Extraits

— Ainsi, votre ami Bingley va enfin se marier, c’est cela ? reprit Mr Hamilton. Qu’en dites-vous, Darcy ? En moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, vous et moi serons les derniers célibataires à la ronde !

— Vous savez que c’est absurde, répondit l’intéressé en souriant. Vous êtes capitaine dans la marine, vous serez l’homme le plus couru. Vous trouverez une femme en un clin d’œil.

— Ah, les interrompit Lizzy avec un soupçon de rire dans la voix. Mais assurément, il devra en trouver une rapidement, car dans le cas contraire, il ne pourra certainement pas espérer croiser une prétendante sur le vaste océan !

— Mademoiselle a raison ! s’exclama Hamilton. Je dois dénicher une épouse convenable avant de reprendre la mer.

Darcy remarqua une œillade et un sourire que son cousin lançait à Elizabeth, et pinça les lèvres.

— Mais la difficulté réside dans le fait qu’il existe tant de dames aux tempéraments et aux qualités différents !

Hamilton s’adressa à sa compagne.

— Quel genre de femme devrais-je chercher ?

— Vous devez en trouver une qui convienne parfaitement ; une épouse dotée de force de caractère, car soit elle devra rester à la maison pour élever votre progéniture lorsque vous serez en mer, soit, une fois que vous posséderez votre propre navire, il sera peut-être de son devoir de vous accompagner. (Elle eut un petit rire.) Et elle devra être remarquablement quelconque !

Le marin hocha la tête, hilare.

— Je vous en prie, dites-moi pourquoi !

Elle s’esclaffa.

— Elle sera la seule femme à bord de ce navire rempli d’hommes.

Mr Hamilton opina du chef avec ardeur en riant de plus belle.

— Oui, mais je crains que nos relations n’aient été plutôt antagonistes. Je le croyais fier et inamical. Je n’ai pas craint de lui faire savoir qu’une partie de son comportement m’offensait… alors que, je le comprends aujourd’hui, cela était plus l’effet de sa réserve que de son arrogance.

— Oh, ces leçons que nous apprenons parfois trop tard.

— Bien trop tard, conclut Elizabeth à voix basse.

Une fois le premier couplet achevé , elle tendit le bras pour tourner la partition d' un geste expert. Sa concentration fut momentanément distraite par quelqu'un qui franchissait le seuil. Il s' agissait de Miss Darcy.

" -Avez-vous noté ce qu'il aimait ou exécrait? Avez-vous remarqué de quelles dames il appréciait la compagnie? Quel genre de femme préfère-t-il, à votre avis?

Lizzy baissa les yeux, sentant ses joues se colorer de façon très inopportune. Elle comprenait son amie et souhaitait sincèrement lui donner des conseils utiles.

Relevant la tête, elle expliqua :

-Ne tentez pas de le flatter, ni de l'amadouer. Je le crois capable de voir clair dans les artifices qu'une dame pourrait essayer de déployer pour attirer son attention.

Rosalyn la scruta avec intensité.

-Oui, je pense que vous avez raison. Que pouvez-vous m'apprendre de plus?

-S'il vous semble rechercher la solitude, ne le harcelez surtout pas de questions ou de propos insignifiants. Vous avez vous-même mentionné qu'il était réservé. Mieux vaut faire bonne impression maintenant et utiliser de futures occasions de faire preuve de votre intelligence.

-Tout à fait! Voilà qui est très sage, Elizabeth. autre chose?

La jeune femme examina un instant la question, puis sa physionomie s'éclaira.

-Vous devriez parfois être en désaccord avec lui.

-En désaccord! Oh, vous me taquinez! ( [...] ) Je ne pourrais jamais faire cela!

-Non, concéda Elizabeth en branlant du chef. Je suppose que non. "

— En effet. Nous faisons de notre mieux.

Un silence embarrassé se fit dans la pièce tandis qu’ils se jaugeaient avant de détourner la tête. Il était déjà assez incongru de se retrouver brutalement nez à nez avec le jeune homme, mais la situation était empirée par le fait qu’il était accompagné de la demoiselle qui avait censément supplanté Jane dans son cœur.

— Miss Bennet, vous connaissez donc Mr Bingley ? s’enquit rapidement Mrs Willstone.

L’interpellée se tourna vers son employeuse.

— Oui… oui, tout à fait. Il a loué une résidence non loin de Longbourn il y a quelque temps. (Elizabeth regarda l’invité sans ciller.) J’ai entendu dire qu’on avait acheté Netherfield.

— Oui, je n’ai pas… commença-t-il. J’ai moi aussi appris la nouvelle.

Il semblait à court de mots. La jeune fille à côté de lui continuait à les examiner alternativement.

Quand la conversation entre eux cessa, l’hôtesse entreprit de finir les présentations.

— Puis-je vous présenter à tous la gouvernante d’Emily, Miss Elizabeth Bennet ? (Elle se tourna vers son employée.) Miss Bennet, voici Mr et Mrs Estes, Mr et Mrs Fountain, Mrs et Mrs Hampton. Vous connaissez déjà Mr Bingley, et cette élégante demoiselle est Miss Georgiana Darcy.