Extraits

(J'ADORE QUAND DANTE EST JALOUX :D)

BAR GAY, deuxième round. Cette tentative de sortie avait commencé sur une mauvaise note, et tout le trajet en métro avait été une suite sans fin de bouderies et ronchonnements de la part d’un Italien jaloux.

— Il fallait que tu portes ton putain de kilt.

Dante avait les mains enfoncées dans les poches de son caban. Il ressemblait à un marin honteux arpentant l’East Village un vendredi soir frisquet. Dante jetait un regard noir à tous ceux qui osaient même regarder Griff… hommes, femmes, ça n’avait pas d’importance.

Griff cogna son épaule avec la sienne.

— Je pensais que tu aimais mon kilt.

— Tu rigoles ? Je l’adore. Je rêve de ce kilt, bon Dieu !

Dante jeta un œil à ses jambes musclées.

— Mais c’est le cas de tout le monde en fait, et je ne partage pas. Seigneur. Ce mec là-bas vient juste de te reluquer lui aussi. Je vais tuer ce…

Dante se retourna pour défier quiconque avait osé mater Griff une deuxième fois. C’était comme marcher avec un garde du corps maniaque.

Griff se leva, lui tournant le dos, déterminé à ne pas s’excuser parce qu’il s’en faisait pour lui.

— Ta vie a besoin d’un airbag. Je te jure, Anastagio, tu aurais dû naître équipé d’un de ces gadgets.

Juste à cet instant, Dante se pencha contre lui, son front posé entre ses omoplates pendant un court moment, si hésitant que Griff retint son souffle. Sa voix était presque embarrassée.

— Nan. Tout le monde sait que je suis né défectueux. Ils ne t’ont installé que bien plus tard.

Griff s’appuya contre le mur et se pencha, les mains sur les genoux, regardant le sol. Enfin, il murmura :

— Je fais ça pour nous. Pour toi ! C’est déjà assez horrible sans que tu remues ce putain de couteau dans la plaie.

Du coin de l’œil, il pouvait voir Dante debout tout près, mais aucun d’eux ne bougea.

Puis Dante émit un petit son qui fit se retourner Griff. Bordel, il pleurait, là debout comme un soldat brisé. Son visage était un rictus d’agonie, un masque tragique, empli de douleur.

— Tu es Griffin ?

— Ou Griff. Salut.

Griff déplaça son poids d’une jambe à l’autre sur le seuil, se sentant maladroit et stupide.

Elle tendit la main, et Griff la serra. Elle reporta son regard sur Dante et plissa les yeux.

— Petit ami ?

Euh. Ils n’en avaient pas exactement discuté ; Griff n’était pas sûr de ce qu’il devait répondre.

Dante, oui.

— Ouais. Ça pose un problème ?

Dante était en total mode Brooklyn. Il plissa les yeux et déambula dans la pièce, en remettant vraiment une couche sur son côté étalon italien.

Elle ne le regarda même pas.

— Pas à moins que tu te mettes en travers de mon boulot. Est-ce que c’était toi en train de piquer une colère dans ton slip dans le couloir ?

Ouille.

— Nous avions une conversation.

— Ça avait plutôt l’air d’une engueulade. J’ai l’habitude. Je bosse avec un tas de mannequins, alors les sautes d’humeur tournant à l’hystérie dans ce trou, je connais.

Griff croisa son regard et secoua la tête pour lui faire savoir que tout allait bien. Elle n’était pas d’accord.

Beth se retourna pour engueuler Dante.

— Comme si tu étais un dalmatien enragé et lui ta pompe à incendie ? Des conneries de macho territorial. Rien de nouveau pour moi, Tonto. Pourquoi tu ne pisserais pas sur lui si ça peut te faire sentir mieux ?

Beth leva les yeux au ciel alors qu’elle posait des objectifs en rang sur le comptoir.

— Pour ton info, je ne suis pas intéressée par ton homme, génie. Il a les mauvaises pièces. Tu piges ?

Elle se pointa du doigt et se mit à loucher.

— Grosse gouine, tu vois ?

Griff essaya de désamorcer les bombes à retardement jumelles.

— Euh, je suis là.

Dante l’ignora et leva son noble menton, prenant un air hautain.

— Je veux juste m’assurer que personne ne le harcèle ou ne fasse…

— Ouais, ouais. Bla-bla-bla. Assis.

Beth l’avait cerné, et elle n’avait absolument pas peur.

— Ne touche à rien.

« Dante leva sa bière et serra fortement ses lèvres un moment, observant Walsh avec ses amis.

— Mourir bravement. Vivre de la même façon.Tchin.

