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Nous vivions dans un monde où enfants comme adultes se blessaient souvent: de ces blessures le sang jaillissait, la suppuration survenait, et parfois on en mourait. Une des deux filles de Mme Assunta, la marchande de fruits et de légumes, s'était blessée avec un clou et était mort du tétanos. Le petit dernier de Mme Spagnuolo était mort du croup. Un de mes cousins, qui avait alors vingt ans, alla pelleter les décombres un matin: le soir il était mort, écrasé, le sang lui sortant par les oreilles et par la bouche. Le père de ma mère avait été tué alors qu'il construisait un immeuble et en était tombé. Le père de M. Peluso avait perdu un bras: c'est sa toupie de menuisier qui lui avait traîtreusement coupé. La soeur de Giuseppina, la femme de M. Peluso, était morte de tuberculose à vingt-deux ans.
L'aîné des enfants de Don Achille -je ne l'avais jamais vu et pourtant j'avais l'impression de m'en souvenir- avait fait la guerre et il était mort deux fois, d'abord noyé dans l'océan Pacifique et puis mangé par les requins.
Afficher en entierPuis elle ajouta une phrase dont je me souviendrai toujours : "Greco, la beauté que Cerullo avait dans la tête depuis l'enfance n'a pas trouvé à s'exprimer : elle a fini entièrement sur sa figure, dans ses seins, ses cuisses et son cul. Mais ce sont des endroits où la beauté ne dure pas, et après c'est comme si elle n'avait jamais existé."
Afficher en entier« Elle était comme ça, elle rompait les équilibres seulement pour voir de quelle autre manière elle pouvait les recomposer. »
Afficher en entier« Lila savait parler à travers l’écriture. Pas comme moi quand j’écrivais, pas comme Sarratore dans ses articles et poésies, et pas comme de nombreux écrivains que j’avais lus et lisais : elle s’exprimait avec des phrases qui, certes, étaient soignées et sans erreur – bien qu’elle ait arrêté ses études – mais en plus chez elle tout semblait naturel, on ne sentait jamais l’artifice de la parole écrite. En la lisant je la voyais, je l’entendais. Cette voix sertie dans l’écriture me bouleversa et me ravit encore plus que lorsque nous discutions en tête à tête : elle était totalement purifiée des scories du parler, de la confusion de l’oral, elle avait la clarté et la vivacité que j’imaginais être celles du discours quand on était assez chanceux pour être nés dans la tête de Zeus et non pas chez les Greco ou les Cerullo. »
Afficher en entier« Nino a quelque chose qui le ronge de l’intérieur, comme Lila, ce qui est un don et une souffrance : ils ne sont jamais heureux, ne s’abandonnent pas et craignent ce qui se passe autour d’eux. »
Afficher en entierSi on n'essaie pas, rien ne change jamais.
Afficher en entierLe bien et le mal sont mêlés et ils se renforcent l'un l'autre. [...] Le bon sentait mauvais et le mauvais sentait bon, et cet amalgame lui coupait le souffle.
Afficher en entier[...] Les rêves que j'avais dans la tête se retrouvent sous mes pieds.
Afficher en entierÉtait-ce donc possible ? M'avait-elle entraînée avec elle dans l'espoir que mes parents, en guise de punition, ne m'enverraient plus au collège ? Ou m'avait-elle ramenée à la maison en toute hâte justement pour m'éviter cette punition ? Ou encore - c'est ce que je me demande aujourd'hui - avait-elle suivi à des moments différents ces deux désirs ?
Afficher en entierLila va trop loin, comme d'habitude, ai-je pensé.
Elle élargissait outre mesure le concept de trace.
Non seulement elle voulait disparaître elle-même, maintenant, à soixante-six ans, mais elle voulait aussi effacer tout la vie qu'elle laissait derrière elle.
Je me suis sentie pleine de colère.
Voyons qui l'emporte cette fois, me suis-je dit.
J'ai allumé mon ordinateur et ai commencé à écrire notre histoire dans ses moindres détails, tout ce qui me restait en mémoire.
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