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Pendant la thérapie de groupe, Casper n’aime pas qu’on utilise les mots scarifier ou scarification, ni brûlure ou encore coup de couteau. Elle dit que peu importe ce que vous faites ou comment vous le faites : c’est du pareil au même. Vous pouvez boire, prendre des amphètes, sniffer de la coke, vous infliger des brûlures, incisions, coupures, coups de couteau, vous arracher les cils, ou baiser jusqu’au sang, c’est la même chose : automutilation.
Afficher en entierEt bizarrement, une fois que nous commençons à scarifier, brûler ou baiser parce que nous nous sentons merdiques, moins que rien, notre corps commence à produire cette merde qui donne une sensation de bien-être et qu’on appelle les endorphines ; on est alors tellement défoncé que le monde ressemble à la barbe à papa de la plus belle fête foraine du monde, mais une barbe à papa sanguinolente et bourrée de virus. Ce qui déconne vraiment dans tout ça, c’est qu’une fois qu’on commence à s’automutiler, on ne peut plus être qu’un monstre glauque, pour toujours, car tout notre corps est devenu un champ de bataille couvert de cicatrices et carbonisé. Or personne n’aime ça pour une fille, personne n’aimera jamais ça et donc, nous toutes sans exception, sommes foutues, dedans comme dehors. Lave, rince, et recommence, putain.
Afficher en entier« Ne pas se droguer, ne pas boire d’alcool, parler. Il va falloir faire de gros efforts, Charlie, pour te débarrasser de tes vieilles habitudes. Les vieilles habitudes sont confortables, même quand on sait qu’elles peuvent vous faire du mal. Tu pars vers l’inconnu. »
Afficher en entierLinus m’avait dit : « Ma vie est comme une série d’intervalles de dix minutes parfois. Et j’ai envie de me donner une putain de médaille pour avoir tenu une heure sans boire, mais c’est comme ça que ça doit être. Attendre que ça passe. »
Je referme le tiroir d’un coup sec. Je dois me forcer à attendre, malgré l’orage à l’intérieur de moi, attendre par intervalles de dix minutes, de cinq minutes, le temps qu’il faudra, toujours, maintenant et à jamais.
Afficher en entierLes gens devraient savoir qui nous sommes. Des filles qui écrivent leur souffrance sur leur corps.
Afficher en entierAller de l’avant. Continuer à avancer. Je suis fatiguée que tout le monde pense que c’est facile de vivre. Parce que ça ne l’est pas. Pas du tout.
Afficher en entierLa vie d'une fille est la pire vie du monde. La vie d'une fille c'est: tu nais, tu saignes, tu brûles.
Afficher en entierJ’écris ce que je ressens et fais glisser le papier vers elle. Mon corps est tout le temps en feu ; ça me consume nuit et jour. Il faut que je supprime cette chaleur noire en la découpant. Quand je me purifie, me lave et me répare, je me sens mieux. J’ai moins chaud à l’intérieur, et je me sens plus calme. Comme avec la mousse quand on s’enfonce profondément dans la forêt.
Ce que je n’écris pas : je suis si seule au monde que je voudrais me dépouiller de toute ma chair, n’être plus qu’os et tendons, et marcher jusqu’au fleuve pour qu’elle m’avale, comme l’a fait mon père.
Afficher en entierAussi quand Casper dit : Qui est le gardien de vos secrets ? Je pense : Personne. Personne. Personne avant Ellis. Elle a été ma seule et unique chance et elle m’a choisie, moi. Vous ne savez sûrement pas ce que ça fait, parce que vous êtes habitué à avoir des amis. Vous avez probablement un père et une mère, ou au moins l’un des deux qui n’est pas mort et qui ne vous frappe pas. Personne ne s’écarte de vous pour la photo de classe. Et donc vous ne savez pas ce que ça fait de se sentir tous les jours, chaque putain de jour, si seule que ce trou noir à l’intérieur de vous est prêt à vous avaler,
Afficher en entierCasper peut me dire de respirer, elle peut me dire d’acheter des élastiques à accrocher à mes poignets chaque fois que je panique ou que j’ai envie de me scarifier, et je le ferai, j’essaierai tout ça, mais elle n’a jamais dit, ou nous n’avons jamais parlé de ce qui se passera ou se passerait si ces choses… ne marchaient pas.
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