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— Nous pouvons y aller doucement. Sa mâchoire se serre et il détourne son regard de moi en retirant ma main. — Heu… Depuis très, très longtemps ? — Est-ce que ça compte ? grogne-t-il. Oh là là. Je me retrouve avec un authentique puceau extraterrestre. Je le regarde pendant un long moment, puis mon cœur se serre de compassion. Pas étonnant qu’il pense qu’il est laid. Si personne dans sa tribu ne l’a jamais touché, il doit penser que c’est à cause de son apparence. Une tribu avec seulement quatre femmes signifie que ces dames ont le choix des hommes – jusqu’à ce qu’elles soient accouplées par des poux, bien sûr. Je suppose que Raahosh n’a jamais eu ce genre d’expérience. Le pauvre. Ne jamais recevoir un toucher affectueux ? Une caresse ? S’amuser juste pour le plaisir ? Il a raté tellement de choses. Je me sens un peu comme une idiote tout à coup de l’avoir constamment repoussé. Je suis probablement l’aboutissement de ses rêves les plus fous et le fait que je le repousse doit lui faire mal.

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Le matin, lorsque je me réveille, je ne suis pas vraiment surprise de sentir un grand corps chaud pressé contre le mien. Raahosh n'est pas exactement M.Limites, mais s'il ne fait que dormir, je peux faire avec. Je baille et m'assieds, m'éloignant de lui.

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— Est-ce que je te fais peur ? C’est pour cela que tu me repousses ? Il a l’air presque plein d’espoir. Bizarre. — Je n’ai pas peur de toi. Son expression s’assombrit. — Alors tu me refuses pour d’autres raisons. — Des raisons du genre « ce n’est pas mon choix » ? C’est une raison suffisante pour moi. Je me dirige vers les couvertures et m’y glisse, me déplaçant jusqu’à l’extrémité des fourrures. Elles forment un lit agréable et douillet, même si elles ne sont pas très grandes.

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Mon estomac grogne. Pire que ça, ma poitrine vibre encore de la réaction de mon pou à son égard. Si cela signifie ce que je pense… Je viens de me dégoter un mari extraterrestre. Merde. Ce type ? Je gémis, car ce n’est pas ce que je voulais. Si je devais avoir un extraterrestre, pourquoi ne pouvais-je pas avoir un gentil garçon souriant ? Quelqu’un avec un sourire qui s’illumine à ma vue et qui me traite comme une reine ? Quelqu’un qui me regarde comme Vektal regarde Georgie ? Au lieu de cela, j’ai la version extraterrestre de Grumpy Cat, et il vient de me ligoter et de m’attacher comme un veau dans un rodéo. Connard.

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"J’ignore ses mains qui tentent de me frapper alors que je passe une main le long de ses jambes nues, à la recherche de blessures. Elle repousse mon contact, mais pas avant que je ne voie que trois de ses nombreux orteils sont enflés et meurtris. Ils sont probablement cassés, et elle n’a pas de khui pour la guérir. Malgré tout, elle espère refuser mon aide ? Encore plus stupide. J’ignore ses protestations et la prends dans mes bras. Je la porterai jusqu’à la chasse au sa-kohtsk s’il le faut. Elle survivra, je ne supporterai pas l’inverse. — Hé ! Pose-moi, gros balourd, crie-t-elle à mon oreille. Au moins, ses poumons ne sont pas atteints. J’ignore ses beuglements et m’assure de l’envelopper dans les fourrures malgré son agitation. — Raahosh, tonne une voix. C’est un avertissement. Je lève le regard – tandis que la main de l’humaine me frappe la mâchoire en signe de protestation – et je vois mon ami et chef qui se dirige vers moi. — Tu ne peux pas la porter si elle n’est pas d’accord, dit-il dans notre langue. Les humaines doivent être courtisées en douceur. Elles sont fragiles.

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Tout ce que je sais, c’est que je résonne pour l’une des humaines mourantes, et si elle meurt, elle emporte tous mes espoirs et mes rêves avec elle. Je n’ai jamais eu de compagne. Je n’ai jamais eu d’amante. Les femmes sont peu nombreuses dans notre clan, et celles qui veulent s’accoupler avec un chasseur balafré et revêche encore moins. Jamais je n’aurais imaginé avoir une compagne rien qu’à moi. Et maintenant qu’elle est là… Je ne sais pas comment agir. Je reste donc silencieux et il me faut toute mon énergie pour que mon khui reste calme tandis que les humaines se lèvent pour se préparer au long voyage vers les grottes du clan.

