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"C'est bien les maître, ça, tiens. Jusqu'au bout il a fait en sorte que je ne puisse pas en placer une. Et c'est bien dommage, car en cet ultime instant, j'aurais bien aimé lui dire ce que je pensais de lui. Cela dit, concrètement, on ne fait qu'un, lui et moi. Alors pendant ce bref et ultime instant, il a bien dû le savoir."

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"Enfin, on m'invoque! Pas trop tôt... Finis de rigoler. Je suis toujours Bartiméus d'Uruk, d'Al-Arish et d'Alexandrie. Cette fois, c'est du sérieux."

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C'est peut-être de la vanité, mais j'en ai assez d'être une flaque de bouillie crue. Au prix d'un effort démesuré, je me modèle en pyramide de bave.

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Mlle Piper ouvrait de grands yeux plus qu'admiratifs devant son supérieur, mais elle n'était pas la seule parmi l'élément féminin de l'élite gouvernante. John Mandrake était alors un séduisant jeune homme dont il émanait comme une aura de pouvoir entêtante, suave, telle l'odeur du chèvrefeuille dans l'air du soir. Svelte, de taille moyenne, il savait réagir avec assurance et promptitude quand les circonstances l'exigeaient. Son visage pâle et fin réussissait l'exploit paradoxal de combiner l'extrême jeunesse (il n'avait que dix-sept ans) et l'expérience empreinte d'autorité. Ses yeux étaient noirs, son regard vif et sérieux, son front prématurément creusé de fines rides.

L'assurance dont il faisait preuve sur le plan intellectuel, et qui jadis avait dangereusement pris le pas sur ses autres compétences, était à présent renforcée par une certaine aisance en société. Il était courtois, voire charmant, en toutes circonstances, avec ses pairs aussi bien qu'avec ses inférieurs hiérarchiques, tout en demeurant légèrement distant, comme distrait par une perpétuelle mélancolie. À côté des appétits grossiers et des excentricités des autres ministres, ce détachement discret lui conférait une élégance qui ajoutait encore à sa légende.

Mandrake avait récemment adopté une coupe de cheveux très courte, voire militaire, histoire de rendre délibérément honneur aux hommes et aux femmes qui prenaient toujours part à la guerre. Cette initiative avait été couronnée de succès : les espions rapportaient que parmi les plébéiens, il était le plus apprécié de tous les magiciens. Sa coiffure avait fait école et ses costumes sombres inspiré une mode passagère. Il ne s'embarrassait plus de cravate, préférant les cols de chemise négligemment ouverts.

Mandrake était considéré par ses rivaux comme détenteur d'un talent considérable, voire dangereux, et après sa nomination au poste de ministre de l'Information, ils avaient réagi en conséquence. Mais toutes les tentatives d'assassinat sur sa personne avaient promptement échoué : les djinns qu'on lui envoyait ne revenaient jamais, les guets-apens se retournaient contre ceux qui les tendaient, les mauvais sorts se dissolvaient sur place avec un claquement sec. Pour finir, lassé, Mandrake se fit un devoir de défier publiquement ses ennemis masqués : qu'ils l'affrontent à visage découvert sur le terrain de la magie. Personne n'avait répondu à l'appel et il en était encore sorti grandi.

Il habitait une belle maison géorgienne entourée d'autres belles maisons géorgiennes autour d'un grand et agréable square londonien, à quelques centaines de mètres du siège du gouvernement, mais suffisamment loin de la Tamise pour être à l'abri de ses odeurs en été. Le square proprement dit consistait en un généreux bosquet de hêtres sillonné d'allées ombragées dont le centre était occupé par une pelouse. Calme et peu fréquenté, il était néanmoins sous constante surveillance. Des policiers en uniforme gris y patrouillaient toute la journée, et dès la tombée de la nuit des démons revêtant l'aspect de hiboux ou d'engoulevents y voletaient silencieusement d'arbre en arbre.

Ces mesures de sécurité étaient dues aux riverains. Autour du square résidaient en effet quelques-uns des plus grands magiciens de la capitale. Côté sud, Collins, ministre de l'Intérieur, occupait une demeure crème ornée de fausses colonnes et de caryatides aux formes généreuses. Au nord-ouest se déployait la grandiose résidence de Mortensen, récemment nommé ministre de la Guerre ; un scintillant dôme doré coiffait l'édifice.

La résidence de John Mandrake était moins ostentatoire. C'était une maison peinte en jaune bouton d'or, relativement étroite, qui comptait trois étages ; on accédait à la porte d'entrée par une courte volée de marches en marbre blanc. Ses hautes fenêtres étaient pourvues de volets également blancs. Les pièces étaient sobrement meublées, les papiers peints s'ornaient de motifs délicats et sur les parquets étaient disposés des tapis d'Orient. Le ministre ne tenait pas à afficher outre mesure son statut social ; il n'exposait que de rares trésors dans son salon de réception et n'employait que deux domestiques humains pour tenir son ménage. Il dormait au deuxième étage, dans une chambre toute simple aux murs chaulés qui jouxtait sa bibliothèque : ses appartements privés, où nul n'était admis.

