Ajouter un extrait
Liste des extraits
« Vous avez 9 appels en absence, 3 messages vocaux, et douze nouveaux messages. »
Valentine considéra son iPhone, tout en poussant un soupir. Elle n’eut pas à vérifier qu’ils provenaient tous de sa mère, Alyssia. Elle se contenta d’ouvrir ses SMS, pour qu’un extrait apparaisse, suffisant à repaître sa curiosité :
20h05 : « Valentine, je te jure que si tu ne viens pas ce soir, je coupe ton abonnement téléphonique, je te punis de sortie, de télévision, je vends ton ordinateur portable, et je te mets au régime pomme de terre-carotte jusqu’à la fin de ton existence ! »
20h12 : « Valentine, il est vingt heures douze, tu devais être là pour vingt heures ! »
20h13 : « Valentine, je te préviens que… »
Valentine quitta le contact Maman pour pianoter rapidement à l’adresse de sa sœur Romy un SMS de toute urgence :
« J’imagine que t’es pas là si maman me harcèle ? »
La réponse ne se fit pas attendre :
« Dsl Val’, autre chose à faire. Bon courage »
« Connasse », songea Valentine en grimaçant. Quel soutien légendaire pouvait lui apporter sa sœur par moments !
La réelle question n’était cependant pas là. À céder toujours au bon vouloir de sa mère, celle-ci renforçait davantage ses exigences. La semaine dernière, l’absence de Valentine à un après-midi familial avait vu sa mère lui retirer son argent de poche. Sérieusement ? Si, si. Alors qu’elle avait dix-neuf ans. La blague !
Renfrognée, Valentine tapa rapidement sur le clavier virtuel à l’adresse de sa génitrice :
« Je suis en route. »
Vivement la fac, se disait-elle avec amertume. Ce serait un nouveau pas vers l’indépendance.
Afficher en entierAlyssia était ce que l’on appelait une belle femme, alors qu’elle effleurait la cinquantaine.
Un mètre soixante-douze, des jambes incroyablement longues, galbées par trois kilomètres de natation hebdomadaire, bronzées aux UV été comme hiver, une silhouette entretenue grâce à des séances sportives assurées par son coach personnel, ses boucles caramel signées L’Oréal, ses yeux émeraude aux longs cils noirs, ses joues appuyées d’un blush délicieusement rosé : elle aurait pu être mannequin, et ce, sans aucune crainte. Elle le savait.
Lorsqu’elle décroisa ses jambes afin de les croiser dans l’autre sens, le regard des trois hommes face à elle – bien que deux soient accompagnés de créatures non moins déplorables qu’elle – accompagna soigneusement le mouvement.
Ses Guess étaient perchées sur son crâne, retenant ses cheveux en arrière, alors qu’elle baissait son visage vers un magazine. Et, plongée dans sa lecture de Closer, elle en oubliait presque les trois paons devant elle.
« Oh ! mon Dieu, Fred l’a trompée…, songeait-elle, effarée, son ongle limé parcourant le texte, afin de mieux impacter l’ampleur de la nouvelle. C’est effroyable ce que les hommes peuvent être horribles, quand même… Après Joshua qui avait fait le coup à Sissy, le voilà qui nous fait la même avec Françoise… Quel dommage, j’aimais bien sa voix à celle-là… »
« Madame Beauvoisin ? »
Alyssia releva dédaigneusement son menton en direction de la secrétaire qui venait de faire irruption dans la salle d’attente, lançant son nom.
Alyssia hocha la tête, puis, se renversa en avant, son chemisier en dentelle dévoilant son subtil décolleté en direction de ses trois admirateurs. Elle déposa le magazine sur la table basse autour de laquelle se tenaient une dizaine de fauteuils inconfortables.
La lumière perçait par la droite, au travers de trois grands carreaux, qui donnaient sur une rue montpelliéraine.
Dans un lent mouvement travaillé, Alyssia se redressa, rejetant la cascade soyeuse de sa chevelure dans son dos.
Face à elle, les deux épouses lui adressèrent un regard meurtrier. L’appellation « madame » n’avait pas suffi à amoindrir le poison que renvoyaient clairement leurs yeux.
« Bonne journée à vous », glissa légèrement Alyssia en les toisant, avant de talonner la secrétaire.
Cela fut-il intentionnel, lorsque ses hanches roulèrent plus que de mesure, alors qu’elle avançait vers la porte ? Les trois hommes crurent que cela était naturel.
Les deux femmes furent moins dupes.
Et la porte se referma dans un bruit sec.
Afficher en entier