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- Qu'est-ce que la vérité ?
J'avais dit cela comme on hausse les épaules, pour me débarrasser d'un visiteur importun. Qu'est-ce que la vérité ? Il y a la tienne, et celle des autres. En bon Romain formé au scepticisme grec, je relativisais. Toute vérité n'est que la vérité de celui qui la dit. Il y a autant de vérités que d'individus. Seule la force impose une vérité avec ses armes ; par le glaive, par le combat, par le meurtre, par la torture, par le chantage, par la peur, par le calcul des intérêts, elle oblige les esprits à s'entendre provisoirement sur une doctrine. La vérité au singulier, c'est une victoire, c'est la défaite des autres, au mieux un armistice. Mais la vérité n'est jamais une ; c'est pour cela qu'elle n'existe pas.
Afficher en entierAu bonheur, je voulais préférer l'amour. Et, surtout pas l'amour que j'éprouvais pour Rébecca, l'amour exclusif, partagé, tissé d'intérêts mutuels. Je ne voulais plus l'amour en particulier, je voulais l'amour en général. L'amour, je devais en garder pour le vieillard et l'enfant affamés. L'amour, je devais en dispenser à ceux qui n'étaient pas assez beaux, ni assez drôles, ni assez intéressants pour l'attirer naturellement, de l'amour pour les gens non aimables.
Afficher en entier- [...] Il propose une morale dangereuse, qui pourrait bouleverser tout l'équilibre de notre monde si elle avait le moindre écho : il [Jésus] prétend que tous les hommes sont égaux. Tu entends, Pilate ? Te rends-tu compte ? Aucun homme ne vaut mieux qu'un autre ! Cela veut dire qu'il attaque l'esclavage !
Afficher en entierLa terre a été laissée aux hommes : qu’en ont-ils fait ? Rendons-la à Dieu. Abolissons les nations, les races, les haines, les abus, les exploitations, les honneurs, les privilèges. Abattons les échelles qui mettent un homme plus haut qu’un autre. Supprimons l’argent qui fabrique les riches et les pauvres, les dominants et les dominés ; l’argent qui crée l’angoisse, l’avarice, l’insécurité, la guerre, la cruauté ; l’argent qui dresse ses murs entre les hommes.
Afficher en entierÊtre ici ou d'ailleurs, quelle importance ? Est-ce seulement possible ? Épouser un pays, ses particularités, c'est épouser ce qu'il y a de petit. S'en tenir à sa terre, c'est ramper. Je veux me redresser. Ce qui m'intéresse dans les hommes, désormais, ce n'est pas ce qu'ils ont de romain, de grec ou d'égyptien, c'est ce qu'ils pourraient avoir de beau, de généreux, de juste, ce qu'ils peuvent inventer qui rendrait le monde meilleur et habitable.
Afficher en entierLes fanatiques écrasent leurs doutes en sur-affirmant leur foi.
Afficher en entierUne pensée me frappa : et si j'avais été tenté par le Diable ? Et si, pendant ces trente-neuf jours, j'avais cédé aux illusions de Satan ? Et si cette force qui me redressait n'était que l'action du Malin ?
Je devais passer une quarantième nuit au désert.
Ce fut la nuit de toutes les inversions. Ce qui me semblait clair me devenait obscur. Là où j'avais vu du bien, j'apercevais du mal. Lorsque j'avais cru repérer un devoir, je soupçonnais désormais la vanité, la présomption, l'arrogance fatale ! Comment pouvais-je croire être en relation avec Dieu ? N'était-ce pas une démence ? Comment pouvais-je avoir le sentiment de saisir ce qui est juste et ce qui ne l'est pas ? N'était-ce pas une illusion ? Comment pouvais-je m'attribuer le devoir de parler pour Dieu ? N'était-ce pas de la prétention ?
Je ne reçus jamais de réponses à ces questions. Simplement, au matin du quarantième jour, je fis le pari.
Je fis le pari de croire que mes chutes, lourdes méditations, me conduisaient à Dieu, non à Satan. Je fis le pari de croire que j'avais quelque chose de bien à faire. Je fis le pari de croire en moi.
Afficher en entierJe lui souris mais je ne saisis pas tout de suite ce que j'avais appris.
Je le sais maintenant : je venais de quitter l'enfance. Démêlant les fils des songes et de la réalité, je découvrais qu'il y avait d'un côté le rêve, où je planais mieux qu'un rapace, et d'un autre côté le monde vrai, dur comme ces pierres sur lesquelles j'avais failli m'écraser.
J'avais aussi entrevu que je pouvais mourir. Moi ! Yéchoua ! D'ordinaire, la mot ne me concernait pas. Oh, bien sûr, çà et là, je croisais des cadavres à la cuisine et dans les cours des fermes, mais quoi ? C'était des animaux ! De temps en temps, on m'annonçait qu'une tante, un oncle venaient de décéder, mais quoi ? Ils étaient des vieillards ! Ce que moi je n'étais et ne serais jamais. Ni bête, ni vieillard. Non, moi j'étais parti pour vivre toujours... Moi, je m'estimais impérissable, je ne trouvais la pourriture nulle part en moi... Je n'avais rien à voir avec la mort. Et pourtant, là, chat perché sur mon rocher, j'avais senti son souffle humide sur ma nuque. Dans les mois qui suivirent, j'ouvris des yeux que j'aurais préféré garder fermés. Non, je n'avais pas tous les pouvoirs. Non, je ne savais pas tout. Non, je ne m'avérais pas immortel. En un mot : je n'étais pas Dieu.
Afficher en entierTu te crois pur parce que tu te tiens aux formes creuses de la Loi. Il ne suffit pas de se laver les mains avant chaque repas et de respecter le Sabbat pour se garder du péché. Ce n'est qu'en te repentant dans ton coeur que tu peux obtenir la rémission de ton péché.
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Je constatais que même ses plus grands adirateurs ne semblaient pas comprendre un message essentiel de Yohanân : seule l'observance, non de la lettre de la Loi, mais de son esprit, rend le coeur pur.
Afficher en entier"J'ai le choix entre une carrière de fou et une carrière de mauvais charpentier. Je préfère faire un bon fou."
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