À l'étage au-dessous, séparé des autres pièces par un couloir nu, tout résonnant d'échos et lambrissé de bois teint, se trouvait son atelier. C'était là qu'il accomplissait quotidiennement la plupart de ses travaux.

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Je n'ai pas très envie de bouger. Je tisse une Dissimulation autour du morceau de cheminée contre lequel je suis assis, ce qui me soustrait aux yeux des humains. Que je regarde passer d'un mauvais œil.

Ces quelques heures de repos ne m'ont pas tellement retapé. Pas étonnant, d'ailleurs. Il y a quand même deux années entières qu'on ne m'a pas permis de quitter cette maudite terre. Deux années sans pouvoir m'abstraire de la masse pullulante et inepte de cette chère humanité. Et pour récupérer après ça, il me faudrait autre chose qu'une petite sieste derrière une cheminée, je vous le dis. Il faut absolument que je rentre chez moi.

Sinon, je vais mourir.

Théoriquement, les esprits peuvent demeurer indéfiniment sur terre, et à un moment ou à un autre de notre existence, nous devons tous y subir des séjours prolongés, le plus souvent parce que nous avons la malchance de nous faire enfermer dans des vases funéraires à viscères, au temps de l'Egypte ancienne, ou dans des coffrets en bois de santal, entre autres confins arbitrairement choisis par un maître cruel. [1] Le châtiment est terrible, mais au moins, on est à l'abri et au calme. Comme on ne nous demande rien, on ne met plus en danger notre Essence affaiblie. La véritable menace, c'est l'ennui, qui peut conduire à la folie. [2]

Ma triste situation est à l'exact opposé de cette éventualité. Je ne saurais prétendre au luxe de rester caché dans une lampe ou une amulette bien confortables. Au contraire, je suis un djinn qu'on envoie jour après jour dans les rues, qu'il pleuve ou qu'il vente, à parer sans cesse les coups, à prendre des risques et à m'exposer au danger. Et chaque jour il me devient un peu plus difficile de survivre.

Car je ne suis plus l'insouciant Bartiméus d'antan. Mon Essence est souillée par la corruption terrestre, ma tête lourde à force de souffrance. Je suis devenu lent, faible, je n'ai pas l'esprit à ce que je fais. J'ai du mal à me métamorphoser. Dans les combats, mes assauts manquent de cohérence et de vigueur - mes Détonations ont le même potentiel explosif que la limonade, mes Convulsions tremblotent comme de la gelée secouée par la brise. Je suis à bout de forces. Il fut un temps où, pendant l'échauffourée d'hier soir, j'aurais renvoyé aussi sec sur la truie la pissotière qu'elle m'avait balancée, et j'y aurais même ajoute une cabine téléphonique et un Abribus pour faire bonne mesure ; mais à présent, je suis impuissant. Fragile comme un chaton. Je peux encore encaisser quelques petits bâtiments dans la figure, mais je suis déjà pratiquement à la merci d'un Ascobol, ce dandy de seconde zone. ce crétin sans le moindre passé glorieux. [3] Et si je me retrouve face à face avec un ennemi investi d'une infime parcelle de pouvoir, je peux sûrement dire adieu à ma chance.

Un djinn affaibli fait un mauvais esclave, et à double titre puisqu'il est à la fois inefficace et la risée de tous. Les magiciens ne se rendent pas service en les maintenant dans ce monde-ci. C'est pourquoi ils nous permettent de temps en temps de regagner l'Autre Lieu, histoire que nous nous requinquions l'Essence et que nous reprenions des forces. Aucun maître sain d'esprit ne laisserait un djinn dépérir jusqu'au stade où j'en suis.

Aucun maître sain d'esprit... C'est tout le problème, évidemment.

[1] : Quand ils sont fâchés au point d'en recourir au sort de Confinement Illimité, les magiciens ont coutume de comprimer les esprits à l'intérieur du premier objet qui leur tombe sous la main. C'est ainsi qu'un après-midi où je m'étais montré un peu trop insolent avec le mien pendant qu'il prenait le thé, je me suis retrouvé en un clin d'œil emprisonné dans un pot de confiture de fraise à demi-entamé ; j'y serais peut-être resté pour l'éternité si son apprenti ne l'avait pas ouvert par mégarde le soir même. Mon Essence en est restée incrustée de petites graines collantes pendant je ne sais combien de temps.

