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La mort de Jean de Craon, grand-père et tuteur de Gilles, survenue à Champtocé le 15 novembre 1432, le met à la tête d’une immense fortune et lui laisse le champ libre. Les relations entre le vieillard et l’enfant étaient complexes, car si le vieux forban avait longtemps voulu voir un disciple trop timide dans son héritier, il découvrit peu à peu quelle pâle figure il faisait lui-même en regard des abîmes que hantait habituellement l’âme du jeune homme. Il ne renonça pas cependant à vouloir le sermonner une dernière fois avec l’autorité que confère un lit d’agonie
Afficher en entier— Personne pour m’aider à arracher Jeanne aux Anglais. J’ai plaidé sa cause auprès de la reine mère, auprès du roi : oreilles bouchées, regards distraits, bouches menteuses. Personne ! — Personne ? Et moi, alors ? — Toi ? — Moi, mon maréchal ! Allons-y ensemble. Jeanne ne sera pas surprise de voir arriver son compagnon Gilles et son vieux La Hire. Enfin, vous voilà ! elle va dire. Je vous attendais. Vous vous êtes amusés en route, peut-être ?
Afficher en entier— Sire, Jeanne est jugée par Pierre Cauchon, évêque de Beauvais. L’évêque de Beauvais-dépend de l’archevêque de Reims, monseigneur Regnault, votre conseiller. Il faut que monseigneur Regnault en vertu de son privilège exige de son subordonné Cauchon communication des pièces du procès. Geste évasif de Charles qui regarde par la fenêtre en caressant une levrette blanche
Afficher en entier— Madame, quand Charles a été sacré à Reims, Jeanne se tenait debout à sa droite. J’étais à sa gauche. Maintenant Jeanne est prisonnière des Anglais qui veulent la faire mourir. Je suis venu demander au roi ce qu’il entend faire pour la sauver
Afficher en entier— Seigneur de Rais ! Quelle surprise ! Voilà plus d’un an que vous avez disparu. On parlait de vous ici même hier soir. On vous imaginait terré dans l’une de vos forêts, comme un sanglier. Qu’avez-vous donc fait tout ce temps ? Qu’est-ce qui vous fait sortir de votre trou ? — Madame, répond Gilles, ce qui me fait sortir de mon trou, ce sont les mauvaises nouvelles qui me parviennent concernant Jeanne
Afficher en entierMais un jour ces déambulations s’arrêtent. Une image transportée de bouche à oreille de Compiègne en Vendée est venue s’imposer au cerveau fiévreux de Gilles : Jeanne arrachée de son cheval par un archer cramponné à son mantelet de soie. Jeanne par terre sur laquelle se rue la piétaille bourguignonne
Afficher en entierMais ce sont des rêves. L’officier doit avouer à Jeanne que dans deux heures le pont de bateaux n’existera plus. On démonte l’ouvrage sur ordre du roi. Jeanne se tait accablée. Mais depuis six mois, elle connaît son souverain, ses reculades, ses petites trahisons qui en s’accumulant ressemblent de plus en plus à une trahison pure et simple. — Mon Dieu, soupire-t-elle, pourquoi Charles est-il si farouchement obstiné à regagner ses petites chambrettes
Afficher en entier— Tu es encore dans la fièvre du combat, dit-il. Tu ne sens pas ta blessure. Dans une heure tu auras recouvré ton sang-froid. Alors tu commenceras à souffrir. Tu vas souffrir toute la nuit. — Je souffrirai si Dieu le veut. Il n’est de joie ni de souffrance que de Dieu. Que fais-tu ici ? Gilles la regarde en souriant vaguement. — Je te regarde. Je me chauffe le cœur de ta présence
Afficher en entier— Demain, toujours demain ! Voilà des mois qu’on attend demain. Mais moi je sais que je dois faire vite. Mes jours sont comptés. Je durerai un an, guère plus. Étendue sur un lit de sangle dans sa tente, elle n’a pas un regard pour sa jambe blessée, pour la vilaine plaie dont le sang coule sur son genou. Elle plaint encore cette journée perdue
Afficher en entierGilles, qui ne connaît de par son immense fortune que la violence et les manœuvres pour atteindre des buts souvent dérisoires, est stupéfait du spectacle de tant de faiblesse et de simplicité faisant plier devant elles toutes les résistances, tous les scepticismes dans un dessein grandiose
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