Extraits

Ian referme derrière moi. À clé.

- Tu as des problèmes.

Mon estomac se contracte.

- Pourquoi? Qu'est-ce que j'ai fait de mal?

- Rien. Au contraire.

Je ne comprends pas.

- Pourquoi alors?

- Parce que tu as été parfaite, justement.

Ian s'assoit sur un tabouret métallique.

- Chaque année, les épreuves de l'induction sont modifiées afin que les étudiants ne puissent pas prévoir ce qui les attend. Tu as tout résolu si vite que le docteur Barnes et la professeur Holt se posent des questions sur toi. Ils se demandent si tu as été aidée.

- Ils pensent que j'ai triché?

C'est comme si j'avais reçu une gifle. Jamais je ne tricherai. Le simple fait d'y penser me révolte. On m'a appris à me respecter et à respecter plus encore ceux qui m'entourent. Pourtant ma colère fait long feu et ne tarde pas à être remplacée par la peur. Quelle est la punition prévue pour les étudiants qui trichent?

Je suis obligée de me retenir pour ne pas aller à la fenêtre voir si Tomas arrive. Pour me contrôler, je ferme les yeux et essaie de penser au bonheur que j’ai ressenti la première fois que j’ai vu les bâtiments de l’université. Le Test était fini depuis une semaine. Il faisait beau et le soleil me chauffait la peau. Je ne pouvais pas m’arrêter de sourire. J’avais réussi. Je vivais mon rêve et marchais dans les pas de mon père. Tout était possible, surtout avec Tomas à mes côtés. J’ignorais à ce moment combien ce bonheur était précieux. Combien il serait de courte durée. J’ignorais que je ne tarderais pas à découvrir que rien n’était comme je le pensais. Que j’étais piégée.

Tomas savait-il à ce moment-là ? J’essaie de me remémorer son visage pendant que nous marchions dans le campus en discutant de notre avenir. Y avait-il des signes qu’il avait gardé le souvenir du Test ? Avait-il conscience de ce à quoi ressemblerait notre avenir en réalité ? Et si c’est le cas, puis-je lui pardonner de ne pas me l’avoir dit ?

Mais toutes ces pensées disparaissent quand enfin la porte s’ouvre. Tomas. Il m’ouvre ses bras et je n’hésite pas une seconde. Peu importe ce qui s’est passé, Tomas fait partie de mon passé et de mon présent. Au chaud contre lui, en sécurité, je laisse mes larmes couler. Le visage enfoui dans sa veste, je revois Rawson vaciller et tomber dans cet immense trou sans fond. J’étais trop loin pour distinguer son expression mais je peux imaginer la terreur qui l’a saisi au moment de disparaître dans l’abîme. Tant d’espoirs. Évanouis en une seconde.

Tomas me laisse pleurer sans rien dire. Il m’offre réconfort et protection en me serrant dans ses bras. Une fois mes larmes taries, il ne me demande rien. Il m’embrasse, me souffle qu’il m’aime et ajoute :

- Je suis désolé d’avoir mis tant de temps à arriver. J’ai eu peur que tu penses que je ne viendrais pas.

-Je savais que tu me retrouverais ici.

C’était peut-être la seule chose dont j’étais certaine.

Jour d'examen.

Je baisse ma manche cachant les cinq cicatrices sur mon bras et j'examine mon image dans le réflecteur. Tunique bleue. Pantalon gris. Tout autant que le bracelet gravé d'une étoile à mon poignet, mes cernes m'identifient comme un étudiant de premier niveau. Mes camarades afficheront les mêmes signes de fatigue. Nous avons tous révisé jusqu'à une heure avancée de la nuit. Après six mois passés à étudier les matières générales, l'examen d'aujourd'hui décidera de notre orientation finale.

La lueur pâle de la lune et le faisceau de sa lampe torche nous permettent de remonter l’allée. Je prends garde à bien lester au milieu du pont. Même s’il y a une rambarde de chaque côté, je ne veux pas risquer un faux pas.

Les aérojets ressemblent à celui que j’ai pris des Cinq Lacs à Tosu. Longs et fins, ils s’élèvent à cinq mètres au-dessus du sol et sont idéals pour se déplacer sur des terrains ravagés par les Sept Époques de la guerre.

La majorité des étudiants s’entasse dans le premier. Je choisis le deuxième. L’intérieur est éclairé d’une lumière douce. Le plafond est assez haut pour que je me tienne debout. Les coussins des sièges ont l’air confortable. À l’arrière se trouve une cabine. Lors de ma venue à Tosu, Tomas et moi y avions trouvé de quoi nous restaurer. La porte du fond mène aux toilettes. Les vitres sont couvertes d’un tissu opaque qui nous empêche de voir le paysage. Nous ne découvrirons pas notre destination avant d’être arrivés

<Tous se taisent et se tournent vers la porte dans l'attente du prochain arrivant.

Tous sauf Ian qui continue de me regarder.Il se penche vers moi et me souffle:

-merci.

-de quoi ?

-j'avais parier avec Jenny que tu serais la première fille à sortir.

Il adresse un sourire victorieux à la fille à côté de moi.

-Maintenant,elle doit s'occuper de mon linge pendant deux semaines.

Jenny lève les yeux au ciel et me murmure:

-Il aura de la chance si ses caleçons lui reviennent en un seul morceau.>

(P68)

- Parce que la plupart du temps, les meilleurs dirigeants ne sont pas ceux qui veulent le pouvoir mais ceux qui veulent servir la Communauté.

"Après les guerres et les catastrophes naturelles, certains, désespérés par l’avenir qui se présentait, ont cédé à la tentation de la mort. Je les comprends mieux aujourd’hui. Mais je comprends également mieux le courage nécessaire pour vivre."

Dès son institution, le gouvernement de la Communauté Unifiée a interdit de brûler les livres. Les dirigeants estimaient que s'il est important de se chauffer, la connaissance de notre histoire et de notre culture était primordiale.

Ce n'est pas le moment de revivre le passé. C'est le moment de faire en sorte qu'il ne se reproduise jamais

Ce n'est pas le moment de revivre le passé. C'est le moment de faire en sorte qu'il ne se reproduise jamais.