[2] : Le meilleur exemple en est l'afrit Honorius, devenu fou après être resté cent ans enfermé dans un squelette. Ca a donné un spectacle assez lamentable ; j'aime à croire que grâce à ma charmante personnalité, j'aurais quand même tenu le coup plus longtemps que ça.

[3] : Paradoxalement, tout en enrageant de nous faire invoquer dans ce monde-ci, nous autres esprits tirons une assez grande satisfaction rétrospective des exploits que nous y accomplissons. Sur le moment, bien sûr, nous faisons de notre mieux pour nous défiler, mais après coup, nous montrons une certaine fierté empreinte de lassitude au récit des événements marquants les plus astucieux, les plus téméraires ou les plus hasardeux de notre CV. Un philosophe avancerait sans doute que c'est parce que nous sommes essentiellement définis par notre vécu en ce monde, vu que dans l'Autre Lieu nous ne sommes pas aussi aisément individualisés. Voilà pourquoi les esprits dotés d'une longue et brillante carrière (comme moi) ont tendance à prendre de haut ceux dont le nom (tel Ascabol) n'a émergé que récemment, et qui n'ont donc pas eu le temps d'accumuler les glorieuses prouesses. Dans le cas d'Ascabol, je dois dire que mon aversion vient aussi de sa voix de fausser, qui détonne singulièrement chez un géant de deux mètres cinquante.

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Je me détourne d'elle pour lancer au magicien assis à son bureau :

« Hé, Mandrake ! » Pas de réponse. Je recommence un ton plus haut. La paperasse se met à voleter devant lui.

Il passe sa main dans ses cheveux courts et lève les yeux, l'air vaguement excédé. On dirait qu'on le force à se rappeler une blessure ancienne située dans un endroit particulièrement sensible. Il se tourne vers son assistante.

« Mademoiselle Piper, veuillez informer Bartiméus que ses récriminations ne m'intéressent pas le moins du monde. Rappelez-lui que la plupart des maîtres l'auraient déjà sévèrement puni pour son incompétence au combat, et qu'il a de la chance d'être encore en vie. Ce sera tout. » II reprit son stylo.

Piper fait mine de prendre la parole mais je la lui coupe aussitôt :

« Veuillez informer ce foutriquet hirsute qu'il doit impérativement me congédier à l'instant. Mes pouvoirs, quoique toujours impressionnants, sont quelque peu réduits ; je dois me ressourcer. S'il refuse d'accéder à cette requête pourtant raisonnable et juste, je serai contraint d'agir, en désespoir de cause, à l'encontre de mon intérêt et du sien.

- Qu'est-ce que ça veut dire, ça? dit-elle en fronçant les sourcils.

- Il le sait très bien, lui », je rétorque en haussant un sourcil avant de me tourner une fois de plus vers Mandrake. « N'est-ce pas ?

- Évidemment », répond-il en me jetant un coup d'œil. D'un geste délibéré et un peu pontifiant, il repose son stylet. « Mademoiselle Piper, veuillez faire remarquer à ce pernicieux démon que si certaine idée de trahison venait à lui traverser l'esprit, je le transférerais dans les marécages bostoniens, où on voit chaque jour périr une dizaine de djinns.

- Eh bien, dites-lui de ma part que sa menace ne me fait ni chaud ni froid car mes défenses sont à présent si affaiblies que je risque de périr rien qu'en faisant ses courses. Que ça arrive ici ou là-bas, quelle différence pour moi ? Qu'est-ce que j'ai à y perdre ?

- Dites-lui qu'il exagère manifestement sa faiblesse. Je ne reconnais pas le Bartiméus qui fut à tu et à toi avec Salomon.

- Et Faust ! Et Zarbustibal !

- Faust, Zarbustibal. que sais-je encore. Je ne vais quand même pas dresser la liste complète. Mademoiselle Piper, dites-lui toutefois que s'il s'acquitte correctement de la mission que je m'apprête à lui confier, je donnerai mon accord à son congédiement temporaire, aux fins de convalescence, et qu'il n'obtiendra rien d'autre de moi. »

Avec un reniflement méprisant, je réplique :

« Dites-lui que son offre n'est acceptable que si la mission est simple, rapide et éminemment sans danger.

- Dites-lui... Oh. pour l'amour du ciel, dites-lui en quoi consiste sa mission et qu'on en finisse ! » Dans un grand bruissement de paperasse accompagné d'un grincement de fauteuil en cuir, le magicien retourne à son travail. La tête de Piper s'immobilise enfin, après avoir pivoté d'un côté puis de l'autre pendant tout notre échange comme celle d'une chouette inquiète. Elle se frotte le cou d'un air réticent.

« Eh bien, allez-y », je lui intime.

