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Chapitre Un
Samedi 26 mai 2001
Aujourd'hui, il pleut à Philadelphie. Le match des Expos n'aura pas lieu. Va y avoir un programme double demain. Ce soir, une game à la télévision : les Red Sox jouent à Fenway contre les Blue Jays. Chris Michalak contre Frank Castillo. Je viens de sauter dans la douche.
À l'heure du souper, je serai à l'aéroport. Je m'en vais chercher Laurent qui revient de Grèce.
Laurent
Laurent et moi on s'est connus au cégep. Il était à Maisonneuve et j'étais au Vieux-Montréal. Sa blonde du temps était aussi au Vieux et j'en étais amoureux. C'est comme ça que je l'ai connu : il était le chum d'une fille que j'aimais. La fille s'est envolée et lui est resté dans mon clos. Le hasard a souvent de bonnes idées.
Il a quitté le Québec il y a dix-huit mois. Il est diplômé en éducation physique, mais quand il a terminé l'université, il ne se voyait pas sur le marché du travail tout de suite, pas sérieusement en tout cas. Il a donc occupé des postes sans conséquences pendant quelques mois : moniteur ici, suppléant là. Il a donné des cours privés à des étudiants en difficulté.
Puis il a choisi de voyager. Un peu en Europe, un peu en Afrique, en Amérique du Sud, deux semaines au Japon.
Un jour, il est tombé sur un encart du Club Med dans le journal. On offrait des emplois pour jeunes dégourdis ayant le goût du voyage, du soleil et de l'aventure. Il a postulé, a décroché l'emploi facilement et a quitté pour les îles grecques. Il est allé se faire une idée sur son avenir, entre deux vagues, deux baises et deux cuites. Laurent a longtemps été un baiseur incessant, impénitent et insatiable. Il s'est rassasié les hormones à tout jamais au Club Med. Il n'a plus faim. Pense-t-il.
Sa décision de rentrer au bercail a été facile à prendre, parce qu'au Club Med il a reçu une lettre de la CSDM, acheminée par sa mère. Il sera enseignant dans une école secondaire de Rosemont. Dès septembre. Il a jonglé un peu (comme tout bon G.O.), puis a décidé de revenir au pays.
Moi, ça fait bien mon affaire. À cause du tennis. Depuis des années, Laurent est mon meilleur partenaire, mon favori, et de loin. Il est aussi imbattable que moi. Deux imbattables qui s'affrontent, c'est magique. J'aime bien jouer avec ma blonde Chloé, mais ça n'a rien à voir. Avec Laurent, le tennis prend tout son sens. Et sur le terrain en bas de la côte, juste à côté du chêne sous lequel Chloé s'assoit pour lire, ce sera le ciel.
J'ai hâte de lui montrer le court en terre battue, éclairé à l'ancienne par des lampes qui ont l'air de cloches perchées sur les huit poteaux qui entourent le site, magnifique. Il y a un tapis de broche avec lequel on peigne le court entre chaque set. Il va adorer. En plus, jouer sur la terre battue, c'est tellement plus intéressant. La terre est une surface un peu plus difficile et demande plus de déplacements. La puissance est moins importante que la stratégie et l'adresse.
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