J'aime le sport de petit niveau
Auteur
- Boris Cyrulnik (Écrivain)
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Classement en biblio - 2 lecteurs
extrait
POURQUOI LE SPORT ?
Monsieur Sapiens pratiquait-il un sport ?
Éprouvait-il du plaisir à « jouer » à la course avec un autre ?
A-t-il inventé une épreuve de saut en hauteur où le vainqueur aurait été fier de sauter plus haut que les autres ?…
J’imagine mal le sport de monsieur Sapiens avec des règles, des contraintes arbitraires et des enjeux inutiles.
Monsieur Sapiens adaptait ses efforts à la résolution de problèmes concrets : courir vite pour fuir un tigre à dents de sabre, lancer un caillou sur un agresseur, viser un gibier avec un javelot. Ce qui ne l’empêchait pas de sauter de joie parfois, ou de bousculer gaiement un congénère. Ses actes exprimaient des émotions, exerçaient son corps à réaliser des performances physiques, mais ne s’effectuaient pas dans un cadre rituel qui aurait permis de comparer des résultats. Pour ça, il faut des règles.
C’est ainsi que jouent les animaux quand ils éprouvent le besoin d’exprimer leur joie de vivre ou leur agressivité. Les chatons se bagarrent, les taurillons se donnent des coups de tête, et les macaques mâles s’empilent les uns sur les autres dans une joyeuse mêlée. Pour parler de sport, il aurait fallu que ces jeux de course ou de bagarre amicale s’effectuent selon un règlement. Or, pour passer une convention arbitraire, il faut un langage parlé, un accord pour mettre à l’épreuve les coureurs d’un 100 mètres, les lanceurs de poids ou de javelot.
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Résumé
"La résilience par le sport, c'est la métamorphose du handicap auquel on ne se soumet pas, et qui nous conduit ainsi à la réparation narcissique. Au concept de "morale sportive", je préfère celui d'empathie, dans lequel je me représente le monde de l'autre. Même sans loi, quelque chose m'empêche. Dans le sport, c'est le règlement qui freine, et non le sujet lui-même. L'empathie est plus morale que le sport.
J'aime le sport de "petit niveau" parce qu'il socialise, il moralise, il produit une relation humaine, et fait naître une épopée". Par le prisme du sport, qu'il a pratiqué jeune adulte, Boris Cyrulnik nous entretient de la "condition humaine", avec la bienveillance qui le caractérise. Phénomène social majeur du XXe siècle, le sport constitue à ses yeux un magnifique terrain de reconstruction. Le concept de résilience, qu'il a fait connaitre, trouve dans le sport une application exemplaire.
Son approche anthropologique le conduit aussi à former l'hypothèse de la naissance des conventions de jeux dès l'avènement de la conscience de l'autre chez l'enfant, et du plaisir qui jaillira de se mesurer à lui. Ainsi, ce "protosport" de l'homo ludens s'enracinerait dans l'être en devenir dès les premiers temps de l'humanité.
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