L'Art de perdre

Très belle histoire relatant la vie d’un harki et de sa descendance, témoignant de la grande difficulté de vivre de ces gens qui ont quitté l’Algerie, traités de traites par les Algériens restés au pays et n’ayant jamais été reconnus comme Français en métropole et profondément délaissés

Il faudra attendre 2 générations au moins pour que leur descendance se sentent progressivement assimiles

un parcours de vie (saga familiale) sur fond de l'Histoire

En définitive, il n est question de rien d'autre dans ce roman que l 'identité. L'identité du sang et l'identité du sol sont au centre de ce recit sublime. Alice Zeniter, sous les traits de son héroïne Naïma, décortique la difficulté de l'enracinement. Issue de la 3 éme génération, petite fille d'un ancien harki kabyle exilé en France en 1962, elle se heurte au silence familial et ses questions sur leur passé demeurent sans réponse. Partagée entre 2 pays ( l Algérie par le sang, la France par le sol), elle cherche à donner un sens à sa vie. L' auteure nous mêle à son histoire familiale et nous inclut dans la dilution de génération en génération de l'imprégnation algérienne individuelle dans le magma collectif culturel français. Ce livre n est pas un étendard ni une revendication. Il exprime juste avec beaucoup d'intelligence et de finesse la difficulté de positionnement que peuvent ressentir les descendants d'émigrés. Je crois que c'est le livre qui définit le mieux la quête identitaire de ceux dont les origines sont ailleurs, ceux qui portent le poids de leurs aïeux, leurs souffrances, leurs déceptions mais portent en eux un espoir sans limite de reconstruction et une volonté farouche de reconquête identitaire.

Je souligne la force narrative de ce roman- essai qui nous propulse vers une quête métaphysique quasi philosophique.

Un beau livre traitant de différents sujets, à la fois différents mais liés entre eux : la colonisation française, la guerre d'Algérie, les Harkis, les difficultés d'intégration en France et enfin le rapport à une culture/un héritage.

La construction en trois parties, correspondant à trois générations, est intéressante car elle permet de montrer les liens et différences entre chacun, toutefois il y a un tel écart entre l'Algérie du grand-père dans les années 50 et la petite-fille parisienne en 2015 qu'on a parfois l'impression de lire deux romans différents.

Si les deux premières parties prennent la forme d'un roman classique, la dernière ressemble plutôt à un documentaire, avec des énumérations de faits et événements, qui rendent la lecture plus difficile, il y a une forme de disparition de l'intrigue romanesque. Et l'identité de Naïma semble reposer sur le cliché 'femme libérée qui couche avec qui elle veut" et absolument que sur ça, ce qui m'a assez agacée. Toutefois, la fin est touchante et rattrape ces défauts.

C'est surtout un livre qu'il faut lire pour les réflexions qu'il soulève.

J'ai apprécié cette lecture, que je n'aurais pas choisie dans les rayons d'une librairie mais que l'on m'a offerte et qui m'a bien transportée.

Une merveille ! Une collègue me l'a passé et au début, le sujet ne m'emballait pas, j'ai tardé à le commencer et en fait, j'ai adoré l'écriture, les personnages, la peinture d'un pan d'histoire que je ne connais que très, très peu. J'aime quand l'histoire s'incarne, prend des visages. J'ai dévoré ce roman en m'attachant à chaque personnage. Cela m'a donné envie de visiter l'Algérie, cela a aussi donné de la consistance à ce mot "harki" que je me rappelle surtout avoir entendu une fois quand j'étais enfant à propos d'une camarade de classe ("elle, tu sais, une fille de harki..." puis silence entendu... mais je n'y entendais rien.) L'écriture est aussi bien maitrisée, claire, tantôt conteuse, tantôt didactique, tantôt presque théâtrale.

"L'Art de perdre" quoi ?

Pour Ali, le grand-père de Naïma, un montagnard kabyle, en fuyant l'Algérie qui devient indépendante, il perd tout ce qu'il avait construit : sa propriété que les autres travaillent pour lui, son statut de patriarche et de personne écoutée dans le village.Il fait le choix en 1962 de fuir l'Algérie pour la France qu'il a servie pendant la seconde guerre mondiale et se revendique français.Sauf que la France l'accueille comme un paria , un parasite et utilise sa misère tant sociale que financière pour lui proposer non plutôt lui imposer un travail en usine à Flers, dans l'Orne, après l'avoir fait végéter dans des camps de transit...Pour lui, c'est la déchéance totale mais il le fait pour ses enfants dont il a une certaine fierté car ils deviennent français mais sur lesquels, il n'a plus de pouvoir.

