Extraits

— J'aimerais vivre en Australie

— Alors il faut y aller.

— Je ne peux pas. Ma mère a besoin de moi ici, je dois gagner de l'argent, comme ça je pourrais l'aider. Si un jour elle s'en sort un peu mieux, je verrai.

Il a soupiré.

— Je connais mal ta maman, petite, mais j'en ai connu suffisamment pour savoir une chose : une mère ne peut pas être heureuse si l'un de ses enfants ne l'est pas.

PS : T'as remarqué qu'à une lettre près, autiste ça fait artiste ?

«Toute ma vie, j'ai eu une peur phobique de la mort. Elle n'a pas disparu, mais, désormais, vivre sans mon épouse m'effraie encore plus que mourir.»

Ça roule ? Moi ça va, au cas où ça t’intéresserait. Tes parents t’ont pas appris la politesse ? Bon, vu que je suis pas rancunière, je vais quand même te parler, surtout qu’il s’est passé un truc de malade.

On était en train de visiter un musée trop relou (à part la partie avec les lumières, c’était joli, même Noé souriait) quand Françoise est arrivée en criant, on aurait dit qu’elle avait vu son reflet dans le miroir. En fait, c’était Marine qui avait fait un malaise. Elle était là, et hop, d’un coup, elle était plus là. Tout le monde a eu peur, parce qu’elle a mis du temps à se réveiller, et parce qu’elle s’est cogné la tête contre le mur, ça saignait bien, j’ai failli tourner des yeux.

Louise m’a expliqué qu’ils vivent dans une très grande maison avec une piscine, des volets électriques et même un frigo qui fabrique des glaçons, ils ont des appartements dans d’autres pays et ils prennent l’avion plus souvent qu’une hôtesse de l’air. Du coup, c’est normal pour eux de vivre dans ce confort, ils n’ont pas la valeur de l’argent, c’est pour ça que leurs parents veulent leur montrer autre chose. Je ne comprends pas trop comment on peut ne pas avoir la valeur des choses, moi je peux te dire que, si j’avais un frigo qui fabrique des glaçons, je lui ferais un massage tous les jours pour le remercier. Mais bon, ça n’arrivera jamais, je ne sors pas de la cuisse de Crésus.

Quand elle a vu les poux, elle a fait un bond en arrière en criant que c’était une invasion, qu’il fallait trouver une pharmacie pour éradiquer tout ça. J’ai dit qu’il faudrait d’abord m’éradiquer moi, c’était hors de question qu’on tue mes poux, s’ils avaient choisi ma tête ce n’était pas par hasard, je devais les protéger. J’ai cru que ses yeux allaient tomber. Chloé riait tellement qu’elle en pleurait, elle devait penser que c’était un coup que je faisais à ma mère pour qu’on rentre, sauf que, cette fois, c’était la vérité. Ma mère a dit d’accord et on a continué la journée normalement.

À un moment, ma mère voulait qu’on fasse le tour du château, Chloé m’a fait signe que c’était le moment, puis elle a dit qu’elle ferait bien une pause. On était au pied d’une tour, j’ai attendu que ma mère ne regarde pas, j’ai sorti Mathias de sous mon manteau et je l’ai posé à ses pieds, en espérant qu’il ne s’échappe pas. Elle ne l’a pas vu tout de suite. Faut dire qu’elle n’arrêtait pas de parler, et les douves par-ci, et les remparts par-là, elle a loupé sa vocation, elle aurait dû faire Wikipédia

Pardon de ne pas te demander comment tu vas, mais il faut que je te raconte ce qu’il est en train de se passer en ce moment même, tu comprendras qu’il y a des priorités.

Attention, t’es bien assis ?

Sûr ?

Bon.

Ma mère est en train de crier dans un micro qu’elle a envie de se casser la voix.

J’ai bien envie de la dénoncer à quelqu’un, mais déjà je ne sais pas à qui, et en plus je ne parle pas l’Ikea. Alors je laisse mes tympans mourir à petit feu.

On est dans la pommade, ma mère a trouvé mon secret. J’avais pourtant une bonne cachette et Chloé était une complice assez efficace, mais voilà, c’est foutu. En plus, ma mère a eu tellement peur qu’elle est tombée et elle s’est cognée contre le bord du lit, résultat elle a la lèvre ouverte en deux comme si Moïse était passé par là. On s’est retrouvées à l’hôpital de Copenhague et maintenant elle a un pansement qui va lui recoller la bouche comme de la Patafix. J’aurais préféré qu’ils lui collent la lèvre du haut avec la lèvre du bas, parce que je te dis pas l’interrogatoire que j’ai eu.

Ce matin, on est passées dire au revoir à mon arrière-grand-mère. Elle a donné une boîte à ma mère, apparemment dedans c’est une urne avec son mari. Elle lui avait promis de le jeter tout en haut de la Norvège, au cap je sais plus quoi, parce qu’ils y étaient allés ensemble, mais elle n’en a jamais eu le courage, et maintenant elle ne peut plus à cause de ses jambes. Donc elle a demandé à ma mère de le faire pour elle. J’ai pas connu pépé, mais il devait être vraiment petit pour entrer là-dedans.

Après, on est allées chez mon grand-père, il nous a expliqué comment marchait son camping-car, j’ai pas tout suivi sauf le truc des toilettes, là. Il y a comme un caisson qu’il faut vider quand il est plein. Je peux te dire que je préfère faire mes besoins par la fenêtre à toute allure sur l’autoroute plutôt que vider ce machin.