Extraits

Jake

"— Je rêve où ce mec vient de nous faire une avance ? marmonne-t-il en se rapprochant de moi.

Je jette un œil à celui qui s’éloigne de nous et rejoint un certain Tom, qui lui aussi nous mate, une lueur d’intérêt animant ses rétines.

— Ouais, je crois qu’on pourrait éventuellement dégoter un plan à quatre avec ces mecs.

Dixon hausse un sourcil en terminant son verre.

— Intéressant… renâcle-t-il en fourrant une main dans sa poche. Les pauvres ne savent pas que si je devais me taper un mec, tu serais le seul à me faire bander.

Je manque de m’étouffer avec la gorgée de whisky que je m’apprêtais à avaler.

Naturellement, il me frappe le dos alors que je toussote, pris de court. La chaleur de sa main, qu’il laisse un peu trop longtemps sur mon épaule, me transperce la peau et se propage bien trop agréablement en moi.

Je réprime un frisson déroutant en urgence au moment où mon palpitant se met à pomper plus drastiquement et que son sourire sarcastique kidnappe toute mon attention.

Rapidement, je me reprends alors qu’il récupère sa main pour la plonger à nouveau au fond de sa poche.

— Je savais bien que tu me kiffais, enfin tu ouvres les yeux ! Ça s’arrose, ricané-je en désignant le bar d’un geste du menton.

Dixon

Il se fout de moi.

En silence, alors que Claire, l’adjointe du président Blackfield, s’installe à notre table de réunion, accompagnée d’un aide de bureau, je dirige mon attention, sans pouvoir m’en empêcher, vers la cravate que Jake a décidé de nouer autour de son cou.

Un raclement de gorge me rappelle à l’instant présent et m’ordonne de virer les fantasmes qui harcèlent mon cerveau.

Rapidement, je laisse mon regard balayer le visage de mon associé qui s’est paré d’un rictus entendu tirant vers le sourire machiavélique.

Il l’a fait.

Il l’a fait et il a compris. Il sait que cette foutue cravate, comme toutes les autres, me pose un problème majeur de concentration.

Je détourne les yeux de lui en le maudissant puis me concentre sur nos éminents invités qui ouvrent leurs ordinateurs d’un air affairé.

Le plus discrètement possible, je replace mon érection dans mon boxer et me racle à mon tour la gorge en tentant de virer ce brouillard complètement porno qui m’encombre les méninges.

Ne pas jeter un oeil à Jake.

Ne pas. Jeter. Le moindre coup d’oeil. À cet enfoiré.

Un sourire s’étire sur mes lèvres malgré mon agacement.

J’adore cet homme, définitivement.

Jake

" Axel se racle la gorge pendant que je m’enfuis dans mes pensées, à cette époque durant laquelle je pensais fermement qu’il m’aimait de la même passion que moi.

— J’ai voulu l’embrasser au cinéma ! déclaré-je en me remémorant ce moment terrible. J’ai simplement posé ma main sur sa cuisse. Avec lui j’y allais doucement, parce que bon… j’imaginais qu’il n’osait pas. Avec l’éducation qu’il avait reçue, j’essayais de me montrer très patient. Eh bien, il a repoussé ma main et m’a jeté un regard du genre… effaré !

Je mime l’air de Dixon à cet instant embarrassant de ma vie, yeux écarquillés et bouche ouverte en O.

Axel ricane et j’avoue qu’en y repensant, je ne peux qu’en rire.

— Il était vraiment surpris ?

— Oui, soupiré-je, rêveur, en m’adossant à mon siège. Après il s’est enfui du ciné, m’a laissé comme un con avec mon popcorn et je ne l’ai pas revu pendant une semaine. Puis il est revenu et m’a déclaré qu’il ne pouvait pas se passer de son meilleur ami.

Ce jour-là, son air perdu m’a touché en plein coeur. Surtout parce que moi aussi je morflais sans lui, sans nouvelles. J’avais besoin de ce type dans mon espace personnel. Peu importait la place qu’il choisissait, il fallait qu’il en prenne une. N’importe laquelle.

— Et toi, t’as dit quoi ? s’empresse de me demander mon rencard du soir, absolument pas embarrassé par mes liens avec Dix.

— Moi ? Je lui ai dit : chacun choisit son jeu. Tu veux être mon ami ? OK. Moi je veux que tu me laisses bander pour toi. Tu es mon ami si j’ai le droit de fantasmer sur ton cul dans mon coin.

Axel éclate de rire en tapant dans ses mains brièvement.

— La vache ! Ce romantisme ! Browdy tu viens de devenir ma star ! Je suis fan absolu !

À chaque occasion de le contempler qui se présente à moi, je crève d’envie de me jeter sur lui et de lécher sa peau, de m’en repaitre, de remonter depuis son nombril jusqu’à nicher mon visage au creux de son cou.

Et mes pensées continuent l’histoire, sans moi.

Il s'adosse nonchalamment à l'encadrement de la porte, empêchant cette dernière de se refermer totalement, et inspecte sans aucun embarras la scène avant de reporter son attention sur moi, juste moi. Son regard aux reflets d'un cyclone toujours en pleine révolution kidnappe le mien sans demander la permission.

Nous restons immobiles et silencieux un court instant durant lequel une flopée de sentiments me traversent. Je pourrais tenter de les identifier, mais ça fait bien longtemps que je connais sur le bout des doigts les effets que Jake Browdy produit sur moi.

Il me rassure, me couve de toute sa protection, accapare un peu aussi la totalité de mon attention, et m'aime d'une manière tellement singulière et sans concession qu'il me comble systématiquement le cœur.

Notre amitié est de cette nature. Forte, indéfectible et absolue. Un raz de marée constant que personne jusqu'alors n'a réussi à apprivoiser. Ni lui, ni moi, ni aucun de nos partenaires.

Lui, moi, ce lien indestructible qui nous retient l'un près de l'autre. Voilà notre force.

Dixon

Son buste tremble d'un souffle erratique, ses bras se bandent autour de moi, m'encerclant dans un univers qu'il construit pour moi et dont je ne souhaite plus jamais m'échapper.

L'envie de lui devient virale, se propage de muscle en muscle, crépite sous ma peau, rampe le long de mes membres et s'acharne à me pousser vers lui, encore et encore, me faisant saliver d'impatience, réveillant un appétit démesuré et étouffant.

- ... Des hétéros, j'en ai apprivoisé des tas, je sais ce que je fais... Mon instinct me guide, bientôt il deviendra languide...

- J'en ai marre de tes rimes, t'es pas sur une partition...

- Oh que si ! Au contraire, je me trouve en pleine composition spontanée. Je titille tout un tas de cordes, en ce moment même, bébé. Y a que vous deux qui ne le voyez pas. Allez, fin de l'interlude, reprenons la mélodie.

- Vous avez opté pour le sexe sans contact ? Comment ça se passe ?

Dixon

Le problème c'est qu'en plus de m'avoir dégommé les muscles, les sens et activé le palpitant bien au-delà du supportable, il a également pulvérisé mon âme et démantelé mon esprit.

Dixon

Nos lèvres se rejoignent et j'abandonne mon univers à ses pieds. Je l'embrasse comme s'il était le premier, le dernier, et tous les autres entre-deux. Peut-être parce que finalement, c'est exactement le cas.