L'année du lièvre , T1 Au revoir Phnom Penh

Résumé

Le 17 avril 1975, les redoutables Khmers rouges faisaient leur entrée dans la capitale du Cambodge, Phnom Penh. Ces révolutionnaires qui prétendaient changer la société cambodgienne et la régénérer allaient bientôt se rendre coupables de massacres, de déportations et de crimes, provoquant la mort de plus d’un million de leurs compatriotes. 1975, c’est aussi l’année de naissance de Tian, l’auteur de cette bande dessinée. Quelques années plus tard, en 1980, ses parents ont quitté leur pays d’origine pour venir s’installer en France, où il vit depuis. Plus de trente-cinq ans après la tragédie des Khmers rouges, Tian a décidé de revenir sur cette période sombre de l’histoire cambodgienne dans une bande dessinée intitulée L’Année du lièvre. Il n’est pas le premier auteur à raconter en BD ces années terribles. Avant lui, Séra, adolescent au moment de la folie Khmer rouge, avait déjà traité du même thème mais dans un style graphique et narratif complètement différent, à travers des albums comme Impasse et Rouge, L’Eau et la terre et Lendemains de cendres. Le graphisme de Séra mêle le dessin et la photographie, renforçant ainsi le réalisme de son propos, donnant à ses récits une dimension tragique qui fait pénétrer le lecteur au cœur même de l’abomination. Tian, lui, choisit un parti pris graphique beaucoup plus accessible. Son trait, tout en douceur, évoque celui d’une série comme Aya de Yopougon, ce qui permet au lecteur d’entrer dans le récit sans avoir l’impression d’être confronté de plein fouet à la terreur. Tian raconte les pérégrinations d’une famille qui, chassée de Phnom Penh comme tous les habitants de la ville, tente d’échapper à son destin pour trouver refuge chez des proches. La confusion, le désordre et la violence règnent, tandis que les maîtres du pays tentent d’instaurer un nouveau régime et de mettre en place une nouvelle société imprégnée de leurs idéaux révolutionnaires. Malgré la légèreté du dessin de Tian, le lecteur prend la mesure de l’horreur qui s’installe au fil des jours. Il partage le quotidien fait d’angoisse et de violence de ces gens qui ont tout perdu, dont le monde et les repères basculent soudainement, et qui doivent apprendre à « planter du Kapokier et du palmier autour de la maison », une vieille citation khmère signifiant qu’il faut ne rien voir, ne rien entendre et ne rien dire. L’Année du lièvre, récit d’une grande humanité en trois volets dont on attend avec impatience de lire la suite, nous plonge au cœur de l’un des plus grands drames du XXe siècle. Mais il nous entraîne aussi à la découverte passionnante de la société cambodgienne, dont les fondements historiques ont été soudain bouleversés par une révolution meurtrière qui, loin de bâtir un monde meilleur, n’a fait que dévorer ses propres enfants comme dans un soudain accès de folie.