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Une nuit entière ! La consternation le saisit : face à une menace aussi imminente, gaspiller de précieux instants lui paraissait criminel ! Il tenta encore de se lever, avec succès cette fois. Sous ses pieds, les larges carreaux colorés lui parurent glacés. Cela le revigora. Son ami lui tendit son vêtement ; tout en l’enfilant, le vieil homme se rendit d’une démarche vacillante jusqu’à la fenêtre. La vue était identique à celle qu’il contemplait chaque jour depuis la tour du temple : la Grande Artère, les boutiques, la porte de nacre et, au-delà, la flèche noire du donjon. Les beaux quartiers d’Alstore se déployaient tout autour, propres et étincelants, comme abrités dans une bulle hors du temps. À ce moment de la journée, la cité aurait déjà dû grouiller de monde. Or, un calme quasi surnaturel y régnait, preuve que la rumeur de l’attaque s’était certainement déjà répandue.
Afficher en entierPline parut lire dans le regard hanté du Redresseur de Foi, y deviner quelque chose d’effroyable, de douloureux. « La mort appelle la mort », disait-on. Cet adage était sans doute vrai.
— Vous aussi, n’est-ce pas ? interrogea-t-il, avide de savoir. Vous me l’avez dit, dans le cimetière : vous avez perdu un être cher...
Kenan baissa aussitôt la tête, fixant le bout de viande qu’il tenait à la main. Dans le lointain, un oiseau nocturne poussa un hululement lugubre.
— Souffrez-vous encore ? insista le garçon devant son mutisme.
Le chasseur de monstres hésita, mais il se devait d’être franc.
— Oui.
Pline avait cessé de pleurer. Il écoutait.
Afficher en entierKenan allait dire : « on ne devient pas Redresseur de Foi par vengeance », mais il se tut. De qui se moquerait-il en tenant de tels propos ? De lui-même ? Parfois, le ressentiment pouvait être une motivation comme une autre. De toute façon, le garçon parlait sans savoir. Il avait le temps d’envisager un véritable métier.
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