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Le fils qui a mal tourné
Alors chère voisine à ce que l’on m’a dit
Ce fils qu’a mal tourné, celui qu’on a maudit,
La justice l’enchaîne.
Il est vrai qu’il fut loin d’être un bon angelot
Et vous a fait verser bien souvent un sanglot
Au débit de fontaine.
Faut voir que ce rêveur, chasseur de papillon,
S’est éloigné très tôt de vos blancs cotillons,
Sans esprit de famille.
Il est allé par monts, il est allé par vaux,
Ne trouvant ses amis qu’au fond des caniveaux
Où le maraud fourmille.
Après quoi, quel toupet ! Il a conduit son clan
A travers le pays. Parlant, gesticulant,
Devant la populace.
Il voulait renverser l’ordre et l’autorité.
Mais pourquoi portait-il pareille absurdité
Au fond de sa besace ?
Non content des discours, des braves commerçants
Durent subir de lui des gestes menaçants
Jusque dans la boutique.
Renversant les étals, bousculant les vendeurs
Il vint, les insultant, les traiter de voleurs
En semant la panique.
L’affaire est terminée, il est sous les verrous.
Je ne donne pas cher pour les autres voyous,
Tous ses affreux complices.
Force reste à la loi, le calme est revenu
Le fils agitateur n’est plus qu’un prévenu
Dont l’âme est aux supplices.
Mais oui chère voisine il faut quelques leçons
Dont pourront s’inspirer chacun de nos garçons
Pour garder leur droiture.
Avec un châtiment pour chacun des méfaits,
L’exemple servira pour les insatisfaits
Tentés par l’aventure.
Nous pensons bien à vous et à votre mari
Qui doit être navré qu’un tel charivari
Vous froisse et vous excède.
Ce brave charpentier ne méritait pas ça
Pas plus que vous, Marie : enfanter un forçat !
Que Dieu vous vienne en aide.
Afficher en entierLa femme fidèle
Quand son mari part en voyage
Elise sait rester très sage
Et s’employer
En lisant un coquin ouvrage
Dont elle va choisir la page
Au doigt mouillé
Les jours longuets de cette absence
Sont ressentis en pénitence,
A dévoyer,
Par désir de concupiscence
Dont elle jauge la constance
Au doigt mouillé.
Sinon c’est dans sa kitchenette
Qu’elle manie à la sauvette,
Pour s’égayer,
Un abricot d’une recette
Dont elle estime la fossette
Au doigt mouillé.
Quand son mari, la mine fière,
Revient joyeux à la chaumière,
Près du foyer.
Elle s’agite à sa manière
Afin qu’il trouve sa guêpière
Au doigt mouillé.
Afficher en entierL'héritage
Et bien voilà ! C'est terminé
La pauvre vieille est enterrée
Elle a rejoint et sans encombre
Dans sa tombe, bien à l'ombre,
Celui qui lui faisait parfois
Un chapeau en cornes de bois.
Comme elle n'a pas pardonné
C'est le caveau du cul tourné.
Les héritiers peu accablés
S'en viennent pour rafler le blé,
Et font sitôt un vrai scandale
Au coût de la pierre tombale
Entamant sec son beau profil.
Du bon béton aurait suffit !
Chacun gémit la part perdue
Sur le tombeau qui l'a tondu.
Puis c'est retour à la bicoque
Pour y fouiller dans les breloques
Dans les tiroirs et les placards,
Y découvrir le moindre liard.
On fouille dans la cheminée
Car souvent là y sont caché
Les lingots d'or ou bien les Louis
Mais là chou blanc, rien que la suie.
La division des maigres biens
Est arbitrée à coups de poing
Et pour le plus petit torchon
C'est le crêpage de chignon.
Les anneaux d'or des deux défunts
Sont coupés par ces aigrefins,
Le carillon du corridor
Est partagé entre consorts.
Il ne reste que la maison
Pour terminer la tondaison.
Afin de la vendre au plus tôt
On fit venir un tombereau
O^l'on chargea ces petit riens
Souvenirs vains des deux anciens
Que l'on mena à vive allure
Sans remords sur le tas d'ordures.
Puis, estimant que le magot
Ne ressemblait pas au lingot
Qu'ils espéraient bien empocher
Après la mort des deux fauchés,
C'est beaux infâmes défolièrent
Toutes les fleurs au cimetière
Il ne fallait pas déranger
Quand on a peu à partager !
Ah ! Que la vie est très bien faite
Elle a pensé en plus des fêtes,
Pour les unions de nos enfants,
Rajouter les enterrements.
Car ceux-ci font se rassembler
Les héritiers, forts dispersés,
Autour d'un mort qu'est bien content
De voir pleurer ses descendants.
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