Extraits

Il faut se défaire de la double idée fausse, selon laquelle l’écriture désignerait un système de signes constitué de manière homogène, et qu’elle serait caractéristique d’une époque « historique » par opposition à une époque « préhistorique » (sans écriture). L’étude scientifique classe les systèmes de notation et d’écriture d’après des critères logiques relevant de la sémiologie : or, la pratique est beaucoup plus hétérogène, des exceptions peuvent s’introduire dans tel ou tel système, des archaïsmes sont conservés pour telle ou telle raison, etc. Par ailleurs, le passage à l’écriture est un phénomène très complexe, et l’instauration d’un certain système d’écriture nouveau (par ex. l’alphabet), ne se substitue jamais complètement à la situation antérieure.

L’élargissement presque sans limites de l’objet d’étude a pour effet de rendre la situation actuelle de la recherche en histoire du livre relativement changeante. Si nous simplifions, nous dirons que quatre axes sont plus particulièrement explorés.

Par extension, le terme de livre désigne aussi le contenu intellectuel de l’objet, autrement dit le texte (« un livre de tel auteur ») ou une partie de celui-ci (les différents livres de l’Énéide ou de la Bible). La disparition du support qui s’observe avec l’usage du numérique explique que la définition intellectuelle du livre prenne aujourd’hui plus nettement le pas sur sa définition matérielle.

L’histoire et l’étude des livres ont été désignées à la fin du xviiie siècle comme la bibliologie (science des livres) ou, plus souvent, la bibliographie. L’expression aujourd’hui courante de « bibliographie matérielle » (p. 88) renvoie à cette acception très générale. Mais le terme de « bibliographie a pris généralement un sens plus limité : il s’agit de la liste alphabétique ou systématique des livres parus sur un certain sujet ou dans un certain cadre (un atelier, une ville, une région, une période, etc.), puis, par extension, de l’ouvrage ou de la partie d’ouvrage dans lequel cette liste est publiée.

Si nous cherchons à préciser le sens, le caractère flou de la définition du livre apparaît rapidement. Pour le sens commun, le livre désigne l’objet le plus usuel, c’est-à-dire le livre imprimé, et il s’oppose, en principe, au périodique* et au journal. Mais la distinction n’est pas si nette, et on parlera usuellement de « livres » pour désigner des périodiques réunis en collection et reliés. Un annuaire, périodique paraissant en principe une fois par an, est souvent considéré comme un livre.