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Extrait

Extrait ajouté par HenriLacombe 2018-06-29T07:33:15+02:00

Chapitre I

« A la tienne, Antoine ! » Seul devant mon verre de vin, je fête mes soixante-quinze balais. Quand je pense que voilà maintenant cinquante-trois ans, jour pour jour, que je suis entré dans les Ordres. Plus d’un demi-siècle au service de Notre-Seigneur.

Je me suis levé ce matin avec l’idée dans la tête que cette journée ne serait pas comme d’habitude. Je ne sais pas pourquoi, mais rien ne se passe comme je veux. Sophie, mon aide ménagère m’a laissé un message sur mon répondeur pour m’informer qu’elle ne pourrait pas venir « prise d’une mauvaise grippe » me disait-elle.

Ensuite, le chauffe-eau qui me lâche alors que je suis sous ma douche, plein de mousse. Je ne suis pas du genre à me plaindre, mais là vous avouerez, je me suis laissé aller à lancer des injures. Il faudra que j’en demande pardon à Notre-Seigneur cet après-midi.

C’est peut-être pour me punir d’avoir blasphémé plusieurs fois, qu’en enfilant mon pantalon, j’ai perdu l’équilibre et que je me suis retrouvé par terre, la cheville endolorie. A mon âge, je n’ai plus la résistance d’un gamin !

C’est donc clopin-clopant que j’ai pris la direction de la cuisine pour préparer mon café. Il m’en restait d’hier, alors j’ai voulu le faire chauffer et comme je souffrais trop, je suis allé me mettre de la pommade. C’est un bon produit, il agit vite, la douleur cesse en quelques minutes. Que c’est agréable de ne plus avoir mal !

Dans la cuisine, un bruit étrange m’interpelle, je me lève avec la plus grande prudence pour ne pas me blesser à nouveau, quand je me rends compte que mon café bout tant et plus ! « Café bouillu… café foutu ! » Une nouvelle fois, je me laisse aller à jurer. Je m’assois sur la chaise, devant ma tasse vide, je prends ma tête dans mes mains et je me demande pourquoi aujourd’hui tout va de travers, le jour de mon anniversaire !

La tasse devient donc un verre et le café du vin. Devant tant d’adversité, je ne peux cependant pas m’empêcher de sourire « Moi, petit curé de campagne, je transforme le café en vin, quelle ironie ! » Il est neuf heures du matin et je m’enfile de l’alcool, je peux me le permettre, ce jour est quand même spécial.

Je vide en une fois le jus de la treille, sans me poser de question. Il est âpre, acide et mauvais. « Bon anniversaire, Antoine ! » Je me le répète comme si tout se passait bien. « Allez, un autre verre, il faut bien achever cette bouteille, et on n’en parlera plus ! »

Je n’ai pas l’habitude de boire. Non, juste un petit alcool le dimanche quand j’ai fini de dire la messe. Rien de bien méchant. Mais aujourd’hui, je sens que je vais en avoir besoin. J’embrasse du regard la cuisine qui est mon univers depuis tant d’années. Ces meubles vieillots, cette table bancale en bois qui a fait son temps… et ces chaises, qu’elles sont moches, ces chaises, sales et usées ! Comme moi. Non que je sois sale, je sors de ma douche. Tiens, il faut que je pense à appeler le père Lucien, le plombier, il va falloir qu’il fasse un nouveau miracle avec ma chaudière. Je ne peux pas me permettre de la changer. La semaine dernière, mon Ami 6 m’a lâché elle aussi, elle avait plus de trente ans. Je l’avais trouvée chez le vieil Emile.

Je m’en souviens comme si c’était hier. « Toine, me dit-il, tu me donnes l’extrême onction et moi je te donne Berthe. » Sacré Emile, il était allongé dans son lit, prêt à succomber sous le poids des ans, qu’il pensait encore à moi. Il m’a pris par le col et il a continué « Tu m’entends Toine, je te donne Berthe, tu sais, ma vieille caisse. Elle te sera utile à la place de ton vélo pourri. » Le simple fait de parler de ma bécane rouillée et gémissante, il s’était mis à rire. Son rire se transforma vite en toux. Deux minutes plus tard, il était mort. Emile, mon ami. Tiens, je bois à ta santé ! Seulement la bouteille est vide. Alors je me contenterai de penser à toi, à ta gentillesse.

Oui, la vieille guimbarde, qu’elle était solide ! Elle m’a bien servi en effet, Emile. La semaine dernière, elle n’a pas voulu démarrer. Berthe est morte, elle aussi. C’est normal à son âge !