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Mon khui est stupide. C’est sûr. Sinon, pourquoi aurait-il ignoré les femmes de mon peuple pour se mettre à vibrer à l’instant où nous rentrons dans la tanière pleine d’humaines sales en haillons ? De plus, il a choisi l’humaine la plus frêle et malade pour qu’elle devienne ma compagne. Une compagne qui me regarde avec des yeux sombres et furieux, qui refuse de boire le bouillon médicinal que je lui apporte, qui repousse mes mains lorsque j’essaie de l’aider à se lever, qui se renfrogne lorsque je lui apporte de l’eau ? Il est clair que mon khui est empli de bêtise. — Tu as résonné pour quelqu’un ? demande Aehako à mes côtés. Il glisse une fourrure dans son sac de voyage. Nous sommes en train de préparer la grotte pour partir, car les humaines sont trop faibles pour le faire. Nous devons tout prendre, ordre de Vektal. Même si c’est taché ou inutile. Les humaines possèdent si peu qu’elles chérissent tout ce qui leur appartient. Alors, nous emportons tout avec nous. Deux autres chasseurs, qui ont résonné, ont été envoyés chercher des couvertures dans les grottes les plus proches ; les humaines ne sont pas équipées pour affronter la neige, et elles n’ont pas de khui pour les maintenir au chaud.

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L’alien repose la fourrure sur mes épaules et m’enroule dedans. Il se penche, très près, et je retiens ma respiration. Les autres filles restent silencieuses, je peux sentir leurs yeux sur nous. Alors qu’il ajuste les couvertures une dernière fois sous mon air fixe, il dit un mot : « Raahosh ». Puis, il se lève, ignore nos regards insistants et quitte le vaisseau en trombe. — Qu’est-ce qu’il vient de dire ? demande une des filles. — La traduction est mauvaise, répond Kira en touchant le traducteur sur son oreille. C’est quelque chose comme « Celui qui est en colère et qui grogne. » — C’est son prénom, les informé-je, même si ce n’est qu’une supposition. Le nom « connard grognon » lui irait bien. Ce n’est pas la première fois que Raahosh vient me dire bonjour. Lorsque je me suis réveillée de mon sommeil comateux, c’était pour trouver son visage près du mien, forçant l’eau à traverser mes lèvres sèches. Il s’est imposé comme mon sauveteur personnel, m’offrant de la viande, des boissons chaudes, et il s’assure fréquemment que je suis bien au chaud. Pour faire court, il fait du surplace depuis l’arrivée des chasseurs et ça me tape sur le système. D’habitude, ça ne me dérange pas qu’un homme se présente à moi et m’offre des cadeaux, surtout si je suis affamée. Mais ces cadeaux ne sont pas gratuits. Capitaine Obvious cherche une compagne et il semble avoir jeté son dévolu sur moi.

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C’est vrai, je passe une journée pourrie. Penser que, malgré un kidnapping par des aliens, malgré avoir vécu dans une espèce de soute glaciale et brisée pendant une semaine en ne portant qu’une chemise de nuit… je peux passer une journée encore pire ? Oui, c’est possible. La raison de ma mauvaise humeur apparaît un moment plus tard. Il se dirige vers moi alors que j’essaie de me faire toute petite, invisible sous mes fourrures. Il ignore les cris effrayés des autres femmes et se précipite à mes côtés. Il ouvre les fourrures et me tend, presque sous mon nez, une tasse contenant un liquide fumant. Il ne dit rien. Il attend, en silence. — Dégage, lui lancé-je d’un ton grincheux en essayant de récupérer mes fourrures. L’extraterrestre ne me laisse pas les prendre. À la place, il les tire encore plus loin, hors de ma portée. Il pousse à nouveau la tasse sous mon nez. Il me semble évident que, si je veux récupérer ma couverture, je vais devoir boire ce liquide démoniaque qu’il m’apporte. C’est un connard.

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Pour survivre, il faut être… infectée. J’admets que, si l’idée du sauvetage me redonnait espoir (je suis celle qui voit le verre à moitié plein, et Kira, à moitié vide) l’idée qu’un insecte puisse vivre en moi me rend malade. Si le pou semble être la solution à notre problème, il y a un piège, comme nous l’a gentiment précisé Georgie. Le but de la créature étant la procréation de l’espèce, s’il voit deux personnes qui feraient un bébé parfait, il se passe ce qui s’appelle « la résonance ». Le pou se met à vibrer dans notre poitrine dès que notre « compagnon » se trouve proche de nous, et il ne s’arrêtera que lorsqu’un bébé sera né. Oh, et, la tribu de Vektal, composée d’extraterrestres à la peau bleue qui font deux mètres et ont des cornes ? Ils n’ont que quatre femelles. Si nous restons ici, nous acceptons plus qu’un sauvetage, nous acceptons des maris. Georgie a déjà été revendiquée par Vektal et en semble heureuse. Ils ne peuvent pas s’empêcher de se dévorer du regard. Non seulement nous acceptons le pou, mais nous acceptons aussi un homme, et nous n’avons pas le droit de le choisir. Je ne sais pas encore ce que j’éprouve à ce sujet. Quand je dis qu’ils sont « gentils sous certaines conditions », c’est la pure vérité. Ils sont gentils parce qu’ils veulent nous remplir de leur pâte à bébé.

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