La belle et le poète

Leurs rires et leurs jacassements emplissaient la plaine. Ils couraient à travers les venelles bordées de murs de toub d’où débordaient les branches de grenadiers, d’abricotiers, de citronniers et de figuiers surplombées par les palmiers centenaires qui paraissaient gigantesques aux yeux des bambins. Le soleil frayait difficilement son chemin parmi ces arbres touffus, ce qui faisait qu’en été, il y régnait une fraîcheur permanente accentuée par l’écoulement continuel de l’eau dans les seguias gérées à la perfection par le distributeur d’eau « le waqqaf ». En été les baignades dans les seguias où coulait une eau fraîche et limpide faisaient leur bonheur. Les plus téméraires poussaient parfois jusqu’au marais de ras el youn là où l’eau était plus profonde et ou ils pouvaient nager à loisir. Vers quatre heures de l’après-midi, à la prière du açr, ils rentraient chez eux affamés, les baies et les fruits qu’ils avaient pu chaparder n’ayant pas suffi à apaiser leur fringale. Une fois repus, ils reprenaient le chemin de la mahad’ra où ils restaient jusqu’à la prière du maghreb à réciter et à apprendre les sourates du Coran.