C’est pourquoi j’ai rassemblé mes maigres économies pour acheter une 4L, c’est bien une 4L. Elle devra tenir au moins vingt ans…

Qu’est-ce que je raconte, moi, dans vingt ans je fêterai mes quatre-vingt-quinze ans. Est-ce que je conduirai encore à cet âge-là ?

Sur la table, mon téléphone à clapet vibre sous l’effet de la sonnerie. Le son me tire de mes rêveries.

« Inconnu » C’est tout ce qui est inscrit en guise d’appelant. Je soulève la partie mobile pour écouter ce que cet inconnu veut me dire.

Une voix d’homme enroué, non de femme qui a trop fumé, en fait je n’en sais rien, m’interpelle « Père Antoine, c’est vous ? » Qui voulez-vous que ça soit, c’est mon téléphone, me dis-je. « Oui, bien sûr » je réponds aimablement.

A l’autre bout du fil, si j’ose dire, l’individu se tait, il semble hésiter. Alors je l’incite à parler « Je peux vous être utile à quelque chose ? »

Mon interlocuteur se racle la gorge. « Oui, je dois me confesser ». Comme sa demande fait partie de mes fonctions, je lui confirme que je peux faire ça pour lui, ou pour elle. Je tente de lui faire dire son prénom, mais l’inconnu reste une voix asexuée, une voix sans visage.

Le vin commence à faire son effet et ma cheville me rappelle à l’ordre. Mon interlocuteur se décide enfin à me parler « Au confessionnal, dans une heure précisément. Je vous y attendrai. Je compte sur vous mon père, c’est très important ».

Plus rien, le vide… il ou elle a raccroché. Mais bon sang, quelle journée !

Je referme le clapet, je regarde les restes de ma beuverie et je pars dans ma chambre mettre un bandage sur ma cheville qui ne va pas très bien.

En jetant un œil à la pendule au-dessus de mon lit, je constate qu’il est neuf heures vingt. J’ai le temps. La bande serrée, j’enfile ma soutane et me voilà fin prêt à écouter les aveux de cette personne qui ne s’est même pas présentée.

Que les gens sont bizarres parfois.

Avant de sortir, je prends la canne qui m’a servie à plusieurs reprises. Je traverse la rue déserte pour me rendre à mon église. Autour de moi il n’y pas âme qui vive. Le vieux Félix, assis par terre, me regarde de ses yeux mouillés. Il est noir et blanc, d’où son nom. J’oubliais, mais vous l’aviez compris, Félix est un chat. Dans la Maison de Dieu, nous sommes seuls, le Seigneur et moi. Je le salue en passant devant la croix, je n’ose pas lui parler de mes tourments de ce matin, ça ne l’intéresserait pas. D’ailleurs, je sais qu’il est au courant de tout.

A ma gauche, le confessionnal en bois m’attend. J’ouvre la porte centrale qui couine un peu, je m’assois le plus confortablement. Il n’est pas l’heure, je suis toujours en avance. Je souris, mon interlocuteur de tout à l’heure sera surpris de me voir déjà là !

De l’autre côté de la grille, à ma gauche, j’entends un bruissement. Je soulève le rideau qui nous sépare, l’ombre du visiteur et moi. Je perds contenance, il ou elle est arrivé(e).

« Mon père, j’ai un aveu à vous faire, couvert par le secret de la confession.

- Bien sûr mon enfant. » Je n’ose pas dire mon fils ou ma fille, dans le doute.

« Pardonnez-moi, mais je dois vous tuer mon père. »

Alors là, je suis stupéfait. Nous n’avons pas prononcé beaucoup de paroles. J’ai du mal à saisir ce qui vient de m’être révélé. Il me faut quelques instants pour comprendre. A côté de moi, j’ai un malade qui m’a dit qu’il va me donner la mort !

J’ai la tête qui tourne, je soulève un peu plus le rideau pour tenter de voir le visage de l’inconnu qui me menace quand je m’aperçois qu’il n’y a plus personne. Mes oreilles bourdonnent. Je pousse doucement la porte et glisse un œil. Déjà loin, une silhouette dans une cape, la tête encapuchonnée file vers la sortie.

Est-ce la stupeur, l’angoisse ou la bêtise, je ne sais pas, mais je n’ai pas l’idée de la suivre. Cet inconnu qui s’enfuit vient d’annoncer ma mort prochaine !

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