Pour Hamid, l'aîné de Ali et père de Naïma, il perd son identifié en n'étant pas algérien, en n'étant pas non plus français.Il garde de cet exil un traumatisme dont il se protège en se murant dans un silence néfaste pour son entourage. Le passé en Algérie puis dans les camps de transit celui de Rivesaltes d'abord puis celui en Provence et enfin le déménagement dans l'Orne sont pour lui les étapes d'un exode qu'il ne comprend pas trop.D'accord avec la politique de l’Algérie indépendante, il fustige la peur et la résignation de ses parents surtout de son père qui se fondent en excuses continuels alors que lui Hamid est en révolte constante contre les français, ces colonisateurs, ces oppresseurs....Néanmoins, il fait tout pour se hisser socialement et de ce fait, perd aussi ses grandes idées en travaillant pour une institution française et en étant implicitement un maillon de ce système qu'il critique tant.

Pour Naïma qui travaille pur une galerie d'art contemporain, "l'Art de perdre" est l'occasion de se détacher de cet héritage trop lourd tout en revendiquant son histoire et l'histoire des siens. Grâce à son travail, elle va en Algérie et pour elle la route est bouclée.

Alice ZENITER livre une véritable introspection de sa propre vie et de sa propre histoire en interrogeant son père et en brodant sur ce qu'a pu être la vie du grand-père.C'est un véritable travail historique, étayé de documents et de témoignages qu'elle mène et qu'elle nous livre pour décrire le terrible sort et la blessure des harkis et de leurs descendants. Malgré cela, le lecteur a envie de connaître la suite de la vie des uns et des autres et cela ressemble à un long feuilleton composés d'épisodes haletants et vivants.

En racontant tour à tour la vie de son grand-père, de son père puis la sienne sans être la narratrice de son roman, Alice ZENITER nous conte cette fresque familiale et l'histoire de l'immigration magrébine qui laissent encore des cicatrices béantes dans les sociétés française et algérienne. Les personnages sont touchants et le décalage d'Ali et Yema, ses grands parents, sont drôles et émouvants. Hamid, le plus taiseux,est aussi sympathique car il pense et s'affranchit de fait de tous les artifices de la religion et des traditions même si pour lui, ce passage est compliqué.

Un roman qui pose des questions, ouvre des débats plus qu'il n'apporte de réponses à travers cette saga familiale, sur l'histoire des harkis en particuliers mais aussi des immigrés algériens, magrébins et des autres pour qui "l'Art de perdre" sa culture, celle qui fait le ciment et le lien entre les membres d'une même famille mais aussi ouvre la possibilité de se délester d'un héritage trop lourd à porter et de s'autoriser à être enfin soi.C'est pour tous la quête de sa propre identité sans oublier "ses racines."

Savoir d'où on vient pour savoir où on va c'est cela" l'Art de perdre" car en effet c'est tout un art : perdre quoi ? pour gagner quoi ? et comment ?

Alice ZENITER nous raconte son "Art de perdre" avec poésie et réalisme et sait se montrer brillante, vibrante et touchante.

Pourquoi se retrouve-t-on dans un camp plutôt qu’un autre dans un conflit? Quelles conséquences cela implique sur trois générations?

Dès le début on se retrouve happé par l’histoire de cette famille sur trois générations prise dans la tourmente de la guerre d’indépendance algérienne. Loin des clichés habituels entre les « bons » et les « méchants », ce livre très sensible nous invite à réfléchir sur les conséquences des choix (ou plutôt des non-choix) sur la vie de cette famille rattrapée par l’histoire...L'histoire d'une famille d'origine algérienne installée en France, après l'indépendance en 1962, car il fallait fuir sinon c'était la mort pour les harkis. Une fresque grandiose qui nous donne à voir la misère, mais aussi la grandeur d'âme d'un peuple maltraité par le colonisateur qui a abandonné ceux qui avaient combattu à ses côtés. Méritait, à mon avis, le Goncourt.

Un très beau témoignage qui se lit facilement. A l'école on apprend dans les grandes lignes comment c'est passer la prise d'indépendance de l'Algérie avec quelques conséquences pour les réfugier mais avec ce livre l'on retrace vraiment tout les enjeux.

Nous suivons une famille sur 3 générations. Une famille qui a du quitter l'Algérie et s'installer en France. Une lecture enrichissante ! Une lecture qui nous permet d'apprendre, de comprendre... une famille qui n'a pas eu le choix de quitter son pays, qui a du s'intégrer dans un autre pays (dont certains ne voulaient pas d'eux) et qui a dû avancer, progresser... quitte à oublier ses origines, sa langue, ses coutumes, sa religion.