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J’ai poussé un gros soupir de soulagement. La fille s’est frayé un chemin vers la porte. Tous les regards étaient braqués sur elle, même celui de Vlad le Vampire. Il était d’ailleurs en train de tripoter quelque chose. On aurait dit un de ces téléphones portables qui font appareil photo. Je me suis demandé à qui il avait bien pu envoyer ce cliché-là. Je me suis aussi demandé si la fille arriverait vivante chez elle.

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Il y avait là assez d’indices pour faire crépiter mon radar. Quelque chose clochait chez cette fille. Une femme du cru s’habillerait comme ça pour aller à la chasse ou travailler aux champs, pas pour venir Chez Merlotte. La plupart des nanas du coin se pomponnaient un minimum pour sortir. Donc, cette fille n’était pas là pour s’amuser, mais pour affaires

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Quand je lui ai apporté sa bière, Shirley Hennessey – dit Catfish –, le patron de mon frère à la voirie, m’a demandé où était Jason. — Je te laisse deviner. Je n’en sais pas plus que toi. Il m’a fait un clin d’œil. Quand on cherchait mon frère, la première idée qui venait spontanément à l’esprit incluait toujours une femme.

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Sweetie m’a gratifiée d’un petit sourire avant de retourner derrière ses fourneaux. Son timide commis – dont je n’avais toujours pas réussi à retenir le nom – m’a adressé un rapide signe de tête avant de recommencer à charger le lave-vaisselle

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En parlant de vampires, je me demandais si Bill Compton était chez lui. Bill le Vampire, mon premier amour... Il habitait de l’autre côté du cimetière, juste en face de chez moi. Nos maisons respectives se trouvaient à deux pas d’une petite route de campagne, en périphérie de Bon Temps, modeste bourgade du nord de la Louisiane. Bill voyageait pas mal, ces derniers temps.

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"Les taches sombres n'étaient autre que... du sang.

-Oh, Hadley ! ai-je lâché dans un souffle. Mais qu'est-ce que tu as fait?

L'odeur était aussi terrible que le choc. Je me suis laissée tomber sur une chaise devant la petite table de la cuisine. Des paillettes de sang séché s'étaient éparpillées par terre. J'en avais même sur les bras. Je ne pouvais pas lire dans les pensées d'une serviette, bon sang ! (...) J'avais plutôt besoin... d'une sorcière."

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- On a retrouvé la voiture de votre frère, a-t-il annoncé en se tournant vers Jay Marriot. Elle est garée dans un petit chemin, juste en face de l'allée qui conduit chez Sookie.

[...]

D'après Éric, le chemin en question - qui ne menait guère qu'à un malheureux affût pour la chasse au cerf - était précisément l'endroit qu'avait choisi Debbie Pelt pour planquer sa bagnole quand elle était venue me tirer dessus. Il ne me restait plus qu'à aller y mettre une pancarte: "Pour liquider Sookie Stackhouse, garez-vous ici."

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Je n'arrivais pas à le regarder en face. Je gardais donc les yeux rivés sur ses mains, ses grandes mains brunes avec leur léger duvet noir sur le dessus. Si j'avais le malheur de dévier d'un centimètre, je tombais sur ses cuisses musclées, voire sur... Tss, tss, tss ! Ses mains. On restait calé sur ses mains. C'était plus sur.

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CHAPITRE 1

J'ai su avant mon frère qu'il allait se transformer. Je conduisais en direction de Hotshot. Jason regardait le soleil se coucher en silence. Il portait de vieilles fringues informes et avait emporté quelques affaires dans un sac en plastique : une brosse à dents et des sous-vêtements de rechange. Emmitouflé dans son épaisse parka camouflage, il s'était rencogné dans son siège et regardait droit devant lui. Son visage trahissait une tension manifeste. Il essayait de contrôler sa peur. Sa peur et son excitation.

— Tu as ton portable ?

À peine avais-je ouvert la bouche que je me mordais la lèvre : je lui avais déjà posé la question. Mais au lieu de me reprendre, Jason s'est contenté de hocher la tête sans broncher : il n'était vraiment pas dans son état normal.

On était encore en plein après-midi, mais la luminosité baisse vite à la fin du mois de janvier. Pourtant, cette nuit-là, le ciel serait clair : c'était la première pleine lune de l'année.

Quand j'ai arrêté la voiture, Jason s'est tourné vers moi. Même dans la pénombre, j'ai vu que ses yeux avaient changé, non seulement de couleur — ils n'étaient plus bleus, comme les miens, et tiraient sur le jaune —, mais aussi de forme.

— Je me sens bizarre.

Il se tâtait la figure sans comprendre. Il n'avait pas encore fait le rapprochement.

