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Cinq ans auparavant, les citoyens dômiques avaient pu suivre depuis le dôme d’Édimbourg où il s’était caché, l’arrestation de Grist. Il était le dernier des directeurs des Usines Nouvelles à être attrapé par la justice. La date du procès n'était pas encore connue que tous les ministères européens s’étaient déjà déclarés partie civile. Celui de l'environnement, celui de la santé, celui de la ville... Face à cette myriade d'accusations, Grist ne se berçait pas d'illusions. Son sort était scellé depuis le jour où il avait été mis en examen sous le prétexte qu'il aurait dû, en tant que directeur d'une Usine

Nouvelle, s'assurer que toutes les conditions de sécurité étaient requises pour empêcher une attaque terroriste. Peu importe qu’il soit lui-même une victime, le gouvernement cherchait des coupables à présenter aux citoyens, il était la cible idéale. Avant lui, d'autres procès s'étaient tenus. Le dernier en date avait jugé le directeur de l'Usine Nouvelle de Stockholm. Le nuage y avait tué moins de monde qu'à Paris, quelques millions seulement. L'accusé

s’était battu jusqu'au dernier souffle contre le ridicule de sa condamnation.

Plusieurs mois durant, il avait tenté de prouver son innocence et de dévoiler l’existence d’un complot européen. Il avait directement mis en cause les politiques de l’époque et l’incompétence des services de surveillance des territoires. Il avait renvoyé chacun de ses accusateurs face à ses contradictions, implorant les juges et l'opinion publique de ne pas céder aux volontés d'un gouvernement qui ne cherchait qu'à renforcer son autorité. Il avait réclamé à cor et à cri l'annulation de ce procès. Des millions de citoyens, à travers l'Europe entière, avaient suivi les débats. Tout le monde s’était passionné pour l’affaire ! Puis la sentence était tombée, peine capitale. Si les arguments de la défense les avaient parfois fait douter, les jurés avaient besoin de désigner des coupables. Il fallait mettre des noms sur la catastrophe, peu importe si ces noms n’étaient pas toujours les bons. En parfait bouc émissaire, l’homme s’était résigné et avait accepté la mort, presque soulagé de quitter ce monde absurde. Mickael Grist n'était pas loin de penser la même chose de la justice des hommes. Contrairement à son collègue de Stockholm, il avait laissé la main à son avocat, Maître Darnel, un ténor du barreau européen. Darnel savait manipuler les médias. Peut-être arriverait-il à infléchir l’opinion publique, car elle seule comptait vraiment.

Pour sa part, depuis le jour de son arrestation, Grist s’était muré dans un mutisme total. Il semblait attendre que les choses se passent.

La voix fluette du présentateur laissa place à un spot publicitaire. En quelques secondes, Van Daele y apparut trois fois et la milice deux fois pour bien montrer son rôle essentiel dans la sécurité des dômes. S’enchaînèrent des images de bonheur, de travail, de sérénité et de bien vivre. Tous les acteurs souriaient. Un monde parfait pour qui viendrait de l’extérieur, chose par ailleurs impossible puisque les sorties comme les entrées des dômes restaient interdites. Seule une poignée de citoyens, militaires pour la plupart, pouvait en franchir les portes.

Antoine constata que le message publicitaire avait eu pour conséquence de replonger le nez des consommateurs dans leur coffi. Même Paul, à

l'origine de la demande, contemplait maintenant d'un air songeur les jaquettes de livres posées sur l'étagère. Antoine éteignit le téléviseur. Il s'apprêtait à retourner dans l’arrière-cour quand la porte du bistrot s'ouvrit violemment. La petite clochette se décrocha du plafond et atterrit au milieu de la salle. L'ouverture provoqua un tel appel d'air que la robe du mannequin se releva par-dessus tête et dévoila sans pudeur des dessous affriolants qu'Antoine s'était bien gardé d'exposer. Tous les regards convergèrent du mannequin au jeune homme affolé qui venait de pénétrer avec fracas dans le bistrot. L'homme, haletant, s'accrocha au comptoir. Une vingtaine d’années, pas très grand, les cheveux coupés très court, comme le sont ceux des miliciens, un nez droit et long. Son physique n'affichait pas de particularités remarquables, si ce n'était ses yeux noirs agrandis par l'effroi, sa bouche tordue et ses pommettes rougies par l'effort. L'homme portait un uniforme réglementaire dômique dédié au personnel d'entretien des bâtiments administratifs. Seuls manquaient la casquette et les gants d'hygiène. Paul se fit la réflexion qu'aucun bâtiment administratif ne se trouvait à moins de trois ou quatre cents mètres du bistrot. Le jeune homme jeta des regards affolés vers la porte d'entrée. Sans même réfléchir, d’un geste du pouce,

