Extrait

Elle peigne mes longues boucles brunes avec des gestes lents et délicats. Elle ne tire pas, ne force pas. Ensuite, elle les recouvre de pâte verte, mèche à mèche. Je ferme les yeux. C'est donc ça, une maman. Quelqu'un qui nous démêle les cheveux et nous fait oublier nos problèmes.

Plus tard, nous nous installons au soleil au milieu des fraisiers, où nous nous gorgeons de gros fruits rouges et juteux en essuyant les coulures de henné sur notre cou et nos oreilles. Niall a fabriqué un barbecue à l'aide de vieille briques et de morceaux de grillages. Il est en train de faire griller du tofu, des épis de maïs et des brochettes de légumes dans un nuage de fumée. Tess désherbe le potager, Zak feuillette un livre sur la lithothérapie et Mousse essaie de se dresser sur la roue arrière du BMX. A l'intérieur de la maison, Finn joue du piano. Les notes s'échappent par la fenêtre ouverte, comme sorties d'un rêve. Il nous faut une heure pour nous rincer les cheveux, et une autre pour les sécher au soleil. La tête de Storm est désormais recouverte d'un duvet écarlate, et mes boucles ont pris la teinte des feuilles d'automne, plus lustrée que jamais.

_Magnifique, me complimente-t-elle.

Elle fouille dans le sac à couture de Tess et en sort des fils à broder verts, rouges et or pour me faire une tresse brésilienne. Ses doigts vont et viennent dans mes cheveux, rapides et doux.

_C'est cette image que je garderai de toi, dit-elle.

Je comprends alors qu'il s'agit d'un adieu.