Extraits

Il fallait qu'elle trouve le moyen de rallier son ravisseur à sa cause, si elle voulait avoir la moindre chance d'échapper à une mort certaine.

Helen n’avait plus aucune famille désormais et, dans des moments comme celui-ci, elle avait pour habitude de se distancer du monde, de battre en retraite et de se cacher. Mais pour une fois, elle n’en avait pas envie. La journée était magnifique et elle se sentait en paix avec l’univers. Plus encore, elle se sentait connectée à lui. Grâce à Charlie, sans doute, qui lui avait fait deux énormes surprises au cours de leur matinée ensemble. D’abord, elle lui avait demandé d’être la marraine de Jessica, une offre qui l’avait laissée sans voix pendant quelques secondes. Bien entendu, une fois remise du choc, Helen avait accepté ce rôle avec joie. Tant mieux, car en hommage à leur amitié toujours plus profonde, Charlie avait couronné cette journée mémorable en lui révélant le deuxième prénom de la petite Jessica.

Helen. 

Depuis son enlèvement, elle craignait de devenir l’esclave de son ravisseur. A présent, elle savait qu’elle serait sa prochaine victime.

Jaillissant de la mer, elle retira ses lunettes de plongée et nagea sur place tout en aspirant de grandes goulées d'air. Comme prévu, elle entendit les appels plaintifs de sa mère. Souriant intérieurement, elle se prépara à replonger. Les cris se firent plus fort et, alors qu'elle était résolue à les ignorer elle sentit tout à coup la main de sa mère sur son épaule, qui la tirait vers le rivage. Comment était-elle arrivée jusqu'ici ? Elle se trouvait à des kilomètres de...

- Summer.

Déjà son rêve commençait à se fragmenter.

- Summer.

Ce n'était pas sa mère qui la ramenait vers le rivage, c'était lui qui l'arrachait à sa douce rêverie.

Son geôlier était revenu.

L’ancienne équipe se délitait. Tony Bridges avait quitté la police pour de bon, le lieutenant Grounds allait prendre sa retraite sous peu et Charlie était en congé maternité, à quelques jours d’accoucher. Lloyd était passé capitaine et ils avaient recruté deux nouveaux lieutenants – la brigade criminelle n’avait plus la même saveur désormais. Pour être honnête, ces changements mettaient Helen mal à l’aise. Elle n’avait pas encore cerné les nouveaux venus et continuait de chercher son rythme de croisière avec cette équipe fraîchement constituée. Mais le seul moyen d’y parvenir, c’était d’aller au charbon ensemble.

Malmenée par le vent, le commandant de police Helen Grace roulait pleins gaz le long de la route côtière. Elle n’était jamais venue sur cette bande de terre retirée et ce qu’elle y découvrait lui plaisait. La nature sauvage, l’isolement ; le genre d’endroit qui lui correspondait. La route ouverte à l’infini devant elle, elle poussa encore sa moto, fendant le vent contraire.

Une grande silhouette s’encadrait dans l’embrasure de la porte, éclairée par-derrière, si bien que Ruby ne put discerner les traits de l’individu. Il n’était qu’une ombre, qui guettait et attendait.

Alors, aussi soudainement qu’elle s’était ouverte, la lourde porte se referma d’un coup sec. Ils se retrouvèrent tous les deux dans le noir.

Ruby se cacha le visage dans les mains et pria un dieu en qui elle ne croyait pas, l’implorant de la sauver. Mais malgré ses supplications, elle ne put refouler le bruit des pas qui avançaient vers elle.

Elle frissonna. De peur et de froid. Son regard se posa sur la gazinière. C’était un vieil appareil avec deux fours et quatre feux. Tout à coup, elle ne songeait plus qu’à les allumer. Les brûleurs diffuseraient un peu de chaleur et de lumière. Elle tourna le bouton et appuya sur l’allumage. Rien. Ruby essaya le suivant puis les autres. Sans succès.

Elle regarda derrière. Elle n’y connaissait rien du tout en cuisinière, mais le problème lui sauta aux yeux : elle n’était pas branchée. Il n’y avait aucun tuyau relié à une arrivée de gaz. L’équipement de la chambre était factice ! Ruby se laissa tomber au sol, éclata en sanglots tandis que le désarroi le disputait à l’effroi.

Calme-toi. Essaie de te détendre. Pense à des choses agréables. Pense à maman. À papa. À Cassie. Et à Conor. Pense à des champs et à des rivières. À la lumière du soleil. À quand tu étais petite. Aux aires de jeu. Aux étés dans le jardin. Quand tu courais à travers le jet de l’arroseur. Pense à des choses positives.

Sa vision commença à se brouiller et sa poitrine se serra davantage. Ruby était en pleine crise d’asthme, la terreur et l’angoisse rendant sa respiration courte et irrégulière. Son cœur battait à un rythme furieux et brutal, sur le point d’exploser. Que se passait-il ? Elle cauchemardait ou quoi ?