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L'obstacle à une appréciation de la beauté mathématique n'est pourtant pas insurmontable. (...)
La beauté qu'adorent les mathématiciens se trouve aussi dans le quotidien, dans les jeux, la musique et la magie.
Afficher en entierÀ en juger par ses oeuvres, peu de choses fascinaient autant Shakespeare que la présence de l'absence : la lacune là où il devrait y avoir une abondance de volonté, de jugement ou de compréhension. (...)
Bien sûr, les contemporains de Shakespeare étaient familiers de l'idée du néant, mais non du rien comme nombre, comme chose qu'on peut compter et manipuler.
Afficher en entierLes êtres humains sont inséparables de leur intérêt égoïste, mais l'inégalité a besoin d'une société pour l'inventer.
Afficher en entierUne culture nombrée trouvera tous les moyens à sa disposition pour transmettre ces faits obstinés d'une génération à la suivante. (...) Elle choisira la formulation la plus succincte pour ses vérités essentielles : pas trop lourde pour la langue, pas trop longue pour l'oreille.
Exactement comme un proverbe.
Afficher en entierIl nous arrive de comparer le temps à de l'argent. Mais ce n'est pas de l'argent. Aucun remboursement n'est possible pour une journée mal dépensée; il n'existe pas de banque pour accueillir le temps économisé. Nous ne pouvons gérer notre temps comme notre argent, puisque nous ne savons jamais de combien de temps nous disposons encore. Comment prévoir alors que nul ne sait s'il sera encore en vie le lendemain, ou s'il vivra assez longtemps pour que ses yeux soient noircis par la cécité ?
Afficher en entierJ'avais atteint l'âge où le passé devient si grand et si profond qu'il exerce sur notre esprit une attraction de plus en plus intense.
Afficher en entierC’était le milieu de l’après-midi, mais les lumières électriques étaient déjà allumés. À des points équidistants, des halos fluorescents se dressaient dans le ciel de plus en plus sombre. Je comptai le temps qu’il me fallait pour aller d’un réverbère à l’autre, à pas réguliers. Huit secondes. Puis je revins en arrière, en comptant à reculons, et j’obtins le même résultat. Un peu plus loin, je vis la lumière s’allumer chez mes parents ; les rectangles jaunes brillaient faiblement entre les briques rouges. Je les regardai distraitement.
Afficher en entierJe songeais à ces huit secondes. Pour atteindre le réverbère suivant, je n’avais qu’à faire quelques pas. Avant d’y parvenir, je devrais d’abord arriver à mi-chemin. Il me faudrait quatre secondes. Mais cette observation impliquait que les quatre secondes restantes pouvaient être divisées, elles aussi, en deux moitiés égales. Un nouveau mi-chemin donc qui se situe six secondes après le moment du départ. Seules deux secondes me sépareraient alors du but. Pourtant, avant d’y arriver, un autre « mi-chemin » interviendrait, au bout d’une seconde. Je sentis alors mon cerveau bouillonner sous mon bonnet de laine. Car, après les sept premières secondes, la huitième et dernière se diviserait elle-même en deux moitiés. Sept secondes et demie après avoir démarré, la demi-seconde restante ne s’écoulerait pas avant que j’aie franchi un point situé la encore à mi-chemin. Après sept secondes trois quarts m’attendait encore un quart de seconde de trajet. Si je parcourais la moitié du chemin restant, il me resterait encore un huitième de seconde à parcourir. Un seizième de seconde m’éloignerait du réverbère, puis un trente-deuxième, puis an soixante-quatrième puis un cent-vingt-huitième de seconde, et ainsi de suite. Des fractions de fractions de fractions de seconde me sépareraient toujours de la fin.
Subitement, je ne pouvais plus compter sur ces huit secondes pour me mener à bon port. Pire, je ne pouvais plus être certain qu’elles me permettraient d’avancer d’un centimètre. Ces mêmes interminables fractions de seconde que j’avais observées vers la fin de mon trajet valaient aussi pour le commencement. Disons que mon premier pas prenait une seconde ; cette seconde se divisait évidemment en deux moitiés. Et avant de franchir cette demi-seconde, je devrais d’abord en passer le point situe à mi-chemin (le premier quart de seconde), et ainsi de suite.
Afficher en entierQuand l'inspiration leur manque, certains journalistes de télévision se livrent parfois à cet exercice sur un malheureux ministre de l’Éducation. Grimaçant sous son maquillage à l'intention des caméras, l'intervieweur caresse ses notes, s'éclaircit la gorge et demande : "Une dernière question, monsieur le ministre. Combien font huit fois sept ?"
Chaque fois, je pousse un profond soupir. Il est bien triste de voir les mathématiques réduites au souvenir (ou le plus souvent, à l'absence de souvenir) de règles apprises à l'école.
Afficher en entierComme les œuvres littéraires, les idées mathématiques nous aident à agrandir notre cercle d'empathie, elles nous libèrent de la tyrannie d'un point de vue unique, de l'esprit de clocher. Si on sait les regarder, les nombres font de nous des humains meilleurs.
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