Extraits

Lentement, il s'approcha de la fenêtre, ouvrit les rideaux, et à la lueur de la bougie vit la silhouette tassée et le visage d'une jeune fille. Sa robe déboutonnée montrait le haut de sa chemise qui se soulevait et s'abaissait sur sa poitrine en sueur. Bernard fixait le visage immobile et l'odeur de cette chair montait vers lui, ni agréable ni désagréable, une odeur de femme qui avait toujours le don de l'exciter. Sa main se posa sur l'épaule de la jeune fille et l'attira à lui. Debout, elle le regardait en tremblant, et la vibration de son corps se transmettait au sien.

Très lentement, la fixant toujours, il la poussa le long de la galerie. En face de l'escalier se trouvait une table sur laquelle une lampe brûlait toute la nuit.

Lorsque Katie se rendit compte qu'on l'entraînait à l'opposé de la porte matelassée, elle se raidit soudain, mais la main qui tenait son épaule se crispa avec force et la fit entrer dans une grande chambre à coucher.

Pétrifiée de terreur, abrutie de sommeil, la jeune fille semblait paralysée, tandis que Bernard posait son chandelier sur une table, près du grand lit à colonnes.

Si le mariage de Katie avait pu la convaincre qu'il causait le salut de ceux qu'elle aimait, il aurait du moins donné un sens à la souffrance de la jeune femme. Mais dès le lendemain, après une nuit surprenante - surprenante, car cet homme qui était maintenant son mari ne l'avait pas touchée - Joe apparut à sa porte et, tout en la regardant comme une étrangère, lui apprit leur départ à tous pour Jarrow. Leur nouveau foyer ne serait qu'une masure de la Walter Street, le numéro 3 de la rangée. Leur père avait trouvé du travail aux chantiers Palmer.

En entendant ces mots, Katie faillit prendre son frère par la main pour courir vers Jarrow, mais elle savait que son mari la ramènerait de force. Joe ne fut pas invité à franchir le seuil de la porte car elle avait des ordres. Pas de visites. Dès la veille au soir, Bunting avait spécifié qu'il ne voulait pas de sa belle-famille chez lui, pas plus qu'il ne permettait à sa femme d'aller voir les siens. Lui-même ferait le marché comme il l'avait toujours fait et donnerait à Katie la pitance de la journée.