La femme paradis

https://lessortilegesdesmots.blogspot.com/2024/02/la-femme-paradis-de-pierre-chavagne.html

Je commence à découvrir cette maison d'édition petit à petit. J'ai un peu hésité pour ce titre bien que ma libraire en ait dit énormément de bien au club de lecture. Sûrement parce qu'il est sorti à un moment particulier de ma vie. À force de le voir, j'ai craqué. Je ne crois pas au coïncidence. Encore moins pour les livres.

On suit une femme coupée du monde. Elle vit dans une grotte au fond d'une forêt. Chaque jour, la même routine. Rien ne bouge. Pour survivre, elle a mis en place différent moyen de subsistance tout en respectant la nature. On ne sait rien de cette femme. C'est intriguant. On se pose la question : qu'est-ce qui à pousser cette femme à vivre comme ça depuis quelques années et à faire preuve d'autant de rigueur? Le roman est peut-être court mais cette question nous maintient mais pas seulement.

Un coup de feu va bouleverser son quotidien. Cette femme sauvage au quotidien réglé comme une horloge va devoir improviser. Sait-elle seulement encore le faire? Jusqu'au bout, on ne sait pas ce qu'elle va faire ni les décisions qu'elle prendra. De cette vie sauvage monotone dans la forêt, sans trop de danger, on passe à un roman sous pression et intense. C'est grâce à ça qu'on aura toutes les réponses à nos questions et même celles qu'on ne se posait pas.

Ce roman est déstabilisant. Pas à parce qu'un femme vit dans la nature mais pour l'ambiance. Je ne saurai pas expliquer le pourquoi du comment. L'écriture y est pour beaucoup. L'auteur a créé une héroïne atypique. Je ne me souviens pas d'avoir croisé ce type de personnage quelque part. Elle a choisi de se couper du monde. Elle est impressionnante.

En bref, ce roman est vraiment particulier. J'ai été fascinée par ce personnage unique en son genre. On ne peut pas dire si on a aimé ou non. C'est autre chose que je ne saurai définir. Je peux juste préciser que je visualisais chaque scène.

La femme paradis

C'est elle qu'on nomme comme ça,dans la région,elle a qui a fait le choix de vivre en autonomie en pleine nature dans les Causses.

Elle vit en fusion avec la nature en en acceptant ses dures règles : tuer pour de nourrir mais aussi risque d'être tuée par des animaux qui veulent se nourrir.

Mais le danger ne vient pas de là mais bien d'une détonation qui lui rappelle qu'elle est du genre humain et qu'elle ne peut s'en défaire bien qu'elle lui ait tourné le dos en apprenant à survivre, à tirer le maximum de la nature tout en ne la saccageant,ne prenant que ce dont elle a besoin.

C'est elle aussi qui se souvient de P.,qui est agitée de rêves étranges certaines nuits mais c'est aussi elle qui va tuer les hommes qui représentent une menace car,en pleine nature,c'est soi ou l'autre qu'il soit homme ou animal.

Une écriture vive,lapidaire,brute magnétique confère à ce roman une beauté poétique magnifiant la nature et dépeint la folie brutale et rigide de la femme qui tue.

La fin est une apothéose de souvenirs d'elle qui dit qu'on peut changer de vie mais pas de souvenirs. C'est à la fin que l'histoire trouve son commencement qui manque tant au narrateur extérieur comme témoin de cette femme paradis qu'à elle même,autrice de sa vie d'ermite et les deux récits s'enlacent à se perdre.

La description de la beauté rustique de la nature nous renvoie à l'artificialisation de notre vie.Au temps physique de l'horloge et du calendrier,la nature répond par ses saisons et ses alternances jour-nuit.Aux besoins superficiels nouveaux,jamais assouvis par une consommation sauvage et non raisonnée,elle oppose une existence où les cinq sens sont mobilisés pour se fondre dans la nature plus forte que l'homme dont les besoins sont alors vitaux et uniquement vitaux.

Fuire son passé est-ce si facile même si on s'isole avec pour alliée une nature qui vous accueille,vous ouvre à sa solitude et ses harmonies,ses ressources et ses pièges .?c'est ce qu'elle croit jusqu'à ce que le passé ne soit plus amnésie.

Ce livre crie la beauté,la simplicité et l'animalité. Chaque phrase est cette cascade de mots qui déferlent bruyamment ou au contraire en filets étroits,cette rivière qu'elle passe à gué au même endroit mais une fois la semaine,cette grotte dans laquelle elle fait maison,ce précipice au delà duquel il n'y a plus de vie,cette traque humaine qui l'a perturbe et maintien le lecteur en haleine à l'image d'un triller sanglant.

C'est simplement beau et brutal mais tellement vrai.

J'ai adoré.