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Il m'a suggéré un peu plus tôt de placer sur le perron un saladier rempli de bonbons.
"Non, le premier gosse venu s'empresserait de tout emporter, le saladier et le reste", ai-je objecté.
Il a paru contrarié.
"Oh, c'est vrai que je ne suis pas psy pour gamins...
- Pas besoin d'être psy pour le savoir, il suffit juste d'avoir été un gamin."
Afficher en entierJ'avais relevé les yeux. Devant nous, la route avait disparu.
Nous plongions dans le vide. Dans les ténèbres.
Afficher en entierRetour au 212, où Rita et l'artisan sont en train de se dévêtir en toute hâte. Je pourrais appeler les Renseignements, téléphoner chez elle et la prévenir... Je ne le ferai pas. Observer les autres, c'est comme tourner un documentaire animalier : on ne se mêle pas de la vie des bêtes.
Afficher en entierJe jurerais entendre soudain un énorme craquemént, semblable à celui d'un arbre qu'on abat.
Puis...
... puis tout se précipite vers moi, enfle en prenant de la vitesse, le monde extérieur est pareil à un bloc de pierre projeté par une catapulte, qui me heurte au creux de l'estomac avec une telle force que je me plie en deux sous l'impact. Ma bouche s'ouvre en grand, comme une fenêtre. Le vent s'y engouffre. Je suis une maison vide, toute de poutres pourries et de courants d'air. Mon toit s'effondre dans un grondement...
... et c'est moi qui gronde, glisse et chute, une main désespérément la brique de la façade, griffant l'autre tendue vers le vide. Mes yeux se révulsent, j'aperçois le rouge vif des feuilles, et après plus rien. Coup de projecteur sur une femme en noir, dont les yeux ne voient plus que du blanc - le blanc du métal en fusion. Je voudrais crier, mes lèvres ne font que rencontrer la poussiere. Le goût du ciment envahit ma bouche. Le goût du sang aussi. Mes membres s'agitent sur le sol. Le sol ondoie sous mon corps. Mon corps ondoie dans l'air.
Quelque part dans les profondeurs de mon cerveau, je me rappelle que c'est déjà arrivé une fois, sur ces mêmes marches. Je me souviens du bourdonnement des voix, pareil au murmure des vagues, des mots qui affleuraient de temps à autre, clairs et distincts : «tombée », « Voisine », «quelqu'un », « folle ». Cette fois, il n'y a que le silence.
Afficher en entierMes genoux se bloquent, puis se dérobent. Je me sens chuter, mes yeux se révulsent et je m’imagine vue d’en haut, grelottante dans mon peignoir mouillé, les cheveux collés dans le dos, agitant inutilement un parapluie. Une silhouette solitaire sur un trottoir désert. Sur le point de sombrer, d’être engloutie par le béton. Mais… Elle ne peut pas avoir disparu, elle n’avait même pas encore atteint le bout de la rue ! Je ferme une nouvelle fois les yeux, me la représente de dos, ses cheveux effleurant sa nuque. Je me remémore ensuite Jane devant mon évier, sa longue natte formant une ligne entre ses omoplates. Elle se retourne pour me regarder… Cette image me donne un coup de fouet. Mes genoux se pressent l’un contre l’autre. Le bas de mon peignoir frotte le trottoir, mais je ne suis pas encore tombée.
Afficher en entierJe prononce les mots lentement, comme si je me frayais un chemin à travers des éclats de verre :
— Les flics ne voudront jamais croire qu’il est arrivé quelque chose à Jane tant qu’ils prendront cette femme pour elle.
Afficher en entier— Ils se méfient. N'est-ce pas la preuve qu'ils ont quelque chose à cacher ?
— C'est louche, oui. Ils baissent souvent les stores ?
— Jamais. J'avais l'impression de regarder des poissons dans un aquarium.
Elle hésite.
— Vous croyez que... que vous pourriez être... en danger ?
Cette pensée ne m'avait pas effleurée.
— Pourquoi ?
— Parce que si vous avez réellement vu quelque chose...
Je tressaille.
— C'est le cas.
— ... alors vous êtes un... un témoin.
Afficher en entierMes pantoufles dérapent sur le sol du salon quand je le traverse en hâte. Le tube d'Ativan est là, sur la table basse. Je le débouche, fais tomber trois comprimés dans ma paume et les glisse entre mes lèvres. J'ai l'impression d'être Alice avalant la potion « Buvez-moi ».
Afficher en entierIl n'a pas d'adresse mail, m'a t-il confié, pas de compte Facebook non plus. « On pourrait croire que certaines personnes n'existent pas », comme l'a dit Bina.
Afficher en entierJane Russell ! Comme une de mes actrices préférées. Bina, ma kiné, n'en avait jamais entendu parler. « Les hommes préfèrent les blondes, lui ai-je rappelé.
- Pas que je sache », a t-elle répliqué.
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