Le modeste hameau de Hotshot, silencieux et immobile, se recroquevillait autour de son carrefour dans le jour finissant. Un vent mordant balayait les champs déserts. Les arbres frissonnaient sous les assauts des bourrasques glacées. Seul un homme avait osé braver le froid. Il se tenait devant une des maisonnettes que sa façade fraîchement repeinte distinguait du lot. Il avait les yeux fermés, la tête levée vers le ciel.

Calvin Norris a attendu que Jason descende de voiture pour s'approcher de ma portière. J'ai baissé la vitre.

Ses prunelles étranges — entre le vert et l'or — avaient quelque chose de fascinant, mais le reste de sa personne était d'une affligeante banalité. Solide, trapu et grisonnant, il ressemblait à des centaines de types que je voyais tous les jours Chez Merlotte.

— Je vais bien m'occuper de lui.

Derrière Calvin se dressait la silhouette de mon frère. Il me tournait le dos. L'air autour de lui semblait vibrer.

Calvin Norris n'y était pour rien. Ce n'était pas lui qui avait mordu mon frère et l'avait changé à jamais. Calvin était certes un changeling, mais il était né comme ça. C'était sa nature profonde.

J'ai dû me forcer pour le remercier.

— Je le ramènerai chez lui demain matin, a-t-il ajouté.

— Chez moi, s'il vous plaît. Il a laissé son pick-up à la maison.

— D'accord. Bonne nuit.

Une nouvelle fois, il a levé la tête vers le ciel, et j'ai senti que, derrière les portes et les fenêtres closes, toute la communauté de Hotshot n'attendait qu'une chose : que je parte.

C'est ce que j'ai fait.

Jason a frappé à ma porte à 7 heures le lendemain matin. Il tenait toujours son sac en plastique à la main. Il n'avait pas utilisé ses affaires de rechange. Il avait des égratignures sur le visage et les mains écorchées. Quand je lui ai demandé comment il allait, il m'a juste regardée sans rien dire, puis il est passé devant moi et a traversé le salon pour aller dans le couloir. Le verrou du cabinet de toilette a claqué. J'ai entendu l'eau couler et j'ai poussé un gros soupir. Bien que je sois rentrée du boulot à 2 heures du matin complètement épuisée, je n'avais pas beaucoup dormi.

Quand Jason est ressorti, je lui avais déjà préparé des œufs au bacon. Il s'est assis à la table de la cuisine avec l'air satisfait d'un homme content de retrouver les gestes familiers d'un rituel agréable. Mais, après avoir jeté un coup d'œil à son assiette, il s'est levé d'un bond et s'est rué aux toilettes, dont il a refermé la porte derrière lui d'un coup de pied. Je l'ai entendu vomir encore et encore.

Je suis restée plantée là, accablée par mon impuissance. Je savais qu'il n'aurait pas voulu de moi à ses côtés. Au bout d'un moment, j'ai vidé son assiette et la mienne dans la poubelle, honteuse de jeter de la nourriture mais absolument incapable d'avaler quoi que ce soit.

Quand Jason est revenu, il m'a juste lancé :

— Café.

Il était carrément vert et il marchait comme s'il avait des courbatures.

— Ça va ?

Je n'étais même pas sûre qu'il soit en état de me comprendre. Je lui ai servi une tasse de café.

Il a mis longtemps avant de me répondre, comme s'il avait besoin de réfléchir à la question.

— Oui... C'est le truc le plus dingue qui me soit jamais arrivé !

Sur le coup ; j'ai cru qu'il parlait de son petit séjour dans mes toilettes. Mais ça n'avait rien de nouveau pour Jason. Il avait pas mal picolé dans sa prime jeunesse, jusqu'à ce qu'il finisse par comprendre qu'il n'y avait vraiment rien de glorieux, ni de franchement sexy, à rester penché au-dessus d'une cuvette de W.-C., à rendre tripes et boyaux.

— De te transformer ?

Il a hoché la tête, sa tasse serrée entre les mains. Nos regards se sont croisés. Ses yeux avaient repris leur aspect habituel.

— C'était dément. Évidemment, vu que j'ai été mordu, que je suis pas né comme ça, je me change pas en vraie panthère comme eux.

Il y avait une note de jalousie dans sa voix. À croire qu'il les enviait !

— Mais quand même, ce que je deviens... C'est dingue ! Tu sens la magie agir à l'intérieur, ta vue se modifier, tes os se déplacer dans ton corps, se courber, s'adapter. Et puis, tout à coup, tu te retrouves au ras du sol et tu bouges différemment, tu marches différemment. Quant à courir, bon sang ! Ça, pour courir, tu cours ! Et, pour ce qui est de chasser... Ah ! Tu chasses comme...

