Extraits

""- Voilà pourquoi je ne supporte pas les filles ! Elles sont insolentes et incapables de la moindre patience ! On rentre ! [...] Et le premier grimoire que tu vas ouvrir une fois de retour à la chaumière, apprentie, sera un livre de cuisine.

- J’y trouverai des sorts ?

- Non, des recettes. Tes soupes sont infectes""

""Les choses murmurent si nous savons écouter""

""Tout mythe a un commencement. Voici le début de la plus célèbre quête, celle d'Arthur Pendragon ""

"" De nouveau, des étoiles scintillèrent dans les ténèbres, filant à l’instars de milliers de lucioles. Une légèreté envahit ses membres qui paraissaient flotter parmi les ombres. Tout s’éteignit peu à peu. Seul les runes aux creux de ses mains irradiaient encore une lueur turquoise.""

Vortimer n’avait pu être sauvé. Son prince était mort, perdu à jamais.

L’adolescente repensa un instant à ce que lui avait dit Morgue. Merlin était désormais pour elle seule. La fée avait sans doute eu raison.

L’apprentie se pelotonna contre son maître. Ses yeux se fermèrent aussitôt. Sa dernière sensation fut le bruit mat de la pomme offerte par Urien qui, tombant de sa main endormie, roulait doucement sur le sol.

Elle s’essuya la bouche. Le sommeil la faisait tituber. Dans peu de temps, elle ne pourrait plus lutter, à l’instar de son maître. L’enfant avait pourtant besoin d’une nourrice. Ana déplia le linge qui enveloppait le petit orphelin.

— Je sais où je vais t’emmener, lui dit-elle en l’embrassant sur le front.

Elle remarqua alors des lettres brodées sur le revers du tissu. Sa mère avait dû y coudre le prénom qu’elle lui avait choisi. L’apprentie lut à haute voix les six caractères qui se détachaient en or sur fond rouge :

— Arthur...

Où aller ?

Partout, elle ne trouvait que des images qui la renvoyaient à sa nature d’enfant mal aimée. Et Merlin n’était pas là. Cela ne valait même pas la peine de le chercher : il demeurerait introuvable. Ana marchait sans but dans la forêt. Quatre mois auparavant, elle avait parcouru le même chemin en suivant le sorcier. Sa vie avait tellement changé ! Elle avait appris à lire, à écrire. La magie était gravée dans ses paumes. Les rois dépendaient de son choix.

Il lui fut impossible de repartir sur-le-champ. Tout d’abord, Ana ne voulait pas utiliser le Souffle du Dragon devant sa mère. En outre, elle avait besoin de marcher et ses pas la menaient irrésistiblement vers le village de Carduel. Avec un peu de chance, elle y trouverait peut-être son petit frère.

Comme souvent, le village était vide. Dans la journée, on travaillait aux champs, on taillait les vignes ou on préparait les moutons pour la tonte. Puis quand venait le soir, on se serrait dans la petite auberge de Léodagan.

Ana glissa sous le portique de pierre. Elle espérait que tout se passerait bien et que la trace de boue séchée recueillie sur ses chausses suffirait à la ramener à bon port. La terre se désagrégeait doucement dans sa paume.

Le Souffle du Dragon l’enveloppa comme un brouillard humide et collant. De minuscules éclairs bleutés zébraient parfois la brume blanchâtre. Une puissante aspiration l’arracha à la clairière et son corps s’engouffra dans le néant.

De nouveau, des étoiles scintillèrent dans les ténèbres, filant à l’instar de milliers de lucioles. Une légèreté envahit ses membres qui paraissaient flotter parmi les ombres. Tout s’éteignit peu à peu. Seules les runes au creux de ses mains irradiaient encore une lueur turquoise.

Un rectangle lumineux s’alluma dans le lointain. Il se rapprochait à vive allure.

Cette fois, Ana ne tomba pas. Elle parvint à conserver son équilibre en prenant pied sur le sol. D’un regard, elle contempla le décor.

En mentant ainsi, Ana eut l’impression de trahir Bleïz et de l’abandonner. Elle se promit d’aller le voir au plus tôt. Elle n’avait que trop longtemps remis cette visite.

— Parfois, fit Vortimer d’un ton songeur, j’ai l’impression de n’être que le valet de mon père. Il ne m’assigne que des tâches insignifiantes et me traite comme un subalterne.

Ana ne comprenait que trop bien ce qu’il devait éprouver.

— Savez-vous faire de la magie ?