Elle semble froissée par mon ton peu amène, mais je ne suis pas d'humeur à faire des ronds de jambe. Une fois de plus, Mandrake me traite avec mépris et dérision. Une fois de plus, il ne tient aucun compte de mes menaces et de mes supplications. Pour la millième fois, je jure de me venger. Si ça se trouve, j'ai intérêt à prendre le risque d'aller me battre en Amérique. J'ai déjà survécu à des situations semblables. Seulement, je n'étais pas dans cet état de faiblesse. Non, il faut d'abord que je récupère mes forces, ce qui implique d'accepter cette « ultime » mission. J'attends, redoutant le pire. Au fond de la pièce, j'entends le stylo de Mandrake qui court sur le papier, en répandant toujours plus de mensonges.

Piper est visiblement soulagée que la confrontation ait pris fin.

« Oh, mais je suis sûre que tu trouveras cette mission extrêmement simple, Bartiméus, dit-elle en souriant d'un air dégagé. Nous voulons que tu prennes en filature un magicien mineur du nom de Clive Jenkins et que tu nous rapportes le moindre de ses faits et gestes. Tu ne dois surtout pas te faire repérer. Il est impliqué dans on ne sait trop quel complot contre le gouvernement, et a déjà joué un rôle dans un assassinat. De plus, nous savons qu'il travaille pour le fugitif nommé Clem Hopkins. »

Voilà qui éveille très vaguement mon intérêt. Il y avait des années qu'on avait perdu sa trace, celui-là. Mais je fais en sorte que le visage de Kitty conserve une expression maussade, typiquement adolescente.

« Et ce Jenkins, il est puissant ?

- Je ne pense pas », répond-elle, un peu soucieuse.

Mon maître lève la tête et lâche une onomatopée dédaigneuse.

« Jenkins ? Alors là, pas du tout.

- Il travaille aux Affaires internes, reprend Piper. Au deuxième degré. Il possède un gnome du nom de Trukiet. Nous savons qu'il a tenté de corrompre d'autres magiciens de niveau inférieur. Mais on ne sait pas très bien pourquoi. En revanche, on sait qu'il est en contact avec Clem Hopkins.

- Et c'est là notre priorité, intervient Mandrake. Localiser Hopkins. Ne prends aucune initiative, ne l'attaque pas - nous savons que tu es faible comme un nouveau-né. Contente-toi de le retrouver. Et de découvrir ce qu'ils trament. Si tu y parviens, je... Ah, zut ! » Sur son bureau, le téléphone s'est mis à sonner. Il décroche. « Allô ? Ah, bonjour Makepeace. » II lève les yeux au ciel. « Oui, oui, j'aurais été ravi de venir, mais ce n'est pas possible, je vais bientôt me rendre au Conseil... En fait, je suis déjà en retard. De quoi s'agit-il ? Hmm-hmm. Très mystérieux. Bon, peut-être en fin de... Bon, d'accord, je vais essayer. À ce soir, alors. » II raccroche violemment. « Bon, il faut que j'y aille. Piper. Je finirai le compte rendu du siège de Boston pendant mon heure de déjeuner et je vous l'enverrai par gnome, d'accord ? On le fera imprimer à temps pour les fêtes nocturnes. » II se lève et fourre des papiers dans sa mallette. « As-tu besoin d'autres renseignements, Bartiméus ? Et pas la peine de te trouver des excuses ou de te plaindre encore, parce que je n'ai pas le temps. »

Ma version de Kitty serre les dents.

« Et pour les renforts ? Si j'arrive jusqu'à ce Hopkins, il ne sera sûrement pas gardé que par un gnome.

- Ce n'est qu'un savant, Bartiméus. Un érudit. Mais même s'il a érigé des défenses, pas question que tu t'en mêles. J'enverrai Cormocodran et les autres s'occuper de lui, et Mlle Farrar tiendra un grand nombre de policiers prêts à intervenir. Viens simplement me faire ton rapport dès que tu auras les renseignements voulus. Je vais te donner une injonction "porte ouverte" : tu pourras revenir à moi dès que tu seras prêt.

- Où seras-tu ?

- Cet après-midi, à Westminster Hall. Chez Devereaux à Richmond dans la soirée. Et cette nuit, chez moi. » Sa mallette se referma vivement. Il avait hâte de s'en aller.

« Et où se trouve actuellement ce Jenkins ?

- Dans le bâtiment des Affaires intérieures, à l'adresse habituelle : 16, Whitehall. C'est un petit imbécile de gringalet rouquin. As-tu autre chose en tête ?

- Oui, mais tu n'as sûrement pas envie de savoir quoi.

- Ça, sûrement. Une dernière chose : je t'ai donné ma parole, mais si tu cesses de revêtir cette apparence, tu m'aideras à la tenir. » II me regarde en face pour la première fois. « Penses-y. » II enchaîne une série de gestes complexes. Les liens qui me retiennent prisonnier dans le cercle m'enveloppent, puis s'enroulent dans des directions opposées et m'expédient dans le monde extérieur en décrivant une spirale.