Il s'est interrompu. Ça tombait bien : je préférais ne pas savoir la suite, justement.

— Ce n'est pas si terrible que ça, alors ?

Je serrais les mains comme une pénitente en prière : Jason était toute ma famille — hormis une cousine qui était tombée dans la drogue depuis des années.

— Pas si terrible, non, a répondu Jason en s'efforçant de sourire. C'est même génial, lorsque tu es vraiment un animal. Tout devient si simple ! C'est quand tu reprends forme humaine que ça se corse.

Bien. Mon frère n'était pas devenu suicidaire. Il n'était même pas déprimé. Je ne m'étais pas aperçue que je retenais mon souffle avant de recommencer à respirer. Jason allait réussir à vivre avec les nouvelles cartes qu'on lui avait données. Il allait tirer son épingle du jeu, comme toujours.

Ouf ! C'était comme si on venait de m'enlever un truc coincé entre les dents ou un caillou pointu de ma chaussure. Pendant des jours entiers, des semaines même, je m'étais inquiétée. Et maintenant, toute cette anxiété s'envolait d'un coup. Ça ne signifiait pas pour autant que tout irait comme sur des roulettes pour Jason — dans ma façon de voir les choses, du moins. S'il épousait une humaine standard, leurs enfants seraient normaux. Mais s'il épousait une fille de Hotshot, un changeling, j'aurais des neveux et nièces qui se transformeraient tous les vingt-huit jours. Enfin, après leur puberté, en tout cas, ce qui leur laisserait, à eux et à cette brave tante Sookie, le temps de se faire un peu à l'idée.

Par chance, Jason avait beaucoup de jours de congé à rattraper et il n'était pas attendu à la voirie, ce matin-là. En revanche, moi, je devais aller bosser. Bon, je prenais le service du soir, alors j'avais le temps. D'ailleurs, le rutilant pick-up de Jason n'avait pas encore démarré que je retournais me coucher, tout habillée. Moins de cinq minutes après, j'étais dans les bras de Morphée. Il suffit que la tension se relâche, et pouf ! Vous dormez comme un bébé.

Quand je me suis réveillée, il était 15 heures. Il fallait que je commence à me préparer pour aller prendre mon service Chez Merlotte. Un soleil radieux brillait dans le ciel et il faisait 10 °C, d'après mon thermomètre. Ce n'est pas inhabituel, pour un mois de janvier, en Louisiane du Nord. La température allait chuter après le coucher du soleil, et Jason changerait de forme. Enfin, il aurait un peu de fourrure pour se protéger du froid, ce serait déjà ça — pas un pelage entier, puisqu'il demeurait mi-homme mi-bête —, et il serait avec d'autres panthères. Elles chasseraient dans les bois. Mieux vaudrait ne pas se balader dans la forêt autour de Hotshot, ce soir-là...

Tout en mangeant, en prenant ma douche et en pliant mon linge, je n'ai pas cessé de m'interroger : si des changelings rencontraient un humain par une nuit de pleine lune, est-ce qu'ils le tuaient ? Quelle part d'humanité un changeling conservait-il sous sa forme animale ? Si deux panthères-garous s'accouplaient sous leur forme animale, est-ce qu'elles avaient une petite panthère ou un bébé humain ? Qu'est-ce qui se passait quand une panthère-garou voyait la pleine lune, alors qu'elle était enceinte ? Jason connaissait-il la, réponse à ces questions ? Calvin lui avait-il fait un petit topo sur le sujet ?

Je n'avais rien demandé à Jason, et j'avais bien fait. Tout était encore si nouveau pour lui. Et puis, j'aurais tout le temps plus tard.

Pour la première fois depuis le Nouvel An, je pouvais me projeter dans le futur. Le cercle blanc sur mon calendrier n'était plus le symbole de la fin de quelque chose, mais juste un signe qui indiquait un phénomène astronomique mensuel. On venait de m'ôter un tel poids sur la poitrine qu'en enfilant mon uniforme — pantalon noir, sweat-shirt blanc à encolure bateau et Reebok noires —, je me suis sentie presque étourdie par tant de légèreté. J'aurais embrassé tout le monde. Pour une fois, j'ai décidé de renoncer à ma queue de cheval habituelle. J'ai mis de petites boucles d'oreilles rouges et appliqué un brillant à lèvres assorti. Un peu d'ombre à paupières, de mascara, une touche de blush, et j'étais prête.

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-Sookie, Sookie, ta maison brûle!

-Mais non, ai-je maugrée, à moitié ensomeillée. Je n'ai rien laissé sur le feu.

-Il faut que tu sortes d'ici tout de suite, a insisté la voix.

Il me semblait vaguement entendre une sorte d'alarme stridente qui me rappelait les exercices d'incendie à l'école

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