Extraits

Beaucoup de têtes se levèrent quand Léa fit son entrée dans le bar du Flandres. La longue robe blanche prêtée par Claire Mauriac lui allait comme un gant et faisait ressortir sa peau hâlée. Une écharpe de mousseline rouge cachait la blessure de son épaule. Elle s'assit sur un haut tabouret. Le barman s'empressa :

- Que désirez-vous, madame ? Un alexandra, un porto, un mojito ?

- Non, donnez-moi un cuba libre !

-Tout dépend de ceux qui prennent le pouvoir.

-En effet, si ce sont des gens de votre caste, ils renforceront leurs avantages au détriment des déshérités...mais pourquoi voulez-vous qu'(ils fassent une révolutions?

-Vous dites des bêtises...Valery a écrit: " une révolution fait en deux jours l'ouvrage de cent ans et perd en deux ans l'œuvre de cinq siècles."

-C'est ce que vous pensez?

-Non, répondit-il avec un rire sans joie. Derrière ce mot, il y a autant d'espoirs que de mensonges.

-Enfin, elle est très éprise de son mari.

-Je n'ai pas cette impression quand elle est dans mes bras…

-Léa est une femme sensuelle qui aime l'amour et ne sait pas rester longtemps chaste...

Léa n'en pouvait plus de ces conversations à propos de la guerre en Algérie et que reprenaient à chaque repas son mari et son beau-frère. Elle redoutait de voir François s'engager une nouvelle fois dans une bataille qu'elle jugeait perdue d'avance; cmme elle l'avait craint au moment de ce conflit d'Indochine d'où ils étaient revenus amers et meutrtis.

- Tu n'iras pas en Algérie! ... Jamais !

— Si tu as besoin d'exotisme, allons je ne sais où... dans des pays où les gens ne se massacrent pas, en Afrique noire, dans les îles Caraïbes. Ça fait si longtemps que j'ai envie d'aller à la Martinique, là où Maman est née, ou à Cuba. Elle adorait Cuba... Oh oui, allons à Cuba ! Tu te souviens, Françoise, comme elle nous parlait de son voyage de noces à La Havane, des bals, des courses dans de grosses voitures américaines sur le Malecón, des musiciens au coin des rues, des grosses négresses dansant la rumba... ?