Extraits

Tony contempla l'homme recroquevillé sur le lit, le dos à la pièce. De nouveau, Tyler avait refusé de se rendre au bureau de Tony ou dans une salle d'interrogatoire. Mais, cette fois, Tony n'avait pas l'intention d'en rester là. Il était bien décidé à lui arracher quelques-uns de ses secrets.

Il y a des livres qui changent la vie des gens, c'est un fait bien connu. Quelqu'un me demanderait lequel a bouleversé la mienne, il serait sacrément surpris de la réponse. Je me souviens encore du coup que ça m'a flanqué quand j'ai lu Les Trois Otages de John Buchan.

Quand il était gosse, il avait fréquemment des cauchemars. Voilà des années qu'il n'y pensait plus; ils se sont arrêtés le jour où il s'est mis à fumer des pétards. Il n'arrive plus à se souvenir de la dernière fois où il est allé se coucher sans au moins un joint bourdonnant dans ses veines, de même qu’il lui est impossible de se rappeler la dernière fois qu'un mauvais rêve l'a fait se réveiller en poussant des cris et en tremblant entre les draps.

Il n'arrive plus à se rappeler quand il a entendu la Voix pour la première fois. À présent, il a honte de ne pas l'avoir reconnue instantanément. En y repensant, il a du mal à croire que ça lui ait pris si longtemps. C'est qu'elle était si différente des voix de tous les jours. Elle ne se moquait pas de lui.

[ Tony ]

Nous avons deux personnalités, vous savez. Chacune dans un hémisphère du cerveau. L'une est la patronne, elle crie après l'autre.

Mais coupez les relations diplomatiques et il est impossible de dire ce que fera la plus faible s'il lui vient le goût du pouvoir.

Tu n'es pas fou juste parce que tu entends des voix. Il n'y a pas besoin d'être bien malin pour comprendre ça. Et même si ces trucs que tu as commis ont soulevé l'estomac des jurés, tu as assez de jugeote pour savoir que ça ne fait pas de toi un cinglé pour autant. Toutes sortes de gens ont des voix dans la tête, chacun sait ça. C'est comme à la télé. On y croit dur comme fer en regardant, mais on sait que ce n'est pas la réalité. Et un type en a forcément eu l'idée au départ sans finir là où ça t'a conduit. C'est évident, quoi.

"‒ Quand les gens font une régression, ils ne sont jamais valet d'écurie ni ouvrier métallurgiste. Ils sont toujours Cléopâtre, Henri VIII ou Emma Hamilton. C 'est la même chose avec ceux qui entendent des voix. Ils n'entendent pas le laitier ou la femme qui est assise derrière eux le matin dans le bus. Ils entendent la Vierge Marie, John Lennon ou Jack l'Éventreur".

(Troisième partie, page 141)

C'est une chose merveilleuse. Tu peux revivre la lente mise en scène de tes plus grands exploits. Tout est là, devant toi. Le choix d'une victime.La négociation. Le trajet jusqu'à une chambre que tu vas barioler de sang. Leur conviction stupide que cet abruti de Derek ne va pas leur faire de mal. Et l'expression de leurs yeux quand tu te tournes vers elles avec leur pire cauchemar à la main.