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Le lendemain à midi, la photo avait déjà suscité une réaction, sous la forme d’un mail adressé à Lino.
Je me permets de vous écrire. Mon nom est Gamō, et j’habite Tokyo. J’ai lu le blog et j’ai senti l’affection que vous aviez pour votre grand-père. Je vous présente mes condoléances.
Si je vous écris aujourd’hui, c’est bien sûr à cause de la dernière photo que vous avez mise en ligne. J’aimerais vous parler de cette fleur.
Accepteriez-vous que nous nous rencontrions à ce sujet,
à un moment et dans un lieu à votre convenance ?
Je n’ai aucune mauvaise intention et vous transmets mon adresse mail, mon numéro de téléphone fixe et celui de mon portable, ainsi que mon adresse postale. J’espère que vous me contacterez.
Dans cette attente,
P.-S. : Pourriez-vous me dire si votre grand-père est décédé des suites d’une maladie ? Si c’est le cas, laquelle
était-ce ? Je me permets aussi de vous recommander d’effacer dès à présent la photo de la fleur jaune et de fermer rapidement le blog.
Afficher en entierAkiyama Lino se promenait dans le quartier de Shinjuku quand elle reçut l’appel. Craignant d’être bousculée dans la foule qui se pressait sur les trottoirs, elle s’arrêta contre un mur pour répondre. Elle eut quand même du mal à comprendre les mots de sa mère.
— Mais qu’est-ce que tu veux dire ?
— Eh bien, ce que je viens de te dire. Naoto est mort. Il s’est jeté par la fenêtre. Il s’est suicidé, répéta sa mère d’une voix un peu rauque.
Lino, immobile, serra plus fort son téléphone.
Ce soir-là, elle rentra chez ses parents à Yokohama. Elle n’avait pas emporté dans son petit appartement du quartier de Kōenji à Tokyo les vêtements de deuil qu’elle devrait mettre pour la veillée mortuaire et les obsèques. Elle craignait que la robe noire achetée trois ans plus tôt, au moment de la mort de sa grand-mère, ne lui aille plus, mais quand elle l’essaya, elle flottait un peu dedans. Elle était moins musclée qu’autrefois.
Torii Naoto était son cousin, le fils aîné de la petite sœur de son père.
Naoto s’était jeté par la fenêtre de leur appartement à Kawasaki avant l’aube, la nuit précédente. Ses parents et son jeune frère, Tomoki, dormaient et ne s’étaient rendu compte de rien. Le bruit avait réveillé un voisin du rez-de-chaussée qui avait découvert le corps et appelé la police. Un policier avait sonné chez les Torii et leur avait demandé si aucun membre de leur famille ne manquait. La mère de Naoto était allée dans sa chambre qu’elle avait trouvée vide, la fenêtre ouverte.
— Je n’ose même pas m’imaginer ce que Yoshie a ressenti quand elle a compris qu’il s’agissait de Naoto. Je frémis rien qu’à y penser, dit sa mère à Lino, en frissonnant, à propos de sa belle-sœur.
Les policiers qui avaient fouillé sa chambre n’avaient rien trouvé qui ressemble à une lettre d’adieu. Ils n’en étaient pas moins persuadés qu’il s’agissait d’un suicide. La probabilité d’un accident était quasi nulle.
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