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Extrait ajouté par casey74 2019-10-26T11:36:12+02:00

De plus en plus d'immigrants vivaient à Londres, aisément reconnaissables à leur physique, à la langue qu'ils parlaient. Trop d'entre eux étaient pauvres, prêts à travailler plus dur que les autres et pour un salaire moins élevé. Ils ne mangeaient pas les mêmes plats, ne priaient pas le même Dieu. Ils offraient une cible facile à la peur qui se manifestait sous forme de colère. Abercorn nourrissait ce climat hostile. C'était méprisable, mais il n'était pas le premier et ne serait pas le dernier à s'en servir à ses fins.

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Extrait ajouté par casey74 2019-10-26T11:27:43+02:00

- Nous avons besoin que les jeunes croient qu'ils réussiront un jour, objecta Charlotte d'un ton pressant. S'ils n'ont pas de rêves, s'ils ne sont pas habités par la passion d'éradiquer l'injustice et de créer un monde meilleur, alors nous sommes comme morts.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:30:36+01:00

Le lendemain matin, Pitt revêtit de vieux vêtements et omit à dessein de se raser, adoptant une apparence plus négligée que d’ordinaire. Il partit de bonne heure, pendant que Charlotte était occupée en haut, pour qu’elle ne le voie pas et ne devine pas ce qu’il s’apprêtait à faire. Il était inutile qu’elle s’inquiète sans raison.

Plus tard, il irait prendre des nouvelles des blessés, décida-t-il en refermant la porte derrière lui. Il se dirigea vers Tottenham Court Road à pied malgré le trottoir verglacé. Les crieurs de journaux étaient déjà au travail et tous les gros titres parlaient de Lancaster Gate. Certains réclamaient justice, d’autres vengeance. Tous étaient teintés de peur.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:30:15+01:00

Pitt rentra tard chez lui, à Keppel Street, juste à côté de Russell Square. Une mince pellicule de verglas recouvrait le trottoir. Un halo de brume ténu entourait les réverbères, estompant les contours des maisons et des allées qui les séparaient.

Il gravit les marches avec un sentiment de paix, sachant qu’il pourrait laisser la violence et le chagrin de la journée derrière la porte familière. Il glissa sa clé dans la serrure, entra et referma le battant avec un petit bruit, volontairement. Il voulait annoncer son retour, bien qu’à cette heure tardive Jemima, dix-sept ans, et Daniel, quinze, eussent sans doute déjà dîné. Peut-être étaient-ils même déjà couchés. Charlotte en revanche l’aurait attendu. Elle l’attendait toujours.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:30:01+01:00

Le médecin grimaça. Sans rien dire, il conduisit Pitt dans un couloir qui menait à une salle exiguë, où trois hommes reposaient dans des lits et recevaient des soins différents. Deux d’entre eux semblaient sans connaissance, mais peut-être étaient-ils simplement silencieux, immobiles dans leur souffrance.

Ednam, le plus chevronné des policiers, était conscient et regarda Pitt approcher. Son visage était tuméfié et une vilaine zébrure violacée déchirait sa joue gauche. Son bras gauche était entièrement bandé, et sa jambe maintenue en l’air, elle aussi recouverte de pansements. Pitt devina qu’elle était fracturée et sans doute brûlée. L’homme observa Pitt d’un air méfiant, et mit quelques instants à le reconnaître. Puis il se détendit imperceptiblement, les muscles se relâchant aux commissures de ses lèvres.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:29:15+01:00

Pitt ne prit pas la peine de répondre. Il comprenait la peine qui se cachait derrière cette remarque. À cet instant précis, il la partageait. Il en irait peut-être différemment lorsqu’il saurait qui était l’auteur de cet attentat. Certains de ceux qu’on traitait de terroristes n’avaient rien fait de plus que protester pour obtenir un salaire décent, suffisant pour nourrir leur famille. Quelques-uns avaient été emprisonnés, torturés, voire exécutés, simplement parce qu’ils s’étaient élevés contre l’injustice. À leur place, il aurait peut-être fait comme eux.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:29:06+01:00

Pitt inspectait toujours les environs lorsqu’il entendit des pas derrière lui. Se retournant, il reconnut la silhouette familière de Samuel Tellman qui s’avançait prudemment entre les flaques d’eau et les amas de plâtre et de bois calciné. Tellman avait été le sergent de Pitt à Bow Street. Il leur avait fallu un certain temps pour être à l’aise ensemble. Tellman s’était méfié de Pitt, qui parlait comme un gentleman malgré ses origines modestes. Pour lui, cet accent était une affectation suggérant qu’il se jugeait supérieur. Pitt pour sa part ne voyait pas de raison de lui expliquer qu’il devait son élocution au fait d’avoir été éduqué avec le fils du maître, dans la propriété où son père travaillait comme garde-chasse avant d’être accusé de braconnage et déporté en Australie. Sa mère était restée comme blanchisseuse et Sir Arthur avait vu dans le jeune Pitt un compagnon pour son fils, et un rival qui l’encouragerait à se surpasser en classe. Toute cette histoire demeurait pour Pitt une plaie à vif, mais cela ne regardait pas Tellman.

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:28:56+01:00

Il observa la dépouille. Lui apprenait-elle quoi que ce fût, en dehors de ce qu’avait dit le pompier ? Il n’y avait pas de traces de suie sur le visage de Carter. Son bras gauche avait été arraché, mais en y regardant de près, Pitt remarqua que sa main droite était propre. Cela signifiait-il qu’il était déjà à l’intérieur au moment de l’explosion ? À l’évidence, il ne s’était pas frayé un chemin à travers la fumée et les décombres. Pourquoi était-il venu là ? Avait-on signalé un incident ? Lancé une alerte quelconque ? Avait-il suivi quelqu’un ? Y avait-il eu un rendez-vous ? Une embuscade ?

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:28:48+01:00

Les planchers avaient été à demi soulevés par l’explosion. À en juger par l’ampleur des dégâts, il avait dû s’agir d’un engin assez puissant. Que diable s’était-il passé ici dans cette rue tranquille et plaisante, près des jardins de Kensington ? L’attentat était-il dû aux anarchistes ? Londres n’en manquait pas. La moitié des révolutionnaires d’Europe avaient vécu ou séjourné là. 1898 touchait à sa fin et avait connu moins d’attentats que ces dernières années, mais peut-être avaient-ils eu tort d’être confiants. S’agissait-il d’un ultime sursaut, ou du coup précurseur d’une nouvelle vague d’attaques ? Sur le continent, le président Carnot, le tsar Alexandre II, le Premier ministre espagnol, del Castillo, et, au début de l’année, l’impératrice Élisabeth d’Autriche-Hongrie avaient été assassinés. La violence gagnait-elle l’Angleterre aussi ?

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Extrait ajouté par ilovelire 2016-03-07T17:28:29+01:00

Pitt s’adressa d’abord au mari. Âgé d’une soixantaine d’années, les cheveux blancs, il portait un manteau habillé, suggérant qu’il rentrait peut-être de l’église. Il y avait des coupures sur le côté droit de son visage, et une marque rouge en travers de sa joue signe qu’un tison enflammé l’avait atteint. Ses vêtements étaient maculés de poussière et criblés de petits trous laissés par les étincelles.

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