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Il n’y avait pas si longtemps, quelques jours selon ses calculs – bien qu’il fut difficile d’en tenir le compte entre les murs de sa cellule – Pronjed jal Drenthe était encore Premier ministre d’Aneira, le Qirsi le plus puissant de tout le royaume. Depuis l’échec de la prise du château de Dantrielle par Numar de Renbrere et la chute de la Suprématie Solkarienne que Pronjed avait longtemps servie, il n’était plus qu’un prisonnier aux robes ministérielles en loques et souillées, aux cheveux hirsutes et à la peau irritée par la sueur et les vermines. Pour un autre, ces conditions de détention eussent été une déchéance, et cette pièce sombre et isolée, une humiliation. Mais Pronjed pouvait se prévaloir d’être un sorcier puissant, un homme doté de ressources inimaginables pour les imbéciles eandi qui le surveillaient nuit et jour. Son don de Façonnage lui permettait de briser les fers de sa porte ; celui de l’illusion d’influencer la volonté des gardes de Dantrielle pour les contraindre à lui obéir sans qu’ils s’en aperçoivent ; et celui des brumes et des vents d’échapper à ses poursuivants une fois hors de la tour carcérale. Les liens de soie qui lui entravaient les poignets et les chevilles avaient beau représenter un défi – le Façonnage n’était d’aucune utilité sur le tissu –, ils ne suffiraient pas à l’arrêter. Oui, il était un homme puissant, se répéta-t-il, et il envisageait son évasion depuis le début de sa capture. Il savait d’ailleurs exactement comment gagner sa liberté. Les Eandi pouvaient en penser ce qu’ils voulaient, conclut-il, moqueur et méprisant, les murs de leur prison étaient incapables de le retenir.
Afficher en entier« Vous allez nous tuer aussi, n’est-ce pas ? lança Renald le regard flamboyant.
— Je n’en ai pas la moindre intention… aujourd’hui, Lord Galdasten, répondit le Tisserand.
— Aujourd’hui peut-être pas, mais demain, ou après-demain.
— Le Glanage n’a jamais fait partie de mes dons préférés », rétorqua le sorcier avec un sourire torve.
Renald resta silencieux.
« Pour l’heure, vous allez être jeté en prison avec votre mère et vos frères. Ensuite, je ne sais pas.
— Mensonges ! s’exclama Renald sous le regard horrifié de sa mère. Vous voulez diriger les Terres du Devant, être servi par une cour de seigneurs qirsi, tout comme notre roi s’entoure de nobles eandi. Parce que notre existence vous rappellera toujours, à vous et à vos sujets, le temps où les grandes maisons régnaient sur les Sept Royaumes, vous ne laisserez jamais en vie des hommes comme moi. »
Afficher en entier« Nous avons livré cette bataille il y a neuf siècles, haut chancelier, poursuivit le vieil homme, et nous avons été vaincus. Les Eandi dirigent les Terres du Devant depuis ce jour parce que nous n’avons pas été assez forts pour les leur arracher. Nous avons échoué hier, et cette conspiration va échouer aujourd’hui. »
Afficher en entierPuisant dans son pouvoir, il l’unit à celui de Gorlan et renforça son vent comme seul un Tisserand pouvait le faire. Deux des fauteuils basculèrent. Son épée, toujours dans son fourreau, tomba elle aussi. Les volets claquèrent avec fracas. Et Gorlan, médusé, ouvrit les yeux.
« Par les démons et toutes les flammes ! s’exclama-t-il.
— Vous me croyez, maintenant ? »
Le vent mourut et un large sourire illumina le visage du ministre.
« Pardonnez-moi d’avoir douté, Tisserand.
— Vous n’avez pas à vous excuser.
— Les autres vous rejoindront, assura-t-il avec un sourire radieux. J’en suis sûr. Comment pourraient-ils refuser ?
— J’espère que vous avez raison. Car si je leur révèle l’étendue de mes pouvoirs et qu’ils continuent de résister, je serai obligé de les tuer.
— Si vous leur révélez que vous êtes Tisserand et qu’ils refusent toujours d’épouser votre cause, avança Nitara, ils ne méritent que la mort.
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