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Jamais le monde n'apparaît plus beau qu'à l'instant où l'on va être incarcéré. C'est le moment de l'adieu. Si seulement nous étions toujours conscients de cette beauté! Peut-être le temps nous en manquerait-il. Et la sérénité.
Afficher en entierJ'atteignis le Rhin, qui, à cet endroit, est près de sa source, et peu large encore. Je me dévêtis, fis un baluchon de mes vêtements, pour pouvoir les tenir au-dessus de ma tête. Ce fut une curieuse sensation, que celle de l'eau sur mon corps nu. L'eau était froide, noire, étrangère; on aurait dit un plongeon dans le fleuve Léthé, où l'on boit l'oubli. Ma nudité aussi devenait symbolique.
Afficher en entierLisbonne, de jour, a quelque chose de naïvement théâtral, qui ensorcelle et qui captive; la nuit, avec ses terrasses, elle ressemble à un décor de féerie. C'est une cité de rêve dans sa robe d'apparat, qui, semblable à une jolie femme, descend posément, parée de mille diamants, vers son amant nocturne.
Afficher en entierA ma droite, dans l'ombre, se dressait l'hôtel de ville. Un reflet de lune éclairait uniquement les visages de pierre des statues. Sur l'escalier, au-dessous d'eux, avait été lue en 1648 la proclamation annonçant la fin de la guerre de Trente Ans. En 1933, c'était l'avènement du "Reich millénaire" qui avait été proclamé. Vivrais-je assez longtemps pour entendre annoncer sa chute? L'espoir était minime.
Afficher en entierLa journée s'annonçait splendide. Le soleil n'était pas levé encore, mais déjà les senteurs marines se faisaient plus intenses. Des chats rôdaient, et quelques fenêtres exhalaient le parfum du café, mêlé à l'odeur de la nuit et du sommeil. Toutes les lumières étaient éteintes. Un chariot invisible passa avec fracas, à quelques rues de là. Les barques de pêcheurs fleurissaient comme des nénuphars jaunes et rouges sur les eaux mouvantes du Tage. Au loin, dans sa pâleur silencieuse, reposait le bateau, l'Arche du dernier espoir. Nous nous en rapprochions, en descendant pas à pas.
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