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Kitty s'installa confortablement. « Je ne sais pas si tu as remarqué, mais les choses empirent à Londres. Les magiciens commencent à perdre le contrôle de la situation. On envoie les plébéiens se battre, les échanges commerciaux sont perturbés. La pauvreté s'accroît, ce qui provoque des troubles - on a même vu des émeutes dans certaines villes. Et on sent une vive rancune à l'égard des... démons.

- Je te l'avais prédit la dernière fois. Les gens commencent à repérer les esprits et se découvrent une certaine immunité. Ils en explorent les possibilités et se mettent à se défendre. »

Kitty acquiesça.

« Mais les magiciens ne restent pas inactifs. La police nous tombe dessus, on assiste à des violences, des gens sont arrêtés, certains disparaissent, voire pire.

- Ce sont des choses qui arrivent.

- Je crois que les magiciens sont prêts à prendre des mesures terribles pour rester au pouvoir. Il existe de nombreuses associations de plébéiens, mais elles sont faibles et divisées. Aucune n'a la force de s'opposer à l'État.

- Ça viendra en temps voulu.

- Oui, mais dans combien de temps ? C'est ça, la question.

- Tu veux une grossière estimation ? » Le garçon inclina la tête sur le côté, méditatif. « À mon avis. il faut attendre une ou deux générations. Mettons une cinquantaine d'années. Ainsi, l'immunité aura le temps d'atteindre le niveau requis pour permettre le succès de la révolte. Cinquante ans, ce n'est pas si mal. Avec un peu de chance, tu y assisteras quand tu seras une gentille grand-mère chargée d'ans qui fait sauter de beaux bébés bien gras sur ses genoux. Et puis non. finalement - je retire ce que j'ai dit. Ma projection est incorrecte.

- Tant mieux.

- Tu ne seras jamais cette gentille grand-mère chargée d'ans. Plutôt une "vieille fille solitaire et aigrie". »

Kitty donna un coup de poing sur le plancher.

« Cinquante ans, c'est trop long ! Qui sait ce que les magiciens auront le temps de faire d'ici là. J'aurai ma vie derrière moi ! Peut-être même que je serai morte quand la révolution arrivera.

- Exact. Mais moi, je serai toujours là pour voir ce qui se passe. Je n'aurai pas pris une ride.

- Eh oui, fit Kitty, sarcastique. Quelle chance tu as, hein ?

- Tu trouves ? » Le jeune garçon inspecta son corps d'emprunt, toujours assis en tailleur, bien proprement, le dos bien droit, comme les scribes égyptiens. « II s'est écoulé deux mille cent vingt-neuf ans depuis la mort de Ptolémée. Il avait quatorze ans. Huit empires mondiaux ont connu l'ascension puis la chute depuis ce jour, et j'emprunte toujours ses traits. Qui a le plus de chance, dans l'histoire ? »

Kitty ne répondit pas. Enfin, elle demanda :

« Pourquoi fais-tu ça ?

- Parce que je me suis fait une promesse à moi-même. Je le montre tel qu'il était avant de changer.

- Je croyais qu'il n'avait pas eu le temps de grandir.

- En effet. »

Kitty voulut poser encore une question, mais se ravisa et secoua la tête.

« On s'égare, déclara-t-elle avec fermeté. Je ne peux pas me permettre de rester inactive à regarder les magiciens perpétrer leurs crimes ; la vie est trop courte. Il faut agir tout de suite. Seulement, nous autres plébéiens - le peuple - ne pouvons renverser le gouvernement tout seuls. Nous avons besoin d'aide.

- C'est bien possible, répondit le garçon en haussant les épaules.

- Mon idée, ou plutôt ma proposition, en fait, est donc de demander aux djinns et autres esprits de nous apporter cette aide. » Elle attendit la réaction.

L'autre la regarda.

« Euh, pardon ?

- Aidez-nous. Après tout, tu l'as dit toi-même : nous sommes tous des victimes, ici. Les djinns comme les plébéiens. Les magiciens nous assujettissent de la même façon. Alors pourquoi ne pas unir nos forces, faire cause commune dans le but de les détrôner ? »

Le jeune garçon conservait un visage inexpressif.

« Ça a l'air facile, à t'entendre.