Ils portèrent un toast. »

Elle se pencha en avant et prit une olive farcie dans un petit bol sur la table à leurs genoux. La glissant dans sa bouche, elle inclina la tête comme si elle attendait de lui qu'il confesse quelque chose.

- Loretta dit que tu te languis d'une fille.

Ses yeux noisette cherchèrent les siens.

- Elle est jolie ?

Griff déglutit, la regardant mâcher.

- Tu aurais pu l'amener, tu sais. J'adorerais la rencontrer.

Qu'était-il supposé répondre ?

Spoiler(cliquez pour révéler)Euh. Non. Je pense que je pourrais être gay, et je suis probablement amoureux de ton fils hétérosexuel, qui s'est tapé la moitié de Brooklyn, et, oh ouais, il fait du porno sur Internet maintenant et il veut que je me joigne à lui pour la prochaine fête de la branlette mondiale sur le réseau.

Il sentit le rouge monter au-dessus du col de son tee-shirt. Ses joues et ses oreilles brûlaient d'embarras.

Madame Anastagio lut beaucoup de choses là-dedans, naturellement. Elle attrapa une autre olive pour la glisser dans sa bouche et plissa les yeux vers lui, d'un air entendu.

- Quoi ? Elle est mariée ? Enceinte ? Qu'as-tu fait, Griffin ?

- Je n'ai rien fait. Je le jure. Et je ne veux pas, si je peux l'éviter.

Madame Anastagio secoua la tête à son attention et tendit à nouveau la main vers le bol.

- Cest bien dommage. Après tout ce que tu as vécu, quelques petits ennuis t'auraient fait du bien.

Hop. Une autre olive. Elle mâcha, plissant les yeux, essayant de forcer la confession avec son regard perçant de tzigane semblable à celui de Dante.

Il tourna vers la lumière des lampadaires de l’East 7th quand, de l’ombre dans l’allée derrière lui, il entendit quelqu’un japper de douleur.

Instantanément en alerte, Griff revint sur ses pas pour vérifier que tout allait bien, restant caché dans l’ombre.

Si c’était une agression, il fallait qu’il les surprenne. Si quelqu’un était blessé, il ne voulait pas l’effrayer.

Quand il atteignit la benne, il les vit : deux hommes dans la trentaine debout en appui contre le mur de briques, en train de baiser durement dans une flaque lumineuse projetée par la lumière de sécurité au-dessus de leurs têtes.

À nouveau, il murmurait, et Griff pouvait juste distinguer les mots :

— À moi – à moi – à moi, tu es à moi – à moi.

Dante se pencha et effleura de ses lèvres l’arrière du genou de Griff. 

— Eh bien j’aurais fait avec. Oh, attends, je l’ai déjà fait !

Griff explosa dans le couloir vide, se foutant complètement d’être entendu.

— Je suis en train de nettoyer ton bordel ! Tu crois que je ne t’ai pas regardé sur ce site, flirtant avec Alek. Cent fois ? Mille fois ? Tu crois que je ne connais pas chacun des mots que tu as prononcés, que je ne voulais pas me foutre en l’air chaque fois que tu lui as fait un clin d’œil ou que tu as léché tes putains de lèvres comme si tu allais le laisser te sucer ? Comme si ce n’était pas un coup de hache sur ma nuque ?

Le visage de Dante était pétrifié. Ses yeux étaient noirs comme la nuit. Il n’y avait aucune trace de ce vert enfoui au plus profond d’eux.

— Qu… je…, bafouilla Dante.

— Tu sais quoi ? Va te faire foutre. Va te faire foutre ! L’idée de venir ici pour me désaper pour des étrangers me donne envie de vomir. Mais je le fais.

Griff frissonna et réalisa qu’il avait merdé plus qu’aucun d’entre eux n’aurait pu l’imaginer. Rien ne déferait ce qui était arrivé. Rien de ce qu’ils pourraient dire n’effacerait ceci. Rien dans sa vie ne le rendrait plus heureux que ça, et Dante essayait de ne pas croiser son regard. Oh merde. Pourquoi ne lève-t-il pas les yeux ? Sa peau refroidit ; son estomac se noua. Et Dante ne le regardait pas, cherchait en fait à l'éviter.

Le visage de Dante était écrasé dans les coussins du canapé humide de sueur, ses cheveux emmêlés et ses yeux à peine ouverts.

Je lui ai fait mal.

Griff pouvait sentir monter la panique. L’avait-il forcé ? Une plaisanterie venait-elle juste de mal tourner ?

Je suis tellement désolé. Je suis tellement désolé, D.