Ce que veut lady Charlotte

— Il est vrai que nous voulons nous agrandir, admit-elle. Mais ce café est notre gagne-pain, pas une jolie babiole qu’il nous suffirait de remplacer si elle se cassait. Vous comprenez, Charlotte ?

— Je ne considérerai jamais votre établissement comme une babiole, vous avez ma parole.

— Et nous serions aux commandes, ajouta Sophia avec fermeté. Après tout, c’est notre domaine, pas le vôtre.

— Bien sûr. Même si j’aimerais pouvoir proposer mes idées.

— Il faut mettre tout cela par écrit. Dresser une sorte de charte, si vous voulez. Asseyons-nous, décréta Sophia en désignant une table au plateau rayé. Il me semble que nous en avons pour un bon moment.

Charlotte rassembla ses jupes. Son jupon était assez souple pour lui permettre de s’asseoir, mais les chaises étaient étroites et placées très près les unes des autres. Elle entreprit de les déplacer pour se faire de l’espace, mais ses paniers bousculèrent une chaise et en firent tomber une autre.

Elle s’attendait à ce que les cousines Wick se moquent d’elle. Ce ne fut pas le cas. Hannah s’approcha de la fenêtre et ferma le volet.

— Vous feriez mieux d’enlever cette robe ridicule, dit-elle. Nous ne sommes pas à la cour du roi, et nous ne faisons pas de chichis ici, comme vous vous en apercevrez vite.

Charlotte était tellement soulagée qu’elle en avait le vertige. Avec une hâte dont elle aurait dû avoir honte, elle se débarrassa de sa robe et de ses paniers pour ne garder que sa camisole, son corset et un seul jupon.

Elle pensait qu’elle se sentirait horriblement gênée, mais… il n’en fut rien. Au contraire, elle se sentait merveilleusement légère et libérée.

Sans un regard à sa robe abandonnée par terre, elle prit place sur une chaise et se prépara à parler d’avenir.