- Non, je sais bien que non. Mais il doit bien exister un moyen. Par exemple, si une plébéienne comme moi peut invoquer un djinn comme toi, on doit pouvoir s'attaquer tous ensemble à l'État. Ça demande de la réflexion, de la préparation, et l'assistance de nombreux autres esprits, mais on aurait l'avantage de la surprise, non ? Et on serait beaucoup plus efficaces si on pouvait se battre côte à côte - sans qu'il y ait de maîtres et d'esclaves. Sans qu'on se tire dans les pattes entre nous. En coopérant pleinement. Rien ne nous arrêterait ! »

Elle se penchait en avant dans son pentacle et sa vision faisait briller ses yeux. Le garçon semblait également fasciné ; il laissa passer un long moment sans répondre. Puis :

« Complètement cinglée. Les cheveux sont bien, la tenue aussi, mais tu es folle à lier. »

Kitty se tortilla sous l'effet de la contrariété.

« Pourquoi tu ne m'écoutes pas !

- Au fil des ans, j'ai en bon nombre de maîtres déments. Des fanatiques religieux qui se flagellaient le derrière avec des épines, des empereurs au regard mort qui commettaient sans joie des massacres de grande ampleur, des avares qui convoitaient des tas d'or, des criminels en tous genres qui s'en prenaient tant à eux-mêmes qu'aux autres... Vous êtes dans l'ensemble une espèce perverse et bien peu ragoûtante. Certes, ta forme personnelle de folie est moins dangereuse que d'autres ; seulement, elle signera ton arrêt de mort. et le mien par la même occasion si je ne fais pas preuve d'une grande vigilance. Alors je serai franc avec toi. Ce que tu proposes est fou pour mille raisons différentes - si je te les énumérais toutes on serait encore là quand finalement, l'Empire britannique s'effondrera. Alors je ne t'en citerai que deux. Aucun djinn, aucun afrit, aucun marid urbain, aucune mite chatouilleuse ne fera jamais cause commune, comme tu dis, avec un humain quel qu'il soit. Faire cause commune ! Non mais, je te demande un peu ! Tu nous vois arborer le même galon ou je ne sais quoi et aller à la bataille main dans la main ? » II rit. Ça faisait un bruit âpre, désagréable. « Non, nous avons trop souffert pour considérer un jour les humains comme des alliés.

- Tu mens ! cria Kitty. Je le répète : tu oublies le cas de Ptolémée.

- Mais lui était unique ! » Le garçon serra les poings. « Une exception. Ne le mêle pas à tes histoires.

- Il infirme tout ce que tu viens de dire ! s'écria Kitty. Évidemment, on aura du mal à convaincre la plupart des démons, mais...

- On aura du mal, dis-tu ? Mais tu n'y arriveras jamais !

- Tu as déjà dit ça quand j'ai affirmé t'avoir invoqué, et pourtant, je l'ai fait !

- Aucun rapport. Je vais te révéler quelque chose. Depuis le début, je reste là à bavarder aimablement avec toi et à surveiller mes manières comme il se doit pour un djinn, mais à aucun moment je n'ai cessé de te surveiller au cas où un seul de tes orteils dépasserait de ton cercle. Auquel cas je te serais tombé dessus en un clin d'œil et là, je peux te dire que tu en aurais appris de belles sur les rapports entre djinns et humains.

- Ah oui ? railla Kitty. Au lieu de quoi c'est toi qui as fait la bêtise de sortir un orteil et de carboniser ta jupette. Ce qui résume plus ou moins les trois ou quatre derniers millénaires de ton existence. Non mon vieux, tout seul, tu n'arriveras jamais à grand-chose.

- Ah oui ? » L'autre était blême de rage. « Alors je passe à la seconde raison qui fait que ton plan est une ânerie. Même si j'étais disposé à t'aider, même si cent autres djinns presque aussi puissants que moi éprouvaient la même chose et avaient pour seul désir de risquer leur peau pour des humains à la noix, on en serait incapables. Car notre seule façon de venir sur terre, c'est via une invocation. Et cela entraîne la perte de notre libre arbitre. Sans parler de la souffrance. Ça nous oblige à obéir à un maître. Et je ne vois pas où est l'égalité dans cette équation.

- Argument rejeté. Il n'est pas nécessaire que les choses se passent comme ça.

- Puisque je te dis que si. Nous n'avons pas d'autre choix. L'invocation nous asservit. C'est sa raison d'être. Tu veux donc chercher un moyen de nous libérer entièrement ? De nous laisser déchaîner nos pouvoirs ? Sans le moindre contrôle ?

- Eh bien oui, fit vaillamment Kitty. Si cela s'avérait nécessaire.

- Je n'en crois pas un mot. Jamais tu ne ferais une chose pareille.

- Si. Dans un climat de confiance, je le ferais.

- Ah bon ? Eh bien, prouve-le sur-le-champ. Sors de ton pentacle.

- Hein ?

