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1.
Kamel se leva et se dirigea vers une des fenêtres du luxueux bureau de son oncle, le roi du Surana. Ses pas ne faisaient aucun bruit sur la magnifique mosaïque vieille de plusieurs siècles.
Trente-six heures après la disparition d’Hannah Latimer, la nouvelle n’avait pas encore fait la une des journaux, et les diplomates ne s’étaient pas encore activés. Le souverain du Surana, lui, avait décidé d’agir. Il était au téléphone avec son homologue, le cheikh Malek Sa’idi, roi de Quagani, le pays voisin.
Avant d’ouvrir la croisée, Kamel jeta un coup d’œil vers le troisième homme présent dans le bureau. De taille moyenne, la soixantaine, Charles Latimer avait l’air un peu perdu avec ses cheveux poivre et sel en broussaille, sa barbe de trois jours, sa veste de tweed et ses chaussettes dépareillées. Mais ses lunettes à monture d’écaille dissimulaient des yeux perçants et sous sa chevelure mal coiffée bouillonnait un cerveau brillant qui, combiné à
une propension innée à prendre des risques, lui avait valu de se faire un nom dans les affaires. Avant même d’atteindre cinquante ans, il avait réussi le tour de force de gagner une immense fortune, de la perdre et de la rebâtir.
Aujourd’hui, une fois encore, il s’apprêtait à jouer gros :
soit il doublait sa fortune, soit il subissait une faillite retentissante.
Pourtant, Kamel savait qu’en ce moment précis l’esprit de Charles Latimer n’était nullement focalisé sur
8 sa situation financière. Une seule chose lui importait plus que tout au monde : sa fille unique Hannah. Elle avait besoin de lui. Dans cette pièce aux portes hermétiquement closes, il avait perdu son sempiternel sourire et son air conquérant. Il n’était plus qu’un père terrifié.
Afficher en entierLors de sa première confrontation avec ses kidnappeurs, ceux-ci lui avaient montré une photo sur laquelle elle brandissait une pancarte protestant contre la fermeture d’une école dans un village isolé. Ils n’allaient tout de même pas la mettre en prison pour une action aussi pacifique ! Elle avait éclaté de rire. Pas eux. Ils ne semblaient pas partager son sens de l’humour.
N’ayant aucune preuve sérieuse démontrant qu’elle était une espionne, ils l’avaient accusée de trafic de drogue, avait-elle compris. Dans le 4x4 qu’elle conduisait, ils avaient trouvé la boîte contenant les vaccins — qui deviendraient vite inutilisables s’ils n’étaient pas réfrigérés. Elle avait supplié ces hommes de la laisser repartir : des vies d’enfants étaient en jeu. Ils avaient ri. Non, décidément, eux et elle n’avaient pas le même humour…
Hannah serra les poings et se prépara à accueillir ses ravisseurs avec le plus de dignité possible.
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