L'aube de la liberté

L'un de ceux qui s'érigeaient en justiciers, un gradé grand et fort au visage pupin sous une tignasse blonde, retira à mon père sa cravate par la tête, sans en défaire le neoud, la présentat comme un trophée à l'assistance et, avec une certaine lenteur pour ménage ses effets, découpa assez largement le col de chemise, lui remit sa cravate autour du cou dénudé, en resserra le noeud coulant, puis, faisant lui-même office de gibet, en saiit les pans qu'il tordit plusieurs fois pour simuler une corde qu'il leva à la verticale avec un air vainqueur.

Nous assistions à la scne derrière les rideaux. Horrifiée, maman allait ouvrir la fenêtre et se mettre à hurler. Je la retins, comprenant que c'était là une mascarade se voulant symbolique, le prétendu exécuteur des hautes oeuvres se n=bornant à faire subir à la cravate un mouvement de Yo-Yo qui suscité des applaudissements mais assez parcimonieusement dispensés. Je devinai même sur certains visages une expression réprobatrice, mais nul ne s'avisa de s'interposer.