Antoine pointa l'arrière-cour : « Passe par là gamin ! » Aucun habitué n'irait trahir le cafetier. Au mieux, les témoignages parleraient d'un fou traversant en trombe le bistrot pour s'enfuir vers l'issue de secours. Le jeune homme sauta par-dessus le comptoir et courut vers la porte. Mais avant d’en franchir le seuil, il se retourna et observa la salle. Ses yeux croisèrent un instant ceux de Paul, assis de l'autre côté du bar. Ce dernier portait le badge violet destiné

aux personnalités politiques du dôme. Le jeune homme s’approcha et lui glissa dans la main une micro-puce électronique. « Pour la liberté

Monsieur... Sacré-Cœur, apportez cette carte à Ganesh », murmura-t-il. Paul fut troublé par le regard implorant du jeune homme. Il aurait dû refuser l'objet, prétextant ne vouloir se mêler de rien mais il referma d'instinct la main, serrant la minuscule carte contre sa paume. Quand il releva la tête, l'homme avait disparu par l'issue de secours. Il glissa la puce dans la poche de son costume. La porte principale du bistrot s'ouvrit à nouveau violemment. Quatre miliciens, à peu près dans le même état physique que le jeune homme, firent irruption. Antoine émit un petit bruit crispé de la bouche. L'arrivée fracassante de ces miliciens dans son bistrot n’augurait rien de bon. Paul conserva son calme, priant pour que personne ne le dénonce. Finalement, à la différence du cafetier, il ne connaissait guère la vie des autres clients du bistrot. Peut-être se trouvait-il dans la salle un agent infiltré, chargé de la surveillance de ce lieu à la mauvaise réputation. Paul commença à transpirer. Les quatre miliciens se séparèrent. Deux d’entre eux vérifièrent les visages des consommateurs tandis qu’un troisième bloqua l'accès principal. Le dernier membre du groupe, une femme, s'avança directement vers Antoine. Elle pointa vers lui son bâton de défense et demanda d’un ton menaçant : « Où est-il parti ? »

Antoine reproduisit silencieusement le geste du pouce pour désigner l'issue de secours. Un milicien s'y engouffra tandis qu’un autre repartit par la porte d'entrée pour intercepter le fuyard à revers. Les deux autres restèrent en salle pour effectuer un contrôle d'identité. Il n'était pas rare de tomber, dans ce genre de lieu, sur des extérieurs non pucés. Résignés par la fréquence des contrôles, les clients présentèrent leur émetteur fixé au poignet. Alors que son collègue vérifiait les identités, la milicienne vint s'asseoir près de Paul. Elle l’observa attentivement, son visage ne lui étant pas inconnu. Puis elle s’adressa à Antoine :

— Pourquoi l’issue de secours est-elle restée ouverte ?

Antoine lui répondit que la porte donnait sur l’arrière-cour où il entreposait son stock de coffi et d’eau. La milicienne le transperça du regard un long moment pour s’assurer qu’il ne mentait pas. Son attitude laissait imaginer qu’elle sentait ce genre de chose. La femme était d'une beauté

singulière. Elle portait avec grâce son uniforme de milicienne qui épousait son physique athlétique et parfait. On devinait sans difficulté que des heures d'entraînement intensif avaient sculpté ce corps et l'avaient conditionné à

supporter le dur métier de milicien. Son visage dégageait une animalité

presque sauvage. Une peau d'une pâleur effrayante, des joues creusées....

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28 février 2058

Quand la porte du bistrot s'ouvrit sur le tintement aigu de la petite clochette qui pendait au plafond, tous les regards convergèrent vers le nouvel arrivant. Bavarder d'autre chose que du train-train quotidien était devenu tellement rare sous le dôme que l’entrée d'un nouveau client alimentait les discussions des habitués pendant plusieurs jours. De quel quartier venait-il ? Portait-il son bracelet-puce ? Simple client ou enquêteur sanitaire ? Aussi, quand Paul Marantz lança à la cantonade un bonjour en entrant dans le bistrot, les têtes d'habitués se levèrent d'abord, emplies d'excitation puis retombèrent instantanément, déçues, le nez dans leur tasse.

Un visage connu, pas de quoi alimenter les plus folles rumeurs.

Comme tous les matins depuis plusieurs années, Paul vint s'asseoir à sa place régulière, sur un tabouret à la gauche du comptoir. Antoine, le propriétaire du troquet, figure emblématique du commerce de quartier, l'accueillit d'un signe de tête et lui servit d'office un coffi. Paul prit la petite pilule noire entre ses doigts, la fit rouler par habitude entre l'index et le pouce et la plongea dans le verre d'eau froide. Il attendit quelques secondes que la pilule se dissolve complètement dans le liquide et porta la boisson à

ses lèvres. Il grimaça. C’était imbuvable ! Ce coffi ne ressemblait en rien au café que Paul avait pu savourer dans sa jeunesse, avant que tout cela n'arrive. Un breuvage au goût chimique et indéfinissable, décaféiné bien sûr et construit dans le plus grand secret des fabriques alimentaires gouvernementales.

