Extraits

— Qu’en pensez-vous ? lui demandai-je, en montrant ostensiblement l’œuvre accrochée au mur.

— Elle est parfaite !

Tournant le dos à la photo, il plongea ses yeux dans les miens.

— Vous avez un don pour comprendre les gens et une sensibilité à fleur de peau… Je parie que vous êtes artiste vous-même !

— Moi ? Non ! me récrié-je, de plus en plus gênée.

Son regard perçant me troubla, je baissai la tête, intimidée.

— Je fais un peu de photographie, murmuré-je, c’est tout.

— Je le savais ! Je parie aussi que vous aimez bien vous cacher derrière votre appareil…

Soudain, en voulant esquiver son attaque, je fais un pas sur le côté et reçois son genou dans l’entrejambe. C’est douloureux, certes, mais pas au point qu'il s’arrête en plein élan avec une grimace horrifiée ! Sur les visages des gars s’affiche la même expression. Seul Oliver réagit différemment. Il semble vouloir me faire comprendre quelque chose…

Lorsqu’il plaque les mains sur son entrejambe en mimant un cri de douleur, je comprends !

Aussitôt, j'imite son geste et je me jette par terre en roulant des yeux et en poussant des cris rauques. Entre deux gémissements, j’invective Jamie en le traitant de tous les noms. Si j’arrive à le culpabiliser, il oubliera peut-être que j’ai réagi avec un temps de retard.

- Maitre moustique, déclare-t-il solennellement en imitant l'accent chinois, je vous présente mes plus plates excuses.

Sa mine est si comique que je ne peut m'empêcher de sourire. On se croirait dans un épisode de la série "Kun Fu", dont ma grand-mère était fan. Inspirer je m'incline devant lui en joignant les mains.

- Petit scarabée, dis-je alors, je serais toujours à tes côtés. Mais si tu fais chier, tu l'auras t'a raclée!

- C'est parce que vous n'avez pas trouvé la robe de vos rêves que vous êtes dans cet état-là?

Estomaquées, nous le regardons toutes les trois, les yeux écarquillés, tandis qu'il installe le gril sur la table.

Croyant nous avoir bluffées, il ajoute:

- Comme on dit, une robe de perdue, dix de rachetées !

- Comme on dit, réplique Amber, un con de parti, dix minutes de gagnées !

Vexé, le serveur repart sans nous jeter un regard.

Le conte de fées n'a pas duré... Je ne suis pas restée longtemps une "femme fatale". A vrai dire, c'est plutôt le contraire qui s'est produit. Être une femme m'a été fatal.

J’apprendrai à ne plus être une victime ; j’apprendrai à me défendre contre les hommes violents ; j’apprendrai à combattre le mâle par le mal. Aujourd’hui, je le déclare solennellement : cet œil au beurre noir est une blessure de guerre que je peux arborer avec fierté.