Extraits

— Pourriez-vous me conduire dans la chambre de M. Tsukahara, demanda Isobe de sa grosse voix.

Setsuko se leva.

— Bien sûr ! Suivez-moi, si vous voulez bien.

Les policiers se dirigèrent vers l’ascenseur derrière elle.

— Je vous accompagne, lança Shigeharu qui ferma la marche en s’appuyant sur sa canne.

Resté seul avec Narumi, Nishiguchi lui demanda de l’excuser pour cet énième dérangement.

— Apparemment, ce ne serait pas un simple accident, et l’enquête ne fait que s’élargir. Il y a chaque jour plus de monde qui y travaille. Ce n’est pas facile pour nous non plus.

Narumi esquissa un sourire tout en faisant non de la tête.

La ligne de chemin de fer desservait plusieurs plages célèbres. De nouveaux voyageurs en descendaient à chaque arrêt et le wagon fut bientôt presque vide. Hari-Plage était encore loin.

Le ronflement du vieil homme allait s’amplifiant. Probablement parce qu’elle en avait l’habitude, sa femme regardait défiler le paysage comme si de rien n’était. Kyōhei, que le bruit empêchait de se concentrer sur son jeu, décida de changer de place. Il prit son sac à dos et le plastique, et se leva.

Le wagon était presque vide à présent. Désireux de s’éloigner le plus possible du vieil homme, il avança dans le couloir central et aperçut le dos de l’homme de tout à l’heure. Les jambes croisées, il était plongé dans la lecture de son magazine. Le petit garçon l’observa par-dessus son épaule. Il faisait les mots croisés et paraissait bloqué.

— Temperance, lui souffla Kyōhei.

Surpris, l’homme se retourna.

— Quoi ?

Le petit garçon tendit le doigt vers la grille.

— Le 5 vertical, “Elle fait parler les os”. La réponse, c’est Temperance.

L’inconnu regarda la grille et hocha la tête.

Elle enfila ses tennis et regarda la vieille pendule murale. Il était presque 13 h 30. C’est parfait, pensa Narumi Kawahata. À vélo, il ne lui faudrait qu’un quart d’heure pour arriver là-bas, et elle en aurait un autre pour régler les derniers détails avec ses camarades.

— À tout à l’heure, maman ! lança-t-elle en direction du comptoir.

Setsuko, sa mère qui était dans la cuisine, apparut en écartant les pans du rideau qui la séparait de la réception. Un foulard sur ses cheveux, elle préparait sans doute le dîner.

— Ta réunion va durer combien de temps ?

Malgré ses cinquante-quatre ans, elle n’avait pas beaucoup de rides et, maquillée, elle en aurait paru dix de moins. Mais elle n’était pas coquette et se contentait en été d’une couche de fond de teint qui lui servait aussi d’écran solaire.

Le ronflement du vieil homme allait s’amplifiant. Probablement parce qu’elle en avait l’habitude, sa femme regardait défiler le paysage comme si de rien n’était. Kyōhei, que le bruit empêchait de se concentrer sur son jeu, décida de changer de place. Il prit son sac à dos et le plastique, et se leva.

Le wagon était presque vide à présent. Désireux de s’éloigner le plus possible du vieil homme, il avança dans le couloir central et aperçut le dos de l’homme de tout à l’heure. Les jambes croisées, il était plongé dans la lecture de son magazine. Le petit garçon l’observa par-dessus son épaule. Il faisait les mots croisés et paraissait bloqué.

Kyōhei dévisagea alternativement le vieil homme ébahi et son voisin. Le premier regardait avec perplexité le second, mais lorsqu’il sentit sur lui les yeux du petit garçon, il ferma les siens en grommelant dans sa barbe. La vieille dame lui adressa un sourire, peut-être parce qu’elle était contente que cette dispute soit terminée.

Le train continuait à rouler le long de la côte. Le petit garçon qui avait fini son pique-nique jouait sur sa console portable lorsque son téléphone se mit à vibrer dans la poche de son sac à dos. Il mit son jeu en pause et sortit l’appareil spécialement conçu pour les enfants.

Kyōhei avait répondu oui sans interrompre son jeu sur sa console. Il savait qu’il serait de toute façon expédié à Hari-Plage chez cette tante, la sœur de son père, et sa famille qu’il connaissait à peine pendant que ses parents seraient à Osaka. Ce ne serait du reste pas la première fois que cela lui arrivait. La seule différence était que lorsque sa grand-mère maternelle était encore vivante, c’était chez elle qu’il allait lorsque cela arrangeait Yuri. Sa mort l’année précédente imposait un changement de destination.

Il mastiqua le riz en buvant de l’eau à la bouteille. Le train roulait le long de la mer. Il n’y avait presque pas de nuages dans le ciel, et la mer au loin étincelait sous le soleil. Près du rivage, elle était couverte d’écume.

Trois jours plus tôt, sa mère, Yuri, lui avait dit qu’il serait mieux à la mer plutôt que dans une chambre d’hôtel à Osaka où ses parents devaient aller pour leur travail. Kyōhei n’avait pas du tout imaginé qu’il irait seul chez sa tante qui habitait si loin.

Il les trouva stupides. Comment pouvait-on se réjouir à ce point d’aller à la mer ? La mer, c’est la mer. Une piscine, c’est bien mieux. À la mer, il n’y a ni bassin à vagues, ni toboggans géants.

Il remarqua une banquette à deux places libre au bout du wagon. Celle qui lui faisait face devait être occupée, mais être assis sans avoir quelqu’un à côté de lui était mieux que rien.

De l’autre côté du couloir central, un homme âgé, à la tête blanche et à la carrure imposante, faisait face à une vieille dame au visage rond, qui devait être sa femme. Elle remplit de thé un gobelet en plastique et le tendit à son mari qui l’accepta sans un sourire, le but d’une traite et se mit à tousser, probablement afin de lui signifier qu’elle en avait versé trop. Ils étaient habillés normalement et ne devaient pas non plus être en vacances. Peut-être rentraient-ils chez eux.