- Tu m'as très bien entendu. Enjambe le tracé. Oui, celui-là, là. Voyons comment se traduit en actes la fameuse confiance dont tu parles. Donne-moi le pouvoir un moment. Et voyons si tu as le courage de tes convictions. »

Le garçon se leva d'un bond et, au bout d'un moment, Kitty l'imita. Ils restèrent debout dans leurs pentacles respectifs à se regarder dans les yeux. Kitty se mordit la lèvre. Elle avait chaud et froid en même temps. Elle n'avait pas prévu le tour que prenaient les événements, le rejet de sa proposition immédiatement suivi par un défi à relever. Elle n'avait vraiment rien imaginé de tel. Que faire ? Si elle rompait l'invocation en sortant de son pentacle, Bartiméus pouvait la tuer avant de disparaître. Son immunité partielle n'empêcherait pas le démon de la mettre en pièces. À cette idée, elle frémit de la tête aux pieds.

Elle dévisagea le garçon qui n'était plus depuis longtemps. Il lui sourit en affectant l'amabilité, mais son regard était dur et moqueur.

« Alors ? fit-il. Ça vient ?

- Tu viens de m'exposer ce que tu me ferais si je sortais du tracé protecteur, répondit-elle d'une voix rauque. Tu prétends que tu me sauteras dessus en un clin d'œil. »

Le sourire de l'autre perdit de l'assurance.

« Ah, ne fais pas attention. Je bluffais. Il ne faut pas croire tout ce que raconte le vieux Bartiméus, quand même ! Tu sais bien que je suis tout le temps à faire des blagues. » Kitty ne dit rien. « Allez, vas-y, reprit le garçon. Je ne vais rien te faire. Place-toi un instant sous mon pouvoir. Tu seras surprise. Fie-toi à moi. »

Kitty passa le bout de sa langue sèche sur sa lèvre inférieure. Le sourire du garçon redevint éclatant. Il y mettait tellement du sien, d'ailleurs, qu'il en avait les traits tendus à l'extrême. Elle regarda les marques à la craie, puis ses pieds, puis à nouveau les tracés.

« Oui, comme ça, allez », l'encouragea le garçon.

Kitty se rendit brusquement compte qu'elle en oubliait de respirer. Elle exhala d'un coup.

« Non, s'étrangla-t-elle. Non, ça servirait à rien. »

Les yeux sombres l'observèrent ; tout à coup, le djinn pinçait les lèvres.

« Enfin..., fit-il avec aigreur. J'admets que je n'avais pas grand espoir, de toute façon.

- Ce n'est pas une question de confiance, mentit-elle. Seulement, tu te dématérialiserais parce que tu ne peux pas rester sur terre sans le pouvoir de l'invocation et moi, je n'ai pas la force de te réinvoquer pour l'instant. Tout ce que je voulais dire, reprit-elle avec l'énergie du désespoir, c'est que si toi et d'autres djinns joignaient vos forces aux miennes, on pourrait battre les magiciens et arrêter de vous invoquer. »

L'autre eut un reniflement incrédule.

« Épargne-moi tes fantasmes. Tu te rends compte de ce que tu dis ? Même toi, tu ne crois pas un mot de ce que tu racontes. Bon. Si c'est tout ce que tu avais à me demander, autant me congédier maintenant. » Sur ces mots, il lui tourna le dos.

Là, Kitty sentit la moutarde lui monter au nez. Le souvenir des trois années écoulées lui revint en tête. Le poids des efforts qu'elle avait dû fournir s'abattit d'un coup sur ses épaules. Tout cela pour que cet esprit orgueilleux et borné écarte son idée d'un revers de main. Sans même lui accorder une seconde de réflexion impartiale. D'accord, les détails restaient à mettre au point ; il y avait beaucoup de problèmes à résoudre. Mais pour elle, il était non seulement nécessaire, mais possible de réaliser une certaine forme de collaboration. Elle était au bord des larmes ; elle les ravala furieusement. Elle tapa du pied et le son se réverbéra dans la pièce.

«Dis donc, cet idiot de jeune Égyptien, lui, méritait ta confiance. Avec lui, tu ne t'es pas fait prier. Alors pourquoi pas moi ? Qu'est-ce qu'il a fait pour toi que je ne puisse pas faire ? Eh bien ? À moins que je ne sois trop méprisable pour mériter le récit de ses hauts faits ? » Son ton était chargé d'une amertume sauvage, et son mépris du démon se levait en elle comme une tempête.

Il ne se retourna toujours pas. Le clair de lune tombait sur son dos nu et ses membres fluets.

« Pour commencer, il m'a suivi dans l'Autre Lieu. »

Kitty retrouva enfin sa voix.

« Mais... ce n'est pas...

- Si, c'est possible. Personne ne le fait, c'est tout.

- Je ne te crois pas.