Antoine avait participé, quelques années plus tôt, au front commerçant qui s'était levé contre la malbouffe sortie de ces usines secrètes. Les cafetiers avaient d'ailleurs été la profession commerçante la plus virulente lors des manifestations. L’interdiction de toute consommation d’alcool, pourtant disponible sur le marché noir, leur faisait perdre des clients et avait entraîné la fermeture de la majorité des cafés sous les dômes. Le gouvernement européen imposait des substituts chimiques supposés remplacer les boissons originales. Des petites billes de couleur au goût totalement infecte. Antoine s'était battu pour conserver l'ouverture de son commerce. La légende racontait qu'il avait fait de la prison pour avoir expulsé de son bistrot un contrôleur sanitaire un peu trop zélé. Personne ne savait si l’histoire était vraie. Ce qui était sûr, en revanche, c'est qu'Antoine gérait le dernier café du quartier, dont la réputation s'était dégradée au fil des années à tel point que les habitants l'appelaient communément le bouge.

Aux murs, pendaient des posters écornés de films depuis longtemps tombés dans l'anonymat mais dont les titres sonnaient encore aux oreilles des plus anciens clients. Cyborg 4, Avatar 6, des blockbusters comme les appelaient les médias de l’époque. À l'entrée, trônait sur pied un mannequin représentant Lily Rose Depp en robe blanche. Son apparence était vétuste mais Antoine y tenait comme à la prunelle de ses yeux. Il se vantait souvent de l’avoir récupéré après la catastrophe dans les sous-sols du musée Grévin.

Aux consommateurs ignares qui lui demandaient qui était cette femme près de la porte d'entrée, Antoine ne daignait même pas répondre. Derrière le comptoir, posées sur une tablette de métal, quelques couvertures de livres prenaient la poussière. Couvertures seulement car depuis la création des dômes, les rares livres qui n’avaient pas été brûlés étaient conservés dans des bibliothèques, à l’abri des regards. À nouvelle vie, nouvelle culture, scandait le gouvernement.

Paul but une seconde gorgée de coffi et regarda l'heure. Il avait juste le temps de suivre le bulletin d'informations. Il attendit qu'Antoine revienne de l'arrière-cour où il stockait ses réservoirs d'eau et lui demanda poliment d’augmenter le son du poste. Généralement, Antoine laissait la télévision allumée jusqu’au milieu de matinée. Ensuite, lassé d’y voir les mêmes informations diffusées en boucle sur l’unique chaîne gouvernementale, il

éteignait le poste et meublait le silence en sifflotant de vieilles musiques. Il attrapa la télécommande et monta le son. Sur l’écran, apparut le présentateur le plus jeune de l'histoire de la télévision. À peine quinze ans, un air adolescent, de l'acné encore visible sur le visage malgré le maquillage.

Certains prétendaient que ce jeune journaliste était le petit-neveu du président européen, Werner Van Daele. Paul ne lui connaissait personnellement pas de famille mais c’était possible. Tout était possible avec Van Daele ! Au physique juvénile du présentateur succéda l'image de la prison centrale de Paris. La voix off au timbre léger du journaliste contrasta avec l’austérité de l’imposant bâtiment construit sur les ruines de la cathédrale Notre Dame. « Dans l’affaire Grist, les interrogatoires vont reprendre ce matin après quelques jours d’interruption. En effet, cinq ans après son arrestation et l’ouverture d'une nouvelle information judiciaire, les enquêteurs ne parviennent toujours pas à comprendre les motivations qui ont poussé l’ancien directeur de l'Usine Nouvelle de Paris à négliger les normes de sécurité de son entreprise. Nous avons bien sûr encore en tête l'issue des derniers procès au cours desquels beaucoup de choses ont été

dites sur la catastrophe et sur l’origine du nuage. Il est peu probable que

Mickael Grist nous en apprenne beaucoup plus. Nous savons cependant par la voix de son avocat, Maître Darnel, que Monsieur Grist prépare une défense un peu particulière. Nous ignorons encore de quoi il s’agit. Avant de rendre l’antenne, quelques rappels chronologiques sur Mickael Grist. Né en

1995, il a quarante-six ans au moment des faits, soixante-trois ans aujourd’hui. Son épouse, ses deux enfants et une grande partie de sa famille n’ont pas survécu au nuage. Jusqu'à la catastrophe, son professionnalisme et sa gouvernance de l'Usine Nouvelle de Paris n'avaient jamais été remis en cause. Alors quelle attitude l'ancien directeur adoptera-t-il pendant son procès ? S’expliquera-t-il enfin ? Confirmera-t-il sa négligence ou défendrat-il son mode de gestion de l'usine ? Nous suivrons les débats heure par heure et ne manquerons pas de vous en informer. »

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