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Si je pouvais bouger, je pense que je ne le ferais même pas. Je resterais immobile pour ne surtout pas le déranger, silencieuse pour ne surtout pas le réveiller. Peut être que je m'autoriserais à tourner juste un peu pour le regarder dormir, mais ça n'irait pas plus loin.
Afficher en entierJe préfère être aveugle et ne rien savoir. Si je ne sais rien, je garde espoir. Et l’espoir est tout ce qui me fait avancer aujourd’hui.
Afficher en entierELSA
Ensuite, j’ai compris que je pouvais qu’entendre.
...
Je suis un cocon vide. Non, j’habite dans un cocon vide.
Afficher en entierC’est fou ce qu’on peut comprendre sur notre corps quand on est dans le coma. On comprend réellement que la peur est une réaction chimique. Parce que je pourrais être terrorisée quand je revis chaque nuit mon cauchemar, mais non, je regarde. Je me regarde me lever à 3 heures du matin dans le dortoir du refuge et réveiller mes compagnons de cordée. Je me regarde déjeuner maladroitement, hésitant comme chaque fois à boire un thé pour éviter d’avoir la vessie pleine sur le glacier. Je me regarde enfiler méthodiquement chaque couche de vêtements depuis les pieds jusqu’à la tête. Je me regarde fermer ma veste coupe-vent, enfiler mes gants, régler ma lampe frontale et passer mes crampons. Je me regarde rire avec mes copains, eux aussi à moitié réveillés mais inondés de joie et d’adrénaline.
Afficher en entierTHIBAUT
- Laisse-moi tranquille, jte dit !
- T’iras nulle part tant que tu ne seras pas venu le voir.
- Laisse-moi, j’ai déjà essayé quinze fois et ça ne change rien du tout. Il est abominable, infect, vulgaire et grossier. On dirait un mauvais dessin animé. Ça ne m’intéresse pas.
- C’est ton frère merde !
- C’était mon frère avant qu’il roule sur ces deux gamines.
Afficher en entier« On s’est envolés chacun de notre côté, on n’a juste pas choisi la même piste d’atterrissage »
Afficher en entier« Je suis amoureux d’une fille dans le coma.
Sur le moment, ça semble être la chose la plus saine qui me soit jamais arrivée. »
Afficher en entier- Les termes que nous venons d'utiliser, les approximations que nous venons de faire. Vous dites qu'on ne doit pas parler légèrement de mettre fin l'assistance électronique d'un patient plongé dans le coma, pourtant, il me semble avoir entendu Fabrice dire qu'elle était "foutue", et je crois bien avoir perçu un passage de deux pour cent à zéro pour cent. Si ce n'est pas parler avec légèreté, je crois que nous n'avons pas le même langage.
Si j'avais pu bouger, j'aurais embrassé cet interne.
- Vous remettez en cause le diagnostic de vos confrères et futurs collègues ?
- Je ne remets rien en cause, monsieur, se défend l'interne. Je trouve juste étrange d'être aussi cru avec une personne qui, aux dernières nouvelles, est toujours en train de respirer devant nous.
- Loris, reprend le médecin comme s'il essayait de se rendre lui-même un peu plus patient, si vous ne pouvez pas supporter le fait d'avoir à débrancher quelqu'un, vous n'avez rien à faire dans ce service.
- Il ne s'agit pas de supporter ou de ne pas supporter, monsieur. Il s'agit de traiter les faits. Vous dites deux pour cent. Pour moi, c'est deux pour cent. Ce n'est pas zéro. Tant que nous sommes pas à zero, j'estime que nous avons encore de l'espoir. (p83)
Afficher en entierEt après ça, la seule chose dont je me souvienne est la voix du médecin qui dit à ma mère qu’il y a encore des papiers à remplir puisqu’on vient de me changer de chambre, parce que vous comprenez, madame, au-delà de quatorze semaines, l’équipe médicale ne peut plus faire grand-chose.
Ensuite, j’ai compris que je ne pouvais qu’entendre. Mon esprit s’est préparé à pleurer, mais forcément, je n’ai pas réussi. Je n’ai même pas ressenti de tristesse. Je n’en ressens toujours pas. Je suis un cocon vide. Non, j’habite dans un cocon vide.
Une chrysalide en location dans un cocon, c’est peut-être plus joli. J’aimerais bien en sortir, histoire de dire que je suis aussi propriétaire.
Afficher en entierDu contact… J’en raffolerais comme une gamine devant une glace au chocolat. Presque vingt et une semaines que je n’ai pu expérimenter la moindre sensation tactile. Surtout que la dernière était celle de la neige contre mon corps tout entier. Pas extraordinaire comme souvenir. Du coup, je donnerais avec joie toute ma panoplie de mousquetons pour sentir rien qu’une parcelle de Thibault contre moi. Il y aurait des tas de vêtements et de draps entre nous, mais, rien à faire, sa chaleur passerait au travers et ce serait suffisant.
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