- Tu n'y es pas obligée. Mais Ptolémée, lui, si. Lui aussi je l'ai mis au défi de me prouver qu'il avait confiance en moi. Et c'est le moyen qu'il a choisi : il a conçu la Porte de Ptolémée. Il a traversé les quatre éléments pour me retrouver. Et il en a payé le prix, ainsi qu'il s'en doutait. Après ça... ma foi, s'il m'avait proposé une aberrante association entre djinns et plébéiens j'aurais peut-être marché dans la combine. Il y avait entre nous un lien indestructible. Mais avec toi, aussi louables que soient tes intentions... Désolé, Kitty, mais c'est non. »

Elle contempla son dos sans rien dire. Le garçon finit par lui faire face ; son visage était dans l'ombre.

« Ce qu'a fait Ptolémée reste unique, ajouta-t-il avec douceur. Je ne demanderais cela à personne d'autre, même pas à toi.

- Ça l'a tué ?

- Non, soupira-t-il.

- Alors de quel prix parles-tu ?

- Mon Essence est légèrement vulnérable, aujourd'hui. Je te serais reconnaissant de tenir parole et de me laisser partir.

- Je vais le faire. Mais tu devrais rester parler encore un peu avec moi. Je ne vois pas pourquoi l'exploit de Ptolémée resterait unique en son genre. Peut-être que plus personne n'est au courant, pour cette histoire de Porte. »

Un rire bref.

« Oh si, ils savent, crois-moi. Ptolémée a raconté son voyage dans ses écrits, dont certains ont survécu. Comme toi, il disait beaucoup de bêtises sur la possibilité d'instaurer une trêve entre magiciens et djinns. Il espérait que d'autres suivraient son exemple et prendraient le même risque que lui. D'ailleurs. quelques-uns l'ont fait - plus par cupidité et soif de pouvoir que par idéalisme pur, comme lui. Mais pour eux, ça ne s'est pas bien passé.

- Pourquoi ? »

Pas de réponse. Le djinn détourna les yeux.

« Eh bien ne dis rien, puisque c'est comme ça ! s'écria-t-elle. Je m'en fiche. Je lirai les notes de Ptolémée de mon côté, c'est tout.

- Ah bon, parce que tu lis le grec ancien maintenant ? »

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S'il n'y avait pas Kitty, jamais je ne ferai une chose pareille. Mais elle a vu juste, là-bas, dans l'Autre Lieu, en faisant appel à moi en mémoire de Ptolémée. Elle a tout de suite senti que c'était mon point faible, une plaie qui ne c'est jamais refermée et que deux mille ans de cynisme ininterrompue n'ont pas réussi à guérir, malgré tous mes efforts. Pendant tout ce temps - et ça a été plutôt pénible - j'ai porté en moi le souvenir de ses espoirs : qu'un jour djinns et humans puissent agir de concert, sans malveillance réciproque, sans trahison ni massacre. Soyons honnêtes : c'était une idée idiote et je n'y ai pas songé un instant ; il y avait bien trop de preuves que c'était impossible. Mais Ptolémée y avait cru, lui, et ça m'a suffit. L'écho de sa foi seul à été assez puissant pour me convaincre quand Kitty a réitéré son noble geste et franchi le seuil afin de me rejoindre.

Elle a renouvelé le lien qui m'attachait à lui. Et à partir de là, le sort en était jeté.

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Les assassins s’introduisent à minuit dans les jardins du palais ; tout à coup, quatre ombres fugaces se détachent contre le mur d’enceinte. Le mur est haut, l’atterrissage rude ; pourtant, ils ne font pas plus de bruit, en touchant le sol, que quelques gouttes de pluie. Ils restent accroupis trois secondes, tapis, immobiles, humant l’air. Puis ils repartent furtivement à travers les jardins plongés dans l’ombre, entre tamaris et dattiers, vers l’aile où repose l’enfant. Un guépard enchaîné remue dans son sommeil ; au loin, dans le désert, on entend hurler les chacals.

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– Et on peut se demander quels autres talents. » Il pivota dans son fauteuil pour contempler les branches grises des arbres du square. La brume matinale s’y accrochait toujours, allant jusqu’à masquer le sol. « Bien. Cela suffit pour l’instant. Il est presque neuf heures et j’ai un travail personnel à accomplir. Merci pour votre aide, Piper. Rendez-vous au ministère en fin de matinée. Et ne vous laissez pas intimider par ce garde-porte en sortant. »

Après le départ de son assistante, le magicien resta quelques instants immobile, à tapoter ses doigts les uns contre les autres d’un air indécis. Pour finir, il ouvrit un des tiroirs de son bureau et en sortit un petit paquet emballé dans du tissu, qu’il posa devant lui. Il écarta l’emballage et contempla le contenu : un disque en bronze, poli par des années d’utilisation intensive.

Il plongea son regard dans son miroir divinatoire jusqu’à ce que celui-ci s’anime. Il y eut un mouvement dans ses profondeurs.

« Va me chercher Bartiméus », dit Mandrake.

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