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Extrait de l'avant-propos - La grande chasse
Entre le crépuscule du Moyen Âge et l'aube des Temps modernes a surgi l'éclatante Renaissance ; elle nous est décrite comme les prémices du rayonnement de l'esprit. Cet essor intellectuel et artistique n'augurait-il pas l'avènement du siècle des Lumières ?
Cependant, la Renaissance recèle, comme toute chose, humaine ou pas, une part d'ombre : dans toute l'Europe chrétienne, de la très-catholique Espagne à la luthérienne Scandinavie, de l'Angleterre anglicane à la Sainte Russie orthodoxe, dans tous les pays et contrées de ce monde où les différentes Églises en une lutte sans merci prônaient leur propre exégèse des Saintes Écritures, mille et mille bûchers furent dressés, illuminant le ciel de leurs flambeaux humains.
Aux XVIe et XVIIe siècles, des dizaines de milliers d'hommes et de femmes ont été réduits en cendres. Pourquoi les a-t-on fait disparaître de cette manière ? Quels êtres étaient-ils pour encourir un tel châtiment ? Quels crimes avaient-ils commis ?
La lecture des sentences montre que la plupart des accusés ont été condamnés en raison d'attendus que l'on peut classer en deux catégories : l'une concerne les maléfices - c'est-à-dire les actions malfaisantes perpétrées par des moyens occultes -, l'autre les relations avec le Diable. La première reprend essentiellement l'emploi de poudre ou de breuvage mortifère visant aussi bien les humains que les animaux, l'utilisation de baguettes pour battre l'eau et provoquer de la sorte la tempête ou la grêle afin de détruire les récoltes pour affamer leurs propriétaires ; des « maléficieurs » n'hésitent pas à hanter les cimetières pour déterrer les enfants mort-nés et les faire bouillir; avec la graisse ainsi obtenue et d'horribles ingrédients, ils mijotent ensuite une mixture mortelle, gardant néanmoins les frêles menottes des bambins pour la fabrication de cierges. La seconde catégorie d'attendus a trait à la soumission de l'accusé à la volonté démoniaque, avec pour corollaire le renoncement à Dieu, l'abjuration du baptême, l'abandon de son corps au nouveau maître et la signature du pacte satanique ; à cette relation intime s'ajoute la participation collective au sabbat, l'antimesse des ouailles du grand Bouc au cours de laquelle ont lieu le baiser anal audit Bouc, le banquet où pain et sel sont proscrits et, pour conclure l'office, l'emmêlement général d'une fornication à tout va, sans distinction de sexe ni d'âge.
Assurément, il ne peut s'agir que de sorciers et de sorcières pour commettre de tels crimes. C'est donc au titre de la sorcellerie qu'ils seront jugés. Leurs forfaits, comme on vient de le voir, étant des plus odieux, une justice d'exception est de règle : nulle circonstance atténuante n'est recevable, nulle déposition à décharge n'est admise, nulle preuve matérielle n'est nécessaire, l'aveu seul suffit, quitte à l'obtenir sous la torture ; la mort par le feu est l'unique sentence, la calcination des os et la dispersion des cendres devant rendre impossible la résurrection des corps au moment du Jugement dernier.
http://philippepoisson-hotmail.com.over-blog.com/article-l-holocauste-des-sorcieres-d-alsace-un-effroyable-massacre-74375143.html
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