...

-Ouh là là ! Tu te rends compte combien c'est mythique, ce que tu viens de faire ? Sa cape, c'est sa fierté, sa joie ! Elle t'a envoyée au bureau de Dame Alina ?

- C'est à Disneyland.

Il leva brusquement la tête.

- Je possède mes propres terres ?

- Quoi ?

- Je m'appelle Dizznee.

Dex lança la balle à Sophie.

- Attrape !

L'objet faillit s'écraser au sol, mais elle parvint à le rattraper mentalement à la dernière seconde.

- Désolé, j'avais oublié tu étais pire que moi, dit Dex avec suffisance. Je vais au moins gagner un match.

Elle leva les yeux au ciel. Il ferait mieux de ne pas la sous-estimer.

Elle prit une profonde inspiration et se focalisa sur le pouvoir qu'elle savait posséder en son for intérieur. Elle le sentait presque tournoyait, comme un bourdonnement tiède dans son estomac.

- Éclaboussez !

Sophie expulsa la chaleur de ses doigts pour l'envoyer vers l'éclabousseur.

Splatch !

Médusé, Dex dévisagea Sophie, le menton dégoulinant de substance rose bonbon. Elle l'avait atteint pile sur son rictus suffisant.

- Désolé, dit-elle, incapable de cacher son amusement.

- Ça ne fait rien, répondit-il avec un soupir. Je l'ai mérité, je suppose.

- Elle est vivante ! plaisanta Fitz lorsque Sophie se hasarda dans le salon le lendemain.

Assis dans un fauteuil rembourré, il lisait un ouvrage intitulé << Comment attraper le vent en vingt-cinq leçons.>>

- Tu sais que tu as manqué le petit-déjeuner et le déjeuner ?

- Vraiment ?

Sophie balaya la pièce du regard à la recherche d'une horloge, mais tout étais recouvert de tissus bariolés - comme si une pluie de costumes s'était à battue sur le mobilier.

- Désolé. Je devais être fatiguée.

Jensi surgit à ses côtés.

- Mes amis et moi on a une table, il n'y a que des garçons et la plupart sont un peu nazes mais tu peux venir avec nous.

Elle l'aurait serré dans ses bras si elles n'avait pas eu les mains prises.

-Merci Jensi.

S'ils avaient été humains, les amis de Jensi auraient été maigrichons, boutonneux et équipés d'appareils dentaires. Étant des elfes, ils étaient plutôt pas mal - ou du moins l'auraient-ils été s'ils n'avaient attachés leurs cheveux dans des queues-de-cheval graisseuses. Ils la dévoraient du regard comme s'ils n'avaient encore jamais vu une fille de près. L'un d'entre eux se mit même à baver.

-Désolé, marmonna Jensi en posant d'un geste brusque son plateau. Allez, les gars. Je vous avais dit de la jouer cool !

-Désolé, vieux, lancèrent-ils à l'unisson sans quitter Sophie des yeux.

Jensi soupira, comme résigné.

-Alors, l'élem ?

-Pardon ?

-L'élémentalisme, expliqua une des queues-de-cheval graisseuses. C'est comme ça qu'on dit, tu ne savais pas ?

-Bien sûr que non, puisque jusqu'à maintenant elle vivait avec des humains, rétroqua Jensi sans laisser à Sophie de temps de répondre.

Il sourit de toutes ses dents, comme s'il lui avait ôté une épine du pied. Mais elle résista à grand-peine à l'envie de se cacher sous la table. Surtout lorsque les garçons s'enfoncèrent dans leurs sièges avec un "Ben mon vieux".

Elle retint difficilement un soupir.

-Le cours d'élémentalisme ne s'est pas trop mal passé. Je ne me suis pas fait zapper.

-Sans blague ! tenta les baveux. Autrement tu aurais les vêtements tout cramés.

Jensi leva les yeux au ciel.

-Passons...Qu'est-ce que tu as après ?

-L'Univers.

Le nom seul paraissait redoutable.

-Tu veux dire l'Uni ? demanda le baveux avec un clin d’œil appuyé.

Les autres garçons gloussèrent et Jensi les foudroya du regard.

-Cette expression n'existe pas. Arrêtez de vous payer sa tête.

-Désolé, vieux...marmonnèrent-ils.

-Et lâchez-moi avec vos "vieux" ! Je commence à en avoir ma claque !

-Désolé, vieux.

Jensi semblait prêt à exploser. Sophie toussa pour cacher son rire.

- Oh, ne vas pas t'améliorer en alchimie, Foster! lança Keefe d'un ton réprobateur. Qui d'autre serait capable de détruire les capes de Lady Galvin, autrement?

- Ne t'en fais pas, je doute que Sophie puisse jamais devenir bonne en alchimie, lui dit Marella. Tu veux la liste de tout ce qu'elle a fait exploser?

- Elle a encore fait sauter des trucs? (Il adressa à Sophie un sourire malicieux.) Je veux tout savoir.

Lorsqu'une version hautement romancée de la Destruction de la Grande Cape se propagea à travers l'école plus vite que les feux blancs dans son ancienne ville, Sophie sut que Keefe en était le principal responsable.

J’ai comme l’impression que tu es capable d’atteindre tous les objectifs que tu te fixes. Alors arrête de douter, et prouve-moi que j’ai raison. Tu sais, pour que je puisse m’en vanter.

-Qu'est-ce que vous fabriquez ? demanda soudain Biana derrière eux.

-Rien, répondit Fitz en poussant Sophie à faire quelques pas dans la bonne direction.

-Où était-tu passé ? J'ai demandé à papa, mais il a refusé de me répondre.

-Parce que ce ne sont pas tes affaires, rétorqua Fitz.

-Tu me le diras après ?

-Laisse tomber, O.K. ? Je suis occupé, là.

-J'avais remarqué, marmonna Biana en fixant leurs mains.

-Tu as l'air perdue.

La voix profonde du garçon la tira de sa rêverie. Il arborait l'uniforme vert des Niveau 4 et était affalé sur un banc, d'où il l'observait de ses yeux bleu glacier pleins de curiosité.

-Comment as-tu deviné?

Il sourit d'un air suffisant.

-On est en plein milieu des cours. Soit tu es perdue, soit tu sèches, ce qui n'est clairement pas le cas.

-Et pourquoi donc?

-C'est le cas?

-Non, admit-elle.

-Tu es la nouvelle, n'est-ce pas?

Lassée, elle confirma d'un hochement de tête.

-Moi, c'est Keefe.

-Sophie, mais je suppose que tu le sais déjà.

Il s'esclaffa.

-Tu es probablement le plus gros scoop de l'académie depuis l'incident du grand Gulon il y a trois ans. Avec lequel je n'ai rien à voir, au passage. (Il prit un air malicieux.) Mais ce n'est pas un mal. Personnellement, j'ai toujours adoré être au centre de l'attention.